Question de M. MARCHAND Frédéric (Nord - RDPI) publiée le 21/01/2021

M. Frédéric Marchand attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports, sur l'entretien des joints de ponts-routes.

L'entretien des ponts-routes est une problématique essentielle pour bon nombre de communes et le terrible effondrement du pont Morandi à Gênes en 2017 est venu rappeler la nécessité de l'entretien des ponts qui parsèment la France.
D'ailleurs, consciente de ce besoin, en 2018, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a créé en son sein une mission d'information sur la sécurité des ponts dont il a fait partie.
Il a pu constater que nos communes se retrouvent à devoir supporter des charges incombant à l'entretien de ces ouvrages d'art sans pour autant bénéficier des moyens techniques et financiers nécessaires.
On retrouve cette situation dans onze communes membres de communauté de commune de Flandres intérieures (CCFI) traversées par la ligne à grande vitesse (LGV) Nord.
La jurisprudence constante en la matière pose le principe selon lequel « la domanialité et la propriété d'un pont sont celles de la voie portée par l'ouvrage ».
Aujourd'hui SNCF Réseau exige l'application stricte de cette jurisprudence. C'est d'autant plus dommageable que les joints de chaussée sont des dispositifs complexes dont la qualité de conception et de mise en œuvre conditionne directement le bon fonctionnement et la pérennité des ouvrages d'art et non de la voie circulante. Les communes doivent donc prendre en charge des ouvrages de rétablissement des voies dont elles sont de facto propriétaires alors même que ces ouvrages ont été construits pour permettre de nouvelles infrastructures. Or, cette prise en charge excède bien souvent leur capacité financière.

Le législateur a pris conscience de ce problème. En effet, la loi n° 2014-774 du 7 juillet 2014 vise à repartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies. Ce texte pose le principe de conventions entre le gestionnaire de l'infrastructure de transport nouvelle et le propriétaire de la voie existante. Cependant, cela n'a pas réglé la situation des ouvrages déjà existants.
De même, un arrêté du 22 juillet 2020 à pour objet de recenser les ouvrages ayant rétabli des voies de communication des collectivités territoriales interrompues par une voie de l'État ou de ses opérateurs.
Or, les ouvrages de rétablissement surplombant une voie du réseau autoroutier concédé sont exclus du recensement, car la source de l'obligation pour les sociétés concessionnaires de négocier avec les collectivités territoriales des conventions de gestion se trouve dans la convention de concession elle-même.
À cet égard, il est rappelé que la loi du 7 juillet 2014 n'a pas transféré la propriété des ouvrages de rétablissement à l'État ou à ses opérateurs. Par conséquent, les collectivités qui en sont propriétaires ou gestionnaires demeurent responsables de ces ouvrages et de leur bon état d'entretien.
Aujourd'hui s'ouvre une phase de négociation de conventions par lesquelles l'État et ses établissements publics prendront en charge, dans les conditions prévues par la loi, une partie des frais liés à la surveillance et l'entretien de ces ouvrages.
La conclusion de ces conventions est une opportunité pour les onze communes de la communauté de communes de Flandres intérieures car elles définiront la répartition de frais d'entretien des ouvrages avec, notamment, une prise en compte des capacités financières et techniques.
Aussi, il lui demande quelles sont les instructions ministérielles concernant les modalités d'élaboration et de conclusion de ces conventions.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargé de la biodiversité publiée le 10/03/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/03/2021

Mme le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, auteur de la question n° 1472, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.

M. Frédéric Marchand. Madame la secrétaire d'État, le sous-investissement chronique dans l'entretien des ponts explique que certains ouvrages nécessitent des réparations lourdes ou soient démolis alors même qu'ils n'ont que quarante ou cinquante ans d'existence.

Dès lors, il est nécessaire d'entreprendre des actions, comme le maintien en bon état des étanchéités pour éviter des infiltrations d'eau, des joints de chaussée, la peinture des parties métalliques pour éviter leur corrosion ou la dévégétalisation. Ces actions sont essentielles pour maintenir, voire prolonger, la durée de vie des infrastructures.

Nous constatons, hélas, un manque d'investissement de l'État, mais aussi des collectivités territoriales.

Nous devons également déplorer un manque de compétences techniques avec, notamment, la difficulté pour les départements de recruter des ingénieurs spécialisés dans les ouvrages d'art. Si l'État est doté d'un référentiel technique pour la gestion des ponts, qui prévoit un cycle de visites régulières, la méthode d'évaluation des ponts repose sur une inspection visuelle, qui ne permet de suivre que les dégradations visibles. Elle est donc insuffisante.

