LA MANUTENTION PORTUAIRE
SERVICE DES AFFAIRES EUROPEENNES (janvier 1998)
Table des matières
-
NOTE DE SYNTHESE
- 1) Le Royaume-Uni est le seul pays où la manutention portuaire fonctionne selon le régime de droit commun.
- 2) Des pools de main-d'oeuvre, créés par voie contractuelle ou législative, permettent aux entreprises de manutention allemandes, espagnoles, italiennes et néerlandaises de fonctionner.
- 3) Le fonctionnement consensuel du système belge permet d'éviter les sureffectifs.
- ALLEMAGNE
- BELGIQUE
- ESPAGNE
- ITALIE
- PAYS-BAS
- ROYAUME-UNI
- ANNEXE
NOTE DE SYNTHESE
Afin de
concilier l'irrégularité du trafic et la nécessité d'assurer une situation
décente
aux ouvriers portuaires, plusieurs pays européens ont, au cours de la seconde
guerre
mondiale ou dans les années qui l'ont suivie, modifié le régime juridique de la
manutention portuaire.
Les dispositions adoptées consistaient notamment à protéger la profession en
instituant
des conditions d'emploi prioritaires, voire exclusives, et des formules
d'indemnisation du
non-emploi. Le statut protecteur des ouvriers portuaires fut assez rapidement
mis en
cause, surtout à partir du début des années 70.
En France, c'est la loi n° 92-496 du 9 juin 1992 qui a réformé le
régime de
la manutention portuaire : elle conserve le principe d'une priorité
d'embauche au
profit de la main-d'oeuvre spécialisée, elle généralise la mensualisation des
dockers
professionnels, organise la disparition des dockers professionnels
intermittents et en
confie la gestion aux autorités portuaires locales.
La présente étude tente d'analyser le statut juridique des ouvriers portuaires
dans les
principaux pays européens : l'
Allemagne
, la
Belgique
,
l'
Espagne
,
l'
Italie
, les
Pays-Bas
et le
Royaume-Uni
.
Il apparaît que :
-
le Royaume-Uni est le seul pays où la manutention portuaire fonctionne
selon le
régime de droit commun ;
-
en Allemagne, aux Pays-Bas, en Espagne et en Italie, les entreprises de
manutention
fonctionnent grâce à des pools de main-d'oeuvre créés par voie contractuelle
dans les
deux premiers pays, et par voie législative dans les deux derniers ;
-
en Belgique, l'absence de pool de main-d'oeuvre est compensée, notamment à
Anvers,
par le fonctionnement consensuel des entreprises de manutention.
1) Le Royaume-Uni est le seul pays où la manutention portuaire fonctionne selon le régime de droit commun.
Depuis
l'abolition en 1989 du
Dock Labour Scheme
qui prévoyait un double
monopole, celui
des ouvriers immatriculés et celui des entreprises enregistrées, les
entreprises de
manutention peuvent s'installer librement et embaucher leur personnel selon le
régime de
droit commun.
Le plus souvent, ces ouvriers sont polyvalents et les entreprises recourent au
travail
temporaire pour faire face aux pointes d'activité.
2) Des pools de main-d'oeuvre, créés par voie contractuelle ou législative, permettent aux entreprises de manutention allemandes, espagnoles, italiennes et néerlandaises de fonctionner.
a) En
Allemagne et aux Pays-Bas, l'organisation du travail portuaire résulte
d'accords passés
dans les différents ports.
Le statut des travailleurs portuaires n'est déterminé par
aucun texte
législatif ou
réglementaire.
Les relations entre travailleurs portuaires et entreprises de manutention
résultent de la
convention collective de chaque port. Elles s'apparentent à des relations de
droit
commun. Cependant, la liberté d'embauche n'est pas complète, du moins pour ce
qui
concerne le personnel intermittent.
