Question de M. MÉRILLOU Serge (Dordogne - SER) publiée le 11/03/2021

M. Serge Mérillou attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la vente des produits à base de cannabidiol (CBD) et le flou juridique qui l'entoure.
Il a été sollicité par la fédération des buralistes de Dordogne qui s'inquiète de l'émergence de boutiques spécialisées dans la vente de CBD quand les buralistes sont, quant à eux, contraints par leurs contrats de gérance avec les douanes.
Le législateur n'a pas encore statué sur une légalisation de la commercialisation des produits contenant du CBD. En novembre 2020, la Cour de justice de l'Union européenne a arbitré que la France ne pouvait interdire la circulation et la vente de CBD produit légalement dans un autre pays membre. Cette décision a créé un flou juridique dont ont profité ces boutiques.
Les buralistes sont soucieux du respect des lois. Pour l'heure, ils s'interdisent de commercialiser le CBD tant qu'une règlementation claire ne sera pas adoptée.
C'est pourquoi il lui demande quelle est la position du Gouvernement concernant la légalisation du cannabidiol et quand il prendra une décision claire afin de sortir du flou juridique actuel qui pénalise les buralistes.

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Transmise au Ministère des solidarités et de la santé


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 25/11/2021

Le 19 novembre 2020, la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE) a rendu son arrêt dans l'affaire C-663/18, dite Kanavape. La Cour était saisie d'une question préjudicielle par la Cour d'Appel d'Aix en Provence portant sur la conformité au droit de l'Union européenne de l'article 1er de l'arrêté du 22 août 1990 qui limite la culture, l'importation et l'utilisation industrielle et commerciale du chanvre aux seules fibres et graines de la plante et interdit de ce fait l'importation et la commercialisation d'e-liquide pour cigarette électronique contenant de l'huile de cannabidiol (CBD) obtenue à partir de plantes entières de chanvre. Il est à noter que le mécanisme de la question préjudicielle permet à une juridiction nationale de demander à la CJUE d'interpréter le droit de l'Union. Il appartient ensuite à la juridiction nationale de résoudre le litige conformément à l'arrêt de la CJUE. Dans cet arrêt, la CJUE considère qu'en l'état des connaissances scientifiques et sur la base des conventions internationales en vigueur, l'huile de CBD ne constitue pas un produit stupéfiant. Elle en déduit que les dispositions relatives à la libre circulation des marchandises sont applicables à ce produit et qu'une mesure nationale qui interdit la commercialisation du CBD issue de la plante entière constitue une entrave à la libre circulation. Elle précise cependant qu'une telle mesure peut être justifiée par un objectif de protection de la santé publique sous réserve qu'elle soit nécessaire et proportionnée. Elle rappelle ensuite qu'il appartient à la juridiction de renvoi d'apprécier, à la lumière des données scientifiques disponibles, si des effets nocifs pour la santé humaine pourraient être liés à l'utilisation du CBD, justifiant l'application d'un principe de précaution et si les mesures prises sont propres à garantir l'objectif de protection de la santé publique. En l'espèce, et afin de guider la juridiction dans son appréciation, la CJUE souligne que la réglementation française ne lui parait pas remplir cette condition dans la mesure où l'interdiction de commercialisation ne frappe pas le CBD de synthèse qui aurait les mêmes propriétés que le CBD naturel. Les autorités françaises prennent acte de cet arrêt. Elles tiennent à souligner que, dans cet arrêt, la CJUE reconnait que l'application du principe de précaution pourrait, sous réserve d'éléments scientifiques probants, justifier une réglementation restreignant la commercialisation des produits à base de CBD. Elles étudient les voies et moyens pour prendre en compte ses conclusions. Les autorités réitèrent d'ores et déjà leurs avertissements concernant les effets potentiellement nocifs de la molécule de CBD, encore peu connue. Elles signalent en outre les risques sanitaires liés au ?-9-tétrahydrocannabinol (THC), molécule classée comme stupéfiant, que sont susceptibles de contenir les produits issus du chanvre. Elles appellent à la plus grande vigilance concernant les modes de consommation de ces produits, notamment la voie fumée, dont la toxicité est avérée. Par ailleurs, il est rappelé que les produits contenant du CBD demeurent soumis au respect des dispositions législatives françaises, et plus particulièrement des suivantes : - Ils ne peuvent, sous peine de sanctions pénales, revendiquer des allégations thérapeutiques, à moins qu'ils n'aient été autorisés comme médicament par l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ou la Commission européenne sur la base d'un dossier évalué selon des critères scientifiques de qualité, sécurité et efficacité. - Les publicités en faveur de produits contenant du CBD ne doivent pas entretenir de confusion entre le cannabis et le CBD et faire ainsi la promotion du cannabis. Cette pratique est susceptible de constituer l'infraction pénale de provocation à l'usage de stupéfiant. Enfin, les autorités françaises estiment que l'élaboration d'une approche commune européenne des produits à base de CBD serait souhaitable. Elles poursuivent à cet égard leurs échanges avec les autres Etats membres et la Commission européenne.

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