Société du bien vieillir en France (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir en France.
Discussion générale
Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités . - Bien vieillir est une préoccupation majeure des Français et une priorité absolue du Gouvernement. C'est un enjeu au coeur de mon ministère, un enjeu de santé et de solidarité envers nos aînés, qui ont fait de nous ce que nous sommes. D'ici à 2030, 4 millions de personnes seraient en situation de perte d'autonomie.
La bonne santé d'une société se mesure à la manière de traiter ses aînés. Je vois mon ministère comme celui du pouvoir de vivre. Il faut offrir les conditions d'une vie meilleure et simplifiée, du premier au dernier souffle.
Depuis 2017, nous avons créé une cinquième branche de la sécurité sociale et lutté contre la maltraitance en établissement.
Grâce à votre travail, cette proposition de loi nous fera encore progresser. Je pense à la généralisation progressive du service public départemental de l'autonomie (SPDA). Je m'entretenais ce matin encore avec le président Sauvadet de la place des départements dans ce domaine. Les mesures de lutte contre l'isolement social et le repérage précoce des fragilités sont également essentiels.
Je pense également aux mesures visant à garantir des conditions d'habitat et à des prestations de qualité dans l'aide à domicile et les établissements.
Des amendements gouvernementaux permettront d'améliorer le contrôle des Ehpad et des services d'aide à domicile. Je salue les échanges avec les équipes du rapporteur et avec la justice, notamment pour un meilleur contrôle des antécédents judiciaires du personnel des établissements en lien avec des publics vulnérables.
Je salue également le passage à une tarification forfaitaire pour l'aide à domicile, plus adaptée que la tarification horaire pour tenir compte de la particularité des publics et de l'éloignement géographique.
Au-delà de cette loi, je prends rendez-vous pour une concertation approfondie sur le financement de la perte d'autonomie et sa gouvernance, notamment les relations avec les départements. J'aurai à coeur de travailler avec vous pour répondre à la volonté exprimée par plus de 90 % de nos concitoyens de vieillir à domicile : le virage du domiciliaire doit être abordé avec détermination.
Il faut apporter des réponses à la mesure de l'engagement des proches aidants. J'aurai à coeur d'oeuvrer aux côtés des professionnels du grand âge, qui ont fait le choix de l'humain, et je serai à leurs côtés.
Le Gouvernement souhaite voir aboutir rapidement les négociations de la nouvelle convention nationale unique pour les personnels du secteur social et médico-social. Pas moins de 50 000 personnes devront être recrutées dans nos Ehpad et services d'aide à domicile en six ans !
J'ai pris et je prendrai des initiatives pour obtenir des accords de méthode sur les négociations en cours : l'enjeu est majeur.
Il faut accélérer l'adaptation des logements. Entre le souhait de vieillir à domicile et le fait de disposer d'un lieu adapté, il y a un chemin pour lequel nous devons apporter une aide. Conformément aux engagements du Président de la République, 680 000 logements seront adaptés dans les dix prochaines années, dont 250 000 d'ici la fin du quinquennat. La prise en charge de MaPrimAdapt' facilitera l'acquisition de monte-escaliers, l'aménagement de salles de bains et de cuisines ou la pose de détecteurs de mouvement pour l'éclairage. Le Premier ministre a aussi fait des annonces dans ce domaine.
Il faut restaurer la confiance des Français dans leurs Ehpad, qui doivent être plus humanisés et plus ouverts sur l'extérieur. Ce texte tire les leçons du covid.
Les financements du Ségur doivent produire des effets concrets, ces crédits devenir réalité.
Je connais votre détermination face à ces enjeux et aurai plaisir à y travailler avec vous. Comme élue locale et femme de terrain, je serai toujours attachée au dialogue. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mmes Nathalie Delattre et Sylvie Vermeillet, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe et Daniel Chasseing applaudissent également.)
M. Jean Sol, rapporteur de la commission des affaires sociales . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Les enjeux du vieillissement sous l'effet de la hausse de l'espérance de vie et de l'avancée en âge des personnes nées pendant le baby-boom sont considérables, de même que les besoins d'inclusion de nos concitoyens en situation de handicap.
