EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 18 mai 2023, lors de l'Assemblée annuelle de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) qui s'est tenue à Samarcande (Ouzbékistan) du 16 au 18 mai 2023, les Gouverneurs de la Banque ont adopté la résolution n° 259 modifiant l'article 1er de l'accord portant création de la BERD, signé à Paris le 29 mai 1990. Cet amendement permet à la Banque d'élargir de façon limitée et progressive son champ d'opération à l'Afrique subsaharienne et à l'Irak.

L'adoption de la résolution n° 259 (1(*)) par le conseil des Gouverneurs fait suite à la résolution n° 248 (2(*)) adoptée le 11 mai 2022, donnant mandat au Conseil d'administration pour formuler une proposition d'amendement de l'article 1er de l'accord portant création de la Banque.

L'élargissement du champ géographique d'opérations de la Banque fait suite à plusieurs années d'échanges et de travaux préparatoires. Ces derniers ont été lancés en reconnaissance de l'évolution des priorités de développement et géopolitiques de la communauté internationale, ainsi que des liens croissants entre certains pays d'Afrique subsaharienne et l'Irak et les pays d'opérations de la Banque. Cet élargissement s'inscrit dans un contexte où l'économie mondiale, encore marquée par les effets de la pandémie de covid-19, doit aussi faire face aux conséquences de la guerre d'agression de la Russie contre l'Ukraine, à l'origine de perturbations des chaînes de valeurs mondiales et d'une accélération de l'inflation qui ont durement touché l'Afrique. L'amendement adopté ne marquera toutefois pas un infléchissement des priorités géographiques de la Banque, dont la plus urgente reste le soutien à l'Ukraine et aux pays d'opérations affectés par la guerre, comme le rappelle la résolution n° 259.

Dans sa version actuelle, l'article 1er de l'accord dispose que l'objet de la BERD est de contribuer « au progrès et à la reconstruction économiques des pays d'Europe centrale et orientale [ainsi qu'en] Mongolie et dans les pays membres de la partie méridionale et orientale du Bassin méditerranéen ». L'extension du champ géographique potentiel des activités de la Banque à l'Afrique subsaharienne exige dès lors d'amender l'article, comme ce fut le cas en 2006 pour la Mongolie et en 2012 pour « les pays membres de la partie méridionale et orientale du Bassin méditerranéen » (3(*)).

L'amendement adopté élargit le champ géographique d'intervention de la Banque en y incluant « un nombre limité de pays membres d'Afrique subsaharienne », étant entendu que le terme « Afrique subsaharienne » désigne la région de l'Afrique subsaharienne telle que définie par le Groupe de la banque mondiale (4(*)).

L'inclusion de l'Irak dans le champ d'intervention de la Banque, telle que prévue dans la résolution n° 259, ne nécessite quant à elle pas de modification du texte de l'article 1er dans la mesure où le terme « partie méridionale et orientale du Bassin méditerranéen » s'entendra désormais des pays qui donnent sur la Méditerranée, ainsi que la Jordanie et l'Irak.

Le caractère limité et progressif de l'extension du champ d'opération de la Banque à l'Afrique subsaharienne et à l'Irak sera assuré par les mesures et mécanismes recommandés dans le rapport du conseil d'administration « Modification de l'article 1er de l'Accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement afin de permettre l'élargissement limité et progressif du champ d'action géographique de la Banque à l'Afrique subsaharienne et à l'Irak (5(*)) » présenté au conseil des Gouverneurs à l'occasion de l'Assemblée annuelle de la Banque à Samarcande (16 au 18 mai 2023). Ledit rapport propose d'accepter comme nouveaux pays bénéficiaires, en plus de l'Irak, au maximum six pays d'Afrique subsaharienne d'ici 2030, et de n'engager aucun investissement au bénéfice de ces derniers avant 2025.

Six pays d'Afrique subsaharienne ont été pré-identifiés comme candidats possibles par la Banque, sur la base de leur conformité avec les critères suivants : (i) « être jugé, sur la base d'une analyse préliminaire, comme étant attaché aux principes de la démocratie multipartite, du pluralisme et de l'économie de marché, tels qu'énoncés à l'article 1er, et les appliquer » ; (ii) « avoir un rapport et des liens particuliers avec les pays d'opérations actuels de la Banque » et (iii) « présenter une situation économique et politique propice au déploiement du mandat et du modèle opérationnel de la BERD ». Ces six pays sont le Bénin, la Côte d'Ivoire, le Ghana, le Kenya, le Nigéria et le Sénégal. Aucune demande de statut de pays bénéficiaire émanant d'un autre pays d'Afrique subsaharienne ne sera prise en compte jusqu'à 2025. A partir de 2026, de nouvelles demandes pourront être soumises au Conseil des Gouverneurs, sous réserve que moins de six pays subsahariens soient devenus pays d'opération. Dans ce contexte, toute extension supplémentaire nécessitera un vote affirmatif d'au moins trois quarts du nombre de Gouverneurs, représentant au moins les quatre cinquièmes du nombre total des voix attribuées aux Membres.

L'entrée en vigueur de cet amendement, adopté par les Gouverneurs le 18 mai 2023, nécessitera une acceptation d'au moins trois quarts des 74 membres actionnaires de la BERD représentant quatre cinquième des droits de vote.

Telles sont les principales observations qu'appelle l'amendement à l'article 1er de l'Accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement.

* (1) Résolution n°259 « modification de l'article 1er de l'accord portant création de la banque européenne pour la reconstruction et le développement afin de permettre l'élargissement limité et progressif du champ d'action géographique de la banque à l'Afrique subsaharienne et à l'Irak », 11 mai 2022.

* (2) Résolution n°248 « Vers un élargissement limité et progressif du champ d'action géographique de la BERD à l'Afrique subsaharienne et à l'Irak », 11 mai 2022.

* (3) Les amendements autorisant ces deux extensions successives ont chacun fait l'objet d'une procédure d'autorisation parlementaire (cf notamment Projet de loi autorisant l'approbation des amendements à l'article 1er et à l'article 18 de l'accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, n° 4219, déposé le 25 janvier 2012).

* (4) Afrique du Sud, Angola, Benin, Botswana, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Cap Vert, Centrafrique, Comores, Congo, Côte d'Ivoire, Erythrée, Eswatini, Ethiopie, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée Equatoriale, Kenya, Lesotho, Libéria, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Maurice, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, République démocratique du Congo, Rwanda, Sao Tomé, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Sud Soudan, Tanzanie, Tchad, Togo, Zambie, Zimbabwe.

* (5)  Rapport du conseil d'administration au conseil des Gouverneurs « Modification de l'article 1er de l'Accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement afin de permettre l'élargissement limité et progressif du champ d'action géographique de la Banque à l'Afrique subsaharienne et à l'Irak », 2023

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