Question de Mme PROCACCIA Catherine (Val-de-Marne - Les Républicains) publiée le 14/01/2021
Mme Catherine Procaccia attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement sur le retrait des permis de construire de certaines mairies du Val-de-Marne au profit de l'État.
Quatre communes du Val-de-Marne sont désormais privées de leur droit d'urbanisme, les objectifs de construction de logements sociaux n'ayant pas été atteints selon la déclaration de la ministre alors que trois des maires ne sont en fonction que depuis un mandat (Saint-Maur, le Perreux et Ormesson), et l'autre est en place depuis quelques mois. Elle se demande si on peut réellement reprocher à ces élus les décisions de leurs prédécesseurs et si la ministre croit que dans la petite couronne le foncier disponible est facile à trouver, sans compter son prix.
Il est utile de rappeler que ces maires ne s'opposent en aucun cas à la construction de logements sociaux qu'ils savent nécessaire.
Cette décision centralisatrice souligne le peu de considération portée à l'action des maires, dont certains ont signé un contrat d'engagement avec l'État.
Elle souligne aussi la méconnaissance des efforts effectués dans des territoires qui ne peuvent se prêter à une urbanisation massive et accélérée.
Le manque de surfaces constructibles (24 000 habitants au km2 à Saint-Mandé), le caractère pavillonnaire de certaines villes (Ormesson, Le Perreux), les décisions prises par les maires (30 % de logements sociaux dans toutes les constructions à Saint-Maur) sont autant d'éléments qui ne sont pas pris en compte dans cette décision.
Les franciliens et particulièrement ceux du Val-de-Marne subissent déjà la bétonisation à outrance, à une époque où les citoyens rêvent d'espaces verts et d'une meilleure qualité de vie.
Sans compter que l'accroissement induit par la construction de nouveaux logements suppose des crèches, des écoles et d'autres équipements supplémentaires.
Elle veut savoir si le préfet, qui se substituera aux maires dans ces prérogatives, compte aussi prévoir les équipements publics indispensables, et comment ils seront financés.
En outre, alors que les maires ont démontré ces derniers mois leur importance et la connaissance de leurs territoires, ils sont encore une fois méprisés par un État qui prend des décisions sans aucune consultation.
Alors, elle souhaiterait savoir pourquoi les maires des villes concernées n'ont pas pu s'expliquer et se justifier devant la commission ad hoc et sur quelles bases l'État les sanctionnera de nouveau si le préfet n'arrive pas non plus à atteindre des objectifs totalement idéalistes et irréalistes.
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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargé de la biodiversité publiée le 10/02/2021
Réponse apportée en séance publique le 09/02/2021
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 1457, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.
Mme Catherine Procaccia. Ma question s'adressait à Mme la ministre déléguée chargée du logement.
Au mois de décembre dernier, quatre villes du Val-de-Marne se sont vu retirer leur compétence d'attribution des permis de construire à la demande du Gouvernement. Ce retrait faisait suite à leur prétendue inaction en matière de construction de logements sociaux.
Pourtant, trois maires de ces quatre villes sont là depuis à peine un mandat, et le dernier n'a pris ses fonctions qu'il y a quelques mois !
Tous construisent. Presque tous ont signé des conventions d'engagement avec l'État et imposent des taux stricts et même majorés de logements sociaux dans les nouvelles constructions, pour répondre aux exigences inatteignables de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU.
En se substituant aux collectivités, l'État centralisateur méconnaît tous leurs efforts et montre, une fois encore, le peu de considération qu'il a pour les élus locaux !
Aussi sympathique et efficace que soit le préfet, que pourra-t-il faire face au manque de foncier disponible, à son coût prohibitif, à l'existence d'un plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) ou au caractère pavillonnaire de certaines villes ? Est-ce également lui qui se substituera aux maires pour construire crèches, écoles et autres équipements indispensables pour éviter de reproduire les erreurs passées de l'État ? Et qui les financera ?
