Proposition de loi tendant à généraliser dans l'administration l'usage d'Internet et de logiciels libres
N° 32
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 24 octobre 2002
PROPOSITION DE LOI
tendant à
généraliser
dans
l'
administration
l'
usage
d'
Internet
et de
logiciels libres
,
PRÉSENTÉE
Par MM. Pierre LAFFITTE, René TRÉGOUËT, Jacques PELLETIER
et Paul GIROD,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Audiovisuel et communication. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les progrès fulgurants de l'utilisation des nouvelles technologies de
l'information et des télécommunications nécessitent un
accompagnement législatif. Les services publics et les
collectivités locales doivent, en la matière, constituer un
moteur et un modèle.
Quelques exemples montrent que, malgré les progrès
réalisés, ce n'est pas encore le cas.
Ainsi, à l'heure actuelle, il est impossible d'organiser une
réunion de syndicats de communes par voie électronique; le
contrôle de légalité s'y oppose.
La loi sur la signature électronique des contrats a
constitué une avancée très importante. Toutefois, il ne
règle pas le problème des appels d'offres pour les marchés
publics. Les études réalisées dans divers
ministères démontrent que les économies, tant pour l'Etat
et les collectivités publiques que pour les entreprises, seraient
considérables.
Le passage systématique à la messagerie électronique pour
les appels d'offres, outre sa transparence, permettra de raccourcir les
délais entre la prise de décision par un maître d'ouvrage
et le début des travaux. De nouveaux délais plus courts pourront
être introduits dans les divers codes (code des marchés, code des
communes, etc.). Cette simplification qui est bien dans les objectifs
gouvernementaux apporterait à la dynamique économique en France
un salutaire appui.
Les relations entre les élus et la population nécessitent
désormais disponibilité pour tous, rapidité,
interactivité. C'est un facteur d'économies dans la communication
entre électeurs et élus et un nouvel outil pour la gestion
locale. Les nouvelles technologies permettent de faciliter et d'amplifier les
contacts entre pouvoirs publics (nationaux, régionaux,
départementaux ou locaux) et administrés.
Des expérimentations ont été réalisées. La
multiplication des points d'accès à la communication
électronique est en cours. La satisfaction des usagers est
générale.
Il importe de tenir compte de l'importance et de la transparence des
logiciels utilisés en la matière.
Pour garantir la pérennité des données accessibles,
faciliter les échanges et assurer le libre accès des citoyens
à l'information, il faut que l'utilisation dans l'administration ne
dépende pas du bon vouloir des concepteurs de logiciels. Il faut des
systèmes libres dont l'évolution puisse être garantie
grâce à la disponibilité pour tous du code source
utilisé par le concepteur.
De grands pays comme l'Allemagne ont compris que cette notion de code source
ouvert et disponible était indispensable pour les relations avec les
administrés et par ailleurs nécessaire en matière
d'indépendance nationale.
Le développement des logiciels dits "libres" est à l'heure
actuelle très fort. De nombreuses grandes sociétés
informatiques reconnaissent que le coeur de leur métier n'est plus
désormais de vendre des logiciels mais d'en faciliter l'usage par des
prestations de services associés.
*
* *
Notre
proposition de loi, prévoit qu'après une période
transitoire définie par décret, l'usage par les administrations
publiques de logiciels libres sera obligatoire.
Toute utilisation de logiciels propriétaires dont le code source ne
serait pas publié pour des utilisations spécifiques par ces
services restera licite sous réserve d'une autorisation
délivrée par une agence du logiciel libre.
La présente proposition de loi répond aux préoccupations
énumérées ici.
PROPOSITION DE LOI
Article 1
er
De la dématérialisation des échanges d'informations
et de données entre les administrations publiques
Les
services de l'Etat et les établissements publics nationaux assureront,
à compter du 1
er
juillet 2003, l'échange de leurs
données et de leurs informations sur supports et réseaux
électroniques.
Les conditions du passage entre les échanges actuels sur papier et les
échanges sur supports et réseaux électroniques seront
précisées par décret.
Article 2
De la dématérialisation des procédures de marchés
publics
Afin
d'assurer une large transparence et un accès rapide à
l'information par les entreprises, les appels d'offres publics ainsi que les
documents annexes feront l'objet d'une publicité sur supports et
réseaux électroniques à compter du 1
er
janvier
2004. De même, il sera répondu aux appels d'offres publics sur
supports et réseaux électroniques.
Un décret déterminera les modalités de transition aux
procédures électroniques.
Article 3
Des technologies ouvertes
Les
services de l'Etat et les établissements publics ne peuvent utiliser
à compter du 1
er
janvier 2004, sous réserve des
dispositions de l'article 4, que des logiciels dont l'usage et la modification
sont libres et pour lesquels le code source est disponible.
Un décret fixera les conditions de transition avec la situation actuelle.
Article 4
De l'Agence du logiciel libre
Il est
créé l'Agence du logiciel libre. Elle est chargée
d'informer les services de l'Etat, les collectivités locales et
établissements publics des conditions d'application de la
présente loi. Elle détermine les licences d'utilisation de
logiciels qui rentrent dans le cadre de la présente loi.
Elle veille à l'interopérabilité des logiciels libres au
sein des administrations publiques.
Elle réalise l'inventaire, par secteurs d'activité, des manques
en matière de logiciels dont l'usage et la modification sont libres et
pour lesquels le code source est disponible. En fonction de cet inventaire,
elle autorise les administrations publiques à déroger à la
présente loi.
L'Agence du logiciel libre est ouverte aux internautes et ses décisions
devront en particulier être précédées par des
consultations sur Internet.
Un correspondant de l'Agence du logiciel libre est désigné au
sein de chaque préfecture.
Les modalités de fonctionnement de l'Agence du logiciel libre seront
établies par décret.
Article 5
De la diffusion des modifications portées aux logiciels
utilisés dans le cadre de la présente loi
L'Agence du logiciel libre veille, dans le respect des droits des auteurs, à la diffusion des modifications portées aux logiciels utilisés en application de la présente loi.
Article 6
Les dépenses pour l'Etat résultant de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.