LE DROIT A LA CONNAISSANCE DE SES ORIGINES GENETIQUES
Table des matières
NOTE DE SYNTHESE
Le
principe du secret des origines est enraciné dans le droit
français
, comme le montrent la législation relative à
l'accouchement sous X, ainsi que le choix du secret de l'identité du
donneur fait par les lois de bioéthique du 29 juillet 1994.
Il
est
cependant aujourd'hui
de plus en plus contesté
.
C'est ainsi que la loi 96-604 du 5 juillet 1996 relative à l'adoption
oblige les services de l'aide sociale à informer les personnes qui leur
confient un enfant de la possibilité de donner des renseignements les
concernant, sans que ces renseignements puissent porter atteinte au secret de
l'identité. Cette disposition facilite les recherches ultérieures
que l'enfant adopté peut entreprendre.
C'est ainsi que le rapport présenté en mai 1998 par
Mme Irène Théry suggérait notamment :
- de supprimer l'accouchement sous X ;
- de ne plus permettre aux parents qui confient leur enfant de moins d'un
an à l'aide sociale à l'enfance, en vue de son adoption, de
demander le secret de leur état civil ;
- d'autoriser la contestation de la filiation aux époux ayant eu
recours à la procréation médicalement assistée avec
l'intervention d'un tiers donneur.
Plus récemment, le rapport du groupe de travail présidé
par Mme Dekeuwer-Defossez proposait :
- de conserver l'accouchement sous X, mais de rendre possible
l'établissement de la maternité par voie judiciaire ;
- de créer, parallèlement à l'accouchement sous X, un
système d'accouchement " dans la confidentialité ",
permettant à la femme de garder son anonymat vis-à-vis des
services de l'état civil, son identité étant par ailleurs
conservée par un organisme tiers qui pourrait, à la demande de
l'enfant majeur et avec l'accord de la mère, lever le secret des
origines ;
- d'empêcher les parents qui remettent leur enfant aux services
sociaux de demander le secret de leur identité si la filiation de
l'enfant a déjà été établie à leur
égard ;
- de maintenir l'interdiction de la contestation de la filiation des enfants
conçus par assistance médicale à la procréation
grâce à des tiers donneurs.
A l'opposé, deux pays voisins,
l'Allemagne et la Suisse,
considèrent le droit à connaître ses origines
génétiques comme garanti par la Constitution
. Depuis 1989, la
Cour constitutionnelle allemande estime en effet que ce droit constitue la
conséquence logique des droits à la dignité et au libre
épanouissement, ainsi que du principe d'égalité entre
enfants légitimes et enfants naturels, eux-mêmes établis
par la Loi fondamentale. En Suisse, depuis 1992, la Constitution
fédérale comporte plusieurs dispositions relatives à la
bioéthique, l'une d'elle énonçant :
"
l'accès d'une personne aux informations relatives à son
ascendance est garanti
".
Dans ce contexte, il est intéressant d'examiner si d'autres pays
européens garantissaient à chaque personne le droit à la
connaissance de ses origines génétiques et notamment
d'étudier si, dans ces pays :
- la femme peut accoucher dans l'anonymat ;
- les enfants adoptés peuvent obtenir communication de
l'identité de leurs parents biologiques ;
- ceux qui sont conçus par procréation médicalement
assistée peuvent obtenir des renseignements sur les donneurs qui ont
permis leur naissance.
La présente étude, qui analyse la législation de nos six
plus proches voisins (
Allemagne, Belgique, Espagne, Italie, Royaume-Uni et
Suisse
) fait apparaître que :
- l'accouchement anonyme n'est possible qu'en Italie ;
- dans tous les pays étudiés, les enfants adoptés
peuvent obtenir communication de leur filiation d'origine ;
- les lois anglaise, espagnole et suisse sur la procréation
médicalement assistée sont les seules à résoudre
explicitement le problème des origines des enfants conçus
grâce à ces techniques.
1) L'accouchement anonyme n'est possible qu'en Italie
a) Le code civil italien accorde à la femme la possibilité de
ne pas reconnaître son enfant
Toutefois,
en Italie
,
l'accouchement anonyme n'empêche pas
l'établissement ultérieur de la filiation de l'enfant envers sa
mère
, à l'initiative du premier ou de la seconde car,
à la différence de ce qui existe en France depuis 1992,
l'accouchement anonyme ne constitue pas une fin de non-recevoir à
l'action en recherche de maternité.
b) Dans les autres pays, l'acte de naissance de l'enfant comporte
nécessairement le nom de la mère
En Allemagne, en Belgique, en Espagne, au Royaume-Uni et en Suisse, le
nom
de la mère figure sur l'acte de naissance
, à moins
qu'il ne s'agisse d'un enfant trouvé.
Jusque tout récemment, il était possible d'accoucher dans
l'anonymat en Espagne
, mais, par une décision rendue le 21 septembre
1999, le Tribunal suprême a supprimé la faculté qu'offrait
la législation sur l'état civil de faire figurer sur les
registres la mention " De mère inconnue " dans d'autres cas
que celui des enfants trouvés. Comme en Italie, l'accouchement anonyme
n'empêchait cependant pas l'établissement ultérieur de la
filiation de l'enfant envers sa mère, à l'instigation de l'un ou
de l'autre.
Adoptant une position inverse de celle du Tribunal suprême espagnol, le
Comité consultatif de bioéthique de Belgique a rendu un avis sur
cette question au début de l'année 1998. Il s'est alors
prononcé pour l'introduction de "
l'accouchement dans la
discrétion
", formule permettant la recherche ultérieure
de la filiation.
2) Dans tous les pays étudiés, les enfants adoptés
peuvent obtenir communication de leur filiation d'origine, mais la loi anglaise
est la seule à l'organiser
a) Toutes les législations sur l'état civil permettent aux
enfants adoptés de prendre connaissance de l'identité de leurs
parents
L'adoption donne lieu, selon les pays, à une mention marginale sur
l'acte de naissance ou à l'établissement d'un nouvel acte de
naissance.
Dans tous les pays étudiés, les enfants adoptés peuvent,
à partir d'un certain âge, consulter eux-mêmes les registres
de l'état civil ou en obtenir une copie. Cet âge correspond le
plus souvent à celui de la majorité. Cependant, l'Allemagne l'a
fixé à 16 ans, qui est également l'âge à
partir duquel il est possible de se marier. De même, au Royaume-Uni,
lorsqu'une personne qui a été adoptée désire se
marier, elle peut obtenir des renseignements sur sa famille d'origine,
même si elle n'a pas atteint l'âge de la majorité.
Avant cet âge, la communication des renseignements s'effectue par
l'intermédiaire du représentant légal.
Sauf exception,
le secret des origines est toujours maintenu à
l'égard des tiers,
car seuls un intérêt légitime
et un motif fondé peuvent justifier la divulgation de la filiation
d'origine.
b)
La loi anglaise tente de favoriser les rapprochements entre enfants
adoptés et enfants d'origine
Depuis 1991, la loi anglaise sur l'adoption oblige le greffe central de
l'état civil à tenir
un fichier " des
contacts "
. Ce fichier regroupe le nom et l'adresse des personnes
adoptées qui, devenues majeures, souhaitent entrer en
contact
avec
leurs parents biologiques. Le fichier comporte également les
mêmes renseignements pour les personnes majeures qui savent qu'un membre
de leur famille a été adopté et qui souhaitent entrer en
relation avec lui. L'inscription dans le fichier, facultative, peut être
révoquée à tout moment.
