Question de Mme de MARCO Monique (Gironde - GEST) publiée le 18/02/2021
Mme Monique de Marco attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports, sur le risque de pollution de l'eau induit par le chantier de la déviation du Taillan-Médoc dans le département de la Gironde.
Le centre-ville du Taillan-Médoc est depuis longtemps impacté par le trafic routier auquel s'ajoutent les camions de livraison, avec la traversée de plus de 1 000 poids-lourds par jour. Un projet de déviation a été décidé et est porté par le département de la Gironde.
Le tracé, retenu selon des études datant d'une vingtaine d'années, n'a pas fait l'objet d'études alternatives. Il coupe en deux les derniers espaces boisés de la métropole bordelaise qui abritaient un « hot spot » de biodiversité devenu rare.
La compensation prévue n'est pas à la hauteur de la sixième extinction de masse des espèces : elle ne respecte pas la priorité absolue d'éviter ces destructions, prévue par la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et ne satisfait pas aux conditions de l'avis favorable du conseil national de protection de la nature.
La future déviation traversera également le champ captant de Thil-Gamarde, qui alimente dans une proportion importante l'agglomération bordelaise en eau potable. Ce champ captant est une nappe de l'oligocène affleurante extrêmement vulnérable en raison de la grande perméabilité de la roche. Cette nappe a été victime à trois reprises de pollutions (perchlorate d'amonium, ETBE
) en 2009, 2011 et 2015, entraînant des arrêts de l'exploitation du captage.
Un effondrement du sol dû à des travaux d'engins pour creuser un fossé a été découvert récemment et met en exergue les risques d'accidents de chantier et de pollution de la nappe.
Elle demande donc la suspension des travaux et la réalisation d'une nouvelle expertise hydrogéologique.
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Réponse du Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Logement publiée le 04/06/2021
Réponse apportée en séance publique le 03/06/2021
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, auteure de la question n° 1528, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.
Mme Monique de Marco. Madame la ministre, je vous alerte aujourd'hui sur le risque de pollution de l'eau induit par le chantier de la déviation du Taillan-Médoc, dans le département de la Gironde.
Le centre-ville du Taillan-Médoc est depuis longtemps perturbé par le trafic routier, avec la traversée de 1 000 poids lourds par jour. Un projet de déviation, engagé par le département, a donc été décidé voilà plusieurs dizaines d'années. Le tracé retenu, il y a vingt ans, n'a fait l'objet d'aucune étude alternative. Or il coupe en deux les derniers espaces boisés de la métropole bordelaise, qui abritent une zone extrêmement riche en biodiversité.
La compensation prévue n'est pas à la hauteur de la sixième extinction de masse des espèces. Elle ne respecte pas non plus la priorité absolue d'éviter ces destructions, obligation pourtant prévue par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.
La future déviation traversera surtout un champ captant, qui alimente dans une proportion importante l'agglomération bordelaise en eau potable. Cette nappe, extrêmement vulnérable, a été victime à trois reprises de pollutions, entraînant des arrêts de l'exploitation du captage.
Dernièrement, un effondrement du sol de cinq mètres de diamètre et de cinq mètres de profondeur a mis en exergue les risques d'accident de chantier et de grave pollution du champ captant. En urgence, il a fallu renforcer la sécurité par de nouveaux équipements et décider d'études complémentaires.
Un défaut d'anticipation des risques a été ainsi mis en évidence. Dans l'attente du résultat des nouvelles études géophysiques destinées à vérifier la présence d'éléments pouvant occasionner un nouvel effondrement, madame la ministre, je demande au Gouvernement de suspendre ce chantier par mesure de précaution.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Madame la sénatrice de Marco, vous interrogez le Gouvernement sur le projet de déviation du Taillan-Médoc, en Gironde, et sur ses impacts environnementaux.
Il est important de rappeler que cette déviation est sous maîtrise du département de la Gironde depuis 2007, même si elle a été lancée par l'État avant la décentralisation de 2004.
Un référé visant à suspendre les travaux a été déposé au mois de février 2020 devant le tribunal administratif de Bordeaux par une association et des riverains. Déboutés, ceux-ci se sont ensuite pourvus en cassation. À la fin de l'année dernière, le Conseil d'État a considéré qu'il n'y avait pas lieu de suspendre les travaux.
Je rappelle par ailleurs que l'autorisation de début de travaux de cette déviation a été accordée après l'obtention des autorisations administratives au titre du code de l'environnement sur les volets « loi sur l'eau » et « espèces protégées ». Ces autorisations tiennent bien compte du champ captant et des périmètres rapprochés et éloignés de protection. Dans le cadre de l'instruction du dossier déposé par le conseil départemental, l'agence régionale de santé (ARS) et l'hydrogéologue agréé ont été associés ; leurs préconisations ont été reprises dans les arrêtés autorisant les travaux.
Le premier arrêté préfectoral « loi sur l'eau » concernant la déviation du Taillan-Médoc a été signé le 19 mars 2012. Il a été modifié par un autre arrêté du 15 mars 2016 et sa partie relative aux espèces protégées a été complétée le 13 septembre 2019.
Des contrôles du chantier par les services compétents sont réalisés régulièrement pour s'assurer de la bonne prise en compte de leurs prescriptions par le conseil départemental.
S'agissant des mesures d'évitement, de réduction et de compensation des impacts sur la biodiversité, il ressort de l'instruction du dossier et de la décision du Conseil d'État du 17 décembre dernier que le projet d'aménagement routier a été précédé de l'examen approfondi de tracés alternatifs, dont aucun n'apparaît plus favorable en matière d'atteinte aux espèces protégées. Ce projet comporte des mesures d'évitement, de réduction et de compensation nombreuses et étayées permettant de limiter les atteintes occasionnées aux espèces animales et végétales protégées.
Ces mesures ont conduit le Conseil national de la protection de la nature (CNPN), à la suite des modifications apportées au projet après les avis négatifs qu'il avait initialement émis, à rendre, le 23 mai 2019, un avis favorable, sous réserve de mesures de compensation.
Madame la sénatrice, vous soulevez également les risques d'accident de chantier et de pollution de l'eau. Je rappelle que l'effondrement d'une partie du sol au mois de février 2021 s'est accompagné de la mise en place d'un protocole spécifique de protection pour sécuriser le chantier et protéger la ressource.
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour la réplique.
Mme Monique de Marco. Madame la ministre, tout cela remonte à vingt ans ! Aujourd'hui, nous sommes dans une démarche devant aboutir à une grande loi sur le climat, que j'espère ambitieuse.
Pour nous, ce projet de déviation n'a plus lieu d'être. En effet, il aura des conséquences irrémédiables sur la biodiversité de la Gironde. Il comporte également des risques de pollution de l'eau, que vous avez soulignés, et qui seront toujours présents, la nappe ayant une très faible profondeur à cet endroit. Or ces champs captants fragiles alimentent la métropole bordelaise.
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