Il serait incompréhensible que l'État force à la bétonisation et laisse, comme d'habitude, les communes se débrouiller.
Je souhaite savoir, madame la secrétaire d'État, pourquoi ces quatre maires n'ont pas pu s'expliquer devant la commission ad hoc avant d'être brutalement sanctionnés. Et sur quelles bases ces sanctions seront-elles appliquées quand on constatera que le préfet lui-même n'arrive pas à atteindre des taux idéalistes et irréalistes ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Madame la sénatrice Procaccia, vous attirez l'attention du Gouvernement sur la situation de quatre communes du Val-de-Marne pour lesquelles le préfet vient effectivement de prendre un arrêté de carence au titre de l'article 55 de la loi SRU.
Vous le savez, sur le territoire de la métropole du Gand Paris, à laquelle ces communes appartiennent, la tension sur le logement social est particulièrement forte. On compte dix demandeurs de logement social pour une seule attribution et souvent plusieurs années d'attente. De nombreux ménages se trouvent ainsi dans des situations particulièrement difficiles, ne parvenant pas à accéder à un logement adapté à leurs ressources, avec les conséquences que nous connaissons sur l'équilibre familial, sur la scolarité des enfants et sur la situation professionnelle.
Dans ce contexte, ce principe de solidarité qui fonde la loi SRU ne saurait être contesté, à plus forte raison sur l'un des territoires les plus tendus de France.
Plus particulièrement, les quatre communes que vous évoquez sont soumises à l'obligation de rattrapage depuis l'origine du dispositif, adopté en 2000, et ont accumulé au fil des années un net retard en matière de production de logements sociaux. Ainsi, Saint-Maur-des-Fossés et Ormesson-sur-Marne disposent de moins de 10 % de logements sociaux la dernière de ces communes en compte à peine 3 % ! alors que la loi a désormais vingt ans d'existence. Ces quatre communes étaient déjà en carence lors du précédent bilan triennal.
C'est donc logiquement, au regard de leurs efforts insuffisants observés sur la période 2017-2019, et après un temps d'échange contradictoire avec les communes, que le préfet a pris des mesures fermes, non seulement en majorant le prélèvement opéré sur leur budget, mais également en se substituant aux maires pour la délivrance des autorisations d'urbanisme, afin de favoriser le développement d'opérations de logement social sur leur territoire.
Le manque de foncier supposé de ces communes ne saurait constituer un argument recevable alors que des communes voisines arrivent à respecter leurs engagements.
La production de logement social ne passe pas forcément par la construction neuve : l'acquisition-amélioration de logements existants, la mobilisation du parc privé, qui peut être conventionné avec l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), les opérations de démolition-reconstruction, la résorption de friches ou encore la construction dans les dents creuses font partie des solutions.
Dans ce contexte, j'invite ces quatre communes à mener enfin une politique volontariste : leurs efforts de production de logements sociaux seront bien entendu évalués à l'issue de la présente période triennale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour la réplique.
Mme Catherine Procaccia. Vous doutez du manque de foncier, madame la secrétaire d'État ? Vous pensez qu'il y a beaucoup de foncier dans une commune comme Saint-Mandé, où la densité de population est de 24 000 habitants au kilomètre carré ?
Je regrette que Mme Wargon ne soit pas présente pour répondre personnellement. Mais comme elle multiplie les apparitions et déclarations à l'approche des élections régionales, elle pourra peut-être expliquer aux citoyens pourquoi ils seront pénalisés et pourquoi elle préfère la bétonisation aux espaces verts !
Les communes d'Ormesson-sur-Marne ou du Perreux-sur-Marne sont confrontées à une impossibilité. La loi SRU, que vous évoquez, date de 2000. Pensez-vous que des maires en place depuis six ans puissent compenser en un seul mandat tout ce qui n'a pas été fait pendant vingt ans ?
Amendes, majorations d'amendes, perte du quota d'attribution de logements, perte du droit de préemption et, désormais, des permis de construire Vous faites vraiment tout pour décourager les élus !
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