Proposition de résolution sur l'avant-projet de budget des Communuatés européennes pour l'exercice 2003 (E-2030)
Table des matières
N° 353
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SÉNAT
SESSION
EXTRAORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès-verbal de la séance du 10 juillet 2002
PROPOSITION DE
RÉSOLUTION
présentée au nom de la délégation pour l'Union européenne (1), en application de l'article 73 bis du Règlement, sur l' avant-projet de budget des Communautés européennes pour l' exercice 2003 (E 2030).
par M. Denis BADRÉ,
SÉNATEUR
(Renvoyée à la commission des Finances, du
contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation
sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission
spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
(1) Cette délégation est composée de
: M Hubert
Haenel,
président
; M. Denis Badré,
Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jean-Léonce Dupont, Claude Estier,
Jean François-Poncet, Lucien Lanier,
vice-présidents
; M. Hubert Durand-Chastel,
secrétaire ;
MM. Bernard Angels, Robert Badinter,
Jacques Bellanger, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Jean Bizet,
Jacques Blanc, Maurice Blin, Gérard César, Gilbert Chabroux,
Robert Del Picchia, Mme Michelle Demessine, MM. Marcel Deneux, Jean-Paul
Emin, Pierre Fauchon, André Ferrand, Philippe François,
Yann Gaillard, Emmanuel Hamel, Serge Lagauche, Louis Le Pensec,
Aymeri de Montesquiou, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Simon Sutour,
Jean-Marie Vanlerenberghe, Paul Vergès, Xavier de Villepin, Serge
Vinçon.
Union européenne.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Conformément à la nouvelle procédure budgétaire qui
avait été appliquée l'an dernier pour la première
fois, un débat d'orientation politique a eu lieu le 5 décembre
2001, à la suite duquel la Commission a adopté le
27 février 2002 une
décision de stratégie
politique annuelle
, dans laquelle elle identifie
trois grands objectifs
prioritaires pour 2003
:
- la
préparation à l'élargissement
, qui
recouvre notamment le renforcement des capacités administratives et
judiciaires des futurs Etats membres, la réalisation d'investissements
en infrastructures de transport, l'engagement des travaux de programmation des
fonds structurels et de développement rural, les préparatifs
administratifs et linguistiques des organes communautaires ;
- la
stabilité et la sécurité
, qui recouvre
notamment la lutte contre la criminalité et le terrorisme, la
sécurité des transports, celle des transactions
financières, le contrôle des frontières extérieures
de l'Union, la relance du partenariat euro-méditerranéen, la
stabilisation des Balkans et les partenariats avec les pays européens
non candidats ;
- le
développement durable
, qui conjugue le
développement économique avec le respect de l'environnement et la
dimension sociale, et recouvre notamment la réalisation du marché
intérieur des services dans les secteurs de l'énergie, des
transports et des télécommunications, le renforcement de la
coordination des politiques économiques des Etats membres, la
réalisation de la société de l'information pour tous, la
recherche de la durabilité pour les politiques de l'agriculture, de la
pêche, des transports et de l'énergie.
Comme l'an dernier, le Conseil et le Parlement européen ont chacun tenu
un
débat d'orientation budgétaire
dans le courant du mois
de mars, ce qui permet à la Commission de prendre en
considération leurs avis pour l'élaboration de l'avant-projet de
budget, qu'elle a adopté le 30 avril dernier.
Comme chaque année, les documents budgétaires nous ont
été transmis avec un retard considérable par rapport
à la date de leur adoption formelle, puisqu'ils n'ont été
communiqués que le 5 juin dernier. Toutefois, il serait sans doute
souhaitable de rattacher d'une manière ou d'une autre leur discussion au
débat d'orientation budgétaire national qui a traditionnellement
lieu au mois de juin, même si nous en avons été
exceptionnellement privés cette année pour cause
d'élections. En effet, ce débat constitue une occasion unique de
dialoguer en séance publique avec le ministre du Budget.
