NOTE DE SYNTHÈSE
En
France, la fonction publique nationale emploie 2,5 millions de personnes
dans les administrations centrales et dans les services
déconcentrés de l'État. Les fonctionnaires relèvent
du code des pensions civiles et militaires, au même titre que les
magistrats de l'ordre judiciaire et les militaires. Dans la logique du
système de carrière qui caractérise la fonction publique
française, les fonctionnaires quittent leur emploi lorsqu'ils atteignent
la limite d'âge propre à ce dernier.
Cette limite est fixée à
soixante-cinq ans pour la
majorité des emplois,
dits
sédentaires, et à
soixante ans pour les emplois qui présentent des risques
particuliers ou une certaine pénibilité.
Cependant, à condition d'avoir accompli au moins quinze ans de
services effectifs,
les fonctionnaires peuvent faire valoir leurs droits
à la retraite avant d'atteindre la limite d'âge : dès
soixante ans pour les détenteurs d'emplois
sédentaires et dès cinquante-cinq ans pour les autres.
À l'inverse, des reports de la limite d'âge sont possibles
pour raisons familiales, au bénéfice des parents d'enfants
handicapés ou d'enfants encore à charge le jour de la limite
d'âge par exemple.
Par ailleurs, la limite d'âge est plus élevée pour les
membres de quelques corps (essentiellement Conseil d'État, Cour des
comptes, Inspection générale des finances et enseignement
supérieur). En outre, tous les fonctionnaires peuvent être
maintenus en activité dans l'intérêt du service.
En pratique, comme les années de service prises en compte pour le
calcul de la pension de retraite sont, si l'on exclut les bonifications
(justifiées en particulier par les séjours hors d'Europe, par
les campagnes militaires et, pour les femmes, par les enfants)
limitées à trente-sept et demi, de nombreux fonctionnaires
peuvent prendre leur retraite à taux plein dès l'âge de
soixante ans.
Pour les salariés du secteur privé, la réforme de 1993 a
augmenté le nombre d'annuités justifiant l'octroi d'une pension
à taux plein dès l'âge de soixante ans. L'allongement de la
durée de cotisation est progressif, de sorte que l'écart entre
fonctionnaires et autres salariés se creuse jusqu'en 2003, année
à partir de laquelle les salariés de droit privé devront
justifier de quarante annuités.
L'éventuelle remise en cause de l'avantage dont jouissent les
fonctionnaires français conduit à s'interroger sur les
règles en vigueur dans les pays qui nous entourent :
l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, la Grande-Bretagne, l'Italie et la
Suisse.
Pour chacun de ces pays, on a donc recherché quel était
l'âge « normal » de la retraite dans la fonction
publique, c'est-à-dire l'âge à partir duquel les
fonctionnaires pouvaient prendre leur retraite en bénéficiant
d'une pension à taux plein. On a également recherché s'il
existait des professions soumises à des règles
particulières et si les fonctionnaires avaient la possibilité de
prolonger leur carrière au-delà de la limite d'âge. En
revanche, les cas particuliers, comme celui des personnes handicapées,
n'ont pas été analysés. Par ailleurs, comme la notion de
fonction publique diffère d'un pays à l'autre, on a tout d'abord
tenté de la définir et d'indiquer ses effectifs.
L'analyse des dispositions étrangères montre que :
- en Italie, en Grande-Bretagne et en Suisse, l'âge de la
retraite des fonctionnaires ne fait pas l'objet de règles
particulières ;
- en Allemagne et en Belgique, bien que l'âge de la retraite dans la
fonction publique soit déterminé par un texte spécifique,
les fonctionnaires ne disposent pas d'avantages par rapport aux salariés
du secteur privé ;
- la situation des fonctionnaires espagnols est comparable à celle
des fonctionnaires français.
1) En Italie, en Grande-Bretagne et en Suisse, l'âge de la retraite des
fonctionnaires ne fait pas l'objet de règles particulières
a) La réforme italienne du système des retraites s'applique
aussi bien au secteur public qu'au secteur privé
La réforme Amato de 1992 a fixé l'âge de la retraite
à soixante-cinq ans pour les hommes et à soixante ans
pour les femmes, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur
privé.
