Question de M. KANNER Patrick (Nord - SER) publiée le 18/03/2021
Question posée en séance publique le 17/03/2021
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Patrick Kanner. Le 17 mars 2020, devant l'explosion inexorable de l'épidémie, le confinement était mis en place après l'improbable premier tour des élections municipales.
Un an après, je commencerai mon propos, comme vous l'avez fait, monsieur le président, par une pensée pour les 91 000 disparus, les millions de malades touchés par la covid-19 et les innombrables Françaises et Français fragilisés par cet annus horribilis.
Il y a un an, devant la situation d'exception qui nous percutait, les hésitations, les urgences, les prises de décisions contradictoires ou encore l'absence de décisions pouvaient faire l'objet d'une forme d'indulgence.
Mais aujourd'hui, de situation exceptionnelle en situation exceptionnelle, nous observons une dégradation de la gouvernance de la crise. D'urgence en urgence, c'est la démocratie qui est déstabilisée, ce sont nos libertés qui sont écornées.
Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous enfin organiser la prise de décision de manière plus démocratique et plus transparente ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Réponse du Premier ministre publiée le 18/03/2021
Réponse apportée en séance publique le 17/03/2021
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le président Kanner, je revendique devant la Haute Assemblée la parfaite transparence des décisions de l'exécutif et de la gestion de cette crise sanitaire, devant la représentation nationale, mais aussi devant l'ensemble du peuple français. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Bernard Jomier. Et le conseil de défense ?
M. Jean Castex, Premier ministre. Devant le peuple français, dis-je, parce que, tout d'abord, nous mettons désormais en ligne toutes les données nationales et territoriales sur la crise. Chacun dispose donc de l'ensemble des éléments nécessaires, y compris pour se former sa propre opinion.
Nous respectons ensuite, me semble-t-il, très scrupuleusement les règles de dévolution des pouvoirs et des compétences applicables dans le cadre de la gestion d'une crise sanitaire, qui nécessite que l'autorité exécutive puisse prendre les décisions qui s'imposent, tout en en rendant compte de façon régulière et diversifiée à la représentation nationale.
Je le dis très tranquillement devant le Sénat : c'est ce que nous faisons, par divers canaux que nous avons améliorés, y compris par la création d'un comité de liaison entre l'exécutif et les présidents de groupes parlementaires, comité qui se réunira d'ailleurs c'est un hasard cette après-midi même, après la présente session de questions d'actualité au Gouvernement.
Nous n'avons rien à cacher et nous avons même tout à gagner à la transparence, surtout dans l'épreuve collective que traverse notre pays. À la fin des fins, chacun doit exercer ses responsabilités la République est ainsi organisée et le pouvoir exécutif prend les siennes. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.
M. Patrick Kanner. Monsieur le Premier ministre, vous imaginez bien que vous ne m'avez pas convaincu.
M. Jean Castex, Premier ministre. Je m'en doutais !
M. Patrick Kanner. Le silence du « maître du temps perdu » devient assourdissant !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Vous, vous avez lu Libération !
M. Patrick Kanner. Vous n'avez pas évoqué le conseil de défense. Depuis un an, ce conseil, dont aucun compte rendu n'est public, est devenu une instance de décision au service d'un pouvoir de plus en plus vertical. Ce conseil de défense, au fonctionnement bunkerisé, est finalement un esquif ballotté au gré des circonstances.
Je veux en prendre un exemple assez éclairant, monsieur le Premier ministre : tout le monde sait maintenant que, à la fin de janvier, vous-même et votre ministre de la santé vouliez confiner.
M. Jean Castex, Premier ministre. Voilà une information !
Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques. Vous étiez présent ?
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. Quel roman !
M. Patrick Kanner. Finalement, le Président de la République a décidé, seul, de faire le pari inverse.
Pas de débat parlementaire, pas de discussion organisée ! La parole du Président de la République a suffi, alors que cette décision allait affecter toute la suite de notre stratégie sanitaire, comme nous le voyons aujourd'hui.
Pour l'exécutif, le triptyque BFM TV, Journal du dimanche et ballon d'essai dans les médias suffit à organiser la délibération publique, mais ce n'est pas ainsi que la confiance, si nécessaire pour gagner notre combat contre la maladie, peut se construire.
Monsieur le Premier ministre, alors que de nouveaux choix difficiles sont, encore une fois, devant nous, je vous remercie de vous appuyer sur le seul légitime conseil, celui qui représente la Nation : le Parlement Français ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. Mme Laurence Cohen applaudit également.)
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