Depuis l'institution du fichier, quelques dizaines de rapprochements ont
été établis.
3) Les lois anglaise, espagnole et suisse sur la procréation
médicalement assistée sont les seules à avoir
résolu explicitement le problème des origines des enfants
conçus grâce à l'une de ces techniques
a) Les lois anglaise, espagnole et suisse sur la procréation
médicalement assistée permettent aux enfants conçus
grâce à l'une de ces techniques d'obtenir des renseignements sur
les donneurs
Tout en affirmant le principe de l'anonymat du don, les
lois anglaise et
espagnole
sur la procréation médicalement assistée
permettent aux enfants conçus par procréation médicalement
assistée d'obtenir, à partir de
l'âge de la
majorité
, des
renseignements généraux sur les
donneurs
(taille, poids, appartenance ethnique, profession...). De plus,
les deux lois prévoient également la révélation de
l'identité du donneur lorsque la santé de l'enfant l'exige.
Quant à
la loi fédérale suisse sur la
procréation médicalement assistée,
dont
l'entrée en vigueur dépend de l'issue du référendum
du 12 mars 2000, elle précise que l'enfant peut,
après sa
majorité
, obtenir communication de
certaines des informations
relatives aux donneurs qui sont enregistrées
conformément
à la loi.
Les données
concernant l'identité
et l'aspect physique du donneur peuvent lui être transmises. En outre,
dans la mesure où il fait valoir un
intérêt
légitime
,
l'enfant mineur
peut lui aussi obtenir ces
renseignements, ainsi que d'autres, d'ordre médical.
b)
En Belgique et en Italie,
le principe de l'anonymat du donneur
est
strictement respecté
Dans ces deux pays, qui ne disposent pas encore d'une législation sur la
procréation médicalement assistée, le principe de
l'anonymat du donneur est strictement respecté, et la communication de
renseignements relatifs aux donneurs n'est pas organisée.
c) En Allemagne, l'incertitude juridique se traduit par la forte diminution
du nombre des donneurs
De nature essentiellement pénale, l
a loi de 1990 sur la protection de
l'embryon
, qui établit le cadre juridique de la procréation
médicalement assistée,
n'aborde pas les questions de droit
civil.
Elle a donc laissé subsister la jurisprudence de 1983 de la
Cour fédérale de justice, selon laquelle l'homme, même s'il
a donné son consentement à l'opération, peut contester la
paternité d'un enfant conçu par procréation
médicalement assistée
avec l'assistance d'un donneur.
Malgré l'affirmation par la Cour constitutionnelle du droit à
la connaissance des origines génétiques, l'accès aux
informations sur les donneurs n'est pas organisé.
Cependant, la
réforme du droit de la famille adoptée en 1997 a élargi
les possibilités pour l'enfant de contester la paternité du mari
(ou du compagnon) de sa mère. Désormais, cette faculté lui
est reconnue à partir du moment où il a connaissance de faits
l'amenant à douter des moyens mis en oeuvre pour sa conception. A
l'occasion de cette réforme, le législateur a renoncé
à introduire dans le droit, comme l'avait suggéré la Cour
constitutionnelle, la notion d'"
action autonome en
établissement de filiation
". Dépourvue d'effets
juridiques, elle aurait uniquement permis de faire apparaître la
filiation de l'enfant.
Il en résulte donc une situation assez confuse, qui conduit l'Ordre
fédéral des médecins à recommander de limiter
autant que possible le recours à des méthodes de
procréation médicalement assistée
nécessitant le recours à des donneurs. Il en résulte
aussi une forte diminution du nombre des donneurs.
* *
*
Les législations anglaise et espagnole sont donc les seules à concilier le droit pour chacun à la connaissance de ses origines génétiques avec le respect de l'anonymat du donneur en cas de procréation médicalement assistée.
ALLEMAGNE
Depuis 1989, la Cour constitutionnelle reconnaît à
toute personne le droit de connaître ses origines
,
c'est-à-dire sa filiation biologique. Selon la Cour constitutionnelle,
ce droit constitue la conséquence de deux droits fondamentaux :
|
I. L'ACCOUCHEMENT ANONYME
Il
n'existe aucune procédure comparable à l'accouchement sous X, et
le lien entre la naissance et la filiation maternelle est automatique
.
Sauf dans le cas des enfants trouvés, l'indication du nom de la
mère dans l'acte de naissance est obligatoire.
II. L'ADOPTION
Le droit
allemand distingue l'adoption des majeurs et l'adoption des mineurs, proche de
l'adoption plénière. Pour l'adoption des majeurs, la question du
secret ne se pose pas, car l'adopté demeure lié à sa
famille par le sang. En revanche, lorsqu'elle concerne un mineur, la
décision d'adoption fait en principe
(1(
*
))
disparaître les liens de parenté avec la famille d'origine, et
l'enfant acquiert le même statut qu'un enfant légitime. L'adoption
est mentionnée en marge de l'acte de naissance.
La loi sur l'état civil garantit le droit aux origines
. En effet,
à partir de l'âge de
seize ans
, l'enfant adopté
peut consulter lui-même les registres de l'état civil ou en
obtenir un extrait, et connaître ainsi le nom de ses parents biologiques,
ainsi que leur adresse au moment de la naissance. L'âge retenu,
seize ans, est l'âge minimum requis pour le mariage. Avant que
l'enfant n'atteigne cet âge, la personne qui l'a adopté ainsi que
son représentant légal peuvent exercer cette faculté.
Cette disposition n'empêche pas le maintien du secret des origines
à l'égard des tiers. En effet, l'article 1758 du code civil
interdit la divulgation et la recherche de "
faits susceptibles de
dévoiler l'adoption et ses circonstances
" sans le consentement
de l'adoptant ou de l'enfant, à moins que des raisons
particulières d'intérêt public ne l'exigent. De plus, la
loi sur l'état civil énumère de façon limitative
les personnes qui peuvent consulter les pièces d'état civil
concernant un enfant adopté. Outre l'intéressé, la
personne qui l'a adopté et son représentant légal, les
autorités administratives et judiciaires, dans le cadre de leurs
compétences, sont les seules à pouvoir le faire.
III. LA PROCREATION MEDICALEMENT ASSISTEE
La
loi de 1990 sur la protection de l'embryon
détermine le cadre
juridique de la procréation médicalement assistée.
De
nature essentiellement pénale
, elle ne règle pas tous les
problèmes. Elle n'aborde notamment pas les questions de droit civil
liées à la procréation médicalement
assistée. C'est pourquoi l'adoption d'une nouvelle loi est
envisagée depuis plusieurs années.
