SÉANCE

du jeudi 14 mars 2024

72e séance de la session ordinaire 2023-2024

Présidence de M. Loïc Hervé, vice-président

Secrétaires : M. Jean-Michel Arnaud, Mme Catherine Conconne.

La séance est ouverte à 10 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Sécurité des élus locaux et protection des maires (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour le Sénat de la CMP .  - Cette proposition de loi, votée à l'unanimité du Sénat en octobre dernier, a trouvé une large majorité transpartisane en CMP. Nous pouvons être fiers du travail accompli. Les violences à l'encontre des élus sont insupportables. Rendons hommage au dévouement des maires, vigies de la République.

Pourtant, la protection que leur offre la République est largement perfectible. Déposée le 28 mai dernier, peu après la démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins et avant que le Gouvernement prenne conscience de l'urgence à agir, la proposition de loi de François-Noël Buffet entend répondre aux attentes des élus : reconnaissance de leur travail, urgence de leur protection, face à des menaces croissantes.

Travaillé avec les associations d'élus locaux et des sénateurs de tous les groupes, le texte initial comportait des mesures utiles, inspirées de travaux parlementaires antérieurs.

Toutes les dispositions adoptées au Sénat ont été reprises par l'Assemblée nationale. Les députés ont ajouté des dispositions bienvenues, comme le fait de conférer le caractère de dépenses obligatoires aux dépenses liées à la protection fonctionnelle des élus, ou la prise en compte des anciens élus victimes de violences.

Quelques regrets toutefois. Nous aurions souhaité aller plus loin sur le périmètre de la protection fonctionnelle, qu'il conviendrait d'élargir à l'ensemble des élus, et sur la couverture assurantielle des élus et biens nécessaires à l'exercice de leur mandat. Nous serons attentifs à la traduction des engagements pris par la ministre devant le Sénat sur ces sujets, ainsi qu'aux décrets d'application.

À l'article 2 bis, allongeant les délais de prescription en cas d'injure et de diffamation publiques, nous avions souhaité rétablir la rédaction du Sénat, qui avait été votée à l'unanimité, avec l'accord de la ministre.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.  - C'est vrai.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur.  - Les députés s'y sont opposés. Je ne sais si c'est une maladresse, c'est à tout le moins un manque de courage. Il faudra impérativement, à l'avenir, renforcer la protection des élus et des personnes dépositaires de l'autorité publique face à la multiplication des injures sur les réseaux sociaux.

Cette proposition de loi apportera des réponses concrètes aux difficultés des maires. J'espère un vote unanime, comme il est de coutume au Sénat quand il s'agit de protéger les élus locaux. (Applaudissements)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Je remercie solennellement le Sénat, et l'Assemblée nationale, pour le travail réalisé. Je suis ravie des conclusions de la CMP. Le Gouvernement y est favorable et considère cette proposition de loi comme une pierre angulaire de la lutte contre ce fléau, au même titre que le plan national de lutte contre les violences envers les élus.

S'en prendre à un élu, c'est s'en prendre à la République. Il fallait trouver un consensus partisan, c'est le cas.

La proposition de loi comporte des avancées majeures qui viendront compléter le dispositif annoncé par le Gouvernement à la suite des événements de Saint-Brevin-les-Pins. Celui-ci repose sur un « pack sécurité », avec la création d'un réseau de 3 400 référents dans les brigades de gendarmerie et les commissariats ; le renforcement du dispositif « Alarme élu » ; des sessions de sensibilisation à la gestion des incivilités et à la désescalade de la violence ; la mobilisation de la plateforme Pharos, qui a permis de retirer les vidéos de Papacito visant le maire de Montjoi ; la démarche « d'aller vers » des forces de l'ordre pour permettre aux élus de déposer plainte là où ils le souhaitent.

J'ai également créé un centre d'analyse et de lutte contre les atteintes aux élus, qui coordonne l'action des parties prenantes, afin de mieux comprendre le phénomène et examiner les situations individuelles.

