N°340 SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 6 mai 1999
PROPOSITION DE LOI
relative à la vente d'une partie des avoirs en or de l'Etat détenus et gérés
par la Banque de France,
PRÉSENTÉE
Par MM. Joël BOURDIN et Jean-Philippe LACHENAUD,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
Banque de France.
EXPOSE DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Notre système de retraite va devoir s'adapter à la nouvelle donne démographique qui résulte, d'une part, de l'accroissement du nombre de retraités en raison de l'allongement de l'espérance de vie, et, d'autre part, de l'arrivée à la retraite, à partir de 2005, de générations plus nombreuses que celles qui liquident leurs droits aujourd'hui.
Cette évolution démographique est bien connue. La nécessité d'engager une réforme des conditions de financement de nos régimes de retraite par répartition fait partie du débat public depuis une dizaine d'années. Le gouvernement de M. Edouard Balladur avait mis en oeuvre une réforme courageuse en 1993. De nouvelles réformes sont cependant nécessaires en raison de l'imminence des évolutions démographiques.
Le commissaire au plan, M. Jean-Michel Charpin, a récemment remis au Premier ministre un rapport sur la situation et les perspectives de notre système de retraite. Ce rapport rappelle qu'il faudra financer des retraités plus nombreux pendant une période plus longue. Il souligne notamment que le nombre de personnes de plus de 60 ans va augmenter de dix millions entre 1998 et 2040, alors que le nombre d'actifs qui financent les retraites devrait baisser de plus d'un million si les évolutions actuelles en matière d'immigration et d'activité se poursuivent. Ainsi y aurait-il 7 personnes de plus de 60 ans pour 10 personnes d'âge actif en 2040, au lieu de 4 pour 10 aujourd'hui.
Ces évolutions démographiques sont à l'origine d'importants déficits à venir pour tous les régimes de retraite. Le rapport Charpin a dès lors étudié plusieurs pistes tendant à préserver la viabilité de notre système de retraite. Une des voies envisagées consiste à provisionner dès aujourd'hui des ressources dans le fonds de réserve pour les retraites, afin de faire face au changement de régime démographique à venir.
Ce fonds de réserve a en effet été créé par l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Il est géré au sein du fonds de solidarité vieillesse (FSV) prévu à l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale.
Or, ce fonds de réserve pourrait être abondé par les recettes provenant de la vente d'une partie des réserves en or de l'Etat, qui sont détenues et gérées par la Banque de France conformément aux dispositions de l'article 2 de la loi n° 93-980 du 4 août 1993 modifiée relative au statut de la Banque de France et à l'activité et au contrôle des établissements de crédit.
La France possède en effet 2 500 tonnes d'or. Le montant de ces avoirs représente environ 160 milliards de francs. La présente proposition de loi tend à dynamiser les stocks d'or de la Banque de France qui représentent une masse considérable de capitaux immobilisés alors que des besoins financiers tout aussi considérables doivent être dégagés, pour financer les retraites par exemple.
La présente proposition de loi vise à permettre la vente des avoirs en or de l'Etat à hauteur des deux tiers de leur montant, soit pour environ 100 milliards de francs. L'affectation du produit de cette vente ne pourra intervenir que dans le cadre du projet de loi de finances pour 2000, en raison des dispositions de l'article 18 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances qui pose le principe de la non affectation des recettes aux dépenses au sein du budget de l'Etat.
Dans certains pays comme le Canada ou les Etats-Unis, les régimes publics de retraite ont procédé à la constitution d'un fonds de réserve. De même, la Suisse a décidé, par votation populaire, de vendre une partie de son stock d'or. La France pourrait saisir l'opportunité de l'importance de ses avoirs en or pour trouver une source de financement des retraites.
Dans la perspective d'assurer l'avenir à long terme de notre système de retraite, il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la proposition de loi suivante.
PROPOSITION DE LOI
Article 1 er
Les avoirs en or de l'Etat, détenus et gérés par la Banque de France conformément à l'article 2 de la loi n° 93-980 du 4 août 1993 modifiée relative au statut de la Banque de France et à l'activité et au contrôle des établissements de crédit font l'objet d'une cession, à hauteur des deux tiers de leur montant.
L'affectation du produit de cette cession est déterminée dans la prochaine loi de finances.
Article 2
Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application de la présente loi.