Les lacunes de la loi de 1990 sur la protection de l'embryon sont en partie
comblées par :
- la loi de 1989 sur l'entremise en matière d'adoption, qui
interdit la gestation pour le compte d'un tiers ;
- le code de la sécurité sociale, qui précise dans
quelle mesure les opérations relatives à la procréation
médicalement assistée sont prises en charge par la
collectivité ;
- les dispositions du code civil sur la contestation de paternité.
Ces différentes dispositions législatives sont
complétées par la jurisprudence, par la doctrine et par les
prescriptions de l'Ordre fédéral des médecins.
1) La filiation maternelle
L'article 1591 du code civil précise que la mère
d'un enfant est la femme qui l'a mis au monde.
Par ailleurs, plusieurs dispositions législatives visent à
empêcher que la femme qui met l'enfant au monde, c'est-à-dire la
mère au sens du droit civil, ne soit pas la mère biologique.
En effet, la
maternité de substitution
est
interdite
à la fois par la loi de 1989 sur l'entremise en
matière d'adoption et par la loi de 1990 sur le statut de l'embryon. La
première déclare la nullité de l'accord par lequel une
femme, quel que soit le moyen de fécondation utilisé, porte un
enfant pour autrui. La seconde punit celui qui procède à la
fécondation artificielle d'une femme qui est prête à
céder son enfant à un tiers après la naissance.
De plus, la loi de 1990 prohibe le don d'embryons ainsi que le don
d'ovocytes.
2) La filiation paternelle
L'insémination artificielle et la fécondation
in
vitro
, que la loi n'évoque pas, sont, dans l'attente d'une
législation fédérale
(2(
*
))
explicite, considérées comme licites, qu'elles soient ou non
réalisées grâce à un tiers donneur.
Aucun texte ne règle de façon explicite la question de l'anonymat
du donneur. Toutefois, ce principe est condamné de façon presque
unanime, car son respect empêcherait l'enfant de connaître ses
origines.
L'application des règles de droit commun de la filiation amène
à considérer l'homme qui a cohabité avec la femme pendant
la période de gestation comme le père.
Cependant, depuis 1983, la
Cour fédérale de justice
reconnaît au mari (ou au compagnon)
(
3(
*
)
)
de la mère le droit de contester la
paternité d'un enfant conçu par procréation
médicalement assistée exogène, c'est-à-dire avec
l'assistance d'un tiers donneur, même s'il a donné son
consentement. Bien que cette jurisprudence ait souvent été
contestée par les tribunaux inférieurs, l'action en
désaveu de paternité est généralement reconnue.
La réforme du droit de la famille, adoptée en 1997 et
entrée en vigueur le 1
er
juillet 1998, n'empêche
pas de telles contestations et laisse donc subsister la jurisprudence de 1983.
Ses effets ont toutefois été précisés par une
décision prise en 1995 par la Cour fédérale de justice.
Cette dernière a alors souligné la faculté pour le mari de
retirer de façon unilatérale son consentement au projet
d'assistance médicalisée à la procréation jusqu'au
moment de l'exécution. Si le projet est réalisé
malgré le désaccord du mari, celui-ci n'a aucune obligation
d'entretien. En revanche, si le mari retire son consentement après la
date de réalisation, il a l'obligation de se comporter comme un
père par rapport à la mère et à l'enfant.
3) L'accès aux informations sur les donneurs
Il n'est
pas organisé. Toutefois, pour tirer les conséquences de la
reconnaissance constitutionnelle du droit aux origines,
la réforme du
droit de la famille de 1997
, s'est notamment traduite par
l'élargissement de la faculté qu'a l'enfant de contester la
paternité du mari (ou du compagnon) de sa mère
.
Désormais, il peut en effet, dans la mesure où il a connaissance
de faits le laissant douter de la paternité qui a été
établie, contester cette dernière dans le délai de deux
ans
(4(
*
))
. Cette possibilité vaut pour les
enfants devenus majeurs, ainsi que pour les mineurs, qui l'exercent par
l'intermédiaire de leur représentant légal. La
réforme de 1997 se limite à élargir les
possibilités de contestation de paternité. Devant les nombreuses
difficultés juridiques, le législateur a en effet renoncé
à introduire dans le droit, comme l'avait suggéré la Cour
constitutionnelle, la notion d'"
action autonome en
établissement de filiation
". Dépourvue d'effets
juridiques et ne modifiant en rien le statut de l'enfant, elle lui aurait
seulement permis de faire apparaître sa filiation véritable.
Lorsque la filiation paternelle a été contestée avec
succès, rien n'empêche qu'une action en recherche de
paternité établisse un lien de filiation entre le donneur et
l'enfant, puisque le principe de l'anonymat du donneur est condamné au
nom du droit constitutionnel à la connaissance des origines biologiques.
Si l'accès aux informations sur les donneurs n'est pas organisé, l'un des deux principaux rapports préalables à l'élaboration de la loi tirait les conclusions de l'absence d'anonymat des donneurs. En effet, l'avant-projet de loi publié en 1988 par le groupe de travail sur la procréation médicalement assistée commun à la Fédération et aux Länder recommandait la constitution par les médecins d'un dossier comportant notamment l'identité du donneur, afin que l'enfant pût obtenir ces informations à partir de l'âge de seize ans. Il suggérait donc des dispositions semblables à celles qui existent pour l'adoption. |
* *
*
L'incertitude juridique créée par l'absence de
règles claires se traduit notamment par la forte diminution du nombre
des donneurs depuis la décision de 1983.
Pour éviter tous les problèmes juridiques que le droit aux
origines entraîne, l'Ordre fédéral des médecins,
dans ses directives sur la procréation médicalement
assistée, recommande de n'employer une méthode exogène que
lorsque la commission régionale
ad hoc
de l'ordre a donné
son accord explicite.
Les directives précisent qu'un tel accord
suppose que la stérilité de l'homme empêche le recours
à une méthode endogène.
Les directives indiquent également que :
- l'utilisation du mélange de sperme doit être exclue ;
- le donneur doit être mis au courant de la possibilité qu'a
l'enfant de rechercher ses origines biologiques, et donc son nom, par
l'intermédiaire du médecin, qui ne peut en aucun cas s'abriter
derrière le secret médical ;
- le couple doit être prévenu de la faculté qu'a
l'enfant de contester la paternité et, par conséquent, de
rechercher le nom du donneur.
De même, le code de la sécurité sociale prévoit que
les caisses d'assurance maladie remboursent les dépenses relatives
à l'assistance médicale à la procréation uniquement
lorsque seuls les gamètes du couple sont utilisés.
BELGIQUE
La
loi du 31 mars 1987
a réformé le droit de la filiation
en vue
de permettre à tout enfant d'établir sa double
filiation maternelle et paternelle
, ce qui s'est notamment traduit par
l'élargissement des possibilités de recherche de paternité.
|
I. L'ACCOUCHEMENT ANONYME
La
possibilité d'accouchement anonyme n'est pas reconnue
, puisque le
nom et l'adresse de la mère doivent obligatoirement être
mentionnés dans l'acte de naissance.