Ces réformes doivent répondre à l'urgence. Votre proposition de loi, elle, apporte des solutions à long terme et témoigne de notre soutien total envers les élus locaux, découragés face à la violence grandissante de notre société et au sentiment d'impunité des auteurs.

Ce renoncement, nous le combattons. La République doit apporter une réponse commune pour mieux protéger ses élus. Ce texte n'est qu'une première étape, car le mal a des racines profondes. Je me félicite à cet égard de nos récents travaux sur le statut de l'élu.

Le mandat de maire est le plus beau. Nous devons le protéger, de même que tous les élus, locaux ou nationaux. J'ai une pensée pour le président Patriat, dont le domicile a été vandalisé cette semaine. (Mme Catherine Di Folco acquiesce.) Ces actes inacceptables doivent être systématiquement et durement punis.

En alourdissant les sanctions, la proposition de loi vient compléter les mesures prises récemment pour mobiliser les parquets. La circulaire diffusée cet été demande aux procureurs un traitement priorisé des procédures concernant les atteintes sur les élus et une réponse pénale systématique, ferme et rapide. Il s'agit de privilégier la voie du déferrement, afin de permettre le prononcé d'une mesure de sûreté.

On observe déjà une légère amélioration de la réponse pénale, avec un nombre de déférés en hausse de 4 points, et de convocations judiciaires de 8 points. Nous devons faire encore mieux, encore plus vite.

Le plan national de lutte contre les violences aux élus s'articule autour de quatre axes : la protection juridique, la sécurité physique des élus, la réponse judiciaire et les relations entre les maires et les parquets. Nous mettons en place une aide psychologique, encourageons le déploiement de la vidéosurveillance - mais il faut passer par la loi pour renforcer la protection fonctionnelle, améliorer sa prise en charge financière, alourdir les sanctions pénales.

Nous pouvons aller plus loin. Je pense à l'article 2 bis, supprimé en CMP. Nous devons trouver les solutions les plus consensuelles. Je m'engage à continuer à y travailler. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE, du GEST, ainsi que des groupes UC et INDEP)

Discussion du texte élaboré par la CMP

M. le président.  - En application de l'article 42, alinéa 12, du Règlement, le Sénat examinant après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la CMP, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement. En conséquence, le vote sur les amendements et sur les articles est réservé.

Article 5

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé : 

Au second alinéa du I et au 2° du II de l'article L. 2335-1 du code général des collectivités territoriales, les mots : « au dernier » sont remplacés par les mots : « à l'avant-dernier ».

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Coordination.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur.  - Avis favorable.

Article 14

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 12

Supprimer les mots :

élus dans la circonscription où est située la commune

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Rédactionnel.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur.  - Avis favorable.

Vote sur l'ensemble

M. Éric Bocquet .  - Le 21 décembre dernier, la vue du mot « maire » inscrit sur l'insigne bleu blanc rouge accroché au revers de la veste d'André Mondange, maire de Péage-de-Roussillon, a suffi pour qu'un groupe d'extrême droite l'agresse violemment.

En 2022, 2 265 signalements pour violence verbale ou physique contre des élus ont été recensés par le ministère de l'intérieur, soit une hausse de 32 % en un an. Leurs familles aussi sont touchées : en 2020, le fils de 14 ans de la maire de Chevilly a été agressé, un mois après des dégradations sur son véhicule et des tirs de mortier sur son domicile. Ces faits ne sont pas isolés : notre collègue François Patriat a vu sa maison dégradée ; le maire de Hantay, Jacques Montois, a fait l'objet de menaces de mort.

Nos 520 000 élus locaux incarnent les valeurs de la République. Nous devons les protéger, alors que la crise de l'engagement s'installe. En 2023, 3 % des maires élus en 2020 avaient démissionné. Les violences ne peuvent qu'accentuer la chute des vocations.