En effet, à
Rotterdam
, de très loin le principal port des Pays-Bas, les
entreprises
de manutention ont constitué une fondation qui administre une réserve de
main-d'oeuvre
,
à laquelle elles doivent obligatoirement s'adresser lorsque leur personnel
permanent se
révèle insuffisant. Le recrutement direct de main-d'oeuvre extérieure n'est
possible
que si le pool de réserve est insuffisant.
En
Allemagne
, une
loi fédérale de 1950
prévoit la conclusion,
dans chaque
port, d'un accord entre employeurs et syndicats d'ouvriers pour prévoir la
constitution
d'une "
entreprise portuaire générale
", destinée à
employer à titre permanent les ouvriers portuaires qui ne sont pas liés avec une
entreprise de manutention par un contrat de longue durée. De tels accords ont
été
conclus dans les principaux ports.
Les entreprises de manutention ont l'obligation de s'adresser à
l'" entreprise
portuaire générale " lorsqu'elles ont besoin de main-d'oeuvre
temporaire : celle-ci met à leur disposition son propre personnel. En
aucun cas, les
entreprises de manutention ne peuvent donc recruter directement du personnel
intermittent.
Les accords fixent non seulement les conditions d'emploi de la réserve de
main-d'oeuvre
que constitue le personnel de l'" entreprise portuaire
générale ".
Ils établissent aussi une
priorité générale d'embauche au profit des ouvriers
détenteurs d'une carte délivrée par l'" entreprise portuaire
générale
"
.
b) En Espagne et en Italie, l'organisation du travail portuaire est régie
par un texte
à valeur législative.
La réforme espagnole de 1986
a conservé à la manutention portuaire son
caractère de service public. Ce dernier est concédé à des entreprises exerçant
leur
activité de façon concurrentielle.
La réforme a remplacé le monopole précédent (celui de l'Organisation des
travailleurs
portuaires, organisme administratif placé sous l'autorité du ministère du
Travail,
auquel les entreprises avaient l'obligation de s'adresser chaque jour pour
embaucher la
main-d'oeuvre dont elles avaient besoin) par celui d'une
société anonyme
dont la
création dans chaque port est obligatoire.
Cette société anonyme, où l'autorité portuaire détient la majorité, fournit aux
entreprises de manutention la main-d'oeuvre dont elles ont besoin : aussi
bien leur
main-d'oeuvre permanente que leur main-d'oeuvre intermittente. Les entreprises
de
manutention ne peuvent recruter leur personnel directement que si la société
anonyme ne
peut pas répondre à leurs besoins. Pour limiter le recours à la main-d'oeuvre
intermittente, une ordonnance oblige les entreprises de manutention à faire
réaliser au
moins 25 % de leurs activités par leur personnel permanent.
La réforme italienne
, réalisée depuis une dizaine d'années par une
succession
de lois et de décrets-lois,
n'est pas achevée
: le monopole des
coopératives d'ouvriers portuaires et celui des entreprises de manutention sont
peu à
peu démantelés. Aucune législation ne parvient toutefois à fixer de manière
stable le
régime des ouvriers portuaires. Plusieurs ont été successivement mises au
point, mais
leur application concrète se heurte, d'une part, à l'hostilité des travailleurs
portuaires et, d'autre part, à celle des autres parties intéressées qui,
arguant de
violations des règles de concurrence, en appellent aux autorités
communautaires. Ainsi,
à la fin du mois d'octobre 1997, la Commission a enjoint au gouvernement de
modifier la
réglementation actuellement en vigueur et qui avait été adoptée en décembre
1996.
3) Le fonctionnement consensuel du système belge permet d'éviter les sureffectifs.
La loi
organisant le travail portuaire le réserve aux seuls ouvriers reconnus. Les
ouvriers
sont, en principe, recrutés à la tâche par les entreprises de manutention qui ne
peuvent embaucher du personnel occasionnel qu'en cas de manque d'ouvriers
portuaires
reconnus. De plus, les entreprises de manutention doivent passer par
l'intermédiaire du
bureau d'embauche du port.