Le 12 janvier 1998, le Comité consultatif de bioéthique de
Belgique a rendu un avis concernant " la problématique des
accouchements anonymes ", dans lequel il estime que
"
l'accouchement dans l'anonymat est parfaitement légitime et
acceptable du point de vue éthique
". Toutefois, il
préfère proposer d'organiser "
l'accouchement dans la
discrétion
" solution qui aurait l'avantage de ne pas fermer
définitivement la porte à toute recherche de filiation.
Dans ce même avis, il suggère d'apporter des modifications
à la législation sur l'adoption "
de façon
à rendre la procédure classique d'abandon à la naissance
moins difficile pour les mères qui désirent que leur enfant soit
adopté
" : réduction, voire suppression du
délai pour consentir à une adoption, et suppression de
l'obligation de recueillir l'avis des grands-parents pour assurer à la
mère la discrétion à l'égard de son entourage.
Une proposition de loi a été déposée au
Sénat le 30 septembre 1999 " afin de permettre l'accouchement
anonyme ". La commission de la justice n'a pas encore
procédé à son examen.
II. L'ADOPTION
Le texte
qui suit concerne uniquement l'adoption plénière, puisque
l'adoption simple laisse subsister les liens de l'adopté avec sa famille
d'origine.
Le jugement homologuant l'adoption mentionne l'identité
complète
des adoptants et de l'adopté. Il est transcrit en
marge de l'acte de naissance de l'adopté, qui comporte obligatoirement
la filiation maternelle et, de façon éventuelle, la filiation
paternelle.
Or, l'intéressé ou son représentant légal peuvent
obtenir une copie conforme de l'acte de naissance ou un extrait de cet acte
mentionnant la filiation. Les parents adoptifs et l'adopté sont donc
à même, s'ils le souhaitent, de connaître la famille
d'origine de l'adopté.
En revanche, le secret est maintenu à l'égard des tiers, car,
outre l'intéressé, seule une personne "
justifiant d'un
intérêt familial, scientifique ou de tout autre
intérêt légitime
" peut obtenir communication des
documents révélant la filiation d'origine.
III. LA PROCREATION MEDICALEMENT ASSISTEE
Il n'existe, à l'heure actuelle, aucune loi concernant la procréation médicalement assistée . La filiation s'établit donc en fonction des règles applicables à la filiation légitime ou à la filiation naturelle, le recours à la procréation médicalement assistée étant également possible pour un couple non marié.
1) La filiation maternelle
L'article 312 du code civil précise que l'enfant a pour
mère la personne qui est désignée comme telle dans l'acte
de naissance. Or, d'après l'article 56 du code civil, la
mère est la femme qui a accouché.
Aucune disposition légale ne prohibe la maternité de
substitution, mais une convention de mère porteuse serait
vraisemblablement considérée comme contraire à l'ordre
public et, en conséquence, frappée de nullité absolue.
Au cas où il y aurait tout de même recours à une
mère porteuse, celle-ci serait considérée comme la
mère de l'enfant, car l'acte de naissance, qui mentionne comme telle la
femme qui a accouché, a la primauté sur l'acte de reconnaissance
de la mère biologique.
2) La filiation paternelle
L'article 318 du code civil interdit au mari qui a
" consenti à l'insémination artificielle ou à un
autre acte ayant la procréation pour but "
de contester sa
paternité.
Les prescriptions de l'article 318 du code civil s'appliquent seulement
lorsque les parents sont mariés. L'enfant conçu par
procréation médicalement assistée ne peut donc avoir pour
père que le mari de sa mère, sauf si la conception de l'enfant ne
peut être la conséquence de l'insémination artificielle.
En revanche, lorsque les parents ne sont pas mariés, l'homme qui a
reconnu l'enfant peut contester sa paternité.
3) L'accès aux informations sur les donneurs
La fécondation par donneur implique l'anonymat du père biologique, et l'accès à des renseignements, même non identifiants, n'est pas organisé. En principe, aucun lien ne doit pouvoir être établi entre le donneur et l'enfant conçu par procréation artificielle.
ESPAGNE
A
l'occasion d'un recours en cassation,
le Tribunal suprême a
affirmé, le 21 septembre 1999, l'impossibilité pour la
mère de ne pas déclarer son identité au moment de
l'accouchement
.
|
I. L'ACCOUCHEMENT ANONYME
Par
sa décision du 21 septembre 1999, le Tribunal suprême a
supprimé la possibilité qu'offrait l'article 47 de la loi
sur l'état civil de faire figurer la mention " De mère
inconnue " sur les registres dans d'autres cas que celui des enfants
trouvés
.
En effet, l'article 167 du règlement
d'application de la loi sur l'état civil, qui prévoyait toutes
les mentions obligatoires de l'acte de naissance, parmi lesquelles le nom de la
mère, autorisait également le personnel médical à
recourir au secret professionnel pour respecter le souhait d'anonymat de la
mère.
Toutefois, l'accouchement anonyme n'empêchait pas l'établissement
ultérieur de la filiation de l'enfant envers sa mère biologique
à l'initiative de cette dernière. Il n'empêchait pas non
plus l'enfant d'ouvrir une action en recherche de filiation maternelle.
Cependant, l'adoption se déroulait de la même façon que
s'il se fût agi d'un enfant né de parents inconnus.
Le Tribunal suprême a justifié sa décision en indiquant
que la garantie de l'anonymat de la mère était en contradiction
avec les principes de libre recherche de la paternité et
d'égalité entre enfants naturels et enfants légitimes,
ainsi que de dignité de la personne, tous garantis par la
Constitution.
La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 47 de la
loi sur l'état civil a rendu inapplicable l'article 167 du
règlement correspondant. C'est pourquoi un règlement du
ministère de la Justice du 10 novembre 1999 détermine les
nouveaux formulaires de déclaration de naissance. Ces derniers
comportent nécessairement un certain nombre d'informations sur la
mère (nom, filiation, adresse...), ainsi que ses empreintes digitales.
II. L'ADOPTION
Depuis
la réforme de 1981, il n'existe plus qu'une catégorie d'adoption,
l'adoption simple ayant été supprimée. En principe
(5(
*
))
l'adoption fait disparaître les liens de
parenté avec la famille d'origine, et l'enfant adopté acquiert le
statut d'enfant légitime. La décision judiciaire constitutive de
l'adoption fait l'objet d'une
mention marginale sur l'acte de naissance
.
Cette inscription mentionne l'identité du (ou des) adoptant(s) et
précise les modifications de nom consécutives à
l'adoption.
D'après le règlement de 1958 qui applique la loi de 1957 sur
l'état civil, les renseignements relatifs à l'adoption sont
soumis à un régime de
publicité restreinte
:
aucune information révélant l'origine de l'adopté ou sa
qualité de personne adoptée ne peut être donnée sans
autorisation spéciale. L'octroi d'une telle autorisation suppose un
"
intérêt légitime et un motif
fondé
". Toutefois, les parents adoptifs et la personne
adoptée devenue majeure peuvent obtenir ces informations sans
autorisation spéciale.
