N° 386
SENAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 8 avril 1998
PROJET DE LOI
autorisant la ratification du protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République tchèque ,
PRÉSENTÉ
au nom de M. LIONEL JOSPIN,
Premier ministre,
par M. HUBERT VÉDRINE,
ministre des affaires étrangères.
(Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
Traités et conventions. -- République tchèque.
EXPOSE DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La France a signé le 16 décembre 1997 les protocoles au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Hongrie, de la République de Pologne et de la République tchèque.
1° L'élargissement de l'OTAN fait partie d'un processus plus général d'ouverture à l'Est des institutions européennes et euro-atlantiques, suite à la fin de la confrontation Est-Ouest en Europe et à l'effondrement du bloc soviétique. C'est ainsi que le Conseil de l'Europe, l'OTAN, l'Union européenne et l'UEO ont entamé, selon des modalités et des rythmes différents, leurs élargissements qui concourent toutefois au même objectif, celui de l'effacement des fractures issues de la guerre froide et de l'unification progressive du continent.
2° Dès le début des années quatre-vingt-dix, les pays d'Europe centrale et orientale, en pleine transition vers une économie de marché et la démocratie, ont fait de leur intégration à ces structures européennes et euro-atlantiques, et notamment à l'OTAN, la priorité de leur politique étrangère. Au-delà du souci évident de sécurité et de stabilité, cette motivation profonde traduit l'aspiration de ces pays à trouver leur place dans la communauté euro-atlantique et d'en partager les valeurs au sein des différentes structures en émanant.
Dans cette perspective, les pays candidats à l'OTAN, conscients que leur adhésion exigeait de se présenter non seulement en demandeur mais aussi en fournisseur de sécurité, ont fourni des efforts significatifs pour adapter leur outil militaire à la nouvelle donne stratégique, et surtout pour améliorer significativement leurs relations de voisinage.
3° II était donc nécessaire et souhaitable de répondre aux attentes légitimes des pays d'Europe centrale et orientale. Dès lors, les Alliés, en plus des ouvertures sur l'extérieur que constituaient le Conseil de coopération nord-atlantique (COCONA) en 1991, le Partenariat pour la paix en 1994 et le Conseil du partenariat euro-atlantique (CPEA) en 1997 - enceintes ouvertes à l'ensemble des partenaires de la zone euro-atlantique - ont lancé dès 1994 les études relatives à l'élargissement de l'OTAN.
4° Alors que l'Alliance atlantique étudiait les implications politiques, militaires et financières de l'élargissement, il est apparu clairement qu'il était essentiel de prendre également en compte les préoccupations de la Russie à l'égard de ce processus. Ainsi, l'élargissement de l'OTAN a été précédé de la signature, lors d'un Sommet des chefs d'Etat et de Gouvernement, le 27 mai 1997, à Paris, de l'Acte fondateur entre l'Alliance atlantique et la Russie.
Cet accord est historique dans la mesure où, au-delà des engagements pris par l'OTAN dans le contexte de son élargissement (les alliés y réitèrent qu'ils n'ont aucune intention, aucun projet et aucune raison de déployer des armes nucléaires ou d'établir des dépôts d'armes nucléaires sur le territoire des nouveaux membres ; ils y réaffirment également que l'OTAN remplira ses missions en veillant à assurer l'interopérabilité, l'intégration et la capacité de renforcement nécessaires plutôt qu'en recourant à un stationnement permanent supplémentaire d'importantes forces de combat et qu'en conséquence l'OTAN devra compter sur une infrastructure à la mesure de ses missions), il jette les bases d'un véritable partenariat de sécurité entre les deux anciens adversaires, en mettant en place des structures de coopération et de concertation, en particulier le Conseil permanent conjoint OTAN-Russie.
5° Lors du Sommet de Madrid, qui a vu le lancement effectif de l'élargissement avec l'invitation adressée à la Hongrie, la Pologne et la République tchèque, les discussions ont porté sur trois points :
- l'invitation des premiers candidats à entamer les
négociations
d'adhésion.
