LA DETENTION PROVISOIRE
Table des matières
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NOTE DE SYNTHESE
- 1) Seules la Belgique et, dans une moindre mesure, l'Espagne font référence à une notion comparable à l'" ordre public " pour justifier la mise en détention provisoire.
- 2) La limitation de la durée de la détention provisoire résulte de règles très variables.
- 3) Les législations étrangères sur la détention provisoire ne prévoient pas de procédures comparables au " référé-liberté " français.
- ALLEMAGNE
- ANGLETERRE ET PAYS DE GALLES
- BELGIQUE
- ESPAGNE
- ITALIE
NOTE DE SYNTHESE
Le
projet de loi français sur la détention provisoire tend à
modifier le code de procédure pénale pour :
- limiter les conditions de fond du placement en détention provisoire
grâce à une redéfinition de la référence
à l'" ordre public " ;
- réduire la durée de la détention provisoire par la
modification de ses conditions de renouvellement en matière criminelle ;
- renforcer les garanties offertes contre les détentions abusives.
Dans la perspective du prochain examen du projet par le Sénat, on a
choisi d'analyser les dispositions des législations de nos proches
voisins relatives à ces trois aspects de la détention provisoire.
On a retenu cinq pays : l'
Allemagne
, l'
Angleterre
et le
Pays
de Galles
,
la
Belgique
,
l'
Espagne
et
l'
Italie
.
En Angleterre et au Pays de Galles, s'il n'est jamais fait explicitement
référence à la détention provisoire, celle-ci peut
cependant être comprise comme une exception au droit à la
liberté provisoire dont jouit toute personne qui a été
arrêtée, et qui ne peut être refusé que dans les cas
prévus par la loi. Depuis quelques années, on note une tendance
à l'augmentation du nombre de ces cas.
*
* *
1) Seules la Belgique et, dans une moindre mesure, l'Espagne font référence à une notion comparable à l'" ordre public " pour justifier la mise en détention provisoire.
La loi
belge de 1990 sur la détention provisoire exige la réunion de
trois conditions parmi lesquelles l'"
absolue nécessité pour
la sécurité publique
". Cependant, pour
éviter le recours abusif à cet argument, le mandat d'arrêt
doit préciser les faits qui justifient la détention eu
égard au critère de l'"
absolue nécessité
pour
la sécurité
publique
".
Le code espagnol de procédure pénale exige également la
réunion de plusieurs conditions, parmi lesquelles une peine encourue
supérieure à six ans de prison. Cependant,
l'inquiétude
provoquée dans la population
par une infraction peut justifier que
son auteur présumé soit placé en détention
provisoire même si la peine qu'il encourt est inférieure ou
égale à six ans de prison.
En revanche, ni la loi anglaise sur la liberté provisoire, ni les codes
de procédure pénale allemand et italien ne mentionnent de notion
équivalente à l'ordre public pour justifier la détention
provisoire.
En Allemagne, la notion de "
trouble à l'ordre
public
", ajoutée à la législation en 1935 comme
motif de détention provisoire, a été supprimée
dès 1945. De plus, la Cour constitutionnelle, dans sa décision de
1965 consécutive à l'adoption de la loi de 1964 modifiant les
dispositions du code de procédure pénale sur la détention
provisoire, a notamment précisé que "
la prise en compte
de l'émotion suscitée dans l'opinion publique ne saurait
justifier la détention provisoire
".
2) La limitation de la durée de la détention provisoire résulte de règles très variables.
a) Il
n'y a pas de limitation absolue de durée en Allemagne et en Belgique.
En Allemagne, si l'on excepte les détentions provisoires fondées
sur le risque de récidive et expressément limitées
à un an, il n'existe aucune limitation absolue de la durée de la
détention provisoire. En effet, si celle-ci ne peut normalement pas
excéder six mois, elle peut être prolongée. Toutefois, le
principe de proportionnalité empêche la prolongation de la
détention provisoire au-delà de ce qui est strictement
nécessaire. Les prolongations de trois mois, renouvelables, ne peuvent
être prononcées que "
si une difficulté
spécifique
ou l'étendue particulière des
investigations ou un autre motif
important
" le justifient. Les
conditions de prolongation sont alors contrôlées par un tribunal
de niveau supérieur.
