Question de Mme BELRHITI Catherine (Moselle - Les Républicains) publiée le 25/03/2021

Mme Catherine Belrhiti attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le contrôle des structures agricoles frontalières.

Le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) régule l'accès des exploitants au foncier agricole en fonction des enjeux nationaux et locaux. Encadré par les articles L331-1, R331-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, il soumet certaines opérations de mise en valeur des terres (installation, agrandissement ou réunion d'exploitations) à autorisation préalable. Il est particulièrement utilisé pour permettre aux petites structures d'être privilégiées vis-à-vis des grandes exploitations dans l'obtention d'autorisation d'acquérir et d'exploiter les terres agricoles libérées. Il permet de lutter contre la concentration excessive de terres et de consolider les petites exploitations.

Il apparaît néanmoins que, même si le schéma permet aux agriculteurs français d'être mis en concurrence dans des conditions justes et équitables, ce n'est pas le cas lorsqu'il s'agit d'agriculteurs étrangers frontaliers, qui sont nombreux dans la région Grand Est notamment.

Alors que le contrôle des structures est pleinement appliqué pour un agriculteur français et que l'ensemble des terres agricoles qu'il cultive sont prises en compte, pour un agriculteur d'une nationalité différente, seulement les terres étant exploitées en France sont comptabilisées et soumises au contrôle administratif du préfet.

Les agriculteurs étrangers sont donc favorisés si la majeure partie de leur exploitation est située à l'étranger, et il en résulte une distorsion de concurrence flagrante puisque les agriculteurs français connaissent plus de difficultés à obtenir l'autorisation d'exploiter de nouvelles terres agricoles.

Cette situation ne peut se résoudre uniquement à l'échelon national. Même si l'article L. 331-1 du code rural exige de prendre en considération l'ensemble des superficies mises en valeur par le candidat, sous quelque forme que ce soit et toutes productions confondues, le Gouvernement français doit agir au niveau européen pour faire respecter l'équité et la libre concurrence entre tous les agriculteurs.

Elle lui demande comment le Gouvernement peut agir pour faire en sorte que l'ensemble des terres des agriculteurs puissent être contrôlées, qu'elles soient situées en France ou dans des pays limitrophes.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du Premier ministre, chargé des personnes handicapées publiée le 14/07/2021

Réponse apportée en séance publique le 13/07/2021

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, en remplacement de Mme Catherine Belrhiti, auteure de la question n° 1599, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Mme Corinne Imbert. Madame la secrétaire d'État, je pose effectivement cette question au nom de ma collègue Catherine Belrhiti, retenue dans le département dont elle est élue et qui vous prie de bien vouloir excuser son absence.

Nous allons changer totalement de sujet.

Le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) régule l'accès des exploitants au foncier agricole en fonction des enjeux nationaux et locaux. Ce schéma, encadré par les articles L. 331-1, R. 331-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, soumet certaines opérations de mise en valeur des terres – installation, agrandissement ou réunion d'exploitations – à autorisation préalable.

Il est particulièrement utilisé pour permettre aux petites structures d'être privilégiées par rapport aux grandes exploitations, dans l'obtention de l'autorisation d'acquérir et d'exploiter les terres agricoles libérées. Il permet de lutter contre la concentration excessive des terres et de consolider les petites exploitations.

Il paraît néanmoins que, même si le schéma permet aux agriculteurs français d'être mis en concurrence dans des conditions justes et équitables, ce n'est pas le cas lorsqu'il s'agit d'agriculteurs étrangers frontaliers, qui sont nombreux, notamment dans la région Grand Est. Alors que le contrôle des structures est pleinement appliqué pour un agriculteur français et que l'ensemble des terres agricoles qu'il cultive sont prises en compte, seules les terres exploitées par un agriculteur étranger en France sont comptabilisées et soumises au contrôle administratif du préfet.

Les agriculteurs étrangers sont donc favorisés si la majeure partie de leur exploitation est située à l'étranger. Il en résulte une distorsion flagrante de concurrence puisque les agriculteurs français ont plus de difficultés à obtenir l'autorisation d'exploiter de nouvelles terres agricoles.

Cette situation ne peut se résoudre uniquement à l'échelon national. Même si le code rural exige de prendre en considération l'ensemble des superficies mises en valeur par le candidat, sous quelque forme que ce soit et toutes productions confondues, le Gouvernement français doit agir à l'échelon européen pour faire respecter l'équité et la libre concurrence entre tous les agriculteurs.

Je souhaite donc savoir, madame la secrétaire d'État, si le Gouvernement compte agir afin de faire en sorte que l'ensemble des terres des agriculteurs puissent être contrôlées, qu'elles soient situées en France ou dans des pays limitrophes.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Je réponds également au nom de l'un de mes collègues, M. le ministre de l'agriculture.

Comme vous le mentionnez, madame la sénatrice, l'application, aux agriculteurs étrangers, de la réglementation du contrôle des structures peut poser certaines difficultés. Si tout agriculteur, quelle que soit sa nationalité, doit respecter les dispositions du contrôle des structures sur notre territoire, la loi française est soumise au principe de territorialité. Les terres exploitées à l'étranger ne sont ainsi pas soumises au contrôle administratif du préfet.

Mme Belrhiti défend l'idée d'une action à l'échelon européen pour résoudre ces difficultés. L'Union européenne a marqué son intérêt, au cours des dernières années, pour les questions relatives à la régulation du foncier agricole : d'une part, avec la publication du Rapport sur l'état des lieux de la concentration agricole dans l'Union européenne : comment faciliter l'accès des agriculteurs aux terres ?, ayant donné lieu à une résolution adoptée par le Parlement européen en avril 2017 ; d'autre part, en septembre 2017, au travers de la communication interprétative de la Commission sur l'acquisition de terres agricoles et le droit de l'Union européenne. La réflexion mérite d'être poursuivie.

Pour autant, l'article 345 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dispose : « Les traités ne préjugent en rien le régime de la propriété dans les États membres. » Les règles régissant l'utilisation des terres agricoles relèvent ainsi de la compétence des États membres. La possibilité de tendre vers un cadre de réglementation harmonisé à l'échelon européen me semble donc très hypothétique au regard de la complexité du sujet et de contextes différents, y compris entre pays frontaliers.

Si les circonstances locales le justifient, des solutions peuvent être toutefois trouvées dans la coopération transfrontalière. Je peux ainsi citer les travaux menés dans le cadre de la conférence transjurassienne : à cette occasion, les autorités françaises et suisses ont mis en place une commission technique de conciliation foncière, qui permet de coordonner la régulation du foncier entre les deux pays. Cette commission a permis de mettre en place un protocole de suivi des exploitants suisses en France relevant d'une collaboration entre l'administration française, dans les départements du Doubs et du Territoire de Belfort, et le service des douanes suisses. Cela ne résout pas tous les problèmes juridiques, mais cela permet de fluidifier les échanges dans le traitement des dossiers.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique ; vous avez vingt-deux secondes et pas une de plus, ma chère collègue !

Mme Corinne Imbert. Je serai brève, monsieur le président.

Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d'État. Ma collègue Catherine Belrhiti en prendra connaissance avec beaucoup d'attention, même si j'ai bien compris qu'il y avait peu d'espoir en cette matière, sauf à faire appel à l'intelligence locale, au travers de coopérations transfrontalières.

Il est curieux que cela fonctionne avec la Suisse, qui n'est pas membre de l'Union européenne, mais, après tout, ceci explique peut-être cela… (Sourires.)

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