La proposition de loi renforce le volet répressif et améliore la prise en charge des élus victimes. Toutefois, elle devra aussi s'accompagner d'un réinvestissement de l'État sur tout le territoire. Depuis dix ans, la baisse continue des dotations versées aux communes ne leur permet plus de répondre aux besoins de leurs habitants. Les élus locaux, devenus uniques interlocuteurs des citoyens, sont de plus en plus sollicités. Il convient de les protéger dans l'exercice de leur mandat et de garantir en même temps aux collectivités les moyens d'agir, car l'échelon communal est essentiel pour l'équilibre de notre République.

Nos premiers travaux sur le statut de l'élu local devront permettre aux élus locaux d'exercer leur mandat dans les meilleures conditions. La réponse répressive ne suffira pas, il faut réinvestir tous les territoires par des services publics fonctionnels et accessibles à tous.

Nos élus locaux ne peuvent pas être les urgentistes de la République, ne les laissons pas seuls ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et du GEST)

Mme Maryse Carrère .  - Un chiffre : 1 424. C'est le nombre de démissions de maires depuis 2020. Cela confirme le sentiment d'abandon et d'injustice qu'éprouvent les élus locaux, qui va de pair avec l'accroissement des violences et agressions à leur égard.

Les drames de Signes, de Montjoi, de Saint-Brevin-les-Pins, de L'Haÿ-les-Roses ne sont que les exemples les plus médiatisés de ces violences ahurissantes. À travers l'agression de ces élus, c'est la République qui est attaquée. Je salue la prise de conscience qui a suivi ces drames et le travail de notre assemblée, notamment de la commission des lois et de son président, pour accompagner ces élus.

Des précédents existent, notamment la loi Engagement et proximité, qui imposait de souscrire une assurance pour couvrir les coûts liés à la protection fonctionnelle, ou la loi permettant aux associations d'élus de se constituer partie civile, à l'initiative de Nathalie Delattre. Le présent texte reprend des recommandations de notre mission d'information sur l'avenir du maire et de la commune, dont le renforcement de la protection fonctionnelle et l'amélioration du dispositif judiciaire.

L'alignement des peines sur le régime existant pour les dépositaires de l'autorité publique, l'institution d'une peine de travail d'intérêt général en cas d'injure publique ou encore la circonstance aggravante en cas d'atteinte à la vie privée et familiale répondent aux demandes des élus.

Les articles 3 et 8 améliorent l'application et le financement de la protection fonctionnelle et l'élargissent aux conseillers régionaux et départementaux ainsi qu'aux candidats aux élections.

Les articles 11 à 14 visent une meilleure prise en compte des réalités du mandat par l'appareil judiciaire, avec une collaboration dans le cadre des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance.

Cette proposition de loi contribuera à une meilleure sécurisation des élus locaux, sans lesquels la République ne peut fonctionner. Il est de notre devoir de leur assurer cette protection, ainsi qu'à leurs proches.

Le RDSE votera en faveur de cette proposition de loi, à l'unanimité. (M. Mathieu Darnaud applaudit.)

M. Thani Mohamed Soilihi .  - Les maires, ici et en outre-mer, sont confrontés à une hausse inquiétante des violences à leur encontre. À mon tour, j'ai une pensée pour le président Patriat.

La CMP est parvenue à un accord, après un travail de coconstruction entre les deux assemblées et le Gouvernement. La navette a amélioré le texte tout en préservant ses grands équilibres et en maintenant les apports du Sénat. Les sanctions encourues par les auteurs d'agressions envers des élus seront renforcées : peine de travail d'intérêt général en cas d'injure publique, circonstance aggravante en cas de harcèlement.

La protection fonctionnelle sera automatiquement octroyée aux maires et adjoints, actuels ou passés, qui en feront la demande, et sera élargie aux candidats aux élections ; les frais de sécurisation engagés par ces derniers en cas de menace seront remboursés par l'État.

Plusieurs demandes de rapports ont été introduites, sur l'élargissement de la protection fonctionnelle à l'ensemble des élus, sur les résultats statistiques des actions menées, sur le coût des contrats d'assurance pour les communes.

