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N° 827
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2012-2013
Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 septembre 2013 |
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE
présentée en application de l'article 73 quinquies du Règlement, sur la révision des lignes directrices concernant les aides d' État aux aéroports régionaux ,
Par MM. Jean BIZET et Bernard SAUGEY,
Sénateurs
(Envoyée à la commission des affaires européennes.)
EXPOSÉ DES MOTIFS
Madame, Monsieur,
Le 3 juillet dernier, la Commission européenne a ouvert une consultation publique en vue d'une révision des lignes directrices de l'Union européenne de 2005 sur le financement des aéroports et les aides d'État au démarrage pour les compagnies aériennes au départ d'aéroports régionaux .
Aux termes de la réglementation actuelle, les aéroports régionaux ne doivent pas bénéficier d'aides publiques à leur fonctionnement au motif qu'elles fausseraient la concurrence sur le marché intérieur européen. Cependant, les aéroports dont le volume de passagers est de moins d'un million par an sont considérés comme assurant un service d'intérêt économique général par l'Union européenne. À ce titre, ils peuvent être soutenus par des aides publiques exemptes de notification à la Commission européenne.
Dans le projet qu'elle a soumis à consultation publique, la Commission européenne propose d'abaisser ce seuil d'un million à 200 000 passagers par an . Ce faisant, elle fait courir le risque de la suppression de nombreuses lignes peu rentables pour les compagnies aériennes et d'entrainer ainsi la fermeture d'un certain nombre d'aéroports français.
Il y a en France 79 aéroports. Parmi eux, 62 ont eu un trafic inférieur à un million de passagers en 2012. Mais seulement 21 de ces aéroports ont connu un trafic inférieur à 200 000 passagers. C'est donc près de 40 aéroports - soit la moitié - qui pourraient voir contestées les aides publiques dont ils bénéficient si la proposition de la Commission européenne était adoptée en l'état.
Or, le maintien d'un aéroport sur un territoire ne relève pas uniquement de la question de la concurrence libre et non faussée. Le choix par les collectivités locales de maintenir ou non un aéroport en activité dépend de considérations multiples d'aménagement et de défense des territoires.
Disposer d'un aéroport est un atout pour la compétitivité de nos régions et de nos villes et constitue un levier pour leur développement. C'est également un avantage pour l'ensemble des citoyens européens qui accèdent ainsi plus directement - et souvent pour un moindre coût ! - à certaines localités d'Europe.
De plus, comment comprendre que soutenir un aéroport dont le trafic est inférieur à un million de personnes par an ne constitue pas aujourd'hui une distorsion de concurrence, mais le fera demain ? L'abaissement proposé du seuil constituerait une remise en cause sans précédent de la notion de service d'intérêt économique général en Europe !
Pour l'ensemble de ces raisons, nous proposons au Sénat d'adopter la résolution suivante :
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPEENNE
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu l'article 106 § 2 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne concernant les services d'intérêt économique général,
Vu l'article 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne concernant les aides d'État,
Vu le livre blanc de la Commission européenne « La politique européenne des transports à l'horizon 2010 : l'heure des choix »,
Vu les lignes directrices de la Commission européenne de 2005 sur le financement des aéroports et les aides d'État au démarrage pour les compagnies aériennes au départ d'aéroports régionaux,
Vu le projet de lignes directrices de l'Union européenne sur les aides d'État aux aéroports et aux compagnies aériennes du 3 juillet 2013,
Considérant que l'Union européenne bénéficie d'une compétence exclusive en droit de la concurrence et que, dans ce cadre, la Commission européenne a engagé une révision des lignes directrices sur les aides d'états aux aéroports régionaux ;
Considérant que les aides aux fonctionnements octroyées aux aéroports de moins d'un million de passagers, sous condition d'être chargés d'une mission d'intérêt économique général, ne sont pas actuellement soumis à l'obligation de notification à la Commission européenne en ce qui concerne les subventions à l'exploitation des aéroports ;
Comprend que les aides accordées aux aéroports régionaux doivent respecter des principes de transparence, de non-discrimination et de proportionnalité afin de ne pas constituer de distorsion de concurrence ;
Rappelle que le rôle des aéroports et des compagnies aériennes dans l'ouverture du ciel européen fait partie intégrante de la stratégie de l'Union européenne en matière de transport, et contribue aux objectifs de lutte contre les problèmes de congestion du transport aérien ainsi que l'accroissement des possibilités de vols pour les citoyens européens ;
Souligne que l'accès aux transports sur l'ensemble des territoires constitue un levier de développement économique pour chaque région et participe à la cohésion territoriale ;
Estime que la présence d'un aéroport régional est cruciale pour la compétitivité des territoires puisqu'elle bénéficie aux entreprises des régions concernées et peut également favoriser un cercle vertueux d'implantation d'entreprises dans ces régions ;
Souligne que la présence d'un aéroport régional bénéficie également aux citoyens européens en favorisant le tourisme et la mobilité des personnes sur le territoire européen ;
Juge qu'en temps de crise économique particulièrement sévère, il est indispensable que les collectivités locales puissent octroyer des aides aux aéroports régionaux pour soutenir leurs activités et éviter une disparition de ce type de transports dans certaines régions ;
S'oppose à ce que la révision des lignes directrices entraine une diminution du seuil du nombre de passagers en-deçà duquel les aéroports peuvent bénéficier, sous conditions, d'une exemption de notification au titre de service d'intérêt économique général en ce qui concerne les subventions à l'exploitation des aéroports ;
Souligne qu'une diminution du seuil élargirait le nombre d'aéroports dont les aides publiques devraient être notifiées à la Commission européenne et aurait pour conséquence d'ajouter une lourdeur administrative insupportable pour les collectivités locales.
Craint qu'une diminution du seuil en-deçà d'un million de passagers n'engendre la disparition d'un certain nombre d'aéroports régionaux ;
Estime qu'un tel abaissement du seuil reviendrait à remettre en cause la notion de service d'intérêt économique général ;
Demande, par conséquent, au Gouvernement de défendre le maintien du seuil actuel d'un million de passagers pour bénéficier, sous conditions, d'une exemption de notification au titre de service d'intérêt économique général dans les négociations avec la Commission européenne sur le projet de révision des lignes directrices de 2005 sur le financement des aéroports et les aides d'états au démarrage pour les compagnies aériennes au départ d'aéroports régionaux.