EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Établi en mai 1979, le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) a été créé, comme stipulé dans la constitution iranienne, en tant qu'« armée idéologique » chargée de servir l'idéologie islamiste chiite de la révolution islamique à la fois à l'intérieur et à l'extérieur du pays.

Contrairement à l'armée iranienne régulière (dite « Artesh »), dont l'objectif principal est de protéger l'intégrité territoriale de l'Iran, la mission principale du CGRI est de protéger et de faire avancer les intérêts du système théocratique islamiste chiite de la velayat-e faqih en Iran. Pour cette raison, le CGRI est pratiquement indissociable de l'establishment clérical iranien. Le Guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, est le commandant en chef des forces armées de la République islamique, y compris du CGRI. En créant une structure militaire duale, avec une force prêtant allégeance à la révolution plutôt qu'à la nation, le guide suprême de la République islamique, l'ayatollah Ruhollah Khomeini, a cherché non seulement à « éviter les coups d'État » au sein de l'armée, mais aussi à créer une force loyale capable de neutraliser les menaces à la révolution. L'organisation interne du CGRI tourne autour de la réalisation de sa mission idéologique.

Depuis 1979, les forces du CGRI ont été déployées contre des vagues de protestation en 1993, 1999, 2003, 2009, 2017 et, plus récemment, en novembre 2019 et depuis septembre 2022 contre le mouvement révolutionnaire en cours.

Au cours des quarante-cinq dernières années, le CGRI a été à l'origine de la planification et de la mise en oeuvre d'attentats terroristes, de prises d'otages, d'actes de piraterie maritime, d'assassinats politiques, de violations des droits de l'Homme et de répressions des voix dissidentes en Iran. Ce dernier a eu recours, récemment encore, à d'extrêmes violences qui ont été commises particulièrement contre des manifestants pacifistes. En novembre 2019, le CGRI a tué 1 500 personnes en moins de deux semaines. Depuis l'assassinat de Mahsa Jina Amini, en septembre 2022, et les manifestations révolutionnaires nées à travers tout le pays, plus de 500 personnes ont été tuées, dont 70 enfants, et plus de 19 000 personnes ont été arrêtées, torturées et/ou violées.

Le CGRI crée, arme, forme et finance certaines des organisations terroristes islamistes les plus meurtrières au monde. Le CGRI est ainsi à l'origine du Hezbollah libanais qui, par la suite, a été créé pour détruire Israël et exporter la révolution islamique d'Iran au Liban. De plus, celui-ci a armé l'Asa'ib Ahl al-Haq d'Irak, et lui a ordonné de mener plus de 6 000 attaques contre les forces américaines et britanniques en Irak entre 2003 et 2011. Mais les liens du CGRI avec le terrorisme ne se limitent pas aux extrémistes chiites. Le CGRI a également soutenu des extrémistes sunnites tels que le Hamas et le Jihad islamique palestinien, tout en entretenant des liens avec Al-Qaïda et les Talibans. Le CGRI est ainsi devenu un « franchiseur » pour tous groupes militants qui embrassent son idéologie islamiste et expansionniste.

Principal soutien du Hezbollah libanais pour lequel il fournit des armes, des formations et des financements, aux fins de maintenir la présence hostile du Hezbollah contre Israël et son emprise sur la société libanaise, le CGRI fournit également une assistance opérationnelle clé qui a entraîné des attaques contre des civils en Argentine, en Bulgarie et en Thaïlande. En outre, le CGRI a entraîné environ 200 000 combattants au Moyen-Orient (au Liban, en Syrie, en Irak, au Yémen, au Pakistan et en Afghanistan).

Étant à la tête de sociétés publiques, paraétatiques et stratégiques, le CGRI contrôle l'économie iranienne et utilise son pouvoir économique pour nourrir la répression à l'intérieur du pays et le terrorisme au-delà des frontières iraniennes. Ses ressources contribuent également au financement d'organisations terroristes, comme l'ont documenté les institutions européennes.

Le CGRI détient 40 à 70 % du PIB brut du pays (les estimations varient en fonction de la prise en compte des entreprises publiques ou des entreprises du secteur privé contrôlées par le CGRI).