À l'article 2 bis, le Sénat avait allongé de trois mois à un an les délais de prescription des délits d'injure et de diffamation publiques. L'Assemblée nationale a souhaité, quant à elle, en restreindre l'application - oubliant que le caractère éphémère de la presse papier ne vaut plus avec internet. C'était l'objet de notre rapport d'information, commis avec François Pillet en 2016, sur « L'équilibre de la loi du 29 juillet 1881 à l'épreuve d'Internet », et des amendements déposés avec Alain Richard au projet de loi Égalité et citoyenneté. Je regrette donc que la CMP n'ait pas retenu la version du Sénat.

Pour autant, le RDPI votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP et du GEST)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST) En 2022, 2 265 faits de violences verbales et physiques contre des élus ont été recensés, soit une hausse de 32 % en un an. Ces chiffres sont inquiétants pour la démocratie. Tous les corps de la société sont touchés par la banalisation des incivilités : journalistes, enseignants, sapeurs-pompiers, médecins, mais aussi les élus.

Chaque fois qu'un élu est attaqué, nous lui témoignons notre soutien, nous clamons notre indignation sans que les sources de cette violence ne se tarissent ni que notre législation parvienne à l'endiguer.

Les maires et élus municipaux sont en première ligne face à un mécontentement qui se mue de plus en plus en violence. Notre droit doit évoluer pour les protéger.

Les objectifs de la proposition de loi ont été partiellement atteints. Nous saluons l'aggravation des peines encourues, l'octroi automatique de la protection fonctionnelle ou le dépaysement des affaires, mesures de bon sens. Nous regrettons cependant que l'extension de la protection fonctionnelle à tous les élus, notamment d'opposition, n'ait pas été retenue. Il y aura un rapport, très bien - mais pourquoi attendre ?

Les revirements de l'Assemblée nationale sur l'allongement des délais de prescription nous ont mis dans une situation délicate. Il faudra y revenir, car cette mesure était attendue par les élus.

Avec ce texte, nous adressons un message à ceux qui incarnent la République. Nous sommes tous engagés et mobilisés à leurs côtés. Ils subissent depuis trop longtemps le manque de reconnaissance, la montée des violences et la complexification de l'action publique.

Ce texte est une première marche, sur laquelle le Gouvernement devra prendre appui. Le groupe SER votera pour. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K, INDEP et du GEST)

M. Mathieu Darnaud .  - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP) Soigner le mal des maires, c'était l'objectif que nous nous étions fixé avec Maryse Carrère. Notre rapport apportait des réponses pragmatiques, qui ont inspiré cette proposition de loi - je salue le président Buffet et le rapporteur.

Sur ce sujet, le Sénat s'est montré réactif. Dès 2019, à la suite du décès du maire de Signes, la commission des lois s'était donnée pour priorité de répondre aux violences envers les élus. Elle y a travaillé dans la loi Engagement et proximité, la proposition de loi de Nathalie Delattre, et désormais avec cette proposition de loi.

Notre rapporteur l'a dit, nous aurions souhaité aller plus loin, et il faudra poursuivre la réflexion. Il y va de notre capacité à réinviter nos concitoyens dans la vie démocratique locale - ce qui suppose des conditions satisfaisantes d'exercice du mandat local. Il faudra revenir sur l'allongement du délai de prescription, travailler concrètement sur les attaques répétées dont sont victimes les élus, notamment sur les réseaux sociaux, et qui sont une source majeure de démotivation.

Dans la Somme, le procureur de la République a dédié des moyens au lien avec les élus locaux victimes d'agressions, pour assurer un suivi dans la durée.

Il faut encore et toujours renforcer la protection fonctionnelle et les moyens à disposition des élus locaux pour se défendre.

Madame la ministre, il faudra donner rapidement suite à la proposition de loi de Françoise Gatel sur le statut de l'élu, votée ici à l'unanimité. Nous attendons des signes forts du Gouvernement.