De même, en Belgique, il n'existe pas de limitation absolue de la
durée de la détention provisoire. Le premier mandat d'arrêt
n'est valable que cinq jours. La détention provisoire est ensuite
renouvelable par tranches d'un mois. Les prolongations doivent être
motivées par des raisons aussi importantes que celles qui ont
justifié le mandat d'arrêt initial.
b) En Espagne et en Italie, la durée totale de la détention
provisoire est expressément limitée par le code de
procédure pénale.
En Espagne, la durée maximale de la détention provisoire varie de
trois mois à deux ans en fonction de la gravité de la peine
encourue. Lorsque la peine encourue est supérieure à six mois de
prison, un doublement de cette durée maximale est cependant possible si
la durée initialement prévue est insuffisante pour permettre
l'achèvement du procès.
En Italie, la durée maximale de la détention provisoire varie en
fonction de la gravité des délits et de chaque étape du
procès. Le second paramètre tend à accélérer
le déroulement de la procédure. Des prolongations sont possibles
dans des cas énumérés par la loi, et qui concernent
essentiellement les enquêtes difficiles. Compte tenu de ces
éventuelles prolongations, la durée totale de la détention
provisoire ne saurait excéder des maxima absolus variant entre deux et
six ans selon la gravité de la peine encourue.
c) En Angleterre et au Pays de Galles, la durée de la
détention provisoire est doublement limitée.
En effet, après le premier refus de liberté provisoire, personne
ne peut être mis en détention plus de vingt-huit jours sans
être présenté de nouveau à un juge. Celui-ci peut
alors ordonner de nouvelles prolongations de la détention provisoire. En
toute circonstance, le
refus d'octroyer
la liberté provisoire
doit être motivé
.
En outre, la loi fixe des durées maximales de détention. Pour les
infractions les plus graves, la durée de détention entre la
première comparution d'un inculpé devant un juge et son jugement
par une cour d'assises ne peut excéder cent quatre vingt-deux jours,
soit six mois. Au terme de ce délai, l'accusé est
immédiatement remis en liberté.
3) Les législations étrangères sur la détention provisoire ne prévoient pas de procédures comparables au " référé-liberté " français.
Si
toutes prévoient la possibilité pour le détenu d'exercer
des recours contre les décisions de mise en détention, jamais
aucun de ces recours n'a d'effet suspensif. Tout au plus, la décision
consécutive au recours doit-elle être rendue dans des
délais brefs. Les délais les plus courts sont ceux prescrits par
le code de procédure pénale espagnol : la décision
relative à un recours de réformation de la décision de
placement en détention provisoire doit être rendue dans les
soixante-douze heures.
Par ailleurs, à l'image de l'Angleterre, l'Espagne a adopté en
1984 une loi organique sur
l'habeas corpus
, qui permet à une
personne illégalement détenue d'être remise
immédiatement en liberté.
ALLEMAGNE
La Loi
fondamentale énonce que : "
la liberté de la personne est
inviolable. Des restrictions ne peuvent être apportées
[...]
qu'en vertu d'une loi
".
|
I - LES CONDITIONS DE FOND DU PLACEMENT EN DETENTION PROVISOIRE
Elles
sont déterminées par les
articles 112 et 112a du code de
procédure pénale
.
La détention provisoire ne peut être prononcée que dans
certaines circonstances. Elle doit en outre respecter le principe de
proportionnalité.
1) Les circonstances justifiant la mise en détention provisoire
Pour
qu'une personne soit placée en détention provisoire, il faut
qu'il existe à la fois :
- un "
lourd soupçon
" contre elle,
c'est-à-dire une forte présomption de culpabilité (alors
que le déclenchement des poursuites ne suppose qu'un
"
soupçon suffisant
"), qui doit être
motivée par le juge signataire du mandat d'arrêt ;
- un
motif d'appliquer la détention provisoire
.
Le code de procédure pénale
énumère
limitativement les motifs de détention provisoire
:
- la
fuite
ou le
risque de fuite
;
- le
risque
"
d'obscurcissement
",
c'est-à-dire le risque que l'accusé détruise les
éléments de preuve, les modifie ou les falsifie ou qu'il fasse
pression sur des coaccusés, des témoins, des experts ou des tiers
et empêche ainsi la manifestation de la vérité ;
- le
danger de récidive
, qui ne peut cependant être pris en
considération que dans certains cas (infractions contre les moeurs,
coups et blessures, vols les plus graves, incendies, infractions en
matière de stupéfiants...).