Cette proposition de loi a connu un cheminement chaotique. Au cours de son examen à l'Assemblée nationale, commencé le 11 avril 2023 et achevé le 23 novembre, elle est passée de 14 à 65 articles, de portée globalement limitée : un catalogue de mesures plus qu'une réforme globale. La commission a donc souhaité recentrer le texte sur son contenu utile en supprimant ou en réécrivant de nombreux articles.
À l'article 1er, nous avons supprimé la conférence nationale de l'autonomie, instance redondante qui ne répondait pas à un réel besoin.
À l'article 1er bis G, nous avons supprimé l'extension aux services départementaux de la mission d'évaluation de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), au nom de la décentralisation.
À l'article 1er bis A, nous avons approuvé la création du SPDA dans un objectif de décloisonnement et de rapprochement des politiques liées à l'âge et au handicap. C'est une couche supplémentaire de coordination, mais qui apporte souplesse et adaptabilité aux réalités locales.
La logique de parcours doit être un pilier du SPDA, lequel doit s'inscrire dans le virage domiciliaire. Pour renforcer son inscription territoriale, notre commission a adopté un amendement qui permet de définir des « territoires de l'autonomie » à l'échelle infradépartementale.
L'article 1er bis F vise à remédier à l'insuffisante coordination entre établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) et à l'atomisation du parc d'Ehpad publics en favoriser les regroupements.
En matière de prévention de la perte d'autonomie, la généralisation du programme Icope (Integrated care for older people) à l'article 2 bis A est une avancée. Les actions doivent être coordonnées avec les rendez-vous de prévention.
La commission a également adopté l'article 2, qui étend l'utilisation des registres Canicule tenus par les maires et les enrichit de données sur les bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH).
En matière de contrôle des établissements, nous avons validé l'article 12, mais il faudra allouer des moyens suffisants pour évaluer les 40 000 ESMS tous les cinq ans. Les sanctions ont été renforcées à la suite de l'affaire Orpea ; le cadre était déjà robuste.
Nous avons modifié l'article 12 quater pour que les autorités de tutelle soient informées des changements dans les modalités de contrôle des ESMS. Mais dans ce domaine, il convient surtout d'appliquer la loi.
S'agissant des conditions d'accueil et de prise en charge en Ehpad, nous n'avons retenu que les dispositions relatives aux améliorations pour les résidents. Nous avons par ailleurs supprimé l'article 11 bis D.
Nous avons réécrit l'article 11 bis E afin de concilier l'accueil des animaux domestiques avec les contraintes propres aux établissements.
Je vous invite à adopter le texte de la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC ; Mmes Véronique Guillotin et Solanges Nadille applaudissent également.)
Mme Jocelyne Guidez, rapporteure de la commission des affaires sociales . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; Mme Solanges Nadille applaudit également.) La commission a souhaité recentrer le texte sur les mesures utiles, comme la reconnaissance d'un droit de visite dans les ESMS et les centres de santé, reprenant en cela la proposition de loi Retailleau. L'article 4 prévoit que toute personne ayant connaissance d'une maltraitance le signale à une instance qui prendrait la forme d'une cellule départementale de signalement sous l'autorité conjointe du président du conseil départemental et de l'ARS.
L'article 5 bis A étend l'interdiction d'exercer une activité à domicile d'assistance de majeurs vulnérables ou de garde d'enfants en cas d'antécédents judiciaires, autorise la consultation du fichier judiciaire des auteurs d'infraction sexuelle ou violente (Fijaisv) et confère une base légale à un système d'information, pour une application efficace de la loi.
L'article 3 bis A, inopérant, a été supprimé, même s'il avait le mérite de mettre en lumière le tabou de la vie affective et sexuelle des personnes âgées hébergées. La Haute Autorité de santé (HAS) doit publier prochainement un guide de recommandations dans ce domaine à destination des professionnels en établissement.
