Loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l' emploi (Journal officiel du 14 février 2008 ).
Déposé sur le Bureau du Sénat , le projet de loi relatif à la réforme du service public de l'emploi ( urgence déclarée ) propose, outre la fusion de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) et du réseau opérationnel de l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) dans une nouvelle institution chargée de l'accueil, de l'orientation, du placement, de l'indemnisation et de l'accompagnement des demandeurs d'emploi, le transfert aux URSSAF de la collecte des contributions d'assurance chômage. Il préserve les compétences des partenaires sociaux en matière d'assurance chômage et laisse subsister l'UNEDIC, qui sera chargée de gérer la convention d'assurance chômage. La création d'une plate-forme polyvalente devrait améliorer la prise en charge des demandeurs d'emploi et être facteur d'économies de gestion permettant de dégager des moyens supplémentaires pour améliorer leur suivi. Elle devrait également contribuer à améliorer la qualité du service rendu aux entreprises, notamment celles qui rencontrent des difficultés de recrutement.
Première lecture.
Le projet de loi a été examiné en première lecture par le Sénat les 9 et 10 janvier 2008 au terme de 9 heures de débat et a donné lieu à l'adoption de 42 amendements sur les 102 déposés.
Au cours de la discussion générale sont intervenus, outre Mmes Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, et Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales, Mme Christiane Demontès, M. Gérard Larcher , Mme Annie David, M. Michel Mercier , Mme Annie Jarraud-Vergnolle et M. Alain Gournac .
Le Sénat a ensuite rejeté la motion présentée par M. Guy Fischer et le groupe CRC tendant à opposer la question préalable , qui accusait ce texte de procéder au démantèlement du service public de l'emploi et à une privatisation rampante des activités de placement et d'indemnisation.
Il a fait de même s'agissant de la motion présentée par Mme Demontès et le groupe socialiste demandant le renvoi du texte en commission , qui dénonçait l'inscription précipitée de ce texte à l'ordre du jour du Sénat ayant entraîné des auditions pendant les vacances parlementaires et la réunion de la commission seulement la veille, avant même la publication des résultats de la mission de l'Inspection générale des affaires sociales chargée de recenser les questions techniques liées au projet de fusion.
Lors de l' examen des articles , le Sénat a introduit les principales modifications suivantes :
À l' article 1 er (Coordination des acteurs du service public de l'emploi), le Sénat, à l'initiative de la commission 1 ( * ) , a créé un conseil régional de l'emploi dans chaque région, à l'image du Conseil national de l'emploi instauré par le projet de loi. Il comportera notamment des représentants des collectivités territoriales.
À l' article 2 (Institution d'un nouvel opérateur), le Sénat, à l'initiative conjointe des groupes Union centriste-UDF et CRC, a levé l'ambiguïté pesant sur le statut du nouvel organisme, en précisant qu'il s'agirait d'une personne morale de droit public.
Il a par ailleurs, sur la proposition de la commission, autorisé le conseil d'administration à adopter, à la majorité des deux tiers de ses membres, une délibération demandant la révocation de son directeur général (avis de sagesse du Gouvernement).
Le Sénat a en outre inséré :
- à l'initiative de la commission, un article 8 bis tendant à prévoir un rapport du Gouvernement au Parlement douze mois après la promulgation de la présente loi sur les modalités du transfert éventuel à la nouvelle institution des personnels de l'Association pour la formation professionnelle des adultes chargés de l'orientation professionnelle des demandeurs d'emploi ;
- à l'initiative du président About, un article 8 ter tendant à prévenir les abus consistant pour les salariés, avec l'accord tacite de leur employeur, à abandonner leur poste de travail sans en informer officiellement l'employeur ni démissionner formellement, ce qui leur permet de percevoir des allocations chômage (avis défavorable du Gouvernement s'appuyant sur la jurisprudence de la Cour de cassation).
