Loi n° 2008-757 du 1 er août 2008 relative à la responsabilité environnementale et à diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'environnement (Journal officiel du 2 août 2008 ).
Déposé sur le Bureau du Sénat , le projet de loi relatif à la responsabilité environnementale ( urgence déclarée ) vise à transposer la directive 2004/35/CE du 21 avril 2004 sur la responsabilité environnementale. Son retard de transposition avait motivé l'envoi par la Commission européenne à la France d'une mise en demeure.
Cette directive pose un principe de réparation des dommages écologiques, indépendamment de toute atteinte à des biens ou des personnes, ce qui conforte la récente décision du juge judiciaire sur la marée noire consécutive au naufrage de l'Erika. Le projet de loi inscrit donc en droit français le principe pollueur/payeur et fixe une série de dommages écologiques à prévenir ou réparer comme les atteintes graves aux sols, aux eaux, aux espèces ou habitats naturels protégés. Les préfets chargés de veiller au respect des obligations des exploitants de sites industriels susceptibles de provoquer des pollutions pourront les mettre en demeure de réaliser les mesures de prévention ou réparation nécessaires et, en cas d'urgence ou de danger grave, les faire exécuter d'office à leurs frais. Il reviendra donc à la charge de l'exploitant et non plus de l'État de prendre les mesures de prévention ou réparation. Néanmoins, un certain nombre de dérogations sont prévues et le projet de loi ne comporte aucune obligation d'assurance ni de constitution de garanties financières.
Première lecture.
Le projet de loi a été examiné par le Sénat les 27 et 28 mai 2008 au terme de plus de dix heures de débat et a donné lieu à l'adoption de soixante et un amendements sur les cent trente et un déposés.
Au cours de la discussion générale sont intervenus, outre Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie, et M. Jean Bizet, rapporteur de la commission des affaires économiques, MM. François Fortassin, Daniel Soulage, Mme Odette Herviaux, M. Raymond Couderc, Mme Evelyne Didier, M. Paul Raoult, Mme Fabienne Keller et M. Jean Dessessard .
Le Sénat a ensuite rejeté la motion présentée par M. Thierry Repentin et le groupe socialiste tendant à demander le renvoi du texte en commission , qui s'inquiétait de la transposition a minima du principe pollueur-payeur contraire aux objectifs du Grenelle de l'environnement.
Lors de l' examen des articles , le Sénat a introduit la principale modification suivante :
Il a, à l'initiative de M. Bruno Retailleau et de plusieurs de ses collègues, inséré un article 4 bis nouveau tendant à autoriser les collectivités territoriales à se constituer partie civile pour obtenir réparation d'un préjudice lié à un dommage environnemental survenu sur leur territoire.
Le Sénat a apporté au projet de loi les autres modifications suivantes :
À l' article 1 er (Prévention et réparation de certains dommages causés à l'environnement), le Sénat, à l'initiative de la commission 1 ( * ) :
- a précisé la définition de l'exploitant, en indiquant qu'il s'agit de celui qui exerce la maîtrise opérationnelle effective sur une activité économique ;
- a clarifié le dispositif relatif aux listes des espèces et habitats naturels protégés fixées par les directives « Oiseaux » et « Habitats » et défini le dommage comme une modification négative mesurable ;
- a exclu du champ d'application du texte des dommages couverts par les conventions internationales mentionnées en annexe de la directive 2004/35/CE à compter de leur entrée en vigueur sur le territoire français ;
- a exclu les dommages liés à des pollutions diffuses, lorsqu'aucun lien de causalité avec l'activité des exploitants ne peut être établi par l'autorité administrative, celle-ci pouvant demander aux exploitants les évaluations et informations nécessaires (avis de sagesse du Gouvernement) ;
- a visé la prise en compte, conformément à la directive, dès sa ratification par la France, de la convention de Strasbourg du 4 novembre 1988 tendant à harmoniser la limitation de la responsabilité des propriétaires de navires ;
- a exclu les dommages dont le fait générateur a définitivement cessé avant le 30 avril 2007 ;
- a précisé que le lien de causalité entre le dommage et l'activité doit être établi par l'autorité administrative compétente, qui peut demander à l'exploitant les évaluations et informations nécessaires ;
- a clarifié la distinction entre mesures de prévention et mesures de réparation ;
- a précisé la définition de l'état initial en reprenant celle de la directive ;
- a clarifié les coûts mis à la charge des exploitants et exclu les frais liés à la consultation du public sur les mesures de réparation, cette consultation n'étant pas prévue par la directive et relevant du choix de chaque préfet ;
- précisé que la liste des activités qui seront soumises à un régime de responsabilité sans faute sera déterminée conformément à l'annexe III de la directive.
Le Sénat a en outre prévu, toujours à l'initiative de la commission, et malgré l'avis défavorable du Gouvernement qui préférait conserver le droit commun, qu'en cas de responsabilité partagée entre le fabriquant et l'utilisateur d'un produit, l'autorité administrative, et non le juge, répartit de façon proportionnelle les coûts entre les deux, évitant ainsi à l'agriculteur d'exercer une action récursoire contre le fabriquant.
Il a également ouvert la faculté pour le préfet de recouvrer les coûts non seulement auprès de l'exploitant, mais aussi, le cas échéant, auprès du tiers responsable, afin d'éviter à l'exploitant une action récursoire, conformément à l'article 10 de la directive (avis défavorable du Gouvernement).
