Question de Mme BELRHITI Catherine (Moselle - Les Républicains) publiée le 19/11/2020

Mme Catherine Belrhiti attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement, sur la résiliation des abonnements à l'eau potable.

Certains distributeurs d'eau potable refusent la résiliation de l'abonnement de fourniture allant parfois jusqu'à exiger du titulaire un repreneur et imposant dans le cas contraire le démontage du compteur ou la fermeture de la vanne d'alimentation implantée sur le domaine public, ce qui génère un coût économique non négligeable pour le bénéficiaire du contrat.

Cette situation peut se produire dans l'hypothèse où la fourniture d'eau n'a plus d'intérêt du fait de l'inoccupation de l'immeuble (comme dans le cas d'une succession) et oblige le propriétaire à payer un abonnement parfois pendant de très nombreux mois, contrairement aux abonnements de fourniture de gaz et d'électricité lesquels sont résiliables à tout moment sans obligation de démontage du compteur.

Elle lui demande si de telles pratiques sont conformes à la réglementation en matière de fourniture d'eau potable et de protection des consommateurs.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Logement publiée le 14/04/2022

Il convient de rappeler que la fourniture d'eau potable est un service public industriel et commercial ; à ce titre, les relations entre fournisseurs et usagers sont soumises au droit privé, et plus particulièrement, au droit de la consommation – les fournisseurs étant professionnels, les abonnés, des particuliers. En premier lieu, au terme de l'article 1211 du code civil, la nature des contrats à durée indéterminée permet de demander la résiliation unilatérale du contrat à tout moment, et sans besoin de motivation. Un fournisseur d'eau potable ne peut donc pas, en principe, s'opposer à la résiliation de l'abonnement de fourniture. Il est toutefois à noter que le cas évoqué dans la question ne correspond pas à un simple refus de résiliation de l'abonnement au service de distribution d'eau, mais au fait que certains fournisseurs conditionnent ladite résiliation à la prise en charge par l'abonné des frais de démontage du compteur ou de la fermeture de la vanne d'alimentation. L'article L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit à son dernier alinéa que : « Les usagers des services d'eau potable peuvent présenter à tout moment une demande de résiliation de leur contrat d'abonnement. Ce contrat prend fin dans les conditions fixées par le règlement de chaque service, dans un délai qui ne peut excéder quinze jours à compter de la date de présentation de la demande ». Par conséquent, le fournisseur d'eau potable ne peut s'opposer à la demande de l'abonné de résilier son contrat mais il peut bien exiger de l'abonné la prise en charge des frais de résiliation lorsqu'il sont prévus par le règlement du service public de l'eau établi par la commune ou le groupement de collectivités territoriales responsable du service. Cette condition vise à « limiter les demandes réitératives de fermeture et de réouverture des branchements du même abonné dans un laps de temps court, afin de garantir le service de demandes répétitives et abusives », un objectif identifié par le juge administratif (dans un arrêt reconnaissant le caractère non abusif d'une clause qui prévoyait le paiement de l'abonnement malgré une période d'interruption, puisqu'inférieure à une année – CAA Nantes 03NT00250 29 décembre 2005). Cependant, le paiement des frais de résiliation de l'abonnement ne peut être exigé avant que la résiliation soit effective. En effet, le fournisseur est tenu de résilier l'abonnement sur demande de l'abonné dans le délai de quinze jours fixé par l'article L. 2224-12. Il doit donc dans ce délai, procéder au relevé du compteur et à la fermeture du branchement. Une fois le contrat résilié, le fournisseur pourra alors adresser la facture comprenant, notamment, les frais de fermeture de branchement. Par ailleurs, au terme de l'article L. 111-1 du code de la consommation, le professionnel est tenu d'informer, avant la formation du contrat et de manière lisible et compréhensible, le consommateur du prix du service, comprenant dès lors les éventuels frais de fermeture dudit service. Les fournisseurs d'eau sont donc tenus d'informer les usagers, avant la conclusion du contrat de fourniture, des frais à engager le cas échéant pour le démontage du compteur ou la fermeture de la vanne en cas de résiliation de l'abonnement. En souscrivant un abonnement au service de fourniture d'eau, l'usager consent aux conditions préalablement exposées par le fournisseur – parmi lesquelles figure le paiement des frais de fermeture, qui dès lors, relèvent de son obligation contractuelle. En ce sens, l'alinéa 2 de l'article L. 2224-12 du CGCT prévoit que : « L'exploitant remet à chaque abonné le règlement de service ou le lui adresse par courrier postal ou électronique. Le paiement de la première facture suivant la diffusion du règlement de service ou de sa mise à jour vaut accusé de réception par l'abonné. Le règlement est tenu à la disposition des usagers ». L'alinéa 3 du même article précise que « L'exploitant rend compte au maire ou au président du groupement de collectivités territoriales des modalités et de l'effectivité de la diffusion du règlement de service ». De plus l'article L. 111-2 du code de la consommation impose de communiquer ou mettre à disposition du consommateur les documents contractuels, préalablement à la formation du contrat. Le consommateur disposera donc des conditions dans lesquelles l'abonnement peut être coupé et du coût des frais de fermeture. En complément, il convient de signaler que l'article R. 212-2 alinéa 8 du code de la consommation prévoit la présomption du caractère abusif d'une clause qui soumettrait la résiliation d'un contrat à des conditions ou modalités plus rigoureuses pour le consommateur que pour le professionnel. Cette disposition peut être lue à la lumière de la recommandation CCA n° 85-01 A 6° de la Commission des clauses abusives selon laquelle les frais de fermeture des branchements doivent être dissociés du prix du mètre cube d'eau, et calculés en fonction des coûts réellement supportés (Recommandation CCA n° 85-01 A 6°). Ainsi, des frais de résiliation déconnectés des coûts réels supportés par le fournisseur pour le démontage du compteur ou de la fermeture de la vanne d'alimentation pourraient être regardés comme abusifs. En cas de litige, la charge de la preuve du caractère raisonnable des frais repose sur le fournisseur au titre de l'article R. 212-2 du code de la consommation. Par ailleurs, la Commission des clauses abusives précise que les frais de fermeture du branchement ne devraient pas être mis à la charge des abonnés ayant résilié le contrat de fourniture si la résiliation dudit contrat fait suite à une modification du règlement du service décidé par le service des eaux (CCA - recommandation n° 85-01 B 11°).

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