Pour éviter tout risque de diffusion des renseignements relatifs
à la filiation d'origine, le ministère de la Justice a
publié, en février 1999, une instruction permettant aux parents
adoptifs de demander l'établissement d'un nouvel acte de naissance pour
l'enfant adopté. Cette demande doit être effectuée avant la
majorité de l'enfant. Le nouvel acte de naissance comporte les
références de l'ancienne inscription, qui est alors
annulée. Il fait l'objet du régime normal de publicité.
Cette nouvelle disposition n'empêche pas l'adopté, une fois devenu
majeur, ses parents adoptifs et des tiers munis d'une autorisation
spéciale d'avoir accès aux enregistrements annulés,
c'est-à-dire aux informations sur la filiation d'origine.
III. LA PROCREATION MEDICALEMENT ASSISTEE
La loi n° 35 du 21 novembre 1988, relative aux techniques de procréation médicalement assistée, s'efforce de préserver le secret des origines génétiques . D'une manière générale, elle prévoit l'application des règles de filiation de droit commun et interdit la mention, dans les actes de l'état civil, de détails susceptibles de révéler que l'enfant a été conçu par procréation médicalement assistée. De plus, lorsqu'ils ont donné expressément leur consentement préalable pour qu'il soit recouru à un donneur extérieur au couple, ni le mari ni la femme (6( * )) ne peuvent contester le caractère légitime de la filiation de l'enfant.
1) La filiation maternelle
La
mère d'un enfant est la femme qui l'a mis au monde, et plusieurs
dispositions de la loi de 1988 visent à empêcher toute
contestation de cette affirmation.
La loi énonce, à l'article 40, la nullité de tout
contrat par lequel la mère renonce à la filiation maternelle en
faveur du contractant ou d'un tiers, ce qui interdit implicitement la
maternité de substitution.
De plus, elle comporte, à l'article 5, des dispositions relatives
aux donneurs -qu'il s'agisse de dons de gamètes ou d'embryons- qui
permettent d'appliquer le principe du secret des origines.
Le don doit
être anonyme et les données relatives à l'identité
du donneur doivent être conservées dans les conditions de
confidentialité les plus strictes qui soient et sous forme
codée
, d'une part, au Registre national des donneurs et, d'autre
part, dans les fichiers des établissements recueillant les dons.
2) La filiation paternelle
Les prescriptions de l'article 5 de la loi de 1988, exposées plus haut, s'appliquent. Le père ne peut donc être que le mari de la mère ou l'homme qui a reconnu l'enfant.
3) L'accès aux informations sur les donneurs
Les
enfants conçus par procréation médicalement
assistée et leurs représentants légaux, ainsi que les
femmes qui ont bénéficié de l'assistance médicale
à la procréation, ont le droit d'obtenir des informations
générales sur les donneurs, mais pas leur identité.
Cependant,
ce principe souffre deux exceptions
. L'identité du
donneur peut être révélée :
- lorsque la
vie de l'enfant est en danger
et que la connaissance de
l'identité du donneur permet d'éviter un tel danger ;
- lorsque la
procédure pénale
l'exige.
La loi précise que, même dans ces deux cas, la
révélation de l'identité du donneur n'entraîne aucun
lien de filiation avec l'enfant.
FRANCE
Malgré la loi n° 96-604 du 5 juillet
1996
sur l'adoption, qui oblige les services de l'aide sociale à
l'enfance à informer la mère qui choisit l'accouchement sous X de
la possibilité de donner des renseignements qui ne portent pas atteinte
au secret de l'identité,
le droit français reste
attaché au secret des origines biologiques
.
|
I. L'ACCOUCHEMENT ANONYME
Traditionnelle en France, la possibilité d'accouchement
anonyme, déjà reconnue par le code de la famille et de l'aide
sociale, a été solennellement affirmée dans le code civil.
L'article 341-1, qui résulte de la loi 93-22 du 8 janvier 1993,
énonce en effet : "
Lors de l'accouchement, la mère
peut demander que le secret de son admission et de son identité soit
préservé
".
La principale innovation de la loi 93-22 dans ce domaine a consisté
à faire de l'accouchement anonyme une
fin de non-recevoir à
l'action en recherche de maternité
, puisque l'article 341 du code
civil, également introduit par la loi 93-22, dispose désormais
que : "
La recherche de maternité est admise sous
réserve de l'application de l'article 341-1
".
Pour faciliter les recherches ultérieures sur les origines familiales,
la loi du 5 juillet 1996 relative à l'adoption oblige les services
de l'aide sociale à informer la mère, le père, ou la
personne qui remet l'enfant
(7(
*
))
de la
possibilité de donner des renseignements "
ne portant pas
atteinte au secret de l'identité
".
II. L'ADOPTION
Le texte
qui suit concerne uniquement
l'adoption plénière
, puisque
l'adoption simple laisse subsister les liens de l'adopté avec sa famille
d'origine.
Le
secret de l'adoption à l'égard des tiers est
protégé
: la décision d'adoption est transcrite
sur les registres de l'état civil du lieu de naissance de
l'adopté, et la transcription, qui ne comporte aucune indication sur la
filiation réelle de l'enfant, lui tient lieu d'acte de naissance.
Parallèlement, la mention " adoption " est portée sur
l'acte de naissance d'origine, qui est considéré comme nul.
En revanche, l'enfant adopté peut, sans que la législation
organise expressément la connaissance par l'enfant de ses origines,
obtenir des renseignements sur sa filiation d'origine, notamment grâce
à une copie de la décision d'adoption.
III. LA PROCREATION MEDICALEMENT ASSISTEE
Les lois dites de bioéthique, c'est-à-dire la loi 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain et la loi 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, s'efforcent de préserver le secret des origines en posant le principe de l'anonymat absolu des donneurs et en interdisant, au cas où le secret serait dévoilé, l'établissement de la filiation à l'égard du donneur.
1) La filiation maternelle
La
mère est la femme qui a mis l'enfant au monde, et l'article 311-19 du
code civil, qui résulte de la loi 94-653, empêche toute
contestation, de la part des parents ou du donneur. Il dispose en effet :
"
En cas de procréation médicalement assistée avec
tiers donneur, aucun lien de filiation ne peut être établi entre
l'auteur du don et l'enfant issu de la procréation.
"
Aucune action en responsabilité ne peut être exercée
à l'encontre du donneur
. "
Par ailleurs,
l'interdiction de la maternité de substitution
par
l'article 16-7 du code de la santé publique, qui énonce :
"
Toute convention portant sur la procréation ou la gestation
pour le compte d'autrui est nulle
", permet d'éviter que la
question de la filiation maternelle ne se pose en d'autres termes.
2) La filiation paternelle
Elle est
établie conformément aux règles ordinaires de la
filiation, et l'article 311-19 précité du code civil
empêche toute contestation.
De plus, l'article 311-20 du même code, introduit lui aussi par la loi
94-653, interdit toute action en contestation de filiation après la
réalisation d'une procréation médicalement assistée
à laquelle l'homme a donné son consentement, à moins que
ce dernier n'avance que l'enfant a été conçu
autrement.
3) L'accès aux informations sur les donneurs
Il n'est
pas organisé, car
l'identité des donneurs doit demeurer
absolument secrète
.