Le Sénat a apporté au projet de loi les autres modifications suivantes :
À l' article 2 (Institution d'un nouvel opérateur), le Sénat :
- à l'initiative de Mme David et du groupe CRC, a inscrit dans les compétences du nouvel opérateur la lutte contre les discriminations (avis de sagesse du Gouvernement) ;
- à l'initiative identique de Mme Demontès et du groupe socialiste, et de M. Mercier et du groupe Union centriste-UDF, et après une rectification demandée par le Gouvernement, a remplacé l'une des trois personnalités qualifiées prévues pour siéger au sein du nouvel opérateur par un représentant des collectivités territoriales désigné sur proposition conjointe des associations des collectivités concernées ;
- à l'initiative du Gouvernement, a assuré que les contributions de l'État et de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage seraient fixées à un niveau compatible avec la poursuite des activités de l'institution compte tenu de l'évolution du marché du travail.
Sur la proposition de la commission, il a ensuite :
- distingué dans le budget de l'institution les dépenses d'intervention en faveur des chômeurs des dépenses de fonctionnement, malgré l'avis défavorable du Gouvernement ;
- appliqué à la nouvelle institution, en matière de gestion des achats, l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 20005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics actuellement applicable aux institutions du régime d'assurance chômage ;
- précisé que la convention collective relative au statut des agents de la nouvelle institution serait une convention de branche (avis de sagesse du Gouvernement) ;
- indiqué que la convention signée entre le préfet de région et le directeur régional du nouvel opérateur devrait notamment prévoir les conditions d'association des acteurs locaux du service public de l'emploi, notamment les maisons de l'emploi.
À l' article 3 (Nouvelle organisation du régime d'assurance chômage), le Sénat :
- à l'initiative du Gouvernement, a réparé certaines omissions dans le transfert de la collecte des contributions actuellement recouvrées par les Assedic tout en prévoyant, sur la proposition de la commission, certaines dérogations au principe du transfert du recouvrement aux URSSAF, notamment en ce qui concerne la mutualité sociale agricole, les marins, les salariés expatriés, les représentants de commerce et les salariés de Saint-Pierre-et-Miquelon (ainsi, à l'initiative de M. Jean-Claude Carle et de plusieurs de ses collègues, que du Centre national cinéma spectacle) ;
- à l'initiative de Mme Demontès et du groupe socialiste, a prévu la répartition annuelle de la contribution des employeurs et des salariés par le conseil d'administration de la nouvelle institution (malgré l'avis défavorable du Gouvernement).
À l' article 4 (Transfert du recouvrement des cotisations Assedic aux URSSAF), le Sénat, à l'initiative de la commission, a précisé que les cotisations et contributions exigibles avant la date du transfert aux URSSAF demeureraient recouvrées selon les règles applicables avant celui-ci.
À l' article 5 (Instance de préfiguration de la nouvelle institution), le Sénat :
- à l'initiative de la commission, a indiqué qu'elle serait compétente pour le choix de son nom ;
- à l'initiative du Gouvernement, a tiré les conséquences des modifications adoptées à l'article 2 s'agissant de la composition du conseil de l'instance nationale provisoire et du conseil d'administration de la nouvelle institution.
À l' article 6 (Modalités du transfert à la nouvelle institution des personnels de l'ANPE et de l'UNEDIC), le Sénat :
- à l'initiative du Gouvernement, a précisé que seraient également transférés les personnels du centre de recouvrement d'Annecy, compétent pour le recouvrement de la contribution spécifique aux intermittents du spectacle ;
- à l'initiative de la commission, a fixé le 30 septembre 2010 comme date butoir pour la négociation de la nouvelle convention collective (avis de sagesse du Gouvernement), tout en ajoutant que les personnels embauchés seraient soumis au statut actuel du personnel de l'UNEDIC et des Assedic dans l'intervalle.
