EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En préambule il convient de rappeler le rôle prépondérant que jouent, à l'instar des haies, les zones humides tout à la fois en matière agricole, environnementale et paysagère. Elles assurent en effet, par leur multifonctionnalité, de nombreux services écosystémiques : habitat naturel d'espèces animales et végétales, corridor écologique, stockage de carbone, auxiliaire de cultures, affouragement, production de biomasse et élément paysager structurant des milieux ruraux, urbains ou périurbains.

À l'origine, le 1° de l'article L. 211-1 du code de l'environnement définissait ainsi les zones humides : « on entend par zone humide des terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ». Le « ; » étant alors interprété comme un « et », interprétation qui fut stabilisée par l'arrêt du Conseil d'État du 22 février 2017. La définition ainsi entendue rendait donc cumulatifs les critères pédologique et botanique permettant de définir une zone humide.

Or, la loi du 24 juillet 2019, portant création de l'Office français de la biodiversité, a rendu ces critères alternatifs via son article 23 qui remplace les mots : « temporaire ; la végétation » par les mots : « temporaire, ou dont la végétation ».

Des critères alternatifs qui engendrent plusieurs problèmes sur le terrain :

- en retenant exclusivement le critère pédologique sans aucune présence de végétation, les bureaux d'études et administrations engendrent de manière abusive des qualifications en « zones humides » (certes légales d'un point de vue du droit mais absurdes du point de vue agricole et complexes sur le plan opérationnel, avec une compensation environnementale obligatoire pour toute construction agricole). Le dosage d'oxydes de fer dans le sol, surtout en surface, est accentué par les labours depuis 50 ans des agriculteurs et est parfaitement artificiel ;

- en remettant en cause de nombreux projets d'aménagements des collectivités et les faisant basculer dans le champ de l'autorisation environnementale alors qu'ils étaient uniquement soumis - avant l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2019 - à déclaration ;

- en rendant des documents d'urbanisme - faits sur la base de la décision du Conseil d'État de 2017 - obsolètes car comportant des inventaires de zones humides qui ne répondent plus aux critères de la nouvelle législation ;

- en plaçant la France hors de toute proportion pour la cartographie des zones humides qu'elle doit rendre à la Commission européenne d'ici la fin de l'année 2024 : les premières estimations annonçant 27 % du territoire national qualifié en zone humide là où les autres pays européens ont rendu des copies entre 0,8 et 3,5 % de leurs territoires respectifs...

Aussi, il apparaît nécessaire de revenir au caractère cumulatif des critères pédologique et floristique permettant de qualifier les zones humides. Tel est l'objet de l'article unique de cette proposition de loi.

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