La commission a adopté les articles apportant des réponses, certes partielles, à la crise du secteur du domicile, dont la création d'une carte professionnelle pour les intervenants à domicile. Nous en avons ouvert le bénéfice aux professionnels justifiant de deux années d'exercice.
Les déplacements entre lieux d'intervention sont une contrainte majeure pour les professionnels de l'aide à domicile. L'article 7 crée donc une nouvelle aide financière de la CNSA aux départements, destinée à soutenir la mobilité. La commission souhaite qu'elle puisse financer les aides départementales à l'obtention du permis de conduire.
En matière de financement des Ehpad, la commission a approuvé la suppression de l'obligation alimentaire des petits-enfants dans le cadre de l'aide sociale à l'hébergement et adopté article 11, qui prévoit la prise en charge par la dotation soins d'actions de prévention.
Concernant le volet relatif à la protection juridique des majeurs, nous n'avons retenu que les dispositions qui répondaient aux difficultés rencontrées par les professionnels. Nous avons modifié l'article 5 pour préciser les missions des mandataires judiciaires.
S'agissant enfin des mesures relatives à l'habitat inclusif, l'article 13 bis B supprimait les plafonds de personnes âgées dépendantes, de personnes en situation de handicap, d'étudiants et de jeunes travailleurs applicables aux résidences autonomie. Pour assurer la sécurité des résidents, nous avons préféré les assouplir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains ; Mme Solanges Nadille applaudit également.)
Mme Elsa Schalck, rapporteure pour avis de la commission des lois . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La commission des lois est saisie de six articles, touchant à la protection juridique des majeurs. Il s'agit en particulier de créer une fonction de tuteur ou curateur de remplacement en cas de décès du tuteur ou curateur en exercice et d'élargir la possibilité de confier une habilitation familiale en visant les parents et alliés.
Nous considérons qu'introduire des dispositions sur la protection juridique des majeurs par voie d'amendement, sans étude d'impact ni concertation, n'est pas à la hauteur des enjeux. Tous les rapports sur le sujet invitent une réflexion globale et transversale sur ces dispositifs, qui concernent près d'un million de nos compatriotes. L'évolution sociodémographique tend à amplifier ce phénomène.
Les professionnels auditionnés ont presque unanimement critiqué les retouches proposées, dénonçant un émiettement législatif et une logique de silos. Les amendements déposés en séance illustrent le caractère incomplet du dispositif.
Pour les familles et les professionnels qui auront à appliquer les textes, évitons les retouches législatives successives.
La commission des lois a ainsi supprimé les articles 5 quater à 5 nonies. D'accord pour faire évoluer les mesures de protection juridique des majeurs, mais pas dans de telles conditions. Nous attendons un projet de loi qui embrasse l'ensemble des sujets, éclairé par une étude d'impact, un avis du Conseil État et une consultation des acteurs.
Nous avons conservé l'article 5 decies, qui crée d'ici à 2026 un registre général des mesures de protection juridique, mesures judiciaires et mandats de protection future. Il est attendu par les professionnels, en particulier les juges des tutelles, pour assurer le respect du principe de subsidiarité et appliquer les dispositions protectrices du code de procédure pénale. Il est aussi indispensable en vue du futur règlement européen. Nous avons avancé son entrée en vigueur à 2025.
Parallèlement, nous avons maintenu le registre spécial des mandats de protection future, prévu depuis 2015 et toujours pas créé. Le Conseil d'État a enjoint le Gouvernement, en septembre dernier, de prendre un décret dans les six mois. Nous avons entendu conserver le bénéfice de cette injonction, car le manque de publicité freine considérablement le recours au mandat de protection future, un outil qui mérite d'être développé. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Depuis des années, nous sommes nombreux à travailler sur la question du bien-vieillir.
Des avancées ont été réalisées, notamment la création de la cinquième branche de la sécurité sociale. Les dépenses pour le grand âge ont augmenté de 32 à 40 milliards d'euros entre 2021 et 2024, ce qui nous situe à mi-chemin de la trajectoire proposée par Dominique Libault dans son rapport de 2018.
Pourtant, de nombreux établissements sont dans une situation difficile, pour ne pas dire catastrophique. Il est urgent de les aider.