Ce dernier motif de détention était d'abord restreint aux
infractions contre les moeurs. Il a ensuite été étendu
à d'autres infractions, mais sa prise en compte suppose alors soit une
éventuelle condamnation à une peine de prison d'au moins un an,
soit que l'accusé ait déjà été
condamné à une peine de prison au cours des cinq dernières
années. Bien qu'il outrepasse le but de la détention provisoire,
qui est de garantir le bon déroulement de la procédure, le risque
de récidive a été considéré comme
constitutionnel par la Cour constitutionnelle fédérale en 1965.
Toutefois,
l'existence d'un motif de détention provisoire n'est pas
nécessaire pour les infractions les plus graves, limitativement
énumérées
à l'article 112 du code de
procédure pénale : homicide, constitution d'une association
terroriste, génocide et attentat à l'explosif. Dans cette
hypothèse, selon le code de procédure pénale, le
critère du " lourd soupçon " suffit à justifier
la détention provisoire. La Cour constitutionnelle considère
toutefois que le risque de fuite ou le risque d'obscurcissement doit
également être vérifié, bien qu'avec moins de
rigueur que dans les autres cas.
2) Le principe de proportionnalité
De plus,
le code de procédure pénale soumet la détention provisoire
au
principe de proportionnalité
: elle ne peut pas être
ordonnée lorsqu'elle serait "
hors de proportion avec
l'importance de l'affaire et avec la peine ou la mesure de
rééducation et de sûreté qui pourrait être
prononcée
".
C'est pourquoi, pour les infractions passibles d'au plus six mois de prison ou
d'une amende de 180 "
taux journaliers
"
(1(
*
))
, l'article 113 exclut la détention provisoire
pour risque "
d'obscurcissement
" et ne l'admet que
très restrictivement pour risque de fuite.
La Cour constitutionnelle fédérale a conféré au
principe de proportionnalité valeur constitutionnelle
. Dans sa
décision de 1965 consécutive à l'adoption de la loi
modifiant la procédure pénale, elle a souligné que le juge
ne devait pas "
perdre de vue le but de la détention
provisoire ",
précisant que
" ni la gravité de
l'infraction, ni la culpabilité, ni même la prise en compte de
l'émotion suscitée dans l'opinion publique qui estime
intolérable qu'un meurtrier reste en liberté ne sauraient
justifier la détention provisoire.
"
La notion de trouble à l'ordre public, ajoutée en 1935 comme
motif de détention provisoire, a été supprimée en
1945.
II - LA DUREE DE LA DETENTION PROVISOIRE
De
façon générale, l'article 120 du code de procédure
pénale prescrit que la détention provisoire prend fin dès
que les conditions de son application ne sont plus réunies ou que sa
prolongation serait disproportionnée par rapport à l'affaire en
cause. De plus, l'article 116 oblige le parquet à contrôler la
détention provisoire pendant toute sa durée. Toutefois,
aucune
limitation absolue de la durée
de la détention provisoire
n'est prévue. Seules les détentions provisoires fondées
sur le risque de récidive sont expressément limitées
à un an.
La détention provisoire ne peut normalement pas excéder six
mois
. Elle peut cependant être prolongée par périodes
de trois mois "
si une difficulté spécifique ou
l'étendue particulière des investigations ou un autre motif
important
" le justifient. Les conditions de prolongation sont alors
contrôlées par le tribunal régional supérieur,
comparable à la cour d'appel.
III - LES POSSIBILITES DE RECOURS OFFERTES AU DETENU
Pendant
toute la durée de la détention provisoire, l'inculpé peut
présenter au juge qui a délivré le mandat d'arrêt
une "
demande de vérification de
détention
", qui peut, si elle est acceptée, se
traduire par sa mise en liberté sans restriction ou par des mesures de
remplacement de la détention provisoire. La demande peut être
renouvelée, mais seulement si la durée de la détention
atteint trois mois et si deux mois la séparent de la demande
précédente.
L'inculpé peut également, mais
subsidiairement
, intenter
un
recours
contre la délivrance du mandat d'arrêt. Ce
recours, également exercé auprès du juge qui a
délivré le mandat d'arrêt, ne peut être
utilisé qu'une fois. Si le juge considère le pourvoi
fondé, il corrige sa décision ; sinon, il doit transmettre le
dossier dans les trois jours à la chambre pénale du tribunal
régional. Si celle-ci rejette à son tour le pourvoi, l'affaire
est portée devant le tribunal régional supérieur.