Les ouvriers qui ont une ancienneté d'au moins deux ans bénéficient, notamment
en cas
de non-emploi, d'indemnités financières supplémentaires versées par un fonds
institué
dans chaque port.
Dans les faits, les entreprises de manutention pratiquent beaucoup le
réengagement sans
passer chaque jour par le bureau d'embauche : elles embauchent les mêmes
ouvriers
qu'elles cherchent à s'attacher. Ce consensus permet un assez bon ajustement des
effectifs aux besoins, notamment à Anvers.
Cependant, les employeurs réclament une révision totale de la loi et la mise en
place,
comme dans les pays voisins, de pools de réserve.
* *
*
Si l'on excepte l'exemple britannique, particulièrement marqué par le libéralisme, cette analyse met donc en évidence une nette distinction entre pays du Nord, qui ont privilégié une démarche contractuelle, et pays du Sud, qui ont choisi la voie législative.
ALLEMAGNE
Le statut
des travailleurs portuaires
n'est déterminé par aucun texte
. Leurs conditions de travail sont
définies dans des
accords collectifs.
|
Les informations qui suivent concernent exclusivement le port de Hambourg . Cependant, à Brême, l'organisation portuaire s'effectue de façon similaire.
I. LE MONOPOLE DES OUVRIERS PORTUAIRES AGREES
1) L'affirmation du monopole
L'accord conclu
en 1951 à Hambourg en application de la loi de 1950 crée une
" entreprise
portuaire générale ". Il s'agit d'une SARL
(
1(
*
)
)
.
L'accord prévoit que cette entreprise peut édicter des règles relatives à
l'emploi du
personnel permanent par les entreprises de manutention, ainsi qu'à l'emploi de
travailleurs occasionnels.
Conformément à cette disposition, les statuts de " l'entreprise
portuaire
générale " de Hambourg
(
Gesamthafenbetriebs-Gesellschaft
: GHBG)
prévoient que le travail portuaire est réservé aux ouvriers détenteurs d'une
carte
professionnelle, délivrée par la GHBG et renouvelée chaque année.
En cas de pénurie temporaire de main-d'oeuvre agréée, la GHBG peut autoriser le
recrutement de personnel auxiliaire.
La loi de 1950 prévoit que, dans la mesure où les employeurs signataires de
l'accord
dans un port donné emploient plus de la moitié des travailleurs portuaires, ses
termes
peuvent être imposés aux autres employeurs qui ne sont pas signataires. L'accord
s'impose ainsi à tous les employeurs du port.
2) Le travail portuaire
Le travail portuaire n'est pas défini au niveau national. Il est déterminé dans les statuts des différentes " entreprises portuaires générales " par la nature des tâches qui le composent (arrimage, transbordement, stockage, amarrage, contrôle du chargement, nettoyage des bateaux et des chaudières...).
3) La délivrance de la carte professionnelle
Elle est effectuée par la GHBG sur demande des employeurs. Elle est renouvelée chaque année. Elle doit être restituée lorsque le contrat de travail prend fin. En revanche, elle reste valable en cas de changement d'employeur. Les statuts de la GHBG ne précisent pas les critères d'attribution de la carte mais il semblerait que l'appartenance syndicale soit décisive.
II. LES DIFFERENTES CATEGORIES D'OUVRIER PORTUAIRES
Les statuts de
la GHBG reconnaissent trois catégories d'ouvriers portuaires :
- ceux qui sont salariés des entreprises de manutention ;
- ceux qui sont employés par la GHBG pour être mis à la disposition des
entreprises de
manutention lorsque leur personnel permanent est insuffisant ;
- les auxiliaires.
III. L'EMPLOI DES OUVRIERS PORTUAIRES
1) Le recrutement
a) Le
personnel permanent des entreprises de manutention
Les statuts de la GMBH exigent que les entreprises de manutention signent des
contrats d'
au
moins deux mois
.
b) Le personnel mis par la GHBG à la disposition des entreprises de
manutention
Les entreprises de manutention ont l'obligation de s'adresser à la GHBG
lorsque leur
personnel permanent est insuffisant
. Le personnel qui est alors mis à leur
disposition est considéré comme faisant partie de leur propre personnel.
