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N° 797
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2013-2014
Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 septembre 2014 |
PROPOSITION DE LOI
visant à la réforme du mode de scrutin départemental ,
PRÉSENTÉE
Par M. Pierre BERNARD-REYMOND,
Sénateur
(Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le scrutin cantonal uninominal, instauré le 22 juin 1833, qui a organisé le mode de désignation des élus chargés de gérer les affaires des départements pendant six années, n'est plus apparu adapté à la répartition de la population sur les territoires de la plupart des départements et d'une manière générale, sur le territoire national.
Il a été remplacé par la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales qui réduisait le nombre des cantons et créait le conseiller territorial, siégeant à la fois au conseil général et au conseil régional. Cette loi, abrogée le 20 novembre 2012 n'a donc jamais été appliquée.
Elle est remplacée par la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers intercommunaux, et modifiant le calendrier électoral, qui réduit elle aussi le nombre des cantons mais qui instaure l'élection d'un homme et d'une femme dans chacun d'entre eux, ainsi que leurs suppléants, introduisant ainsi une forme de parité qui, semble-t-il, n'existe nulle part ailleurs.
Ces différentes tentatives de modernisation du scrutin cantonal présentent des avancées intéressantes, mais aussi des inconvénients. En particulier, la loi en vigueur crée un binôme dans chaque canton, ce qui ne manquera pas de poser des problèmes dans l'exercice quotidien des responsabilités de chacune et de chacun ; surtout elle marginalise trop la représentation des territoires ruraux. Par ailleurs, l'expérience prouve que le scrutin uninominal, surtout en zone rurale, ne permet pas, lors des élections, d'instaurer un débat sur l'avenir du département, il est circonscrit à l'avenir du canton, aux qualités personnelles des candidats et parfois à leur étiquette politique.
Aussi, proposons-nous un scrutin de liste départemental à double alternance qui combinerait à la fois l'alternance homme/femme et l'alternance urbain/rural ou vice versa .
Le scrutin de liste :
- permettrait que le débat électoral ne se focalise plus sur une ou plusieurs personnalités à désigner au service d'un canton, mais donne lieu à un débat général sur l'avenir du département ;
- permettrait le respect de la parité femme/homme ou homme/femme par l'alternance obligatoire des sexes sur la liste ;
- respecterait l'équilibre entre territoires urbains et territoires ruraux, par l'introduction d'une alternance entre ces deux types de territoires afin de s'assurer que les représentants des territoires ruraux ne soient pas systématiquement rejetés en fin de liste.
Pour mettre en oeuvre cette deuxième alternance, les cantons seraient répartis en deux catégories, urbains et ruraux, en fonction d'un seuil démographique.
Ainsi, par exemple, si la tête de liste est une femme domiciliée dans un canton urbain, le second devrait être un homme issu d'un canton rural ou inversement. Cette double parité devrait être poursuivie sur la liste aussi longtemps qu'une des deux catégories de canton ne serait pas épuisée.
Un décret préciserait pour chaque département le seuil démographique répartissant les cantons entre urbains et ruraux, révisable tous les douze ans, après consultation des élus municipaux, départementaux, des organismes de coopération intercommunale, ainsi que les parlementaires élus dans le département.
Certes, la constitution des listes serait rendue plus complexe, mais cet inconvénient n'est pas insurmontable et mériterait d'être accepté dès lors qu'il permettrait d'atteindre les trois objectifs essentiels d'un tel scrutin :
- porter le débat du niveau du canton à celui du département par l'adoption du scrutin de liste ;
- assurer la parité femme - homme ;
- permettre une juste représentation des cantons ruraux.
Tel est le sens de la présente proposition de loi.
L' article 1 er pose le principe du scrutin de liste et de la double alternance femmes/hommes et cantons « urbains » / cantons « ruraux ».
Les articles 2 à 4 précisent, en s'inspirant des règles en vigueur pour les élections régionales, le mode de scrutin, les règles applicables aux candidatures et les modalités de remplacement en cas de vacance d'un siège.
Les articles 5 à 8 contiennent des dispositions de coordination.