I.
UN BUDGET POUR UNE FOIS EN
AUGMENTATION MODÉRÉE
Rompant ave la tendance des exercices antérieurs, l'avant-projet de
budget communautaire est présenté en hausse
modérée : les
crédits d'engagement
s'élèvent à 100 milliards d'euros, soit une
augmentation de 1,4 % seulement
par rapport à 2002, tandis que
les
crédits de paiement
s'élèvent à
98,2 milliards d'euros, soit une
augmentation de 2,7 %
par rapport
à 2002.
Les rubriques qui enregistrent les plus fortes augmentations sont les
dépenses administratives
(+ 5,2 %), les
politiques
internes
(+ 2,4 %) et les
actions extérieures
(+ 2,3 %).
Pour les crédits de politique interne, en dehors du PCRD, les postes de
dépenses principaux sont les suivants :
- les réseaux transeuropéens de transport (629 millions
d'euros, + 7,5 %), avec un accent mis sur les infrastructures
transfrontalières dans les régions voisines des pays
candidats ;
- les programmes Socrates (263 millions d'euros, + 5,2 %),
Jeunesse (81 millions d'euros, + 12,5 %) et Leonardo (175,7 millions d'euros,
+ 11,9 %) ;
- les dépenses de communication (92 millions d'euros,
- 19,1 %), l'information sur l'élargissement ne prenant pas
complètement le relais de l'information sur l'euro ;
- les dépenses de coopération en matière de justice
et d'affaires intérieures (101,8 millions d'euros, en reconduction par
rapport à 2002).
Pour les crédits d'actions extérieures, les principales
évolutions sont les suivantes :
-
baisse sensible des crédits d'engagement consacrés
aux Balkans occidentaux (690 millions d'euros, - 9,6 %), en raison de la
diminution de l'aide au Kosovo, qui sort de la phase d'urgence et de
reconstruction, et n'est que partiellement compensée par l'augmentation
de l'aide à la Serbie et au Monténégro ;
- augmentation du programme TACIS en Europe orientale, Caucase et
républiques d'Asie centrale (509 millions d'euros,
+ 5,4 %) et du programme MEDA en région
méditerranéenne (932 millions d'euros, + 5,3 %). A noter que
l'aide financière promise par l'Union européenne au Sommet de
Barcelone pour appuyer le processus de paix au Moyen-Orient n'est pas
budgétée, mais sera mobilisée «
en utilisant
soit la marge, soit d'autres moyens disponibles, lorsque la situation sur le
terrain le permettra
» ;
- augmentation plus forte des interventions communautaires en Asie (546
millions d'euros, + 11,9 %), qui s'explique principalement par l'aide au
processus de reconstruction de l'Afghanistan ;
- forte augmentation des crédits PESC, qui demeurent toutefois
à un niveau modeste en valeur absolue (40 millions d'euros, + 33,3 %),
afin de mettre en place le potentiel opérationnel de l'Union dans la
gestion civile des crises décidé au Sommet de Laeken.
Les dépenses d'
actions structurelles
sont
présentées en quasi stagnation en crédits d'engagement,
avec une hausse de + 0,5 % seulement, mais augmentent de 4,4 % en
crédits de paiement.
Selon la Commission, la résorption des
restes à liquider hérités des exercices antérieurs
justifie le paiement de 7,9 milliards d'euros en 2003.
Au total, la hausse proposée pour le budget communautaire en 2003 serait
pour une fois moins rapide que celle de la moyenne des budgets nationaux :
+ 2,7 % contre + 3,4 %. Pour mémoire, le plafond des
perspectives financières autoriserait une augmentation de 3,8 %. La
conséquence de cette modération inusitée est que la part
du budget communautaire dans le total des PIB des Etats membres devrait
diminuer de 1,05 % en 2002 à 1,03 % en 2003.