La GHBG met à la disposition prioritairement ses salariés, qui constituent le
pool de
réserve. En cas d'impossibilité, elle s'adresse aux services locaux de l'emploi
qui
fournissent la main-d'oeuvre qu'elle met ensuite à disposition des entreprises
portuaires.
En aucun cas, une entreprise de manutention ne peut donc recruter directement
du personnel
intermittent.
2) L'indemnisation du non-emploi
Seuls les ouvriers qui appartiennent au pool de réserve constitué par la GHBG perçoivent un salaire indépendamment de l'activité portuaire.
* *
*
Les entreprises de manutention actives à Hambourg, que ce soit à titre permanent ou à titre temporaire, couvrent les frais de fonctionnement de la GHBG dont le champ d'action ne se limite pas à l'organisation du travail. Elle prend également en charge les oeuvres sociales et la formation. C'est par exemple la direction de la GHBG qui détermine le nombre d'apprentis nécessaire pour chacun des métiers de la manutention.
BELGIQUE
La loi du
8 juin 1972 organisant
le travail portuaire
, dite loi Major, a doté les ouvriers portuaires
d'un statut
légal alors qu'auparavant, la manutention portuaire reposait sur des
accords collectifs
et sur des usages, qui avaient organisé un système d'emploi fermé.
|
I. LE MONOPOLE DES OUVRIERS PORTUAIRES AGREES
1) L'affirmation du monopole
La loi
organisant le travail portuaire énonce à l'article premier :
"
Nul
ne peut faire effectuer un travail portuaire dans les zones portuaires par des
travailleurs autres que les ouvriers portuaires reconnus "
.
Elle stipule par ailleurs que le fait de faire effectuer ou de laisser
effectuer un
travail portuaire par des ouvriers portuaires non reconnus est sanctionné
pénalement et
que l'employeur est civilement responsable des amendes auxquelles ses préposés,
ou ses
mandataires, sont condamnés.
2) La notion de travail portuaire
La loi
organisant le travail portuaire est une loi-cadre qui confie au Roi le soin de
fixer par
arrêté les détails de son application.
Par arrêté royal du 12 janvier 1973, la notion de
travail portuaire
a donc
été définie.
D'après
l'article premier de
l'arrêté, la loi s'applique à "
tous les travailleurs et leurs
employeurs
qui, dans les zones portuaires, effectuent à titre principal ou accessoire
un travail
portuaire, défini comme l'ensemble des manipulations de marchandises qui
sont
transportées par navire de mer ou bâtiment de navigation intérieure, par
wagon de
chemin de fer ou camion, les services accessoires concernant ces
marchandises, que ces
activités aient lieu dans les docks, sur les voies navigables, sur les
quais ou dans les
établissements s'occupant de l'importation, de l'exportation et du transit
de
marchandises, ainsi que toutes les manipulations de marchandises
transportées par navire
de mer ou bâtiment de navigation intérieure à destination ou en provenance
des quais
d'établissements industriels ".
|
Concrètement,
toutes les marchandises à l'exception de quelques-unes
(essentiellement
pétrole
brut, produits pétroliers, gaz liquides et certaines matières premières
liquides),
qui
arrivent dans la zone portuaire, par quelque moyen que ce soit, doivent être
manipulées
par des ouvriers portuaires reconnus
. Les définitions de
" manipulations " et des " services
accessoires "
sont telles que peu d'activités manuelles exercées dans une zone portuaire ne
relèvent
pas de la loi organisant le travail portuaire.
Le travail portuaire est donc défini certes en fonction de sa nature, mais
surtout en
fonction du lieu où il est effectué.
