Question de Mme RICHER Marie-Pierre (Cher - Les Républicains-R) publiée le 28/01/2021

Question posée en séance publique le 27/01/2021

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Richer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Pierre Richer. Ma question s'adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Monsieur le ministre, je veux vous alerter sur la situation très préoccupante liée à ce que l'on peut qualifier de « désertification pharmaceutique », affectant l'ensemble des officines, mais plus particulièrement celles de nos territoires ruraux.

Ce phénomène, qui accompagne la désertification médicale, aggrave le problème de l'accès aux soins de leurs habitants, notamment les plus âgés. Ces derniers peuvent, de ce fait, éprouver davantage de difficultés pour continuer de vivre à leur domicile, alors que la politique des pouvoirs publics vise à les y maintenir le plus longtemps possible.

Pour y remédier, plusieurs dispositifs sont prévus. Malheureusement, ils ne répondent pas à l'urgence de la situation, qu'il s'agisse des dispositions envisagées dans le cadre du décret relatif aux territoires fragiles, qui autoriseraient l'ouverture d'une officine dans une commune située dans un territoire reconnu comme tel, ou du dispositif permettant la réouverture d'une officine dans une commune qui en disposait déjà dans le passé.

Dans ces deux cas, il est uniquement question de transfert de licence, non de création d'officine. Surtout, ces dispositions ne visent que des communes dans des situations bien spécifiques, ce qui ne règle pas le cas de la plupart des petites communes rurales, les plus nombreuses et les plus exposées à ce phénomène.

De son côté, l'article 95 de la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, dite ASAP, prévoit la possibilité d'autoriser l'installation d'antennes de pharmacie rattachées à une pharmacie de proximité, dans le cas où la seule officine du village cesse son activité sans avoir trouvé de repreneur.

Cette mesure, que je salue, pourrait prendre la forme de pharmacies « mère-fille », comme je vous l'avais proposé dans une question écrite du 23 juillet dernier, restée à ce jour sans réponse. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Toutefois, sa mise en œuvre pourrait s'étaler sur plusieurs années pour aboutir, dans le meilleur des cas, à un système qui ne serait que provisoire et reste soumis à la décision des agences régionales de santé (ARS), au risque de disparités territoriales manifestes.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, j'aimerais connaître les mesures concrètes que vous entendez prendre dans les meilleurs délais, pour mettre fin à cette véritable hémorragie des praticiens de santé que sont les pharmaciens, lesquels, en cette période de pandémie, ont encore montré le rôle et la place indispensables qu'ils occupent dans notre territoire, au service de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 28/01/2021

Réponse apportée en séance publique le 27/01/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Je vous remercie, madame la sénatrice Richer, pour cette question orale. Je vous promets d'examiner également votre question écrite ; nous en recevons beaucoup et nous essayons, dans cette période particulière, de les traiter toutes. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Ce n'est pas une excuse, je le reconnais, mais je crois tout de même avoir signé pas loin de 18 courriers à destination de sénateurs avant de vous rejoindre. Je fais de même chaque semaine (Exclamations sur les mêmes travées.) et votre question écrite trouvera donc une réponse ! Je le dis sous le regard vigilant de notre ministre en charge des relations avec le Parlement, Marc Fesneau, qui est très attentif – à juste titre – à ce que les ministres répondent aux parlementaires.

S'agissant de l'organisation du réseau des pharmacies sur le territoire, vous avez raison de souligner l'importance de ce maillage pharmaceutique. Il est précieux, comme on l'a vu, d'ailleurs, pour la distribution des masques et la réalisation des tests antigéniques, et comme on le verra demain – je l'espère et le souhaite – pour la distribution de vaccins, voire la vaccination.

Les pharmaciens occupent une place de plus en plus importante dans notre système de santé. Ils s'en réjouissent, et je m'en réjouis également, car une réflexion était conduite depuis un certain nombre d'années sur l'évolution de ce métier.

Parfois, il s'agit – et cette remarque annonce la réponse que je vais vous donner – du dernier offreur de soins dans une commune donnée.

En effet, à mesure que l'on regroupe des médecins en maison de santé pluriprofessionnelle, à l'échelle, non pas des communes, mais des intercommunalités, que ce soit en territoire urbain ou rural, certains cabinets médicaux ferment. Auparavant, ils jouxtaient une pharmacie, qui se retrouve donc sans médecin prescripteur à proximité.

C'est pourquoi nous travaillons ardemment, par exemple avec le réseau des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), pour retisser du lien et des partenariats. C'est pourquoi a été votée voilà deux ans – au Sénat aussi, me semble-t-il – la possibilité d'obtenir des prescriptions dérogatoires par des pharmaciens, dans le cadre de protocoles préétablis.

Tout cela vise à conférer aux pharmaciens un rôle toujours plus important d'offreurs de soins à part entière dans notre système de santé et, ainsi, à conforter leur installation.

Au-delà, se posent toutes les questions liées aux dérogations, sur lesquelles je suis fréquemment saisi en tant que ministre de la santé.

Il faut le savoir, un nombre trop important de pharmacies dans un même endroit pénalise l'ensemble des pharmacies. Par ailleurs, le départ d'un médecin, par exemple un médecin regroupé dans une structure collective, a des conséquences sur la pharmacie située à proximité.

Parfois, les pharmacies dans les territoires ruraux connaissent moins de difficultés que celles qui, situées dans des grands quartiers urbains, voient un très grand groupe s'installer et racheter plusieurs officines pour créer une sorte de « super officine ». D'ailleurs, je n'y suis pas, à titre personnel, très favorable ; je crois vraiment à la proximité, à la pharmacie de quartier, avec un pharmacien connaissant bien les patients qui s'adressent à lui. Vous pouvez donc, madame la sénatrice, croire en mon engagement pour conforter son rôle dans la durée. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Richer, pour la réplique.

Mme Marie-Pierre Richer. Une pharmacie ferme tous les deux jours sur le territoire national, soit 200 pharmacies par an. Ce n'est plus de l'actualité, c'est de l'urgence. Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas ! N'attendons pas que la désertification pharmaceutique s'installe et prenne de l'essor, à l'instar de la désertification médicale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

- page 502

Page mise à jour le