EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La culture, sous de multiples formes et dans des circonstances très diverses, interagit avec les dimensions sociales, économiques et environnementales de la civilisation.

Aujourd'hui plus qu'hier, à l'heure des grandes transformations sociétales et environnementales, la culture doit prendre une place essentielle dans le développement durable de nos sociétés et les évolutions du monde qui en résultent.

« Terreau du vivre ensemble », la culture autorise l'expression libre de différentes visions du monde, leur confrontation et elle ajoute une dimension émotionnelle et esthétique à la définition des Lumières fondée avant tout sur la rationalité.

Dans ce cadre problématique général, l'expression des droits culturels est garantie dans l'espace public. Plus fondamentalement encore, elle lui est consubstantielle (art 103 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 dite loi NOTRe).

La culture a d'ailleurs naturellement investi l'espace public, sous une forme à la fois institutionnelle (multiplication des signes politiques par les statues et frontons) ou plus informelle ou spontanée, comme en témoignent historiquement les fêtes et les carnavals, et plus récemment les arts de la rue sous diverses formes (source CHEC 2023-2024).

La création ou l'aménagement de l'espace public revêt donc un enjeu culturel important que la présente PPL entend par ses propositions mieux faire prendre en compte dans les politiques publiques actuellement en vigueur.

À cet égard, l'idée centrale de cette proposition est de donner aux acteurs culturels et artistiques intéressés par l'aménagement de l'espace public la possibilité de s'exprimer dès la concertation des projets jusqu'à leur livraison et par la suite dans la vie « socio-culturelle » des espaces eux-mêmes.

L'ambition de ce texte est de contribuer à la légitimation de la présence des acteurs culturels et artistiques dans les instances de dialogue, de concertation et de conception afférentes aux projets d'aménagement et de construction.

À cette fin, il est proposé d'instituer une « clause culture » facilitant la mobilisation des acteurs culturels et artistiques dans l'élaboration et la réalisation des projets d'aménagement et de construction de l'espace public.

Pour ces raisons, cette proposition de loi est composée de cinq articles permettant l'écoute et l'expression des acteurs culturels et artistiques en faveur des projets d'urbanisme et d'aménagement.

L'article 1er permet de valoriser la dimension culturelle des projets d'aménagement soumis aux CAUE. Pour ce faire, une mission de conseil et de prise en compte de la dimension culturelle des projets leur est attribuée en complément des missions initiales qui leur ont été dévolues par la loi de 1977 qui les a créés.

En conséquence, le pouvoir réglementaire serait invité à prendre en compte cet ajout dans les statuts types des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement aujourd'hui mentionnés au titre II de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture. Dans ce cadre, l'État pourra contribuer le cas échéant à la prise en compte de la dimension culturelle des opérations d'aménagement de l'espace public.

Dans un esprit similaire à l'article 1er, l'article 2 propose d'ajouter aux prérogatives dévolues à l'agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) une possibilité de conseil aux collectivités souhaitant une valorisation culturelle et artistique de l'aménagement de l'espace public.

L'article 3 associe formellement les acteurs culturels et artistiques aux processus de concertation des projets d'aménagement et de planification.

L'article 4 institue une « clause culture » dans les marchés publics afin d'accompagner les maîtres d'ouvrage publics dans la mise en oeuvre et la réalisation d'un volet culturel inhérent à leurs opérations d'aménagement.

Enfin, l'article 5 rappelle la nécessité de la publication, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, du rapport prévu par l'article 6 de la loi LCAP n° 2016-925 du 7 juillet 2016. En fait, un rapport à ce sujet a déjà été remis au Gouvernement mais il n'a pas été rendu public à ce jour. Ce rapport évalue l'opportunité de mettre en place un dispositif permettant à l'État, aux collectivités territoriales et à leurs groupements de consacrer 1 % du coût des opérations de travaux publics au soutien à des projets artistiques ou culturels dans l'espace public.

L'esprit de ce dispositif, tel que présenté notamment par la « Fédération nationale des arts de la rue » est le suivant :

Extrait :

« Le « 1 % culturel » permet d'impliquer les créateurs et aménageurs d'espaces publics - collectivités territoriales, élus et techniciens, aménageurs, urbanistes, architectes, promoteurs et entrepreneurs de BTP,..... - et de les inciter à s'approprier une démarche artistique portée par une réflexion active sur les espaces à vivre qu'ils modifient, créent ou aménagent. 

Les crédits dégagés pourraient soutenir et essaimer de multiples propositions et manifestations artistiques et culturelles dans les espaces publics et la vie quotidienne de leurs usagers, sans restriction de forme, de discipline, de temporalité ou de pérennisation de l'oeuvre pour le plus grand bonheur de l'expérimentation et de la vitalité artistique et culturelle de chacun, participant ainsi pleinement à la construction d'un meilleur vivre ensemble.

Le dispositif, basé sur le volontariat, associe l'ensemble des acteurs de la ville dans la réalisation d'un projet commun - construire la ville ensemble. Il s'agit de porter la culture comme une valeur et non comme une contrainte supplémentaire. Il peut être l'occasion de mettre en oeuvre une nouvelle politique culturelle en faveur du plus grand nombre, en faisant vivre artistiquement ce bien commun riche d'échange et de lien social qu'est l'espace public, idéal pour développer l'émancipation collective démocratique de chacun.

Projets concernés : Les budgets de création ou rénovation de l'espace public, budgets de travaux de voirie, de réseaux souterrains (VRD), d'opérations d'urbanisme et d'aménagements urbains (ZAC, QPV, ZI, ZAE,...), de transports, etc., à l'exclusion des bâtiments publics déjà concernés par le 1 % « Artistique ».

Pour quels projets artistiques ? Toutes les formes d'expressions ou d'actions artistiques dans l'espace public, pérennes ou éphémères. ... »

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