Dans la pratique, le premier moyen est beaucoup plus employé que le
second.
Par ailleurs, lorsque l'accusé n'a pas de défenseur et n'a pas
introduit de recours, un contrôle de la justification de la
détention provisoire est automatiquement organisé au bout de
trois mois.
ANGLETERRE ET PAYS DE GALLES
Si la
notion de détention provisoire n'existe pas de façon explicite
dans la législation, elle peut cependant être comprise
par
opposition au droit à la liberté
provisoire
.
|
I - LES CONDITIONS DE FOND DU PLACEMENT EN DETENTION PROVISOIRE
Il s'agit en fait des circonstances dans lesquelles une personne qui, a priori a droit à la liberté sous caution, peut se voir refuser cette liberté. Dans ce cas, les tribunaux doivent toujours motiver leurs refus d'accorder la liberté provisoire .
1) Les personnes inculpées d'un délit punissable d'emprisonnement
La
liberté provisoire peut leur être refusée dans les cas
qu'énumère la première partie de l'annexe n° 1 du
Bail Act
de 1976 modifié, c'est-à-dire lorsque le tribunal
pense qu'il existe des raisons suffisantes de croire qu'en cas de
libération, la personne poursuivie :
- ne se rendrait pas au tribunal,
- ou commettrait un délit pendant sa liberté provisoire,
- ou interférerait avec des témoins ou encore ferait obstacle
à la bonne marche de la justice, qu'il s'agisse de sa propre affaire, ou
de celle d'une autre personne.
En outre, conformément aux modifications apportées par le
Criminal Justice and Public Order Act
de 1994, lorsque le délit
en cause a été commis par une personne en liberté sous
caution, celle-ci peut également être exclue du
bénéfice d'une nouvelle liberté provisoire.
Dans l'appréciation de ces différentes circonstances, le juge
doit notamment prendre en considération :
- la nature et la gravité de l'infraction, ainsi que la manière
selon laquelle le délinquant a probablement agi ;
- le caractère, les antécédents, l'environnement social de
l'inculpé ;
- éventuellement, la façon dont il a rempli ses obligations lors
d'une précédente mise en liberté sous caution ;
- le poids des charges réunies contre lui.
Lorsque l'inculpé est poursuivi pour meurtre, homicide involontaire ou
viol et qu'après examen des faits, le tribunal décide de lui
accorder la liberté sous caution, le tribunal doit motiver cette
décision et verser ses conclusions motivées au dossier.
Par ailleurs, la liberté sous caution peut ne pas être
accordée :
- s'il est préférable de garder l'inculpé en
détention pour sa propre sécurité,
- ou si le tribunal ne dispose pas d'informations suffisantes pour se prononcer
sur la détention ou la liberté provisoire,
- ou si la détention est nécessaire afin de mener l'enquête
à son terme.
2) Les personnes inculpées d'un délit non punissable d'emprisonnement
La
deuxième partie de l'annexe 1 du
Bail Act
de 1976 modifié,
énumère les conditions dans lesquelles la liberté
provisoire peut leur être refusée.
C'est le cas :
- lorsque l'intéressé a manqué aux obligations qui lui
avaient été imposées lors d'une précédente
liberté sous caution et que le tribunal estime qu'il récidivera,
- ou si la détention est nécessaire à la protection de
l'inculpé.
En pratique, les tribunaux refusent rarement d'accorder la liberté sous
caution pour des délits sans gravité.
II - LA DUREE DE LA DETENTION PROVISOIRE
Avant le
jugement, l'inculpé doit théoriquement être
présenté tous les huit jours devant le juge afin qu'il renouvelle
la détention provisoire. Toutefois,
le Criminal Justice Act
de
1988, entré en vigueur en 1991, autorise la prolongation de la
détention sans que l'inculpé ne comparaisse à nouveau
devant le juge. La durée totale de la détention provisoire avant
cette comparution peut ainsi atteindre vingt-huit jours. Après la
comparution, la détention peut encore être prolongée.
Parallèlement à ces délais de renouvellement de la
décision de détention, il existe des limites à la
durée pendant laquelle une personne peut être détenue avant
son procès.
Ces limites varient en fonction de la catégorie de l'infraction en
cause.
1) Pour une infraction pouvant être jugée par une magistrates' court ou par la Crown Court
La
période de détention maximale entre l'audience de première
comparution et le début du procès devant une
magistrates'
court
ou la décision de renvoi devant la
Crown Court
est de
soixante-dix jours.