En dehors de la zone portuaire, il ne
peut pas y
avoir " travail portuaire "
. Dans ce cas, c'est le
régime de
droit commun qui s'applique.
3) L'agrément des ouvriers portuaires
Il constitue
la condition préalable à l'embauche
. Les règles de la procédure d'agrément
ont
été fixées distinctement par un arrêté royal
" relatif aux
conditions et
aux modalités de la reconnaissance des ouvriers portuaires
" dans
chaque
zone portuaire.
L'agrément est octroyé par la
sous-commission paritaire
(
2(
*
)
)
du port concerné, en fonction de critères, certes variables d'un port à
l'autre,
mais similaires dans les grandes lignes (moralité, âge, aptitude médicale,
aptitude
professionnelle...). La sous-commission paritaire réunit des représentants des
organisations d'employeurs et de travailleurs. Ses décisions sont des actes
administratifs qui peuvent être contestés devant le Conseil d'Etat.
II. LES DIFFERENTES CATEGORIES D'OUVRIERS PORTUAIRES
Dans chacun des
ports flamands
(
3(
*
)
)
, il y a deux groupes
d'ouvriers
portuaires reconnus :
- les
ouvriers du contingent général
, qui réalisent toutes les
opérations de
transbordement ;
- les
ouvriers de magasin
, qui travaillent uniquement dans les magasins
situés
dans la zone portuaire.
Le contingent général est subdivisé en plusieurs catégories professionnelles
correspondant à différents métiers (ouvriers portuaires travaux généraux,
grutiers,
conducteurs de chariots...) et en
deux sous-groupes A et B
correspondant
à
l'ancienneté puisque les nouveaux embauchés sont affectés au sous-groupe B et
qu'ils
passent dans le sous-groupe A au bout de deux ans.
C'est seulement en cas de manque de main-d'oeuvre officiellement établi que des
ouvriers
occasionnels peuvent être embauchés.
III. L'EMPLOI DES OUVRIERS PORTUAIRES
1) Le recrutement
Les ouvriers
portuaires reconnus doivent se présenter chaque jour au
bureau
d'embauche
. Ils se
présentent à la séance pour laquelle ils ont été désignés. Pendant les dix
premières minutes, l'employeur choisit librement ses ouvriers, et
réciproquement. Si ce
système de libre embauche ne permet pas de satisfaire la demande, le
fonctionnaire de
l'Office flamand pour l'emploi désigne d'office les ouvriers qui doivent
accomplir les
tâches restantes.
En pratique, les employeurs de chaque port sont tous affiliés à une organisation
d'employeurs (la centrale des employeurs du port d'Anvers par exemple) qui agit
comme leur
mandataire. De plus, si la main-d'oeuvre est théoriquement embauchée par
journée de
travail, dans les faits, les employeurs embauchent les mêmes ouvriers tous les
jours,
sans même passer par le bureau d'embauche.
En cas de
pénurie
d'ouvriers portuaires reconnus,
dûment constatée par
l'Office flamand pour le travail
, l'employeur peut embaucher
à titre
exceptionnel
et pour une seule journée, des ouvriers occasionnels
à condition qu'ils
répondent
à certaines conditions (notamment connaissances linguistiques et compétence
professionnelle suffisantes). Ces ouvriers occasionnels n'appartiennent à aucune
organisation spécifique, c'est-à-dire à aucun pool de réserve par exemple.
2) L'indemnisation du non-emploi
Les ouvriers du
groupe A qui ne sont pas engagés touchent non seulement l'allocation de
chômage qui
leur est versée par l'Office national de l'emploi mais aussi une
allocation
complémentaire
versée par le
Fonds pour la sécurité de l'existence
du port
dont ils dépendent. Ce fonds, géré paritairement, est alimenté par des
cotisations
patronales. Le total des deux allocations est égal à 66 % du salaire de
base en
vigueur.
Les ouvriers du groupe B n'ont pas droit à l'allocation complémentaire.
