Question de Mme BENBASSA Esther (Paris - GEST) publiée le 11/03/2021
Question posée en séance publique le 10/03/2021
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour le groupe Écologiste Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Esther Benbassa. Monsieur le ministre, dès 2014, la Chine accuse les Ouïghours, minorité musulmane du Xinjiang, de radicalisme politique et religieux et construit des camps dit « de rééducation » pour les y enfermer de manière préventive.
Entre 1 et 3 millions d'Ouïghours sont déportés arbitrairement dans ces camps de concentration et de travail. Les enfants sont éloignés de leurs parents, les couples séparés. Les détenus doivent renoncer à leur langue et à leur religion.
On y pratique stérilisations et avortements forcés. Les tortures et les viols sont le lot quotidien. L'objectif des autorités chinoises est d'éradiquer l'identité ouïghoure.
Le 17 décembre dernier, le Parlement européen a adopté une résolution visant à sanctionner les responsables chinois à l'origine de ce nettoyage ethnique. Vous-même, monsieur le ministre, en février 2021, avez dénoncé « un système de répression institutionnalisé » devant le Conseil des droits de l'homme des Nations unies.
Selon une étude australienne, des dizaines de milliers d'Ouïghours ont été transférés dans des usines appartenant à 83 grandes marques internationales, où ils sont en situation d'esclavage.
Hier, au Conseil de Paris, le groupe écologiste déposait un vœu relatif à l'oppression des Ouïghours. Aujourd'hui, c'est le groupe écologiste du Sénat qui vous demande d'user avec d'autres membres de l'Union européenne de votre pouvoir de pression économico-diplomatique, si puissante que puisse sembler la Chine.
Que comptez-vous faire ? Oserons-nous dire demain que nous ne savions pas ou que nous ne pouvions rien ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 11/03/2021
Réponse apportée en séance publique le 10/03/2021
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice, vous avez évoqué avec justesse les pratiques injustifiables qui se déroulent au Xinjiang. Les faits que vous mentionnez sont attestés, qu'il s'agisse des stérilisations forcées, des abus sexuels dans les camps, des disparitions, des détentions massives, du travail forcé, de la destruction du patrimoine culturel, à commencer par les lieux de culte, ou encore de la mise sous surveillance de la population.
C'est la raison pour laquelle, comme vous avez bien voulu le rappeler, j'ai dit, au nom de la France, devant le Conseil des droits de l'homme des Nations unies, qu'il s'agissait d'un système de surveillance et de répression institutionnalisée à grande échelle. Je l'ai dit en ces termes devant les Nations unies, il y a quelques jours, et je le redis aujourd'hui devant le Sénat.
Je voudrais réitérer mon appel insistant pour qu'une mission impartiale, indépendante et transparente d'experts internationaux puisse se rendre dans le Xinjiang le plus vite possible, sous la responsabilité de la haute-commissaire aux droits de l'homme, Mme Bachelet.
Je tiens aussi à rappeler la responsabilité des entreprises françaises, qui doivent exercer la plus grande vigilance possible, y compris en tant que sociétés mères, sur les risques liés à la chaîne de valeur et sur la nécessité de prévenir des atteintes graves aux droits fondamentaux des Ouïghours. C'est indispensable.
Lors de la négociation de l'accord sur les investissements entre l'Union européenne et la Chine, la France a mis sur la table l'obligation de souscrire à la convention de l'Organisation internationale du travail. Nous entendons la faire respecter.
Enfin, madame la sénatrice, nous travaillons avec nos collègues européens à définir une position commune : après avoir documenté les faits, nous les expertisons, de manière à prendre en conséquence les initiatives adéquates. Vous avez en partie évoqué celles qui ont été mises en uvre à la suite du vote du Parlement européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
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