Lorsque l'affaire est renvoyée devant la
Crown Court
,
l'accusé ne peut être détenu plus de cent-douze jours entre
la décision de renvoi et le jugement.
Toutefois, si dans les cinquante-six jours suivant l'audience de
première comparution une
magistrates' court
décide de
procéder elle-même au jugement, la durée de
détention est ramenée à cinquante-six jours de la
première comparution au début du procès.
2) Pour une infraction du seul ressort de la Crown Court
L'accusé ne pourra être détenu plus de soixante-dix jours entre l'audience de première comparution devant une magistrates' court et la décision de transmission de l'acte d'accusation à la Crown Court . En outre, entre cette transmission et le jugement devant la Crown Court , l'accusé ne pourra être détenu plus de cent-douze jours.
*
* *
Si les
délais indiqués pour ces deux catégories d'infraction ne
sont pas respectés, l'accusé recouvre immédiatement son
droit à la liberté sous caution.
Il n'existe pas de limite à la durée de détention
provisoire pour les infractions mineures du seul ressort des
magistrates'
court
. Cette absence est justifiée par les délais
imposés à ces tribunaux par le
Magistrates' Courts Act
de
1980 qui prévoit qu'il ne peut s'écouler plus de trois semaines
entre l'audience de première comparution et le prononcé de la
sentence, lorsque l'accusé est en détention provisoire.
III - LES POSSIBILITES DE RECOURS OFFERTES AU DETENU
Les
décisions de refus de l'octroi de la liberté provisoire sont
susceptibles de recours devant la
Crown Court
et la
High Court
.
En matière de liberté sous caution, ces deux tribunaux sont
totalement indépendants l'un de l'autre. Aussi, les recours contre les
décisions des
magistrates' courts
peuvent-ils
indifféremment être portés devant l'un ou l'autre de ces
tribunaux et même successivement devant l'un puis l'autre.
1) Les recours devant la Crown Court
La
Crown Court
peut accorder la liberté sous caution à un
défendeur qui se l'est vue refuser par une
magistrates' court
dans l'une des circonstances suivantes :
- le défendeur a été placé en détention
provisoire après que le tribunal a attentivement examiné sa
demande détaillée ;
- le défendeur a été placé en détention dans
l'attente de son procès ou de l'audience de détermination de la
peine devant la
Crown Court
;
- il a été condamné devant une
magistrates' court
,
s'est vu infliger une peine de prison et refuser la liberté sous caution
alors qu'il a fait appel de sa condamnation devant la
Crown
Court
.
2) Les recours devant la High Court
La
High Court
peut être saisie des recours contre les
décisions de refus d'octroi de la liberté provisoire des
magistrates' courts
.
En outre, elle est compétente pour accorder la liberté aux
personnes qui ont fait appel d'un jugement auprès de la
Crown
Court
ou font appel auprès d'elle d'un jugement de la
Crown
Court
ou d'une
magistrates' court
.
*
* *
Par ailleurs, une personne qui s'estime détenue sans motif légitime peut toujours requérir une ordonnance d' Habeas Corpus contre la personne qui la détient.
BELGIQUE
Hors le flagrant délit, la constitution exige, pour toute arrestation, " l'ordonnance motivée du juge, qui doit être signifiée au moment de l'arrestation, ou au plus tard dans les vingt-quatre heures ". La loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive a été adoptée pour remplacer la loi de 1874 que les exigences de la Convention européenne des droits de l'homme imposaient de modifier. |
I - LES CONDITIONS DE FOND DU PLACEMENT EN DETENTION PROVISOIRE
Elles
sont déterminées par l'
article 16 de la loi de 1990
qui
exige à la fois :
- l'"
absolue nécessité pour la sécurité
publique
", les faits qui motivent la détention devant
être mentionnés dans le mandat d'arrêt ;
- l'existence d'un crime ou d'un délit punissable
d'une peine d'au
moins un an d'emprisonnement
;
- des "
indices sérieux de culpabilité
".
En outre, si la peine applicable n'est pas supérieure à quinze
ans de travaux forcés, la loi exige une condition supplémentaire
: le risque de fuite, de collusion avec des tiers ou d'altération des
preuves si l'inculpé était laissé en
liberté.
