Question de Mme MULLER-BRONN Laurence (Bas-Rhin - Les Républicains-A) publiée le 28/01/2021

Mme Laurence Muller-Bronn interroge M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes sur les prélèvements auxquels sont soumis les frontaliers français placés en chômage partiel par leur employeur allemand. En effet, malgré la convention de double imposition signée en 2015 par les deux pays, qui stipule que l'impôt sur le revenu est prélevé par le pays de résidence, l'Allemagne considère le versement du chômage partiel comme une prestation sociale et applique à ce titre un impôt sur ces salaires. L'article 13 alinéa 8 de cette convention précise pourtant que « les pensions, les rentes (y compris les sommes versées au titre des assurances sociales légales) et les autres rémunérations similaires ne sont imposables que dans l'État dont le bénéficiaire est un résident ».
Par ailleurs, un accord conclu le 13 mai 2020 entre la France et l'Allemagne confirme également que les sommes versées, dans le cadre du chômage partiel, par les employeurs allemands aux employés français sont imposables dans leur pays de résidence, donc en France.
Pourtant, l'Allemagne continue à appliquer l'imposition de ces revenus, qui vient s'ajouter au prélèvement à la source pratiqué par le système français sur les salaires. Les revenus des frontaliers sont ainsi doublement pénalisés : par le chômage partiel et par une double imposition. Elle demande au Gouvernement de bien vouloir remédier à cette inégalité face à l'impôt, qui perdure malgré les accords conclus entre la France et l'Allemagne.

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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la relance


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance - Petites et moyennes entreprises publiée le 10/03/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/03/2021

Mme le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, auteure de la question n° 1479, transmise à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Mme Laurence Muller-Bronn. Monsieur le ministre, ma question concerne la situation fiscale des frontaliers français.

Il existe une convention, signée en 2015 par la France et l'Allemagne, qui stipule que l'impôt sur le revenu doit être uniquement prélevé par le pays de résidence. Or, les frontaliers français placés en chômage partiel par leur employeur allemand en raison de la crise sanitaire subissent depuis lors une double imposition : l'Allemagne, considérant que le chômage partiel est une prestation sociale, applique à ce titre un impôt sur ces salaires.

Un accord, conclu le 13 mai 2020 entre la France et l'Allemagne, confirme pourtant que les sommes versées dans le cadre du chômage partiel par les employeurs allemands aux employés français sont imposables dans leur pays de résidence, donc en France.

Malgré cet accord, l'Allemagne continue d'appliquer l'imposition de ces revenus, laquelle s'ajoute au prélèvement à la source pratiqué par le système français sur les salaires. Les revenus des frontaliers français sont ainsi doublement pénalisés : tout d'abord, par le montant réduit du chômage partiel ; ensuite, par la double imposition qu'ils subissent. Concrètement, un salarié placé en chômage partiel peut perdre jusqu'à 52 % de son salaire brut.

Je souhaite donc savoir, monsieur le ministre, comment le Gouvernement peut faire pression sur l'État allemand pour qu'il respecte les accords conclus. Il y a véritablement inégalité devant l'impôt.

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Madame la sénatrice Muller-Bronn, je vous confirme que, conformément à la convention fiscale franco-allemande de 1959, modifiée en 2015, les revenus de source allemande versés au titre des indemnités de chômage partiel et perçus par un résident de France ne sont imposables qu'en France. L'accord du 13 mai 2020 que vous évoquez, conclu dans le cadre de la crise sanitaire liée à la covid, rappelle ce principe.

Par ailleurs, comme vous l'indiquez, si ces indemnités ne sont pas imposables en Allemagne en vertu de la loi sur l'impôt sur le revenu, elles sont déterminées selon un mode de calcul prenant en compte la déduction d'un impôt allemand fictif.

Une telle déduction a été jugée contraire au principe de libre circulation des travailleurs garanti par le droit de l'Union européenne lorsque, s'agissant d'autres contributions sociales allemandes, la convention fiscale franco-allemande précitée en réservait déjà l'imposition exclusive à la France.

C'est pourquoi, pleinement conscient des difficultés que cette situation engendre pour les travailleurs concernés, le ministre Bruno Le Maire a abordé ce sujet avec son homologue allemand, par courrier, l'été dernier. Depuis, nos services continuent d'échanger.

Toutefois, le règlement de la situation impliquerait également, et au principal, la coopération du ministère allemand chargé des affaires sociales.

Par ailleurs, s'agissant d'une législation prévue par le droit social en Allemagne, plusieurs contentieux individuels ont été engagés par les travailleurs concernés devant les juridictions compétentes de cet État.

Je tiens à vous assurer, madame la sénatrice, de la très grande implication de Bruno Le Maire sur cette question, qui doit désormais trouver une solution juste et satisfaisante, sur le plan juridique comme sur le plan économique, et ce dans les plus brefs délais.

Mme le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour la réplique.

Mme Laurence Muller-Bronn. Je vous remercie de votre réponse détaillée, monsieur le ministre.

Cette situation dure depuis bien trop longtemps. Les habitants de nos communes frontalières souffrent depuis déjà un an, surtout ceux qui ont des bas salaires. L'association frontalière des salariés de Moselle a saisi aujourd'hui la Cour européenne des droits de l'homme. Il s'agit d'un déséquilibre, d'une injustice, d'une inégalité, qu'il est urgent de réparer. Nous sommes en Europe et les salariés souffrent de cette baisse importante de leurs revenus.

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