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N° 338
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018
Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 mars 2018 |
PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE
tendant à rendre publics les avis donnés au Gouvernement sur les projets de loi , d' ordonnance et de décret ,
PRÉSENTÉE
Par M. Jean Louis MASSON, Mmes Christine HERZOG et Claudine KAUFFMANN,
Sénateurs
(Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Petit à petit la transparence s'est imposée dans le processus de fonctionnement des structures de l'État. Cependant, certaines règles restent fossilisées avec souvent la complicité tacite des décideurs politiques.
Ainsi, lorsque le Gouvernement élabore un projet de loi, il est tenu de consulter pour avis le Conseil d'État. Toutefois, cet avis est secret et ensuite le Parlement n'en a pas connaissance lorsqu'il vote la loi. Voilà bien une conception pour le moins archaïque de la démocratie, si tant est que, dans ce cas, on puisse encore parler de démocratie. Certes, depuis peu, le Gouvernement consent parfois à communiquer ces avis, mais, en droit, rien ne garantit la continuité de cet assouplissement.
Afin de remédier à cette carence, diverses propositions ont été formulées pour que le Parlement ait obligatoirement connaissance des avis du Conseil d'État sur les projets de loi. Ce serait un petit pas vers plus de démocratie mais un petit pas bien insuffisant.
Par exemple, lors du redécoupage des circonscriptions législatives en 2010, le Gouvernement devait consulter pour avis la commission ad hoc de contrôle puis le Conseil d'État. Or, aucun de ces deux avis n'a été communiqué au Parlement ni à fortiori rendu public. Lors du vote de la loi de ratification de l'ordonnance de découpage, les parlementaires en étaient donc réduits à se référer aux fuites partielles dans la presse.
Le Gouvernement n'étant pas obligé de se conformer à ces avis, si ceux-ci restent par ailleurs secrets, on peut se demander à quoi ils servent. Ce n'est absolument pas démocratique et cela prouve trois choses.
- Tout d'abord la vraie transparence exige que les avis soient rendus publics et pas seulement communiqués au Parlement.
- Ensuite, il ne faut pas limiter la publicité aux avis du seul Conseil d'État car selon les circonstances les avis émanant d'autres organes peuvent être tout aussi importants.
- Enfin, cela concerne à la fois les avis relatifs aux projets de loi et ceux relatifs aux textes à caractère réglementaire (ordonnances, décrets en Conseil d'État...)
La présente proposition tend donc à compléter l'article 20 de la Constitution en prévoyant que les avis que le Gouvernement est tenu de solliciter préalablement au dépôt d'un projet de loi ou à l'adoption d'un texte à valeur réglementaire (ordonnance, décret en Conseil d'État...) doivent être publiés dans des conditions fixées par une loi organique.
PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE
Article unique
L'article 20 de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sauf lorsque leur publication serait susceptible de porter atteinte à la sécurité ou à la défense nationale, les avis que le Gouvernement est tenu de solliciter préalablement au dépôt d'un projet de loi ou à l'adoption d'un texte à valeur règlementaire sont rendus publics dans des conditions fixées par une loi organique. »