II - LA DUREE DE LA DETENTION PROVISOIRE
Le
mandat d'arrêt initialement délivré n'est valable que
cinq jours,
à moins qu'il n'ait été prolongé
avant l'expiration de ce délai par la chambre du conseil
(2(
*
))
, qui entend l'inculpé et son conseil, mais qui
siège à huis clos.
La prolongation
doit être motivée par des raisons aussi
importantes que celles qui ont justifié le mandat d'arrêt. Avant
de prendre une éventuelle décision de maintien en
détention provisoire, la chambre du conseil entend le détenu et
son conseil, et ceux-ci ont alors accès au dossier.
La prolongation est possible pour
un mois
. Elle est
renouvelable
,
la loi ne fixant
aucune limite à la durée de la
détention provisoire
. Cependant, après six mois de
détention provisoire (un an si la peine applicable dépasse quinze
ans de travaux forcés), l'inculpé peut demander sa comparution
devant la chambre du conseil en audience publique.
III - LES POSSIBILITES DE RECOURS OFFERTES AU DETENU
Le
mandat d'arrêt initial n'est susceptible d'aucun appel
.
En revanche
, le détenu peut faire appel de l'ordonnance de maintien
en détention provisoire
dans les vingt-quatre heures suivant le jour
où la décision de maintien lui a été
signifiée.
L'appel est porté devant la chambre des mises en accusation de la cour
d'appel. Celle-ci doit rendre sa décision dans les quinze jours, faute
de quoi l'inculpé est remis en liberté.
ESPAGNE
L'article 17 de la constitution admet le recours aux mesures
privatives de liberté "
dans les cas et sous les formes
prévues par la loi
". Il précise que "
la loi
déterminera la durée maximale de la détention
provisoire
".
Cette loi a notamment limité le champ d'application de la détention provisoire en en excluant a priori les infractions qui ne sont pas punies d'au moins six ans de prison alors qu'auparavant, la limite était de six mois de prison. |
I - LES CONDITIONS DE FOND DU PLACEMENT EN DETENTION PROVISOIRE
Elles
sont déterminées par les
articles 503 et 504 du code de
procédure pénale
.
Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire, il faut
que les conditions suivantes soient réunies :
1) qu'il existe un "
fait représentant les caractères
d'une
infraction punissable
" ;
2) que la
peine encourue soit supérieure à six ans de
prison
, à moins que le juge ne considère que les
antécédents pénaux de l'inculpé, les circonstances
de l'infraction, l'inquiétude qu'elle a provoquée dans la
population ou la fréquence de telles infractions ne justifient la
détention provisoire, ou que l'inculpé n'ait pas
déféré à la convocation du juge alors qu'il n'avait
pas de motif légitime pour le faire ;
3) qu'il y ait des
indices de culpabilité suffisants.
Inversement, lorsque la peine encourue est supérieure à six ans
de prison, le juge peut, moyennant caution, placer l'inculpé en
liberté provisoire s'il estime qu'il ne se soustrait pas à la
justice et que ni les antécédents pénaux de
l'inculpé, ni les circonstances de l'infraction, ni ses
conséquences sur la population ne justifient la mise en détention
provisoire.
II - LA DUREE DE LA DETENTION PROVISOIRE
De
façon générale, l'article 528 du code de procédure
pénale prescrit que la détention provisoire prend fin lorsque
cessent les motifs qui l'ont justifiée. Il invite également tous
les intervenants dans le procès pénal à s'efforcer de
limiter autant que possible la durée de la détention provisoire.
La détention provisoire ne peut être illimitée que lorsqu'a
été déclaré l'état d'exception. Dans tous
les autres cas, sa durée est limitée. Elle varie en fonction de
la peine encourue selon le tableau suivant :
Peine encourue |
Durée maximale de la détention provisoire |
Possibilité de prolongation |
Jusqu'à 6 mois de prison |
3 mois |
Non |
De 6 mois à 6 ans de prison |
1 an |
Prolongation d'un an |
Plus de 6 ans de prison |
2 ans |
Prolongation de deux ans |
Lorsque
la durée maximale de la détention provisoire est
écoulée, le détenu est automatiquement remis en
liberté. Cependant, la prolongation est possible quand il est
prévisible que le procès ne pourra être terminé
pendant la durée initialement fixée pour la détention
provisoire et que l'inculpé risque de se soustraire à la justice.
La durée de la détention provisoire est indépendante du
nombre de délits poursuivis dans le cadre du même
procès.
