EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L'épidémie de Covid-19 va entraîner de très lourdes contraintes sur les juridictions pénales, les établissements pénitentiaires, les détenus, les services chargés des extractions judiciaires et les unités en charge des escortes de détenus et de police d'audience.

En cas d'expansion majeure du virus au sein de ces personnels et de la population carcérale, les extractions judiciaires vont être matériellement rendues quasi impossibles en l'état des moyens de notre justice, outre le danger de propagation que représentent ces mouvements quotidiens alors qu'il convient de confiner les populations autant que faire se peut.

Certes la loi prévoit le recours à la visioconférence pour ces audiences mais les détenus peuvent refuser le recours à cette modalité. Même si le juge peut passer outre ce refus et considérer qu'une extraction judiciaire du détenu pourrait notamment porter atteinte à l'ordre public sanitaire dans le cadre d'une épidémie globale, il reste aujourd'hui que nos juridictions et nos établissements pénitentiaires ne disposent pas des matériels de visioconférence en nombre suffisant pour utiliser de manière généralisée les dispositions prévues par l'article 706-71 du code de procédure pénale. Le temps pourrait manquer pour augmenter massivement les capacités opérationnelles de visioconférence des tribunaux et des établissements pénitentiaires.

La situation pourrait être encore plus tendue si une part significative des magistrats de l'ordre judiciaire ou des escortes venait à être atteinte et dès lors en arrêt de travail.

Nous ne pouvons pas prendre le risque que des détenus particulièrement dangereux, notamment les personnes mises en examen pour faits de terrorisme, soient remis en liberté en cas d'incapacité des services d'assurer les extractions judiciaires et les escortes du fait de l'épidémie en cours.

Il est donc proposé d'adopter en urgence une disposition législative exceptionnelle qui autorise la tenue généralisée des débats de prolongation de détention provisoire en l'absence de la personne détenue lorsqu'une crise sanitaire majeure comme celle que nous connaissons aujourd'hui est constatée par décret en conseil des ministres.

Les droits de la défense y seraient pleinement garantis par la présence de l'avocat de la personne.

Les magistrats du siège auraient évidemment toute latitude pour organiser les débats contradictoires classiquement en présence de la personne détenue si les moyens matériels et humains le leur permettent.

On rappellera que c'est une procédure classique lorsque qu'un tel débat se déroule devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel, sauf demande expresse de comparution personnelle du détenu devant la cour.

Il est proposé de fixer la durée de cette dérogation très exceptionnelle à quinze jours renouvelables dans les formes initiales, tant que dure la crise sanitaire.

C'est une mesure de bon sens qu'il conviendrait d'appliquer dans les plus brefs délais.

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