Le Sénat a ensuite, sur la proposition conjointe des groupes socialiste et CRC et de M. Jean Dessessard et de plusieurs de ses collègues, précisé que le décret compétent pour fixer les objectifs et les critères de choix des mesures de réparation devra respecter l'annexe II de la directive (avis de sagesse du Gouvernement).
Puis le Sénat a supprimé l' article 5 (Plan national d'allocations de quotas de gaz à effet de serre), à l'initiative de la commission, ses dispositions ayant été adoptées dans la loi de finances pour 2008.
Il a ensuite inséré, à l'initiative de la commission :
- un article 6 nouveau tendant à transposer la directive 2005/35/CE relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions en cas d'infractions de pollution, qui aurait dû l'être avant le 1 er mars 2007, la France ayant reçu un avis motivé de la Commission européenne pour transposition incomplète. Elle permet de sanctionner, notamment pénalement, les déversements d'hydrocarbures et d'autres substances nocives effectués par les navires dans les eaux communautaires, quels que soient le type de navire et le pavillon. Les sanctions s'étendront à l'ensemble de la chaîne de transport et concerneront également les fautes résultant d'une « négligence grave ». Les infractions commises en haute mer par les navires de tout pavillon devront être sanctionnées ;
- un article 7 nouveau tendant à achever la transposition des directives 2002/3/CE et 2004/107/CE relatives à la qualité de l'air, qui auraient dû l'être avant respectivement le 9 septembre 2003 et le 15 février 2007. À l'initiative de M. Jean Desessard, le contrôle de la qualité de l'air intérieur a également été ajouté ;
- un article 8 nouveau tendant à apporter quelques corrections à la transposition de la directive 2002/91/CE sur la performance énergétique des bâtiments et des directives 2003/87/CE et 2004/101/CE relatives au système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre ;
- un article 9 nouveau tend à simplifier la mise sur le marché de produits biocides en transférant du ministère de l'agriculture au ministère chargé de l'environnement la compétence pour délivrer des autorisations transitoires de mise sur le marché.
À l'initiative de M. Dominique Braye et de plusieurs de ses collègues, le Sénat a ensuite inséré un article 10 nouveau tendant à adapter le code de l'environnement à la réglementation communautaire en matière de déchets électriques et électroniques et de polluants organiques persistants.
Il a en outre, à l'initiative du Gouvernement, inséré :
- un article 11 nouveau tendant à habiliter le Gouvernement à adapter par voie d'ordonnances le code de l'environnement au règlement (CE) n° 1013/2006 concernant les transferts de déchets ;
- un article 12 nouveau tendant à habiliter le Gouvernement à adapter par voie d'ordonnances le code de l'environnement, le code du travail et le code de la santé publique aux règlements (CE) n°s 1907/2006 concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, 842/2006 relatif aux gaz à effets de serre fluorés, 850/2004 sur les polluants organiques persistants, 304/2003 concernant les produits chimiques dangereux, 2037/2000 sur les substances appauvrissant la couche d'ozone et à la directive 98/8 sur les produits biocides ;
- un article 13 nouveau tendant à apporter des corrections à la transposition de la directive 92/43/CE relative au régime d'évaluation des incidences Natura 2000 pour laquelle la France a reçu un avis motivé de la Commission européenne.
Le Sénat a enfin, à l'initiative de la commission, modifié l'intitulé du projet de loi afin de viser également les diverses dispositions d'adaptation apportées au droit communautaire dans le domaine de l'environnement.
Le Sénat a en outre adopté vingt-six amendements rédactionnels, de précision ou de coordination aux articles 1 er , 2 et 4 .
Il a adopté sans modification l' article 3 .
Après avoir entendu les explications de vote de M. Dominique Braye, Mmes Evelyne Didier et Odette Herviaux, et M. Jean Dessessard, le Sénat a adopté le projet de loi relatif à la responsabilité environnementale et à diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'environnement.
Le projet de loi a ensuite été examiné les 24 et 25 juin 2008 par l' Assemblée nationale .
Commission mixte paritaire.
Réunie au Palais du Luxembourg le 8 juillet 2008, la commission mixte paritaire est parvenue à l' élaboration d'un texte commun sur les onze articles restant en discussion.
Après avoir adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale les articles 2 , 4 , 8 , 9 , 12 et 14 et des amendements rédactionnels aux articles 1 er et 15 , la commission mixte paritaire a :
- à l' article 4 bis , supprimé la limitation introduite à l'initiative du Gouvernement à l'Assemblée nationale subordonnant la possibilité pour les collectivités territoriales de se porter partie civile en cas de dommage environnemental sur leur territoire à l'existence d'une action de l'État ;
- à l' article 6 , augmenté le montant des amendes en cas de rejet en mer de substances nuisibles ;
- à l' article 13 , prévu d'associer à l'élaboration des listes locales « Natura 2000 » les représentants d'organisations professionnelles et d'établissements publics dans les domaines agricole, sylvicole, de la pêche, de la chasse et de l'extraction.
Les conclusions de la commission mixte paritaire ont été lues par le Sénat le 10 juillet 2008.
Au cours de la discussion générale sont intervenus, outre MM. Jean Bizet, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire, et Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports, Mme Evelyne Didier et M. Roger Madec.
Aucun amendement n'a été adopté.
Les conclusions des la commission mixte paritaire ont été adoptées par le Sénat le 10 juillet, puis définitivement par l' Assemblée nationale le 22 juillet 2008.