Ce texte est un point de départ. Je sais pouvoir compter sur la détermination du président Buffet. C'est avec enthousiasme que le groupe Les Républicains le votera. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP, SER, du RDSE, du RDPI et du GEST)

M. Laurent Somon.  - Excellent !

M. Christopher Szczurek .  - Comme vous, j'ai mesuré sur le terrain l'agressivité subie par les élus. Les chiffres ont été rappelés. Depuis la crise sanitaire et les émeutes de l'été dernier, les élus locaux font face à une flambée de violence. Selon le rapport de Philippe Bas, en 2019, 92 % d'entre eux avaient enduré des incivilités, des injures ou des agressions physiques. Les chiffres de 2023 sont en hausse de 15 % par rapport à 2022.

Nombre de mes collègues députés, conseillers régionaux, départementaux ou municipaux ont fait les frais de cet ensauvagement. Toute violence, verbale ou physique, contre un représentant du peuple, quelle que soit son appartenance politique, est insupportable, et nous déplorons que l'oecuménisme n'ait pas toujours cours...

L'élargissement de la protection fonctionnelle et son inscription en dépenses obligatoires sont des avancées, mais nous aurions souhaité qu'elle soit étendue à tous les élus ainsi qu'aux collaborateurs. La protection des candidats aux élections locales va dans le bon sens, tout comme le renforcement des sanctions pénales contre les auteurs de violences. Ici comme ailleurs, il faut appliquer une tolérance zéro.

Nous serons attentifs à la publication des décrets d'application et à la traduction pénale des mesures adoptées.

La sécurité des élus locaux est un principe non négociable. Avec ses 500 000 élus locaux, garants et défenseurs de notre identité républicaine, la France jouit d'une armature démocratique à nulle autre pareille. Nous devons les protéger de l'incivilité, de l'insécurité.

Ce texte n'est que l'amorce du réarmement pénal contre l'insécurité. Nous serons toujours au rendez-vous de la sérénité et de la sécurité de nos compatriot.es. Nous voterons ce texte. (M. Aymeric Durox applaudit.)

M. Vincent Louault .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Nous avons adopté à l'unanimité la semaine dernière un texte essentiel pour améliorer le mandat des élus locaux.

La présente proposition de loi est attendue de longue date. En pleine crise de l'engagement, il est crucial de protéger les élus dans l'exercice de leur mandat, alors que violences, injures et incivilités se multiplient.

Selon le ministre de l'intérieur, 2 265 plaintes ont été recensées en 2022, soit une progression de 32 %.

La parole s'est libérée. Le ministre de l'intérieur et le garde des sceaux sont montés au créneau et ont donné des consignes fortes. En pleine crise démocratique, il faut couper court à toute violence.

Nous nous réjouissons que la CMP ait été conclusive, mais regrettons le rejet de l'allongement des délais de prescription pour injure et diffamation publiques envers une personne dépositaire de l'autorité publique. Le texte de la CMP reprend toutefois largement les apports du Sénat. Saluons ce travail collectif, pour un résultat concret et ambitieux.

Madame la ministre, vous devrez poursuivre l'effort de protection des élus locaux, qui ne ménagent pas leur peine au service de leur territoire. Ils peuvent compter sur notre mobilisation. Accompagnons-les au plus près de leur mandat en nous assurant que les services judiciaires et administratifs font tout pour les protéger. Pour dissuader les fauteurs de troubles et de violences, il faut punir plus fort, et systématiquement.

Nous soutenons ce texte avec force. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC)

Mme Isabelle Florennes .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je salue tous les élus victimes d'agression, avec une pensée particulière pour le maire de Signes, mortellement blessé par un conducteur qui jetait des gravats sur le bord d'une route. Que ce texte lui soit dédié.

Ce texte a été adopté à l'unanimité à l'Assemblée nationale, même si certains le trouvaient ou trop répressif ou trop laxiste. J'espère une même unanimité au Sénat.