PROPOSITION DE LOI
Article 1 er
L'article 3 de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, est ainsi rédigé :
« L'article L. 191 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. L. 191. - Les conseillers départementaux sont élus dans chaque département au scrutin de liste à deux tours, sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation. Le nombre des sièges est égal au nombre des cantons dans le département. Tout candidat est rattaché à un canton en fonction de son domicile principal ou secondaire.
« Les cantons sont répartis en deux séries en fonction d'un seuil de densité de population pris par décret pour chaque département, après consultation de tous les élus : municipaux, cantonaux, régionaux et des parlementaires élus dans le département concerné.
« Chaque liste est composée alternativement d'un candidat rattaché à un canton appartenant à l'une des deux séries et d'un candidat rattaché à un canton appartenant à l'autre série. Deux candidats se succédant sur une même liste ne peuvent être de même sexe. »
Article 2
L'article 6 de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 précitée est ainsi rédigé :
« L'article L. 193 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. L. 193. - Les listes visées à l'article L. 191 comportent autant de candidats que de sièges à pourvoir.
« Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier supérieur. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application du quatrième alinéa ci-après.
« Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un second tour. Il est attribué à la liste qui a obtenu le plus de voix un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier supérieur. En cas d'égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, ces sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la plus élevée. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application du quatrième alinéa ci-après.
« Les listes qui n'ont pas obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à la répartition des sièges.
« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus ».
Article 3
L'article 14 de la loi n° 2013-403 du 17 mai précitée est ainsi rédigé :
« L'article 210-1 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art.210-1. - Une déclaration de candidature est obligatoire pour chaque liste de candidats avant chaque tour de scrutin. Nul ne peut être candidat sur plus d'une liste. Est nul et non avenu l'enregistrement de listes portant le nom d'une ou plusieurs personnes figurant sur une autre liste de candidats.
« Seules peuvent se présenter au second tour les listes ayant obtenu au premier tour un nombre de suffrages au moins égal à 10 % des suffrages exprimés. Dans le cas où une seule liste remplit cette condition, la liste ayant obtenu après celle-ci le plus grand nombre de suffrages au premier tour peut se maintenir au second. Dans le cas où aucune liste ne remplit cette condition, les deux listes ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour peuvent se maintenir au second. La composition de ces listes peut être modifiée pour comprendre les candidats ayant figuré au premier tour au moins 5 % des suffrages exprimés et ne se présentent pas au second tour. En cas de modification de la composition d'une liste, le titre de la liste et l'ordre de présentation des candidats peuvent également être modifiés. Les candidats ayant figuré sur une même liste au premier tour ne peuvent figurer au second tour que sur une même liste. Le choix de la liste sur laquelle ils sont candidats au second tour est notifié à la préfecture de région par le candidat tête de liste sur laquelle ils figuraient au premier tour.
« La déclaration de candidature résulte du dépôt à la préfecture chef-lieu du département d'une liste répondant aux conditions fixées au présent article ainsi qu'aux articles L. 191 et L. 193.
« Elle est faite collectivement pour chaque liste par le candidat tête de liste ou par un mandataire porteur d'un mandat écrit établi par ce candidat.
Elle indique expressément :
« 1° Le titre de la liste présentée ;
« 2° Les nom et prénoms du candidat tête de liste ;
« 3° Les nom, prénoms, sexe, date et lieu de naissance, domicile et profession de chacun des candidats.
« Pour chaque tour de scrutin, le déclaration comporte la signature de chaque candidat, sauf, pour le second tour, lorsque la composition d'une liste n'a pas été modifiée.
« Pour le premier tour, les déclarations de candidature sont déposées au plus tard le quatrième lundi qui précède le jour du scrutin, à midi. Il en est donné récépissé provisoire.
« Elles sont enregistrées si les conditions mentionnées au troisième alinéa ci-dessus sont remplies. Le refus d'enregistrement est motivé.
« Un récépissé définitif est délivré par le représentant de l'État dans le département chef-lieu de la région, après enregistrement, au plus tard le quatrième vendredi qui précède le jour du scrutin, à midi.
