Transport aérien, organisation de certains services
N° 7
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 7
octobre 1998
Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 octobre
1998
PROJET DE LOI
relatif à l'organisation de certains
services au
transport aérien,
PRÉSENTÉ
au nom de M. LIONEL JOSPIN
Premier ministre,
par M. JEAN-CLAUDE GAYSSOT
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
(Renvoyé à la commission des Affaires
économiques et du Plan, sous réserve de la constitution
éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions
prévues par le Règlement).
Transport aérien. - aviation civile - redevance - sécurité civile - code de l'aviation civile. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames,
Messieurs,
Le présent projet de loi a pour objet de prendre les premières
mesures portant sur l'exécution et le financement de services
aéroportuaires, rendues nécessaires à la suite d'un
arrêt du Conseil d'Etat du 20 mai 1998.
Par cet arrêt, le Conseil d'Etat a annulé les arrêtés
fixant les taux de la redevance pour services terminaux de la circulation
aérienne (RSTCA), perçue au profit du budget annexe de l'aviation
civile. Il pose le principe selon lequel le coût des services de
sécurité incendie et de sauvetage (SSIS) et de diverses
installations affectées à la gendarmerie ne peut entrer dans la
base de calcul de la RSTCA, au motif que ces services correspondent à
des missions d'intérêt général qui incombent par
nature à l'Etat, dont le coût ne peut être mis à la
charge des usagers au moyen de redevances.
Cet arrêt a une portée plus large que la seule redevance pour
services terminaux de la circulation aérienne.
D'une part, il remet également en cause la régularité des
décisions des gestionnaires d'aérodromes, qui, au même
titre que l'Etat, introduisent ces coûts, pour la part qui leur incombe,
dans l'assiette de leurs redevances. En effet, si c'est l'Etat qui
procède à l'achat des véhicules de lutte contre
l'incendie, et sur les grands aéroports, met à disposition un
technicien responsable du SSIS, les rémunérations des personnels
d'intervention et l'entretien du matériel sont à la charge des
gestionnaires. Plusieurs contentieux en cours pourraient aboutir à des
annulations de décisions de gestionnaires d'aérodromes en
matière de redevances liées à la sécurité.
D'autre part, la motivation utilisée par le Conseil d'Etat peut
s'appliquer à d'autres services d'intérêt
général dont les coûts sont inclus dans l'assiette des
redevances aéroportuaires, telles les visites de sûreté,
prises en charge par le gestionnaire, avec la participation de l'Etat, en
application de la loi du 26 février 1996 qui les a autorisés
à avoir recours à des agents privés, ainsi que la lutte
contre le péril aviaire destinée, par des techniques
d'effarouchement, à prévenir le risque d'ingestion d'oiseaux dans
les réacteurs.
Il importe par conséquent de mettre en place un financement de ce type
de dépenses, qui ne soit pas juridiquement contestable et qui produise
des ressources adaptées aux besoins du transport aérien.
A cette fin, des dispositions seront présentées dans les projets
de loi de finances rectificative pour 1998 et de loi de finances initiale pour
1999, comportant deux éléments :
- La création, au profit des gestionnaires d'aérodromes, d'une "
taxe d'aéroport ", assise sur le passager, et due par les entreprises de
transport aérien public. De façon à assurer une certaine
adéquation entre le produit de la taxe et les prestations à
financer, les aérodromes seraient répartis en 5 classes, en
fonction du trafic de passagers, chacune d'entre elles étant
dotée d'un taux minimum et maximum. A l'intérieur de ces limites
le montant de la taxe serait fixé par arrêté des ministres
compétents ;
- L'extension du fonds de péréquation du transport aérien
qui participerait ainsi, non seulement à l'équilibre des
dessertes utiles à l'aménagement du territoire, mais
également au financement des services aéroportuaires
d'intérêt général. Ce compte d'affectation
spéciale, qui prendrait la dénomination de " fonds d'intervention
pour les aéroports et le transport aérien ", prendrait en charge
les opérations de sécurité actuellement financées
par la RSTCA ainsi que, le cas échéant, une allocation
strictement réservée au gestionnaire dont la taxe
d'aéroport serait inexistante ou insuffisante par rapport au coût
du service rendu sur la plate-forme. La contribution de l'Etat fera l'objet
d'une convention particulière avec l'exploitant.
Dans ces conditions, la taxe de sécurité-sûreté, qui
alimente le budget annexe de l'aviation civile, et la taxe de
péréquation du transport aérien seraient
supprimées, et une taxe de l'aviation civile serait créée
alimentant, pour partie le budget annexe, et pour partie le fonds
d'intervention pour les aéroports et le transport aérien. La
RSTCA serait réduite à due concurrence.
Dans cette perspective, le présent projet de loi répond à
deux objets :
Le premier, qui fait l'objet de l'article premier, est de donner une assise
juridique aux services chargés de la sécurité incendie, du
sauvetage et de la lutte contre le péril aviaire, qui ne sont
explicitement prévus ni dans les cahiers des charges des concessions
actuellement en vigueur, ni dans la loi n° 96-369 du 5 mai 1996 relative
aux services d'incendie et de secours. Le projet de loi énonce par
conséquent que les titulaires du pouvoir de police exercent leurs
attributions dans le cadre de la réglementation technique définie
par l'autorité administrative et que le service
sécurité-incendie-sauvetage est confié au gestionnaire
d'aérodrome qui peut assurer directement cette mission ou la faire
assurer par un autre service public, tel le service départemental
d'incendie et de secours (SDIS) ou les services du ministère de la
défense lorsque ceux-ci sont implantés sur l'aérodrome ou
la confier à un organisme agréé par décret.