* *
*
Confrontés à la concurrence des ports néerlandais, les employeurs réclament une révision complète de la loi Major . Certains plaident pour l'introduction d'un groupe d'ouvriers polyvalents et liés aux entreprises. Pour éviter les sureffectifs, les entreprises n'engageraient qu'un nombre limité de ces ouvriers. La flexibilité serait garantie non seulement par leur polyvalence mais également par la mise en place d'un pool.
ESPAGNE
Le
décret-loi
(
4(
*
)
)
n° 2 du
23 mai 1986
et le décret royal du
13 mars 1987 pris pour son exécution affirment que la manutention
portuaire
constitue un
service public essentiel relevant de l'Etat.
|
I. LE MONOPOLE DES OUVRIERS PORTUAIRES AGREES
1) L'affirmation du monopole
L'article 9
du décret-loi prévoit que "
seuls pourront être embauchés les
ouvriers
qui sont inscrits sur le registre spécial des travailleurs portuaires
(...)
".
Une loi ultérieure, de 1994, supprime les registres spéciaux et les remplace
par des
certificats professionnels qui sont accordés aux ouvriers accrédités.
2) La définition du service public de la manutention portuaire
Les activités
constituant le service public de la manutention portuaire sont les
suivantes : le
chargement, le déchargement, l'arrimage, le désarrimage et le transbordement des
marchandises qui sont l'objet du trafic maritime dans les bateaux et à
l'intérieur de la
zone portuaire.
Cependant quelques activités, bien que répondant à cette définition, sont
exclues du
service public de la manutention portuaire. Elles sont énumérées à
l'article 2 du
décret-loi. Il s'agit essentiellement d'activités ne correspondant pas au
transport
maritime de marchandises (matériels et marchandises appartenant à
l'administration
portuaire, courrier, véhicules automobiles conduits par leurs utilisateurs...).
De même,
les opérations qui se déroulent sur des bateaux de pêche de moins de
100 tonnes ne
sont pas considérées comme faisant partie du service public de la manutention
portuaire.
En outre, un décret de 1995 a suspendu provisoirement l'application du
décret-loi de
1986 à toutes les activités relatives au poisson.
3) L'agrément des travailleurs portuaires
L'agrément
suppose que les intéressés aient réussi des épreuves d'aptitude et suivi des
cours de
perfectionnement.
C'est la société anonyme chargé dans chaque port de la gestion du service
public de la
manutention portuaire qui fournit la formation professionnelle susceptible de
garantir le
niveau professionnel.
II. LES DIFFERENTES CATEGORIES D'OUVRIERS PORTUAIRES
1) Le personnel permanent des entreprises de manutention
Chacune des
entreprises de manutention participant au service public dispose de personnel
permanent.
L'ordonnance du 15 avril 1987 sur les principes du service public de la
manutention
portuaire impose qu'un
certain pourcentage des activités de manutention de
ces
entreprises soit réalisé par ce personnel permanent
.
Ce pourcentage, fixé par chaque administration portuaire, ne peut cependant pas
être
inférieur à 25 %. Seuls les salariés qui détiennent un contrat de travail à
temps plein d'une durée supérieure ou égale à trois ans sont considérés comme
faisant partie du personnel permanent.
Auparavant, un tel personnel permanent n'existait pas : les entreprises
devaient
nécessairement passer chaque jour par l'OTP pour embaucher les ouvriers
portuaires selon
un système de tour de rôle.
2) Le personnel intermittent des entreprises de manutention
Dans la mesure
où le personnel permanent n'est pas suffisant, les entreprises de manutention
peuvent
faire appel à du
personnel intermittent
,
que doit leur fournir la
société
anonyme du port.
Le recours au personnel intermittent est interdit lorsque le personnel
permanent fait
grève.
III. L'EMPLOI DES OUVRIERS PORTUAIRES
1) Le recrutement
Les ouvriers
portuaires détenteurs d'un certificat professionnel sont salariés, soit d'une
entreprise
de manutention, soit de la société anonyme d'un port.
a) Le recrutement initial
Le recrutement initial est effectué par la société anonyme
qui conclut
avec les
ouvriers portuaires un contrat de travail de type particulier.