« Pour le second tour, les déclarations de candidature sont déposées au plus tard le mardi suivant le premier tour, à 18 heures. Récépissé définitif est délivré immédiatement aux listes répondant aux conditions fixées au deuxième alinéa ci-dessus. Il vaut enregistrement. Le refus d'enregistrement est motivé.
« Pour les déclarations de candidature avant le premier tour, le candidat désigné tête de liste, ou son mandataire, dispose d'un délai de quarante-huit heures pour contester le refus d'enregistrement devant le tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve le chef-lieu du département, qui statue dans les trois jours. Lorsque le refus d'enregistrement est motivé par l'inobservation des conditions mentionnées au troisième alinéa ci-dessus, la liste dispose de quarante-huit heures pour se compléter, à compter de ce refus ou de la décision du tribunal administratif confirmant le refus.
« Dans le cas prévu à l'alinéa précédent la candidature est enregistrée si le tribunal administratif, saisi par le candidat tête de liste ou son mandataire, n'a pas statué dans le délai prévu au premier alinéa.
« Pour les déclarations de candidature avant le second tour, le candidat désigné tête de liste, ou son mandataire, dispose d'un délai de vingt-quatre heures pour contester le refus d'enregistrement devant le tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve le chef-lieu du département, qui statue dans les vingt-quatre heures de la requête. Faute par le tribunal d'avoir statué dans ce délai, la candidature de la liste est enregistrée.
« Dans tous les cas, les décisions du tribunal administratif ne peuvent être contestées qu'à l'occasion d'un recours contre l'élection.
« Aucun retrait volontaire ou remplacement de candidat n'est accepté après le dépôt d'une liste.
« Les listes complètes peuvent être retirées avant le premier tour, au plus tard le quatrième samedi précédant le scrutin, à midi ; avant le second tour, avant l'expiration du délai de dépôt des candidatures. La déclaration de retrait est signée par la majorité des candidats de la liste. Il est donné récépissé des déclarations de retrait. »
Article 4
L'article 15 de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 précitée est ainsi rédigé :
« L'article L. 221 du code électoral est ainsi rédigé :
« Le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu est appelé à remplacer le conseiller départemental élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit.
« Si le candidat ainsi appelé à remplacer le conseiller départemental se trouve de ce fait dans l'un des cas d'incompatibilité mentionnés à l'article L. 46-1, il dispose d'un délai de trente jours à compter de la date de la vacance pour faire cesser l'incompatibilité en démissionnant de l'un des mandats visés par ces dispositions. À défaut d'option dans le délai imparti, le remplacement est assuré par le candidat suivant dans l'ordre de la liste.
« Le représentant de l'État dans le département notifie le nom de ce remplaçant au président du conseil départemental.
« Le mandat de la personne ayant remplacé un conseiller départemental dont le siège était devenu vacant expire lors du renouvellement du conseil départemental qui suit son entrée en fonction.
« Lorsque les dispositions des premier et deuxième alinéas du présent article ne peuvent être appliquées, le siège demeure vacant jusqu'au prochain renouvellement du conseil départemental. Toutefois, si le tiers des sièges d'un conseil départemental vient à être vacant par suite du décès de leurs titulaires, il est procédé au renouvellement intégral du conseil départemental dans les trois mois qui suivent la dernière vacance pour cause de décès, sauf le cas où le renouvellement général des conseils départementaux doit intervenir dans les trois mois suivant ladite vacance. »
Article 5
Au premier alinéa de l'article L. 222 du code électoral, les mots : « du canton » sont remplacés par les mots : « du département ».
Article 6
Le 1° de l'article 16 de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 précitée est abrogé.
Article 7
L'article 17 de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 précitée est ainsi rédigé :
« Au dernier alinéa de l'article L. 52-4 du code électoral, les mots : « à l'élection des conseillers généraux dans les cantons de moins de 9 000 habitants et » sont supprimés. »
Article 8
L'article 18 et les I et III de l'article 19 de la loi n° 2013-403 du 17 mai précitée sont abrogés.