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N° 55
SÉNAT
PREMIERE SESSION ORDINAIRE DE 1986-1987 |
Annexe au procès-verbal de la séance du 30 octobre 1986. |
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
tendant à la création d'une commission d'enquête sur l'utilisation des fonds publics accordés au groupe Boussac.
PRÉSENTÉE
Par MM. Louis MINETTI, Ivan RENAR, Hector VIRON, Jean-Luc BÉCART, Mmes Marie-Claude BEAUDEAU, Danielle BIDARD-REYDET, M. André DUROMÉA, Mmes Paulette FOST, Jacqueline FRAYSSE-CAZALIS, MM. Jean GARCIA, Charles LEDERMAN, Mme Hélène LUC, MM. Paul SOUFFRIN, Robert VIZET et Henri BANGOU,
Sénateurs.
(Renvoyée a la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, et pour avis a la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale en application de l'article 11, alinéa 1, du Règlement.)
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Industrie. -- Accords multifibres - Aides publiques - Cessions - Commissions d'enquête - Comptes - Entreprises - Finances publiques - Formation professionnelle - Subventions - Textile.
EXPOSÉ DES MOTIFS
MESDAMES, MESSIEURS,
Le dépôt de bilan de l'Internationale lainière et cotonnière et l'inculpation de ses principaux dirigeants illustrent la légèreté coupable avec laquelle des fonds publics sont accordés au patronat.
En effet, les unités de production concernées appartenaient auparavant au groupe Boussac. Elles ont été cédées aux repreneurs avec des aides financières publiques sans aucune garantie industrielle et sociale sérieuses.
Sous la responsabilité des directions successives, le groupe Boussac est tombé de 102 établissements à 52 et le nombre de salariés a chuté de 50 % en six ans (26.000 salariés en 1979, 13.000 en 1985).
Alors que toutes les entreprises cédées sont aujourd'hui en dépôt de bilan, sous administrateur judiciaire, que les travailleurs sont sans ressource, la direction actuelle du groupe fait la sourde oreille, tout comme le Gouvernement, alors que l'un et l'autre ont des comptes à rendre. Le scandale financier de l'Internationale lainière et cotonnière qui laisse 1.500 salariés au moins dans l'angoisse, ne freine pas la volonté de liquidation de la direction actuelle du groupe.
De nouvelles cessions sont envisagées : la liquidation de La Madeleine (350 salariés), la mutilation de l'unité de Pérenchies (1.400 salariés) entre autre.
Le chômage partiel ou total a pris une ampleur sans précédent, certaines entreprises chôment complètement trois semaines sur quatre. Les pires inquiétudes pèsent sur l'unité de Fécamp et sur celle de Gaillard à Barentin où un odieux chantage à l'emploi s'exerce. Le secteur Peaudouce du groupe (connu pour sa rentabilité) va être offert aux américains « Pampers » ou à un groupe français si les travailleurs ne s'y opposent pas. La Sicophy (filiale de Peaudouce) vient de lancer un ultimatum aux salariés de l'unité reconvertie de Roanne pour les contraindre à accepter des baisses de salaires et une flexibilité tous azimuts dès le 1 er janvier 1986.
En fait, la direction se débarrasse de ses activités industrielles pour ne conserver que les secteurs les plus rentables, notamment Dior, Conforama et les biens immobiliers.
Pourtant des fonds publics ont été abondamment accordés au groupe Boussac puisque depuis 1981 plus d'un milliard et demi de francs lui ont été consentis.
Par ailleurs, l'utilisation des sommes transitant par Boussac Formation soulève de vives interrogations. Il ne semble en effet pas que les actions de formation connues soient suffisantes pour justifier les dépenses du fonds de formation.
Enfin, les conséquences de la reconduction de l'accord Multifibre mises en avant pour fermer les usines de tissage de coton méritent également d'être clarifiées. Il ne semble pas que cet accord soit essentiellement responsable des difficultés que rencontre cette industrie.
Le groupe communiste estime donc utile la constitution d'une commission d'enquête parlementaire.
Elle aura pour objet indépendamment des poursuites judiciaires en cours, de :
1. dresser un bilan précis de l'utilisation des fonds publics au groupe Boussac durant les dix dernières années ;
2. faire l'inventaire des moyens juridiques utilisés par la direction de ce groupe pour se soustraire aux exigences de transparence financière et au respect des règles élémentaires de morale dans la gestion d'une société ;
3. faire la clarté sur les conditions financières juridiques et sociales des cessions et analyser leur justification économique ;
4. établir un relevé détaillé des actions de formation et formuler une appréciation sur l'utilisation des fonds de Boussac Formation ;
5. examiner les moyens par lesquels des aides publiques destinées au redressement d'activités économiques auraient pu être intégrées à des patrimoines privés.
Au bénéfice de ces considérations, nous vous demandons. Mesdames, Messieurs les sénateurs, d'adopter la proposition de résolution suivante :
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Article unique.
Il est créé en application de l'article 11 du Règlement du Sénat une commission d'enquête de vingt-et-un membres.
Elle est chargée d'établir un rapport sur l'utilisation des fonds publics accordés au groupe Boussac et sur les conditions économiques, juridiques et sociales des cessions d'entreprises de ce groupe aux repreneurs, et notamment au groupe Ferinel.