III - LES POSSIBILITES DE RECOURS OFFERTES AU DETENU
L'inculpé peut exercer :
- dans les trois jours suivant la notification de la détention
provisoire, un recours de
réformation
devant le juge
qui a ordonné la mise en détention provisoire, celui-ci devant,
dans les soixante-douze heures, ratifier sa décision
précédente ou la modifier faute de quoi le détenu est
remis en liberté ;
- dans les cinq jours suivant la notification de la détention
provisoire, un recours en
appel
devant l'audience provinciale. L'appel
ne peut pas être interjeté si le recours en réformation n'a
pas été exercé. L'audience provinciale doit rendre sa
décision dans les trois jours, sinon le détenu est remis en
liberté.
Par ailleurs, la loi organique 6/1984 du 24 mai 1984 prévoit une
procédure d'
habeas corpus
qui permet à une personne
illégalement détenue d'être remise en liberté
immédiatement.
ITALIE
La
constitution italienne reconnaît, dans son article 13, le recours aux
mesures provisoires privatives de liberté
" dans des cas
exceptionnels de nécessité et d'urgence, prévus
explicitement par la loi... ".
|
I - LES CONDITIONS DE FOND DU PLACEMENT EN DETENTION PROVISOIRE
La
détention provisoire ne peut être prononcée que si trois
séries de conditions sont réunies :
- les conditions propres à l'ensemble des mesures provisoires
personnelles,
- celles relatives aux mesures coercitives,
- celles qui sont spécifiques à la détention
provisoire.
1) Les conditions de mise en oeuvre des mesures provisoires personnelles
Pour
qu'une mesure provisoire personnelle puisse être prise à
l'encontre d'une personne mise en examen, il faut que de
graves indices de
culpabilité
pèsent sur elle.
En outre, le recours à une mesure provisoire ne peut avoir lieu que dans
l'une des circonstances suivantes :
- il y a danger d'altération des preuves ;
- la personne mise en examen s'est enfuie ou risque de prendre la fuite,
à condition que le juge estime que cette personne est passible d'une
peine de réclusion supérieure à deux ans ;
- compte tenu des circonstances et de la personnalité de la personne
mise en examen, il est concrètement envisageable que celle-ci commette
de nouveaux
" délits graves au moyen d'armes ou d'autres moyens
de violence, des délits dirigés contre l'ordre constitutionnel ou
des délits de criminalité organisée ou de la même
catégorie que celui pour lequel elle est poursuivie
"
.
Pour le choix de la mesure provisoire personnelle, le juge doit prendre en
compte la nature et la gravité de chaque affaire. La mesure doit
être proportionnelle à la gravité des faits et à la
sanction prévisible.
2) Les conditions propres aux mesures coercitives
Les mesures coercitives ne peuvent être appliquées que pour des délits punissables d'une peine d'emprisonnement d'au moins trois ans.
3) Les conditions spécifiques à la détention provisoire
Elle
ne peut être ordonnée que lorsque toute autre mesure se
révèle inadéquate
. Toutefois, elle est
prononcée
d'office pour certains délits
particulièrement graves énumérés par l'article 275,
paragraphe 3 du code de procédure pénale. Ainsi, le meurtre ou la
tentative de meurtre, l'enlèvement, l'association mafieuse... donnent
lieu à détention provisoire, à condition cependant que les
conditions de mise en oeuvre des mesures provisoires personnelles subsistent.
La détention provisoire ne peut être prononcée à
l'encontre des femmes enceintes ou qui allaitent, des personnes de plus de 70
ans ou qui sont dans un état de santé suffisamment grave pour
qu'on ne puisse envisager de leur octroyer les soins nécessaires pendant
leur détention.
II - LA DUREE DE LA DETENTION PROVISOIRE
La
durée maximale de la détention provisoire
est fixée
par l'article 303 du code de procédure pénale. Elle est
proportionnelle à la gravité des délits
par
référence aux peines édictées pour chacun d'entre
eux. Par ailleurs, elle se divise en périodes maximales, correspondant
aux différentes étapes et degrés de la procédure.
En effet, en droit italien, on parle de détention provisoire aussi
longtemps que la sentence n'est pas définitive.