Pour Aéroports de Paris, dont les missions figurent au code de
l'aviation civile, une modification de l'article L. 251-2 est proposée.
Le second, qui fait l'objet de l'article 2, est de procéder à une
validation législative des redevances actuellement perçues par
les gestionnaires d'aérodromes, ainsi que de celles perçues par
le budget annexe de l'aviation civile.
Cette mesure de validation législative est destinée à
assurer la continuité des prestations de sécurité
aéroportuaire. En effet, la remise en cause des décisions des
exploitants fixant le taux des redevances et des arrêtés fixant
les taux de la RSTCA a de lourdes conséquences pour l'Etat et pour les
gestionnaires d'aérodromes. Ces derniers pourraient, en particulier,
renoncer à assurer des prestations de sécurité qu'ils ne
sont pas contraints d'assurer, en l'état actuel des choses. Il convient
donc, sans attenter à l'autorité de décisions de justice
passées en force de chose jugée, de consolider les titres de
perception émis au titre de la RSTCA et les décisions des
exploitants d'aérodromes.
Il convient enfin de noter que l'effet de cette mesure est limité, pour
la RSTCA, au 1er août 1998, date à laquelle un nouveau taux de
cette redevance a été appliqué, tenant compte de
l'arrêt du Conseil d'Etat. Pour les redevances aéroportuaires, il
est proposé d'en limiter les effets au 1
er
avril 1999, afin
de tenir compte du délai nécessaire à la mise en oeuvre de
la taxe d'aéroport.
PROJET DE LOI
Le Premier
ministre,
Sur le rapport du ministre de l'équipement, des transports et du
logement,
Vu l'article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi autorisant relatif à l'organisation de
certains services au transport aérien, délibéré en
Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera
présenté au Sénat par le ministre de l'équipement,
des transports et du logement, qui sera chargé d'en exposer les motifs
et d'en soutenir la discussion.
Article 1er
Le livre II
du code de l'aviation civile (première partie : législative) est
modifié ainsi qu'il suit :
I. - Il est ajouté au chapitre III du titre Ier, un article L. 213-3
ainsi rédigé :
"
Art. L. 213-3.
- Les aérodromes assurent, suivant des normes
techniques définies par l'autorité administrative, le sauvetage
et la lutte contre les incendies d'aéronefs, ainsi que la
prévention du péril aviaire. Ils participent à
l'organisation des visites de sûreté dans les conditions
prévues à l'article L. 282-8 b.
" Sous l'autorité des titulaires du pouvoir de police mentionnés
à l'article L. 213-2, l'exploitant d'aérodrome assure
l'exécution des services en cause. Il peut faire assurer celle-ci, en
vertu d'une convention, par le service départemental d'incendie et de
secours, par l'autorité militaire ou par un organisme
agréé dans les conditions fixées par décret. "
II. - Le premier alinéa de l'article L. 251-2 du code de l'aviation
civile est remplacé par les dispositions suivantes :
" Il est chargé d'aménager, d'exploiter et de développer
l'ensemble des installations de transport civil aérien ayant leur centre
dans la région Ile-de-France, ainsi que toutes installations annexes,
qui ont pour objet de faciliter l'arrivée et le départ des
aéronefs, d'assurer un service de sauvetage et de lutte contre
l'incendie des aéronefs et de prévention du péril aviaire,
de guider la navigation, de participer à l'organisation des visites de
sûreté dans les conditions prévues par l'article L. 282-8
b, d'assurer l'embarquement, le débarquement et l'acheminement à
terre des voyageurs, des marchandises et du courrier transportés par
air. "
Article 2
I. - Sont
validées, sous réserve des décisions passées en
force de chose jugée, et pour une période qui prendra fin, au
plus tard, le 1
er
avril 1999, les décisions des exploitants
d'aérodromes antérieures à la présente loi et
fixant les taux des redevances aéroportuaires en application des
dispositions des articles R. 224-1, R. 224-2, R. 224-3 du code de l'aviation
civile en tant que leur légalité serait contestée au motif
que la base de calcul comprend des dépenses en matière de
personnel, d'équipement, d'aménagement et d'entretien relatives
aux missions de sécurité-incendie-sauvetage des aéronefs,
de lutte contre le péril aviaire ainsi qu'aux visites de
sûreté prévues à l'article L. 282-8 b du code de
l'aviation civile.
II. - Sont validés, sous réserve des décisions
passées en force de chose jugée, les titres de perception
émis au titre de la redevance pour services terminaux de la circulation
aérienne prévue à l'article R. 134-4 du code de l'aviation
civile, en tant que leur régularité serait contestée par
le motif que les arrêtés du ministre chargé des transports
et du ministre chargé du budget du 21 février 1996, du 16 avril
1996, du 16 décembre 1996 modifié le 14 janvier 1997 et du 16
décembre 1997, sur le fondement desquels ils ont été pris,
intègrent dans leur base de calcul des dépenses qui ne peuvent
être financées par redevances.
Fait à Paris, le 7 octobre 1998
Signé
: Lionel JOSPIN
Par le Premier ministre :
Le ministre de l'équipement, des transports et du logement,
Signé
: Jean-Claude GAYSSOT