Même si l'on ne peut exclure que le Parlement européen se livre
encore à la surenchère dont il est coutumier, la discussion du
budget communautaire semble s'engager sur des bases raisonnables cette
année. Nous sommes loin des psychodrames des discussions
budgétaires précédentes, au cours desquelles la Commission
avait même parfois défendu la nécessité d'une
révision des perspectives financières.
Les
prochaines étapes de la procédure budgétaire
sont les suivantes :
- procédure de conciliation entre les trois institutions
communautaires le 11 juillet ;
- première lecture au conseil Ecofin du 19 juillet ;
- première lecture au Parlement européen le 21 octobre.
Les secondes lectures débouchent sur une adoption définitive par
le Conseil le 16 décembre.
II. PRINCIPALES OBSERVATIONS
1. Une modération résultant surtout d'économies de
constatation :
On doit se féliciter que l'avant-projet de budget présenté
par la Commission européenne respecte, en crédits d'engagement,
le cadre des perspectives financières et soit modéré en
crédits de paiement. Mais il ne faut pas s'y tromper : cette
modération résulte moins d'un véritable effort
d'économie, que de
l'accumulation d'effets d'aubaines
involontaires et non reconductibles.
Ainsi, la suppression de la réserve monétaire agricole, d'un
montant de 250 millions d'euros, se traduit par une diminution de 35,8 %
de la rubrique 6, qui regroupe les crédits de réserve. Cette
suppression avait été décidée lors du sommet de
Berlin en 1999, mais ne prend effet qu'à compter de l'exercice 2003.
De même, la faible progression des dépenses agricoles de
marché, qui n'augmentent que de 1,9 %, s'explique en partie par le
retour à un niveau plus normal des crédits consacrés
à la lutte contre l'encéphalite spongiforme bovine et la
fièvre aphteuse, alors que ceux-ci avaient été
gonflés au cours des exercices précédents par des budgets
rectificatifs et supplémentaires.
La modestie de la progression des dépenses agricoles s'explique aussi
par une volonté d'affichage de la Commission qui, à ce stade de
la procédure, a délibérément choisi d'ignorer
l'évolution récente du cours de l'euro par rapport au dollar, et
a refusé de prendre en compte les répercussions
prévisibles du
farm bill
américain. Mais cette
modération n'a pas vraiment de portée, puisque de toute
façon il s'agit de dépenses obligatoires dont le niveau est
ajusté à l'automne en fonction de l'exécution
réellement constatée en cours d'exercice.
Enfin, l'exercice 2003 correspond à l'année de lancement du
sixième programme-cadre de recherche et de développement (PCRD).
Traditionnellement, les crédits de paiement sont fixés en
première année de programmation à un niveau sensiblement
inférieur à celui qu'ils atteindront ensuite en régime de
croisière. Or, les crédits de recherche représentent
près des deux tiers de la rubrique 3, consacrée aux politiques
internes, qui par conséquence est présentée en diminution
de 0,4 % en crédits de paiement (mais elle progresse de + 2,4 % en
crédits d'engagement).
Alors que les facteurs qui expliquent la faible progression des crédits
ne sont pas de véritables économies, certaines tendances poussant
à la dépense sont toujours présentes.
2. Le problème récurrent des restes à
liquider :
Sous couvert d'une hausse modérée, l'avant-projet de budget pour
2003 masque le problème récurrent des restes à liquider.
Ceux-ci concernent depuis longtemps les
crédits d'actions
structurelles
de la rubrique 2, où le reste à liquider
s'élève à 9,9 milliards d'euros, mais commencent aussi
à s'accumuler au sein de la rubrique 7 consacrée aux
dépenses de préadhésion
.
Face à cette question, la Commission, soutenue par le Parlement
européen, considère que la solution consiste à
accroître les crédits de paiement afférents :
ainsi, les fonds structurels progressent de + 4,4 % et les crédits
de préadhésion augmentent de + 10,1 %. Pour sa part, le Conseil
estime qu'il conviendrait d'abord de fixer les crédits d'engagement
à un niveau plus réaliste.