Les candidatures de la Pologne, de la Hongrie et de la République tchèque ont été soutenues par l'ensemble des Alliés. Une majorité d'alliés, dont la France, souhaitaient toutefois que ce premier élargissement comprenne également la Roumanie et la Slovénie, en raison de leurs mérites propres mais aussi pour des raisons tant politiques (éviter une nouvelle fracture Nord-Sud en Europe en prenant en compte les pays du Sud de notre continent) que stratégiques (renforcer le flanc sud de l'Alliance ; stabiliser les Balkans). Un consensus sur une première vague de cinq pays n'a pas été possible à Madrid, un compromis se dégageant sur un réexamen de la question en avril 1999, lors du prochain sommet de l'Alliance à Washington et, sur la prise en considération, à cette occasion, « des développements positifs intervenus dans le sens de la démocratie et de la primauté du droit intervenus dans un certain nombre de pays d'Europe du Sud-Est, en particulier la Roumanie et la Slovénie » ;
- la notion de « porte ouverte » de l'Alliance ;
L'Alliance a clairement affirmé qu'elle resterait ouverte à de nouveaux membres, conformément à l'article 10 .du Traité de l'Atlantique Nord. Cela signifie que, comme le souhaitait la France, l'élargissement est conçu comme un processus progressif et global auquel tous les candidats européens ont bien vocation à terme à prendre part, indépendamment de leur situation géographique ;
- les aspects financiers.
Les chefs d'Etat et de Gouvernement ont exprimé à Madrid leur certitude que, compte tenu de l'environnement de sécurité de l'Europe d'aujourd'hui, les coûts de l'élargissement seraient raisonnables. Les travaux menés dans le cadre de la négociation des protocoles d'adhésion des trois futurs membres ont confirmé cette analyse en établissant que le coût total de l'élargissement à la charge des Alliés serait marginal, de l'ordre de 1,5 milliard de dollars sur dix ans, et que ces coûts collectifs seraient pour l'essentiel gérables dans le cadre des budgets existants.
6° Les négociations d'adhésion avec la Pologne, la République tchèque et la Hongrie se sont déroulées rapidement et de façon satisfaisante. Les trois candidats ont ainsi adressé début novembre à l'Alliance atlantique des lettres confirmant leur souhait de rejoindre l'OTAN. Ils y déclarent partager les objectifs et les valeurs de l'Alliance, prennent l'engagement d'accepter son acquis juridique et politique, de participer pleinement à ses activités politiques et militaires, de ne pas bloquer de futurs élargissements et de contribuer, selon une clé de répartition définie, aux dépenses communes.
Dès lors, les protocoles d'adhésion proprement dits, signés par les ministres des affaires étrangères de l'Alliance, le 16 décembre 1997, à Bruxelles, en présence de leurs homologues des trois futurs Etats membres se présentent sous la forme de trois textes courts, distincts mais identiques.
Sous réserve de la ratification de ces protocoles par les seize alliés, la Hongrie, la Pologne et la République tchèque devraient être invitées à rejoindre effectivement l'Alliance atlantique d'ici le Sommet de Washington, en avril 1999.
Telles sont les principales observations qu'appellent les protocoles au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Hongrie, de la République de Pologne et de la République tchèque, qui sont soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.
PROJET DE LOI
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,
Vu l'article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi autorisant la ratification du protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République tchèque, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.
Article unique
Est autorisée la ratification du protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République tchèque, signé à Bruxelles le 16 décembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Fait à Paris, le 8 avril 1998.
Signé : LIONEL JOSPIN
Par le Premier ministre : Le ministre des affaires étrangères, Signé: HUBERT VÉDRINE
PROTOCOLE
au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République tchèque
Les Parties au Traité de l'Atlantique Nord, signé le 4 avril 1949 à Washington,
Assurées que l'accession de la République tchèque au Traité de l'Atlantique Nord permettra d'augmenter la sécurité de la région de l'Atlantique Nord,
conviennent ce qui suit :
Article 1er
Dès l'entrée en vigueur de ce Protocole, le secrétaire général de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord enverra, au nom de toutes les Parties, au Gouvernement de la République tchèque une invitation à adhérer au Traité de l'Atlantique Nord. Conformément à l'article 10 du Traité, la République tchèque deviendra Partie à ce Traité à la date du dépôt de son instrument d'accession auprès du Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique.
Article 2
Le présent Protocole entrera en vigueur lorsque toutes les Parties au Traité de l'Atlantique Nord auront notifié leur approbation au Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique. Le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique informera toutes les Parties au Traité de l'Atlantique Nord de la date de réception de chacune de ces notifications et de la date d'entrée en vigueur du présent Protocole.
Article 3
Le présent Protocole, dont les textes en français et anglais font également foi, sera déposé dans les archives du Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique. Des copies certifiées conformes seront transmises par celui-ci aux Gouvernements à toutes les autres Parties au Traité de l'Atlantique Nord.
En foi de quoi, les plénipotentiaires désignés ci-dessous ont signé le présent Protocole.
Signé à Bruxelles le 16 décembre 1997.