Question de Mme HAVET Nadège (Finistère - RDPI) publiée le 04/03/2021

Mme Nadège Havet appelle l'attention de M. le secrétaire d'État auprès des ministres de l'économie, des finances et de la relance, et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques sur le programme « New Deal mobile ».

En janvier 2018, l'autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de presse (Arcep) et le Gouvernement ont annoncé les engagements des opérateurs pour accélérer la couverture mobile des territoires.
Afin de répondre de manière ciblée et adaptée à l'ensemble des attentes des citoyens et des territoires en matière de connectivité mobile, un dispositif de couverture ciblée a été mis en place dès 2018.
Il vise à améliorer de manière localisée et significative la couverture de zones dans lesquelles un besoin d'aménagement numérique du territoire a été identifié par les collectivités et le gouvernement.

C'est dans ce cadre que la commune de Cléden-Cap-Sizun, par un arrêté ministériel en date du 27 mai 2020, a été retenue pour l'implantation d'une antenne de téléphonie.
Après une phase d'études préalables, un « site » a été identifié comme le plus approprié pour l'implantation dudit projet.
Conformément au code de l'urbanisme, une déclaration préalable a été déposée à la mairie. Cependant, la commune se voit contrainte d'envisager de signer un arrêté de refus pour l'implantation de ladite antenne, suite à l'avis délivré par la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM).
Jusqu'à peu, ces pylônes édifiés en discontinuité de l'urbanisation étaient autorisés en considérant qu'il s'agissait d'installations techniques non constitutives d'extensions d'urbanisation. Le juge a cependant une vision de plus en plus restrictive sur ces points (d'abord sur les éoliennes, puis les parcs photovoltaïques), et c'est ainsi qu'il a annulé le 11 décembre 2019 (requête n°1803614) un projet de téléphonie mobile. Il a considéré qu'il résultait de l'instruction que l'installation de cette antenne s'apparenterait à une opération de construction isolée, constitutive d'une extension de l'urbanisation n'étant pas réalisée en continuité d'une agglomération ou d'un village existant.
Au regard de ce jugement, il semble difficile désormais d'autoriser de tels projets en discontinuité de l'urbanisation.
Il s'agit là d'une situation paradoxale, qui met en porte-à-faux deux politiques publiques : celle de la couverture du territoire par la téléphonie mobile et le respect de la loi littoral.
Cette position du juge administratif n'est pas sans conséquence pour les collectivités littorales en général, et pour celle de Cléden-Cap-Sizun, commune située à l'extrémité occidentale du département du Finistère en particulier.
Elle lui demande pourquoi ne pas envisager un portage et une instruction de ces dossiers par l'État sur le modèle des installations classées.
Les communes, en cas de recours, se trouvent doublement exposées ; vulnérables à la fois vis-à-vis de l'entreprise en charge de l'implantation et à la fois vis-à-vis des riverains.
Des équipements publics sous maîtrise d'ouvrage de l'État (reconnus d'utilité publique) peuvent être déconnectés du bâti. Un statut identique pour les collectivités locales pourrait être envisagé.
Elle lui demande quelles sont les mesures envisageables pour répondre à cette problématique.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé de l'économie sociale, solidaire et responsable publiée le 07/05/2021

Réponse apportée en séance publique le 06/05/2021

Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet, auteure de la question n° 1566, adressée à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques.

Mme Nadège Havet. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur le programme « New Deal mobile » et, plus largement, sur les difficultés d'implantation d'antennes sur le littoral.

En janvier 2018, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) et le Gouvernement ont annoncé les différents engagements des opérateurs afin d'accélérer la couverture mobile des territoires.

Afin de répondre de manière adaptée à l'ensemble des attentes des citoyens et des territoires en matière de connectivité mobile, un dispositif de couverture ciblée a ainsi été mis en place.

C'est dans ce cadre que plusieurs collectivités, notamment dans le Finistère, ont été retenues pour l'implantation d'antennes de téléphonie.

Jusqu'à il y a peu, ces pylônes édifiés en discontinuité de l'urbanisation étaient autorisés : on considérait qu'il s'agissait d'installations techniques non constitutives d'une extension de l'urbanisation.

Le juge a cependant une vision de plus en plus restrictive sur ce point. C'est ainsi qu'il a annulé le 11 décembre 2019 un projet de téléphonie mobile, après avoir considéré que l'installation de cette antenne s'apparentait à une opération de construction isolée et qu'elle méconnaissait les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.

Compte tenu de ce jugement, il semble désormais difficile d'autoriser de tels projets en discontinuité de l'urbanisation en zone littorale. Cette situation paradoxale rend incompatibles les deux objectifs que sont la couverture en téléphonie mobile de l'ensemble du territoire et le respect de la loi relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi Littoral. Comment donc concilier protection environnementale et désenclavement territorial ?

En 2018, lors de l'examen de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi ÉLAN, l'article L. 122-3 du code de l'urbanisme a été modifié. Désormais, les implantations d'antennes peuvent déroger au principe de continuité de l'urbanisation en zone de montagne.

Par cohérence avec cette disposition de la loi ÉLAN, il conviendrait d'appliquer également cette dérogation dans les zones littorales. Un article pourrait ainsi être inséré après l'article L. 121-5-1 du code de l'urbanisme, qui reprendrait les termes de l'article L. 122-3 du même code.

Le Gouvernement a fait de l'aménagement du territoire et de l'accès au numérique des enjeux prioritaires. Madame la secrétaire d'État, quelle est votre position sur cette proposition législative ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable. Madame la sénatrice Havet, je partage le constat précis que vous venez de dresser. La loi du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral impose en effet des contraintes fortes en ce qui concerne l'implantation de pylônes de téléphonie mobile.

Lors des débats sur la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, le sujet avait été soulevé : dans le contexte d'accélération et de densification de la couverture mobile demandée aux opérateurs par les pouvoirs publics, l'obligation de construire en continuité de l'urbanisation restreint la possibilité d'implanter des sites mobiles dans les communes littorales.

Des propositions similaires à la vôtre ont déjà été examinées. À titre d'exemple, le député Éric Bothorel avait proposé que les constructions destinées aux communications électroniques puissent déroger aux règles actuelles du code de l'urbanisme. La majorité des parlementaires avait toutefois considéré qu'il n'était pas opportun de remettre en cause cette règle de construction en continuité de l'urbanisation en zone littorale, si bien que tous les amendements de même nature avaient été rejetés.

Compte tenu de la réelle sensibilité de cette question et du fait que la majorité des parlementaires s'est prononcée clairement sur le sujet, le Gouvernement considère qu'il n'est pas opportun aujourd'hui de modifier l'équilibre trouvé dans la loi ÉLAN.

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