Nous constatons tous que nos communes se retrouvent à devoir supporter des charges incombant à l'entretien de ces ouvrages d'art sans pour autant bénéficier des moyens techniques et financiers nécessaires.

C'est le cas dans onze communes membres de la communauté de communes de Flandre intérieure traversées par la ligne à grande vitesse Nord.

La jurisprudence constante en la matière pose le principe selon lequel « la domanialité et la propriété d'un pont sont celles de la voie portée par l'ouvrage ».

Aujourd'hui, SNCF Réseau exige l'application stricte de cette jurisprudence. C'est d'autant plus dommageable que les joints de chaussée sont des dispositifs complexes, dont la qualité de conception et de mise en œuvre conditionne directement le bon fonctionnement et la pérennité des ouvrages d'art et non de la voie circulante. Les communes doivent donc prendre en charge des ouvrages de rétablissement des voies dont elles sont de facto propriétaires, alors même que ces ouvrages ont été construits pour permettre de nouvelles infrastructures. Or cette prise en charge excède bien souvent leurs capacités financières.

Le législateur a pris conscience de ce problème. En effet, la loi du 7 juillet 2014 vise à repartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies. De même, un arrêté du 22 juillet 2020 a pour objet de recenser les ouvrages ayant rétabli des voies de communication des collectivités territoriales interrompues par une voie de l'État ou de ses opérateurs. Or les ouvrages de rétablissement surplombant une voie du réseau autoroutier concédé sont exclus du recensement, car la source de l'obligation pour les sociétés concessionnaires de négocier avec les collectivités territoriales des conventions de gestion se trouve dans la convention de concession elle-même.

Aujourd'hui s'ouvre une phase de négociation de conventions par lesquelles l'État et ses établissements publics perdront en charge, dans les conditions prévues par la loi, une partie des frais liés à la surveillance et l'entretien de ces ouvrages.

La conclusion de ces conventions est une opportunité pour les onze communes de la communauté de communes de Flandre intérieure, car celles-ci définiront la répartition de frais d'entretien des ouvrages avec, notamment, une prise en compte des capacités financières.

Aussi, madame la secrétaire d'État, pouvez-vous m'apporter des précisions sur l'instruction ministérielle concernant les modalités d'élaboration et de conclusion de ces conventions ?

Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Marchand, vous nous interpellez effectivement sur la loi Didier (loi du 7 juillet 2014 visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies) et sa bonne application. Cette loi a fait l'objet d'un premier et méticuleux travail par les services de l'État et de ses opérateurs de recensement des ouvrages d'art de rétablissement ne faisant pas l'objet de conventions, dont les ponts-routes. Il s'agissait d'un travail inédit, qui a abouti, après une concertation organisée avec les collectivités territoriales sur la base d'un recensement provisoire, à la publication d'une liste de 9 480 ouvrages d'art, dont plus de 4 000 sont situés au-dessus du réseau ferré français.

En complément de cette liste, le ministère des transports va très prochainement mettre en place un formulaire de contact, afin que les collectivités puissent soumettre des ouvrages d'art de rétablissement dont elle n'avait pas pu soumettre la situation lors du recensement initial.

Ces ouvrages d'art feront progressivement l'objet de conventions sur une période qui, en raison du nombre d'ouvrages à conventionner, s'étalera sur un temps long. Une priorisation du conventionnement des ouvrages sera nécessaire. Au vu de la disparité des réseaux concernés, en termes de nombre d'ouvrages et de caractéristiques techniques, il apparaît préférable que l'État et ses opérateurs définissent chacun la politique de priorisation de conventionnement des ouvrages situés au-dessus de leur réseau, l'État veillant à la cohérence de l'ensemble.

Ainsi, SNCF Réseau travaille actuellement avec les collectivités territoriales ayant sollicité le gestionnaire pour définir le périmètre et le contenu des conventions de gestion. Ces conventions s'inscriront dans le cadre défini par le code général de la propriété des personnes publiques, lequel dispose que le « principe de référence », donc la prise en charge par le gestionnaire de la « nouvelle » infrastructure de l'ensemble des charges relatives à la structure de l'ouvrage, bénéficie, sauf accord contraire des parties, aux collectivités locales propriétaires d'un ouvrage de rétablissement dont le potentiel fiscal est inférieur à 10 millions d'euros.

Vous pouvez compter, monsieur le sénateur, sur notre pleine mobilisation pour la mise en œuvre de la loi.

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