Plusieurs dispositions législatives garantissent ce secret.
L'article 16-8 du code civil, qui résulte de la loi 94-653,
énonce en effet à l'alinéa premier : "
Aucune
information permettant d'identifier à la fois celui qui a fait don d'un
élément ou d'un produit de son corps et celui qui l'a reçu
ne peut être divulguée. Le donneur ne peut connaître
l'identité du receveur, ni le receveur celle du donneur
. "
Le code de la santé publique, à l'article L 665-14, rappelle
mot pour mot cette disposition, par ailleurs reprise à l'article 152-5
du même code pour ce qui concerne le don d'embryon.
Ces interdictions sont assorties de sanctions pénales : la
divulgation de renseignements permettant d'identifier à la fois le(s)
donneur(s) de gamètes ou d'embryons et le couple receveur est punie de
deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende.
Toutefois, l'article 16-8 du code civil prévoit la
levée de
l'anonymat pour les médecins
"
en cas
de
nécessité thérapeutique
", disposition reprise
par l'article L 673-6 du code de la santé publique qui
dispose : "
Les organismes et établissements
autorisés (...) fournissent aux autorités sanitaires les
informations utiles relatives aux donneurs. Un médecin peut
accéder aux informations médicales non identifiantes en cas de
nécessité thérapeutique concernant un enfant conçu
par une assistance médicale à la procréation avec tiers
donneur
".
ITALIE
Le
droit italien protège le secret des origines.
|
I. L'ACCOUCHEMENT ANONYME
Bien que
l'article 269 du code civil considère la femme qui a mis au monde
un enfant comme sa mère,
l'article 250 accorde à la femme la
possibilité de ne pas reconnaître
son enfant
. En
pratique, elle doit demander à l'hôpital de préserver son
anonymat lors de l'accouchement.
Dans ce cas, un
dossier médical
comportant des renseignements
médicaux sur la mère et l'enfant est constitué. Seul le
médecin traitant de l'enfant peut y avoir accès sur autorisation
du tuteur de l'enfant, car la loi ne prévoit pas que l'enfant né
à la suite d'un accouchement anonyme et devenu majeur ait accès
à son dossier médical.
L'accouchement anonyme n'empêche pas l'établissement
ultérieur de la filiation de l'enfant envers sa mère, à
l'initiative de cette dernière. Il n'empêche pas non plus l'enfant
d'ouvrir une action en recherche de filiation maternelle.
II. L'ADOPTION
La loi
de 1983 sur l'adoption distingue l'adoption des majeurs et l'adoption des
mineurs. Dans le premier cas, la question du secret ne se pose pas, car
l'adopté demeure lié à sa famille d'origine. En revanche,
dans le second, l'adoption fait cesser les relations avec la famille d'origine
(8(
*
))
.
La loi de 1983 sur l'adoption garantit le secret des origines
, sauf si
l'autorité judiciaire donne une autorisation expresse.
En effet, la décision d'adoption, une fois prise par le tribunal, est
communiquée aux services de l'état civil pour être
mentionnée en marge de l'acte de naissance. Or, les copies des actes
d'état civil de l'adopté doivent être
délivrées avec la seule indication de son nouveau nom, sans
mention de la paternité ou de la maternité d'origine, ni de
l'annotation relative à l'adoption. De plus, à moins d'avoir une
autorisation expresse du tribunal, les officiers et employés de
l'état civil ont l'obligation de refuser de fournir quelque
renseignement qui puisse révéler l'adoption.
Cette interdiction se double de sanctions à l'égard des personnes
qui dévoileraient des renseignements relatifs à la filiation
naturelle des enfants adoptés (amende de 900 000 lires, soit environ
2 700 F, réclusion d'une durée de six mois à
trois ans si les renseignements sont fournis par un employé du service
public).
III. LA PROCREATION MEDICALEMENT ASSISTEE
En l'absence de législation spécifique et compte tenu de l'impossibilité de considérer comme illicites les techniques de procréation médicalement assistée, le code civil fournit les règles applicables.
1) La filiation maternelle
L'article 269 du code civil considère la femme qui a mis
au monde un enfant comme sa mère, et l'interdiction de la
maternité pour autrui, que la mère " porteuse " soit ou
non la mère génétique, empêche toute contestation
à cet égard.
En effet, en 1989, le tribunal de Monza, se fondant sur l'article 5 du
code civil, selon lequel "
les actes de disposition du corps sont
interdits lorsqu'ils provoquent une diminution permanente de
l'intégrité physique ou quand ils sont contraires à la
loi, à l'ordre public ou aux bonnes moeurs
", conclut à
la nullité de tous les accords susceptibles d'être passés
entre une mère " porteuse " et un couple.
2) La filiation paternelle
Dans la mesure où la conception est postérieure au mariage, l'article 231 du code civil attribue la paternité au mari. Cependant, même lorsque ce dernier a donné son consentement, certains tribunaux accueillent favorablement les actions en désaveu de paternité dès lors que la naissance a été rendue possible par un don de sperme.
3) L'accès aux informations sur les donneurs
Les centres de procréation médicalement assistée appliquent strictement le principe d'anonymat des donneurs, et l'accès aux informations n'est pas du tout organisé.
* *
*
L'inadéquation des règles du code civil aux
problèmes posés par la procréation médicalement
assistée a suscité, depuis plus de dix ans, le dépôt
de nombreuses propositions de loi, tant à la Chambre des
députés qu'au Sénat.
Plusieurs d'entre elles ont été examinées en commun par la
Chambre des députés, adoptées et transmises au
Sénat, qui, à son tour, y a joint plusieurs propositions
déposées en son sein. La discussion en séance publique
devrait avoir lieu au Sénat au mois de février 2000.
Le texte actuellement soumis à l'examen du Sénat
prévoit l'interdiction des techniques exogènes de
procréation médicalement assistée. Il dispose cependant
que, dans l'hypothèse où il serait recouru à de telles
méthodes, la mère ne peut pas se prévaloir de la
possibilité d'accoucher de façon anonyme, et son mari ne peut pas
contester la paternité dans la mesure où il a donné son
consentement à l'opération.
ROYAUME-UNI
Le
droit anglais garantit à chacun la connaissance de ses origines
biologiques
.
|
I. L'ACCOUCHEMENT ANONYME
Cette possibilité n'existe pas. En effet, les noms et l'adresse de la mère figurent nécessairement sur l'acte de naissance de l'enfant , alors que ceux du père n'y figurent de façon obligatoire qu'en cas de naissance légitime.
II. L'ADOPTION
Bien que
l'adoption, qui ne peut concerner qu'un mineur, se traduise
nécessairement par l'établissement d'un nouvel acte de naissance
pour l'adopté, plusieurs dispositions législatives permettent aux
enfants adoptés de prendre connaissance de leurs origines biologiques.
En effet, la loi de 1976 sur l'adoption
(9(
*
))
oblige
le greffe central de l'état civil
à tenir un fichier des
décisions d'adoption, ainsi qu'un fichier des enfants adoptés.
Ils sont tous les deux consultables sur demande, moyennant le paiement d'un
droit.