Cependant, jusqu'en 2008, ni la réforme Amato ni les réformes
complémentaires successives n'excluent la possibilité de prendre
une retraite anticipée avec une pension réduite. Ainsi, en 2001,
les personnes qui justifient trente-sept années de cotisation
peuvent le faire, de même que celles qui n'ont que
trente-cinq années de cotisation, mais qui ont
cinquante-six ans. La possibilité de prendre une retraite
anticipée est, jusqu'en 2008, subordonnée à des conditions
d'âge et de cotisation de plus en plus sévères.
b) En Grande-Bretagne et en Suisse, il n'existe pas de fonctionnaires de
carrière
En Grande-Bretagne, les employés du
Civil Service
sont
recrutés par les ministères et leurs agences, selon des modes de
sélection proches de ceux du secteur privé. Ils n'ont pas la
garantie d'un emploi permanent.
L'âge de la retraite est fixé par l'employeur, qui a seulement
pour obligation de traiter sans discrimination son personnel et de s'assurer de
l'état de santé et de la compétence des personnes
âgées de plus de soixante ans. En règle
générale, l'âge de la retraite est fixé à
soixante ans, mais on peut le considérer plutôt comme
l'âge minimal de départ à la retraite, car les
fonctionnaires qui continuent à travailler après soixante ans
sont presque aussi nombreux que ceux qui prennent leur retraite à cet
âge.
En Suisse, le statut des fonctionnaires a été supprimé par
la loi du 24 mars 2000 sur le personnel de la Confédération.
À partir du 31 décembre 2001, cette loi devrait s'appliquer
à tous les fonctionnaires, qui seront alors soumis à un contrat
de travail de droit public susceptible d'être résilié pour
des motifs prévus par la loi.
La loi sur le personnel de la Confédération prévoit
notamment que les dispositions de la loi sur l'assurance vieillesse relatives
à l'âge de la retraite s'appliquent aux fonctionnaires. Par
conséquent, l'âge de la retraite des fonctionnaires demeure
fixé à soixante-cinq ans pour les hommes et passe à
soixante-quatre ans pour les femmes.
2) En Allemagne et en Belgique, bien que l'âge de la retraite dans la
fonction publique soit déterminé par un texte spécifique,
les fonctionnaires ne disposent pas d'avantages par rapport aux salariés
du secteur privé
Dans ces deux pays, l'âge de la retraite des fonctionnaires, bien que
déterminé par un texte spécifique, est, comme pour les
salariés de droit privé, de soixante-cinq ans.
Toutefois, les fonctionnaires ont la possibilité de prendre leur
retraite avant cet âge : dès soixante-trois ans en
Allemagne, et dès soixante ans en Belgique.
En Allemagne, ils perçoivent alors une pension qui est réduite de
3,6 % par année d'anticipation. Dans le secteur privé, où
la retraite avant l'âge de soixante-cinq ans est également
possible, le départ anticipé entraîne, de la même
façon, une réduction de la pension de 3,6 % par année
d'anticipation.
En revanche, en Belgique, comme le nombre d'annuités prises en compte
pour le calcul de la pension de retraite est plafonné à
quarante-cinq, les fonctionnaires peuvent, en théorie, prétendre
à une pension de retraite à taux plein avant d'atteindre
soixante-cinq ans. Cette faculté, difficile à mettre
à profit, ne constitue pas une règle propre aux fonctionnaires,
car elle s'applique également aux salariés du secteur
privé.
3) La situation des fonctionnaires espagnols est comparable à celle
des fonctionnaires français
Déterminé par un texte spécifique, l'âge de la
retraite des fonctionnaires espagnols est identique à celui des
salariés de droit privé : il est de soixante-cinq ans.
Cependant, dans la mesure où ils ont accompli trente-cinq ans de
service, les fonctionnaires peuvent prendre leur retraite dès
soixante ans en bénéficiant d'une pension à taux
plein, faculté dont ne disposent que les salariés du secteur
privé qui ont exercé une profession dangereuse, pénible ou
insalubre.
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Dans les six pays étudiés, les fonctionnaires ont généralement la possibilité de prendre une retraite à taux plein avant l'âge de soixante-cinq ans. Cependant, si l'on excepte l'Espagne, cette faculté n'apparaît pas comme un avantage particulier, car les salariés du secteur privé peuvent l'exercer dans des conditions similaires.