Je salue l'aggravation des peines en cas d'agression d'un élu ou d'un ancien élu, l'extension de la protection aux candidats, l'élargissement du bénéfice de la protection fonctionnelle et le droit à l'assurance pour les permanences des élus et des candidats.

Nous apportons ainsi une réponse circonscrite à ces actes de violence. Circonscrite, car ce texte fait partie d'un tout, avec le statut de l'élu et de la loi Engagement et proximité de 2019.

Cela suffira-t-il à répondre au malaise des élus locaux ? Voyez les démissions : 1 300 depuis juin 2020, soit 450 par an, contre 350 par an entre 2014 et 2020, soit une hausse de 30 %. En mars 2020, 106 communes s'étaient retrouvées sans candidat déclaré, 70 % de plus qu'en 2014. Les raisons sont multiples et complexes : repli sur soi, peur de s'engager, dégradation du débat public, entre autres.

Quelle est notre conception de la condition d'élu ? Peut-on imaginer que cela devienne un métier, avec un diplôme, des formations ? La suspicion à l'égard des élus, considérés comme des privilégiés, est désormais telle que nous avons peur d'aborder cette question.

Toute évolution législative devra s'accompagner d'un changement de culture des acteurs de la justice et de l'État.

Je remercie l'auteur de ce texte, François-Noël Buffet, et les rapporteures Violette Spillebout et Catherine Di Folco.

Le groupe UC votera résolument en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains ainsi que du GEST)

M. Guy Benarroche .  - Le GEST apporte tout son soutien à François Patriat.

La semaine dernière, nous avons avancé sur le statut de l'élu. Il y a un besoin de renouveau de la démocratie locale, qui doit susciter l'envie de s'engager. La crise de confiance et la crise de l'engagement sont profondément liées.

Les écologistes ont toujours soutenu les réflexions en ce sens et proposé des solutions pour faire baisser les tensions. La relation entre élus et citoyens a parfois pris des dimensions violentes inacceptables.

Le GEST soutient l'action des élus locaux et s'associe à toutes les propositions d'amélioration de l'exercice de leur mandat - je pense au groupe de travail sur la décentralisation voulu par le président Larcher. Nous nous associons à la demande d'un réel statut de l'élu, plus protecteur. Il faut aussi améliorer la parité et la diversité des profils.

Nous accueillons très favorablement ce texte, même s'il ne va pas assez loin, et saluons le travail de Catherine Di Folco, mais également de Marie-Pierre de La Gontrie.

Nous nous réjouissons aussi de la meilleure compensation des coûts d'assurance, car les budgets de nos collectivités sont en souffrance : inflation, non-compensation, lisibilité pluriannuelle limitée...

Les périodes de campagne étant propices au déclenchement des violences, il est bienvenu que la protection fonctionnelle soit étendue aux candidats déclarés.

Nous saluons la facilitation des relations avec les acteurs judiciaires et le dépaysement d'office des affaires impliquant un élu.

Nous sommes attentifs à ce que ces mesures ne soit pas perçues comme inéquitables par nos concitoyens. Le message est clair : les violences à l'égard des élus sont intolérables. Mais les élus ne sont pas des citoyens à part. La justice, qui mérite d'être renforcée, ne doit pas être à deux vitesses. S'il est essentiel d'encourager et d'accompagner les dépôts de plaintes des élus, cela doit valoir pour toutes les plaintes.

Ces violences traduisent une déconnexion entre la politique et les citoyens et la fin de la croyance en une gouvernance pour l'intérêt commun. La réponse se trouve probablement dans le développement plus large de la démocratie locale : référendums citoyens, budgets citoyens, applications citoyennes...

Le GEST votera cette proposition de loi, malgré ses limites. (Applaudissements sur les travées du GEST, du RDSE et des groupes CECRE-K, SER et UC)

La proposition de loi est définitivement adoptée.

(Applaudissements)