La loi oblige également à la tenue d'un fichier permettant
d'établir les liens entre le fichier des décisions d'adoptions et
celui des naissances
, lorsque la mention " adopté " figure
dans ce dernier.
Le fichier des liens n'est consultable que par les personnes qui y sont
autorisées par une décision de justice. Cependant,
la loi
oblige le greffe central à fournir à toute personne
âgée de plus de 18 ans qui a fait l'objet d'une adoption, les
renseignements nécessaires pour lui permettre d'obtenir une copie de son
acte de naissance
, qui mentionne en principe les noms des parents et
leur(s) adresse(s) au moment de la naissance. Par ailleurs, si une personne
adoptée âgée de plus de 16 ans et de moins de
18 ans souhaite se marier, le greffe central doit lui indiquer si les
recherches faites dans les registres de l'état civil établissent
l'existence entre elle et son futur conjoint d'un lien de parenté lui
interdisant de contracter le mariage envisagé.
De plus,
depuis 1991, le greffe central de l'état civil doit tenir un
fichier dit des contacts
qui se compose de deux parties :
- la première comporte le nom et l'adresse de toute personne
adoptée qui atteint l'âge de dix-huit ans, qui a manifesté
le souhait d'être éventuellement contactée par l'un de ses
parents et qui a payé le droit d'inscription, actuellement fixé
à 15 livres sterling (soit environ 150 francs) ;
- la seconde comporte les mêmes mentions pour les membres majeurs de
la famille (c'est-à-dire les personnes liées par le sang ou par
le mariage) qui ont exprimé le désir d'entrer en relation avec
une personne adoptée et qui ont payé le droit d'inscription de
30 livres sterling.
A tout moment, les intéressés peuvent indiquer qu'ils souhaitent
ne plus figurer sur le fichier " des contacts ".
Dans la mesure où il a reçu toutes les informations
nécessaires, le greffe peut transmettre aux personnes adoptées
inscrites dans le fichier, sur leur demande, les noms et les adresses des
membres de leur famille.
Au 1
er
mars 1998, 11 641 personnes adoptées et
5 713 personnes comptant des adoptés dans leur famille
étaient inscrites dans le fichier. Depuis l'institution du fichier,
257 rapprochements avaient pu être établis.
III. LA PROCREATION MEDICALEMENT ASSISTEE
Le
régime juridique de la procréation médicalement
assistée est déterminé par une loi adoptée en
novembre 1990 et entrée en vigueur le 1
er
août
1991.
Cette loi prévoit l'anonymat des dons, ainsi que des dispositions
extrêmement précises visant à éviter toute
revendication juridique de la part des parents génétiques. Elle
charge également l'organisme chargé de son contrôle de
tenir un registre permettant aux enfants conçus par procréation
médicalement assistée d'accéder à des informations
concernant les donneurs.
1) La filiation maternelle
D'après l'article 27 de la loi de 1990, la mère
est la femme qui a porté l'enfant, même si la conception
résulte de l'implantation d'un embryon ou d'un ovule, ou d'une
insémination.
Cependant,
la loi
prévoit une exception à cette
règle générale, car elle
n'interdit pas la
procréation pour autrui à titre bénévole
.
Ainsi, lorsqu'un enfant est né par procréation
médicalement assistée, le tribunal peut le déclarer enfant
d'un couple et non de la femme qui l'a mis au monde si les conditions suivantes
sont remplies :
- les gamètes étaient ceux de l'homme ou de sa compagne ;
- le domicile de l'enfant est celui du couple ;
- l'homme et sa compagne ont tous les deux plus de dix-huit ans ;
- l'homme et la femme qui a porté l'enfant ont agi de leur plein
gré ;
- la femme qui a mis l'enfant au monde n'a pas été
rémunérée.
2) La filiation paternelle
L'article 28 de la loi de 1990 dispose que le mari (ou le concubin)
est le père de l'enfant, à moins qu'il n'ait expressément
refusé la procréation médicalement assistée.
Si la paternité d'un enfant conçu par procréation
médicalement assistée ne peut pas être
déterminée de cette façon, le père de l'enfant est
l'homme avec lequel la mère a demandé à
bénéficier de la procréation médicalement
assistée.
3 L'accès aux informations sur les donneurs
La loi
prévoit la mise en place d'une autorité de contrôle
indépendante, la
Human Fertilisation and Embryology Authority
(HFEA), qu'elle charge de tenir un fichier comportant des informations sur
les personnes ayant fait l'objet d'un traitement contre la
stérilité, sur les donneurs de gamètes ou d'embryons et
sur les enfants conçus par procréation médicalement
assistée. Le recoupement de tous ces éléments permettrait
d'établir les origines des enfants nés par procréation
médicalement assistée si tous les parents indiquaient à
leur centre de traitement la naissance de l'enfant. Cependant, l'interdiction
de toute divulgation à laquelle est soumis le personnel de la HFEA et
qui est sanctionnée pénalement, empêche ce recoupement
d'informations.
S'agissant des donneurs, la HFEA a l'obligation d'enregistrer au moins leur nom
et leur date de naissance. Elle enregistre également des renseignements
non identifiants, comme leur taille, leur poids, leur appartenance ethnique, la
couleur de leurs yeux, de leurs cheveux, leurs antécédents
médicaux et familiaux, leur profession, leurs centres
d'intérêt. En outre, ils sont invités à laisser un
message écrit (ou un portrait dessiné) à leurs
éventuels descendants génétiques.
A l'âge de dix-huit ans, toute personne peut s'adresser à
la HFEA, afin de savoir si sa naissance résulte d'une procréation
médicalement assistée. En cas de réponse positive, le
demandeur peut obtenir les seuls renseignements que la HFEA est
habilitée à fournir
, le législateur ayant
chargé le pouvoir réglementaire de déterminer les
indications susceptibles d'être transmises.
Toutefois,
la loi interdit explicitement que l'identité des donneurs
soit révélée, à moins que l'enfant conçu par
procréation médicalement assistée ne souffre d'un
handicap
résultant du refus du donneur de signaler une maladie
congénitale
. Le demandeur peut donc obtenir des renseignements qui
n'identifient pas le donneur. S'il envisage de se marier, le demandeur peut
également savoir s'il a un lien de parenté
génétique avec son futur conjoint. Ce dernier renseignement peut
être obtenu à partir de l'âge de seize ans lorsque
l'intéressé envisage de se marier. La loi sur la
procréation médicalement assistée a donc choisi une
solution identique à celle que prévoit la loi sur l'adoption.
Compte tenu de la date d'entrée en vigueur de la loi, les dispositions
relatives à l'accès aux informations commenceront à
s'appliquer en 2008 pour les personnes de plus de seize ans qui envisagent
de se marier.
De plus, la loi de 1990 prévoit que le secret des origines soit
levé lorsque l'intérêt de la justice l'exige, sans
toutefois que les éléments fournis permettent d'identifier les
donneurs.