La situation tend plutôt
à s'aggraver, puisque le solde excédentaire d'exécution,
qui était de 11 milliards d'euros pour l'exercice 2000, a atteint
15 milliards d'euros pour l'exercice 2001.
3.
Le dépassement des perspectives financières pour les
dépenses administratives
Comme l'an dernier, les
dépenses administratives et de personnel
constituent le poste en plus forte augmentation, et dépassent le plafond
qui leur a été assigné par les perspectives
financières.
Toutefois, cette année, la Commission ne justifie plus ses demandes par
la réorganisation de ses services, mais par la préparation de
l'élargissement. A ce titre, elle demande la
création de 500
postes supplémentaires
et les
investissements immobiliers
nécessaires pour accueillir 10 nouveaux Commissaires au 1
er
janvier 2004, ce qui explique l'augmentation de 5,5 % des dépenses
administratives. Les autres institutions ne sont pas en reste, puisque le
budget de la CJCE est présenté en augmentation de 5,8 % et celui
du Conseil en augmentation de 11,6 %.
Au total, la rubrique 5 dépasse le plafond des perspectives
financières de 66 millions d'euros.
La Commission fait valoir qu'au
sommet de Berlin, des crédits supplémentaires n'avaient
été prévus pour l'élargissement qu'à compter
de 2004, alors que celui-ci entraîne des frais dès l'exercice
précédent. En conséquence, elle propose de couvrir ces
besoins excédentaires en recourant à
l'instrument de
flexibilité
. Mais tant le Conseil que le Parlement européen y
sont opposés, car cela détournerait cet instrument de sa
finalité, qui est de financer des dépenses imprévues et
exceptionnelles.
Il est donc vraisemblable qu'à l'issue de la discussion
budgétaire, les dépenses administratives liées à
l'élargissement seront
financées par redéploiement
sous le plafond des perspectives financières. Mais cette première
tentative de dépassement augure mal de ce que sera la négociation
budgétaire dans le contexte de l'élargissement.
En effet, l'un des effets budgétaires de l'élargissement sera de
réouvrir à la discussion le niveau du plafond de toutes les
rubriques des perspectives financières. Même si celles-ci courent
jusqu'à 2006, l'adhésion des nouveaux Etats membres se traduira
par la
répartition des dépenses de préadhésion
de la rubrique 7 entre toutes les autres rubriques.
Cette
réattribution ne se fera forcément de manière
linéaire, mais peut se prêter à tous les marchandages
imaginables.
Le budget 2003 est donc le dernier à s'inscrire dans le cadre des
perspectives financières définies à Berlin en 1999, avant
les modifications entraînées par l'élargissement qui
interviendront dès 2004 et prendront toute leur ampleur en 2006, avec la
définition de nouvelles perspectives financières.
*
La délégation a conclu au dépôt de la proposition de résolution suivante :
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Le
Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu l'avant-projet de budget des Communautés européennes pour
l'exercice 2003 (E 2030),
Se félicite de la modération de l'augmentation proposée
pour le budget communautaire en 2003 par rapport à l'exercice 2002, soit
1,4 % en crédits d'engagement et 2,7 % en crédits de paiement,
qui devrait pour une fois être inférieure à celle des
budgets des Etats membres ;
Relève, toutefois, que cette modération résulte plus
d'économies de constatation, involontaires et non reconductibles, que de
véritables efforts de rationalisation des dépenses ;
Demande au Gouvernement :
- de lutter contre l'accumulation des restes à liquider, notamment
en matière de fonds structurels et de dépenses de
préadhésion, en fixant les crédits d'engagement
afférents à un niveau plus réaliste ;
- de financer par redéploiement le surcroît des
dépenses administratives et de personnel lié à la
préparation de l'élargissement, qui ne saurait justifier ni un
dépassement du plafond des perspectives financières, ni le
recours à l'instrument de flexibilité.