EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Notre pays bénéficie d'un enseignement scolaire d'excellence, fruit de notre tradition scientifique et littéraire.

Néanmoins, plusieurs études, tant nationales qu'internationales, atteste d'une baisse générale du niveau scolaire des élèves français depuis plusieurs dizaines d'années.

Selon le rapport « L'Europe de l'éducation en chiffres » de la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP), sous l'autorité du Ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, environ 21 % des élèves âgés de 15 ans n'ont pas un niveau suffisant de compétences en compréhension de l'écrit, de la culture mathématique et de la culture scientifique en France.

Le niveau moyen de compétences en mathématiques est en baisse régulière depuis près de 40 ans, comme indiqué dans le rapport portant sur la « Place des mathématiques dans la voie générale du lycée » commandé par le ministre Jean-Michel Blanquer et remis le 21 mars 2022.

Pourtant, dans son étude publiée en décembre 2021, « Une école plus efficacement organisée au service des élèves », la Cour des comptes constate que la France dépense plus pour l'éducation que la moyenne des pays membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

La compilation des classements PISA (programme international pour le suivi des acquis des élèves) confirme cette dégradation continue du niveau moyen de compétences en mathématiques en France.

Ces enquêtes internationales indiquent par ailleurs que :

- 15 % des élèves français testés atteignaient le niveau dit « avancé » en mathématiques en 1995, contre 1 % en 2015.

- 64 % des élèves français atteignaient au moins le niveau dit « élevé » en 1995, contre 11 % en 2015.

- 43 % des élèves français de terminale S atteignaient le niveau dit « intermédiaire » en 2015.

Les causes de ce déclassement sont complexes, et les solutions globales relèvent évidemment des experts de l'Éducation nationale.

Mais certaines mesures à l'expérimentation dans plusieurs pays, comme l'apprentissage du jeu d'échecs, tendent à faire leurs preuves pour lutter contre ce phénomène.

En effet, des études menées par les professeurs experts en sciences de l'éducation Arthur Costa et Bena Kallick ont démontré que la pratique de ce jeu pouvait être un outil éducatif efficace, capable d'améliorer non seulement les compétences mathématiques, mais aussi d'autres compétences scolaires telles que l'apprentissage de la lecture et de la culture générale, ainsi que les capacités cognitives générales comme la concentration, la mémoire et la capacité de résolution de problèmes (« Habitudes cognitives », Arthur Costa et Bena Kallick, 2009).

Dans le monde, plusieurs pays ont déjà intégré le jeu d'échecs au sein de leur enseignement scolaire. La république russe de Kalmoukie fut la première à imposer le jeu d'échecs comme matière obligatoire en 1996, puis ce fut au tour de l'Arménie en 2011, du Mexique en 2014, suivis de la Chine, de l'Inde, et de l'Allemagne.

Les premiers résultats sont très positifs. Chez notre voisin européen allemand, le niveau moyen des élèves en mathématiques a augmenté de 30 % après avoir intégré une heure d'échecs par semaine au programme scolaire.

Le jeu d'échecs mobilise logique, stratégie, rigueur et capacité d'abstraction, tout en facilitant, de façon indirecte, l'apprentissage de la citoyenneté par le respect des règles et d'autrui.

En France, le gouvernement a permis l'introduction du jeu d'échecs à l'école via « Class'Échecs », un programme pluriannuel porté par la Fédération française d'échecs (FFE) ayant pour objectif d'initier près de 250 000 enfants par des professeurs volontaires (circulaire n° 2012-011 du 12 janvier 2012).

Cette proposition de loi a pour objectif de soutenir l'enseignement du jeu d'échecs à l'école primaire, dans la continuité du programme « Class'Échecs », avec le soutien de clubs d'échecs locaux affiliés à la Fédération Française des Échecs (FFE), dans la limite de leurs moyens. Cet enseignement serait donc dispensé par des enseignants volontaires sur le temps scolaire.

Par ailleurs, les enseignants ont accès depuis la rentrée 2022 à des autoformations au jeu d'échecs sur la plateforme « M@gistère ». En complément des contenus à la demande, des conférences interactives à distance, ainsi qu'un support par forum ou par courrier électronique, peuvent être proposés tout au long de l'année.

Le soutien de la FFE permettrait une mise en relation efficace avec un club d'échec local référent qui serait à même de proposer, dans la limite de ses moyens, l'intervention d'un animateur disposant des connaissances et des qualités pédagogiques nécessaires à la transmission de ce savoir.

Le jeu d'échecs est une activité à la fois intellectuelle, ludique et sportive, qui permet de développer des capacités cognitives telles que nommées précédemment, mais qui possède également une fonction éducative et sociale, puisqu'il porte les valeurs de l'égalité des chances.

Appris dès le plus jeune âge, il contribue à la construction de la personnalité en encourageant l'attention, l'imagination, l'audace, l'initiative, l'anticipation, le jugement, la concentration, la mémorisation et la confiance en soi...

Pour toutes ces raisons, cette proposition de loi vise ainsi à intégrer l'enseignement du jeu d'échecs à l'école primaire.