SUISSE
Depuis 1992, la Constitution fédérale
reconnaît à chacun le droit à la connaissance de ses
origines génétiques.
|
I. L'ACCOUCHEMENT ANONYME
Cette
possibilité n'existe pas. En effet le code civil prévoit
que : "
A l'égard de la mère, la filiation
résulte de la naissance
".
En outre, le registre des naissances comporte nécessairement le nom et
le domicile de la mère.
II. L'ADOPTION
Il
existe une seule catégorie d'adoption, qui entraîne la rupture des
liens de filiation antérieurs. L'adoption se traduit par
l'établissement d'un nouvel acte de naissance pour
l'adopté
. En effet, l'adoption est mentionnée en marge de
l'acte de naissance, mais, pour en garder le secret, l'inscription d'origine
est remplacée par une feuille complémentaire qui la recouvre et
la masque. La feuille complémentaire, qui devient le nouvel acte de
naissance de l'adopté, ne comporte pas l'identité de ses parents
biologiques.
L'ordonnance sur l'état civil garantit le droit aux origines.
Elle énonce en effet à l'article 29 que :
"
Toute personne a le droit de connaître les données qui
concernent son propre état civil
", et précise que les
renseignements peuvent être fournis au représentant légal
de l'intéressé. Cependant, comme les indications relatives
à la filiation d'origine sont masquées, leur délivrance
suppose, conformément à l'article 138 de l'ordonnance sur
l'état civil, l'autorisation de l'autorité cantonale de
surveillance. Cette disposition, qui garantit le maintien du secret à
l'égard des tiers, a justifié jusqu'à présent une
pratique assez restrictive dans la communication des renseignements relatifs
à la filiation d'origine. Le Conseil fédéral estime que
l'article 138 de l'ordonnance sur l'état civil devra être
adapté si la loi sur la procréation médicalement
assistée entre en vigueur, car cette dernière reconnaît aux
enfants ainsi conçus le droit à la connaissance de leurs origines
génétiques.
III. LA PROCREATION MEDICALEMENT ASSISTEE
En application de l'article 24 novies de la Constitution fédérale, qui fixe les limites de la procréation médicalement assistée, une loi a été adoptée en décembre 1998. Elle entrera en vigueur si le référendum (10( * )) du 12 mars 2000 n'aboutit pas.
1) La filiation maternelle
En vertu
du code civil, la mère est la femme qui met l'enfant au monde.
Par ailleurs, plusieurs dispositions législatives visent à
empêcher que cette dernière ne soit pas la mère
biologique :
- l'article 24
novies
de la Constitution interdit le don
d'embryons et toutes les formes de maternité de substitution ;
- la loi fédérale sur la procréation
médicalement assistée interdit le don d'ovules et
réaffirme l'interdiction du don d'embryons ainsi que de la
maternité de substitution.
2) La filiation paternelle
D'après la loi fédérale sur la
procréation médicalement assistée, la filiation paternelle
est établie conformément aux règles de droit commun :
l'enfant qui est né pendant le mariage a pour père le mari
(11(
*
))
. De plus, l'action en désaveu de la
part du mari est exclue. La loi ne comporte aucune nouvelle disposition
à cet égard, mais elle renvoie au code civil. Or,
l'article
256 du code civil interdit au mari d'intenter une action en désaveu de
paternité lorsqu'il a accepté que la conception résulte du
don d'un tiers
.
Quant à l'enfant conçu au moyen d'un don de sperme, il ne peut
pas contester le lien de filiation à l'égard du mari de sa
mère, et l'action en paternité contre le donneur est impossible,
à moins que le don n'ait pas été réalisé
conformément à la loi.
3) L'accès aux informations sur les donneurs
La loi
fédérale sur la procréation médicalement
assistée prévoit que les établissements qui conservent ou
utilisent du sperme doivent enregistrer certaines informations sur les
donneurs :
- leurs nom et prénom, leurs date et lieu de naissance, leur domicile,
leur nationalité, leur profession et leur formation ;
- des "
renseignements sur leur aspect physique
" ;
- la date du don de sperme ;
- le résultat des examens médicaux.
Après la naissance de l'enfant, toutes ces données sont
transmises à l'
Office fédéral de l'état
civil
. Or,
l'enfant devenu majeur peut demander à l'Office de lui
communiquer les données concernant l'identité du donneur ainsi
que son aspect physique
.
Par ailleurs,
quel que soit son âge
, l'enfant peut obtenir
toutes les données relatives au donneur
à condition de
faire valoir un
intérêt légitime.
Lorsqu'un enfant demande des renseignements sur son ascendance
génétique, l'Office a l'obligation de tenter d'informer le
donneur de la démarche de l'enfant. Même si le donneur refuse de
rencontrer l'enfant, ce dernier peut maintenir sa demande et obtenir les
informations désirées.
(1)
Cette disposition ne s'applique pas si un époux adopte l'enfant naturel
de son conjoint ou un enfant légitime de son conjoint né d'un
précédent mariage, ou si les adoptants sont parents avec l'enfant
au deuxième ou troisième degré.
(2) D'après l'article 74-1-26 de la Loi fondamentale,
la " fécondation artificielle chez l'être humain "
fait partie des matières relevant de la compétence
législative concurrente. Dans ces matières, les Länder
peuvent " légiférer pour autant et aussi longtemps que la
Fédération n'a pas fait, par une loi, usage de sa
compétence législative ".
(3) En pratique, la procréation médicalement assistée
est réservée aux couples mariés, les couples non
mariés devant obtenir l'assentiment de la commission régionale de
l'Ordre des médecins.
(4) Auparavant, la contestation de paternité de la part de l'enfant
n'était possible que dans des cas limitativement
énumérés.
(5) Cette disposition ne s'applique pas lorsque l'enfant adopté est un
enfant du conjoint de l'adoptant. Elle ne s'applique pas non plus lorsque la
filiation de l'enfant n'est déterminée qu'à l'égard
d'un seul parent, que l'adoptant n'est pas du même sexe que ce parent et
qu'il a demandé le maintien du lien de parenté de l'enfant avec
ce parent.
(6) La procréation médicalement assistée n'est pas
réservée aux couples mariés : une femme de plus de
18 ans, mariée ou non, peut y recourir. Lorsque la femme n'est pas
mariée, il est fait application des règles relatives à la
filiation naturelle.
(7) Outre l'accouchement anonyme, la loi prévoit la possibilité
pour les parents de remettre leur enfant aux services de l'aide à
l'enfance en demandant que le secret de l'identité des parents soit
préservé. Cette faculté est limitée aux enfants de
moins d'un an.
(8) Sauf l'adoption que la loi qualifie d'" adoption dans certains cas
particuliers " et qui concerne essentiellement les enfants du conjoint ou
les orphelins.
(9) Cette loi ne s'applique pas en Ecosse.
(10) En Suisse, toute loi fédérale peut faire l'objet d'un
référendum si, dans les quatre-vingt-dix jours suivant sa
publication, 50 000 citoyens ou 8 cantons le demandent. Le
référendum a un effet suspensif : la loi qui y est soumise
n'entre en vigueur que si elle obtient la double majorité des
électeurs et des cantons.
(11) Le don de sperme est réservé aux couples
mariés.