Cela lui permet d'investir des sommes importantes dans le but d'atteindre ses objectifs géopolitiques et idéologiques dans la région. À titre d'exemple, l'Iran a dépensé plus de 30 milliards de dollars depuis 2011 en Syrie uniquement pour soutenir le régime de Bachar al-Assad.

Depuis les sanctions américaines et européennes, le pouvoir et le contrôle du CGRI sur l'économie iranienne ont été renforcés. En effet, les sanctions ont créé une position monopolistique unique pour le CGRI, seule entité à être suffisamment puissante pour maintenir ses interactions avec les entreprises occidentales grâce à un réseau d'intermédiaires.

Il est donc urgent que le CGRI et toutes les entités, personnes physiques directement ou indirectement liées à cette organisation, soient inclus sur la liste des entités soumises à des mesures restrictives spécifiques dans la lutte contre le terrorisme sur la base du règlement (CE) n° 2580/2001 du Conseil du 27 décembre 2001.

S'agissant de la demande de classement du CGRI sur la liste des organisations terroristes, objet de cette résolution, il convient de relever les éléments suivants :

- Le 15 avril 2019, le gouvernement américain a officiellement classé le CGRI comme étant une organisation terroriste étrangère. Cette mesure sans précédent a placé le CGRI, force militaire idéologique du régime iranien, sur une liste aux côtés d'acteurs non-étatiques tels qu'al-Qaïda, le Hezbollah, le Hamas ou l'État islamique ;

- Le 19 juin 2024, le Canada a pris la décision d'inscrire le CGRI sur la liste des entités terroristes ;

- Le Royaume-Uni travaille sur une mesure similaire ;

- Le Parlement européen a voté, à une large majorité, le 19 janvier 2023, une résolution demandant aux institutions européennes de classer le CGRI comme organisation terroriste ;

- Les Iraniens à l'intérieur et à l'extérieur de l'Iran souhaitent que le CGRI soit classé comme groupe terroriste ;

- Le CGRI alimente les groupes militaires chiites et sunnites au Moyen-Orient afin de réaliser ses ambitions hégémoniques dans la région ;

- Le CGRI apporte son soutien militaire à la Russie dans la guerre contre l'Ukraine ;

- Hossein Salami, commandant du CGRI, a reconnu la responsabilité de cette organisation dans les menaces terroristes proférées à l'encontre des journalistes iraniens et des chaînes télévisées d'opposition basées au Royaume-Uni ;

- Les juristes estiment que toutes les conditions sont d'ores et déjà réunies pour que le CGRI soit classé comme organisation terroriste.

L'inscription du Corps des gardiens de la révolution islamique et de toutes ses ramifications en tant que groupes impliqués dans des actes terroristes est la seule mesure capable de neutraliser efficacement l'organisation derrière la répression en cours en Iran.

Bien que les sanctions de « droit ordinaire » existantes touchent déjà les individus et quelques rares entités liées au CGRI, leur portée est trop limitée : les acteurs principaux ne sont pas ciblés ; dans tous les cas, ces mesures sont insuffisantes dans la mesure où elles interdisent seulement à leurs destinataires de se déplacer en Europe, tout en gelant leurs actifs.

La reconnaissance de la nature terroriste du CGRI est pertinente et politiquement nécessaire compte tenu de son implication en tant que responsable de la déstabilisation géopolitique dans la région et dans le monde. Depuis l'arrivée au pouvoir du régime iranien en 1979, le CGRI a mené des complots terroristes, des assassinats et des attaques dans plus de 20 pays dans le monde, principalement par le biais de la force Qods et du ministère du renseignement et de la sécurité (MOIS), mais également via le Hezbollah libanais. Après une brève accalmie dans les années 1990 et au début des années 2000, le CGRI a depuis intensifié son implication active dans la planification et le financement d'attaques terroristes dans le monde entier.

Cette inscription comme organisation terroriste contribuerait au respect des droits de l'homme et à la sécurité en Iran mais également en dehors de ses frontières.

Elle correspond au souhait de la majorité des Iraniens de l'intérieur et de l'extérieur de l'Iran.

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