À l' article 7 (Modalités du transfert à la nouvelle institution des biens de l'ANPE et des Assedic), le Sénat, à l'initiative de la commission, a facilité le transfert des biens des Assedic à l'UNEDIC puis à la nouvelle institution, pour lequel le projet de loi prévoit une convention entre l'UNEDIC et la nouvelle institution (avis de sagesse du Gouvernement).
À l' article 9 (Cohérence rédactionnelle des textes législatifs et réglementaires en vigueur), le Sénat, à l'initiative du Gouvernement, a prévu que le recouvrement de la contribution de la convention de reclassement personnalisé dite « contribution CRP », actuellement du ressort des organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage, serait assuré pendant la période transitoire par la nouvelle institution, puis par les URSSAF.
À l' article 11 (Insertion dans le nouveau code du travail des dispositions figurant aux articles 1 er à 3), le Sénat, à l'initiative du Gouvernement, a clarifié les règles de recouvrement applicables à la contribution spécifique prévue par l'article L. 351-14 du code du travail.
Le Sénat a enfin, à l'initiative de la commission, modifié l'intitulé du projet de loi afin de viser la réforme de l'organisation du service public de l'emploi et non uniquement la réforme du service public de l'emploi.
Il a en outre adopté quinze amendements rédactionnels, de précision ou de coordination aux articles 4 , 9 , 11 et 12 .
Le Sénat a adopté sans modification les articles 8 et 10 .
Après avoir entendu les explications de vote de Mmes David et Demontès et de M. Paul Girod, le Sénat a adopté le projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi.
Le projet de loi a ensuite été examiné le 23 janvier 2008 par l' Assemblée nationale .
Commission mixte paritaire.
L'Assemblée nationale n'a pas remis en cause les dispositions retenues par le Sénat sur la possibilité d'une motion de défiance votée par le conseil d'administration, la création d'une quatrième section dans le budget de l'institution, l'instauration de conseils régionaux de l'emploi à vocation consultative et les modalités du choix du nom de la future institution.
Réunie au Palais du Luxembourg le 30 janvier 2008, la commission mixte paritaire est parvenue à l' élaboration d'un texte commun sur les seize articles restant en discussion.
À l' article 1 er , la commission mixte paritaire a tout d'abord adopté un amendement commun aux rapporteurs des deux assemblées afin de souligner le rôle des conseils régionaux dans la mise en oeuvre des politiques de l'emploi au niveau territorial, en articulation avec les politiques régionales de formation professionnelle dont ils sont responsables. Elle a ensuite, à l'initiative de M. Dominique Tian, rapporteur pour l'Assemblée nationale, proposé à titre expérimental dans deux régions une coprésidence du conseil régional de l'emploi par le président du conseil régional et le préfet de région.
À l' article 2 , la commission a supprimé l'avis des maisons de l'emploi intervenant dans la région sur la convention conclue entre le préfet de région et le directeur régional de la nouvelle institution.
À l' article 6 , la commission a prévu la fixation par les partenaires sociaux eux-mêmes de la date à laquelle la convention collective applicable aux Assedic cesserait de produire ses effets, puis, sur la proposition conjointe des deux rapporteurs, a précisé que les anciens agents de l'ANPE ayant conservé leur statut public demeureraient affiliés à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques (IRCANTEC).
La commission mixte paritaire a en outre maintenu la suppression par l'Assemblée nationale de l' article 8 ter inséré au Sénat à l'initiative du président About, qui visait à éviter que des salariés abandonnent leur poste au lieu de démissionner dans le seul but de bénéficier d'allocations chômage, estimant ce problème réglé par l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008.
Les conclusions de la commission mixte paritaire ont été adoptées par l' Assemblée nationale le 31 janvier 2008.
Elles ont été lues le même jour par le Sénat .
Au cours de la discussion générale sont intervenus, outre Mmes Catherine Procaccia, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire, Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, et M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, Mmes Annie David et Christiane Demontès.
Après l'explication de vote de M. Robert del Picchia, le Sénat a adopté définitivement les conclusions de la commission mixte paritaire.