Il s'agit d'un
contrat à durée indéterminée qui peut être suspendu
lorsqu'un
ouvrier portuaire conclut un contrat de travail avec une entreprise de
manutention pour
faire partie de son personnel permanent. Il peut être repris ensuite.
b) Le recrutement du personnel permanent des entreprises de manutention
Une entreprise de manutention qui a besoin de personnel permanent ne peut pas
le recruter
directement : elle doit s'adresser à la société anonyme de son port en lui
adressant une demande précisant toutes les conditions dans lesquelles
s'effectuera
l'emploi offert.
La demande peut être nominative ou anonyme. Dans ce cas, la société anonyme du
port
doit y répondre en respectant l'ordre d'ancienneté des ouvriers portuaires
accrédités.
Ces derniers ne peuvent pas refuser de manière répétée les offres qui leur sont
proposées si elles leur permettent d'obtenir le même revenu annuel que celui
qui leur
est garanti par le société anonyme. On considère comme refus répété le fait de
refuser deux offres au cours d'une période de deux ans.
c) Le recrutement du personnel intermittent des entreprises de
manutention
En priorité par l'intermédiaire de la société anonyme
Lorsqu'une entreprise de manutention a besoin de main-d'oeuvre parce que son
personnel
permanent n'est pas suffisant, elle doit s'adresser à la société anonyme du
port qui
lui fournit, à titre temporaire, le personnel dont elle a besoin.
Cette règle ne vaut que pour les activités qui constituent le service public de
la
manutention portuaire, et non pour des tâches administratives par exemple.
Le personnel ainsi mis à disposition demeure employé par la société anonyme,
mais
c'est l'entreprise de manutention qui détient le pouvoir de direction et le
pouvoir
disciplinaire. La société anonyme a l'obligation de respecter un tour de rôle
lorsqu'elle met son personnel à disposition d'une entreprise de manutention.
Les frais de fonctionnement de la société anonyme sont couverts par les
cotisations des
entreprises privées. Les cotisations nécessaires pour couvrir le coût de la
main-d'oeuvre sont proportionnelles à l'utilisation qui en est faite par les
entreprises
de manutention.
Directement
C'est seulement si la société anonyme n'est pas en mesure de lui fournir le
personnel
dont elle a besoin que l'entreprise de manutention peut recruter directement du
personnel.
Elle doit alors recruter des ouvriers portuaires accrédités, pour une durée qui
ne
saurait dépasser une journée. Le respect du tour de rôle est également imposé
dans ce
cas.
Au cas où aucun ouvrier accrédité ne serait disponible, l'entreprise de
manutention
peut faire appel à du personnel non accrédité.
* *
*
Afin que chaque société anonyme sache à tout moment de quel effectif elle dispose, ses salariés doivent lui signaler toute indisponibilité, ainsi que les motifs de cette dernière.
2) L'indemnisation du non-emploi
Ce système de recrutement permet à chaque ouvrier portuaire accrédité de percevoir un minimum garanti, indépendamment du trafic du port. En effet en dehors des périodes où ils travaillent pour une entreprise de manutention, les ouvriers portuaires accrédités restent salariés de la société anonyme du port. Il existe un accord national passé entre l'administration, les organisations patronales et les syndicats ouvriers qui définit notamment un salaire minimum. Dans chaque port, cet accord est appliqué par une convention collective.
ITALIE
La législation
italienne dans ce
domaine se caractérise par une
très grande instabilité
.
