EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les élections des 30 juin et 7 juillet 2024 ont créé une situation politique et institutionnelle inédite.
À cette occasion, des failles juridiques sont apparues, y compris au coeur même de la Constitution de notre pays.
Le Président de la République utilise l'incertitude des textes pour tenter d'imposer l'impensable, maintenir en place pour une durée indéterminée un Gouvernement issu d'une majorité largement défaite lors du scrutin législatif plutôt que de nommer au poste de Premier ministre une personnalité issue de la force la plus importante aujourd'hui à l'Assemblée nationale.
M. Macron a, dans un premier temps, refusé la démission présentée le 8 juillet par M. Attal, Premier ministre, pour l'accepter le mardi 16 juillet.
Le caractère démissionnaire du Gouvernement lui confère cependant d'importantes prérogatives, édicter des décrets, par exemple, maintenir l'ordre public jusqu'à pouvoir décréter l'état d'urgence.
Or, malgré ces compétences étendues, le Gouvernement démissionnaire n'est plus contrôlé par le Parlement. Impossible pour l'Assemblée nationale, par exemple, de voter une motion de censure, car on ne démissionne pas un Gouvernement déjà démissionné.
On l'aura compris, cette situation ne peut perdurer au-delà de quelques heures ou quelques jours, au risque de mettre gravement en cause les prérogatives parlementaires, éléments incontournables de la démocratie.
Il est donc nécessaire de prévoir explicitement le caractère très provisoire de l'exercice des responsabilités par un Gouvernement démissionnaire.
C'est l'objet de l'article 1er du présent texte.
Une seconde question est rapidement apparue : le cumul de fonction des ministres démissionnaires-députés.
Alors que la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen pose clairement en son article 16 le principe de la séparation des pouvoirs, acte fondamental de la Révolution française et de la République, « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution », alors que l'article 23 de la Constitution de 1958 reprend sans ambiguïté ce principe dans son premier alinéa : « Les fonctions de membre du Gouvernement sont incompatibles avec l'exercice de tout mandat parlementaire », des ministres ont pu participer aux scrutins renouvelant les instances de l'Assemblée nationale, à commencer par celui consacré à l'élection de sa Présidence.
Des précédents, non validés par le Conseil constitutionnel qui s'est déclaré incompétent en la matière, des querelles d'interprétation des textes d'application ne peuvent, selon les auteurs de la présente proposition de loi, affaiblir la portée de principes républicains fondateurs comme celui de la séparation incontestable entre pouvoirs exécutif et législatif.
Il apparaît donc nécessaire de préciser la Constitution elle-même, pour échapper aux interprétations qui mettent en péril l'équilibre même de nos institutions.
C'est l'objet de l'article 2 du présent texte.