Ainsi, une personne mise en examen pour un délit punissable d'une peine
de prison supérieure à vingt ans pourra être gardée
en détention provisoire si :
- du début de la détention provisoire à l'ordonnance
décidant du procès ;
- de l'ordonnance décidant du procès au prononcé de la
sentence de condamnation en première instance ;
il ne s'est pas écoulé plus d'une année.
En outre, cette même personne pourra être maintenue en
détention provisoire si :
- du prononcé de la sentence en première instance au
prononcé de la sentence en appel ;
- du prononcé de la sentence en appel au prononcé de la sentence
irrévocable,
il ne s'écoule pas plus d'un an et six mois.
En tout état de cause, la durée globale de la détention
provisoire, compte tenu d'éventuelles prolongations prévues dans
des cas limitativement énumérés par la loi et qui
recouvrent essentiellement les enquêtes difficiles, ne pourra
excéder :
- deux ans pour les délits punissables d'une peine d'emprisonnement
égale ou inférieure à six ans ;
- quatre ans pour les délits punissables d'une peine d'emprisonnement
comprise entre six et vingt ans ;
- six ans pour les délits punissables d'une peine de prison
supérieure à vingt ans.
Cette durée globale ne pourra être dépassée que dans
les hypothèses de suspension des délais
énumérés par l'article 304 du code de procédure
pénale, notamment pendant la phase de jugement lorsque les débats
sont suspendus ou ajournés pour empêchement de l'inculpé ou
de son avocat. Cependant, même en cas de dépassement des
délais,
la durée de la détention provisoire est
limitée aux deux tiers du maximum de la peine
édictée pour le délit en cause
. Pour ce calcul, la
peine d'emprisonnement à vie est assimilée à une peine
d'emprisonnement de trente ans.
III - LES POSSIBILITES DE RECOURS OFFERTES AU DETENU
La
personne placée en détention provisoire -ou son défenseur-
peut choisir entre deux voies de recours :
- la demande de réexamen de l'ordonnance de mise en détention
provisoire ;
- le recours en cassation.
1) Le réexamen de l'ordonnance de placement en détention provisoire
La
demande de réexamen peut être faite par la personne détenue
-ou son défenseur- dans les dix jours suivant l'exécution ou la
notification de la mesure. La demande peut porter sur les motifs
examinés par le juge qui a ordonné la détention ou sur de
nouveaux motifs.
C'est le tribunal du chef-lieu de la province où siège le juge
qui a émis l'ordonnance qui se prononce sur la demande de
réexamen. Celui-ci peut porter sur le fond comme sur la forme. Le
tribunal peut annuler, modifier dans un sens favorable au demandeur ou
confirmer l'ordonnance de détention.
Il doit se prononcer dans les dix jours suivant la réception du dossier.
A défaut de respect de ce délai, l'ordonnance est
immédiatement annulée. Dans cette hypothèse, une
ordonnance de libération immédiate doit être établie
sur le champ. Il en va de même lorsque c'est le tribunal qui,
après réexamen, annule l'ordonnance de détention.
En tout état de cause, la décision du tribunal peut faire l'objet
d'appel de la part du ministère public ou d'un recours en cassation de
la part de la personne mise en examen ou de son défenseur.
2) Le recours en cassation
Il peut
s'agir d'un recours direct contre l'ordonnance de mise en détention
provisoire ou d'un recours contre la décision émise lors du
réexamen.
a) Le recours direct en cassation
Dans les mêmes délais qu'une demande de réexamen, une
personne placée en détention provisoire -ou son défenseur-
peut choisir le recours direct pour violation de la loi contre l'ordonnance de
mise en détention. Le recours est présenté au greffe du
tribunal où siège le juge qui a ordonné la
détention, qui doit transmettre le dossier à la Cour de
cassation. Cette dernière doit se prononcer dans les trente jours
suivant la réception du dossier. Le recours direct en cassation
empêche une demande de réexamen.
b) Le recours en cassation contre une décision émise lors d'un
réexamen
La demande doit être faite dans les dix jours suivant la communication ou
la notification de la décision prise lors du réexamen.
Le recours est effectué dans les mêmes conditions que le recours
direct.
(1)
D'origine scandinave, le système du " taux journalier " a
remplacé les amendes globales en 1969. Le " taux journalier "
est calculé par le tribunal en fonction des ressources
financières du condamné.
(2)
La chambre du conseil, instituée pour contrôler les
actes du juge d'instruction ne comporte plus qu'un juge depuis 1919. Il ne peut
pas s'agir du juge d'instruction lui-même.