Le
monopole des
" compagnies portuaires " (c'est-à-dire des
coopératives d'ouvriers
portuaires) pour l'exécution de la manutention, et celui des entreprises de
manutention,
en général contrôlées par le gestionnaire du port, pour l'exploitation des
opérations
de manutention ont été condamnés en décembre 1991
(
6(
*
)
)
par la Cour de justice des Communautés européennes.
|
PAYS-BAS
Le statut
des travailleurs portuaires
n'est déterminé par aucun texte
. Leurs conditions de travail sont
définies dans des
accords collectifs
signés par les organisations d'employeurs
portuaires et les
syndicats.
|
ROYAUME-UNI
Le
Dock
Labour Scheme
(DLS),
organisation du travail portuaire, qui régissait les rapports sociaux dans
les ports
britanniques et qui pouvait être rapproché du régime institué par la loi
française de
1947, a été
aboli le 3 juillet 1989
. Le DLS avait été introduit
en 1947
afin de permettre aux ports de disposer d'une main-d'oeuvre suffisamment
abondante pour
maintenir un trafic continu.
|
I. LA SUPPRESSION DU MONOPOLE DES " OUVRIERS PORTUAIRES IMMATRICULES "
Le DLS
prévoyait un
double monopole
:
- celui des " ouvriers portuaires immatriculés ", pour
réaliser la
manutention portuaire dans les limites du port ;
- celui des employeurs enregistrés, pour employer les " ouvriers
portuaires
immatriculés ".
Le monopole des ouvriers portuaires variait d'un port à l'autre car la
définition du
travail portuaire, et donc des tâches réservées aux dockers, n'avait pas été
établie
au niveau national, mais localement en fonction de facteurs historiques. Les
infractions
au monopole étaient sanctionnées par des amendes et/ou des peines de prison.
Le DLS ne s'appliquait pas à tous les ports (voir annexe page 23). A
l'origine, les
ports non concernés par le DLS ne représentaient que 2 % du trafic mais,
au moment
de l'abolition du système, ils en représentaient 30 % en tonnage et
52 % en
valeur.
Le
Dock Work Act
du 3 juillet 1989
, entré en vigueur le même
jour, a
précisément été adopté pour "
abolir le régime d'emploi des
travailleurs de 1967, abroger la loi de 1946 organisant l'emploi des
travailleurs
portuaires, et établir les dispositions pour la dissolution du Bureau national
pour
l'emploi des dockers
". Tel est en effet le titre de
la loi de
1989
qui, en supprimant le DLS, a effacé la distinction entre les ports qui y
étaient soumis
et les autres, et a donc
permis à toutes les entreprises de fonctionner de
la même
façon : le travail dans les ports est libre
. Il est organisé sur la
base
d'accords locaux négociés entre les employeurs et les syndicats, ou avec les
employés
individuellement.
II. L'EMPLOI DES OUVRIERS PORTUAIRES
Les entreprises
de manutention emploient de façon permanente des ouvriers portuaires qui sont
soumis au
droit
commun du travail
. Le plus souvent, ces ouvriers sont
polyvalents
.
En outre,
elles ont recours, pendant les périodes de pointe, à des dockers occasionnels.
En pratique, le
travail temporaire s'est beaucoup développé,
certaines
sociétés
s'étant même spécialisées dans la fourniture temporaire de main-d'oeuvre
portuaire.
ANNEXE
Royaume-Uni :
Situation des principaux ports
par rapport au DLS au moment de son abolition
( 1 ) A Brême, c'est une association.
( 2 ) Il y a une sous-commission paritaire dans chaque zone portuaire et une commission paritaire au niveau national.
( 3 ) Car toute la façade maritime est située en Flandre.
(
4
)
C'est en raison de la dissolution, qui a empêché le Parlement de légiférer, que
la
matière est régie par un décret-loi et non par une loi.
(
5
) La loi de 1992 transfère en effet aux autorités portuaires la
gestion des
ports dits d'intérêt général, qui relèvent de la compétence de l'Etat.
(
6
) Dès le début de l'année 1989, un décret avait tenté de mettre
fin à
ce monopole, mais ils suscita une telle tension sociale qu'il fut contredit,
quelques
semaines plus tard, par un accord passé avec les syndicats.