Cette proposition de loi n'entraînera pas de bouleversement des politiques de soutien à l'autonomie. La commission a supprimé 31 articles pour la recentrer sur son contenu utile : territorialisation du pilotage des politiques, coordination locale facilitée, renforcement des mesures de prévention et de protection des personnes âgées.
L'adaptabilité des politiques aux réalités est primordiale. Nous n'avons pas besoin de chapeaux à plumes ou de conférences nationales ! Plutôt que de décréter d'en haut, il faut partir du réel et avoir un assembleur territorial ; le rôle des élus est à cet égard essentiel.
La proposition de loi est ainsi recentrée sur l'essentiel : dépistage, qualité des services, prévention pour permettre à nos aînés de vieillir le plus longtemps possible chez eux.
Notre débat enrichira sans doute ce texte, qui reste assez léger. Nos espoirs se portent, madame la ministre, sur la future loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge que vous avez annoncée en commission. Nous attendons avec impatience vos engagements en matière de stratégie, de finances et de gouvernance. Cette grande loi est plus que jamais nécessaire : en 2030, les plus de 65 ans seront plus nombreux dans notre pays que les moins de 20 ans. Assurer l'équilibre entre générations, l'urgence est aussi là. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mme Anne Souyris . - (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER) Je vous prie d'excuser l'absence de Raymonde Poncet-Monge, accidentée, mais qui a réalisé l'essentiel du travail sur ce texte pour notre groupe.
Cinq ans après le rapport Libault, qui annonçait un besoin de financement supplémentaire de 6 milliards d'euros par an en 2024, six ans après que le Gouvernement a promis une loi sur autonomie, nous débattons d'une proposition de loi déposée par le parti gouvernemental, sans étude d'impact ni concertation.
Elle comporte des mesures positives, mais isolées, hétéroclites et sans portée systémique. On nous promet une autre loi pour la fin de l'année - nouvelle manoeuvre dilatoire. Il faut des réformes pérennes, qui changent notre modèle.
L'expérimentation des dotations forfaitaires pour les services autonomie à domicile (SAD) amorce ce changement. Elle devrait être déployée selon le même calendrier que la réforme des services autonomie aide et soins. Autres avancées timides, le financement par le forfait soin des actions de prévention et l'information et l'accord préalables aux prises de contrôle des établissements et services autorisés.
La loi de programmation devra inclure le champ du handicap, dans ses dimensions stratégique, financière et de gouvernance.
Cette proposition de loi relève d'une démarche dilatoire. Réduite en commission, elle va certainement grossir de nouveau, sans contenter les acteurs. Des structures vont fermer ou tourner à bas régime, les professionnels vont continuer de souffrir ou de fuir. Deux tiers des structures ont des postes vacants depuis des années. La dégradation des conditions de travail et la maltraitance institutionnelle amplifient la crise d'attractivité.
La carte professionnelle, mesure symbolique, est déjà une réalité en de nombreux endroits ; aucun droit n'y est associé.
Le rappel du droit de visite témoigne d'un certain changement de regard. Mais est-ce possible, dans une société qui juge et hiérarchise à l'aune de la contribution des personnes à l'activité productive ? Selon la chercheure Charlotte Puiseux, « un système fondé sur la compétitivité, l'endurance à l'effort de production exclut d'emblée les corps handicapés de ce qui est valorisé et valorisable ». Il empêche déconstruction des normes productivistes et valorisation des activités solidaires.
Les écologistes défendent un projet de reconfiguration des normes sociales et productives permettant au concept d'autonomie de se déployer. Nous espérons que notre débat donnera à ce texte plus de souffle et de cohérence. (Applaudissements sur les travées du GEST)
Mme Céline Brulin . - Avec cette proposition de loi, d'aucuns pensaient peut-être calmer les impatiences à l'égard de la grande loi sur l'autonomie maintes fois annoncée. C'est raté. Elle ressemble surtout à un catalogue de mesures sans ambition. Je salue le travail mené par les rapporteurs pour recentrer le texte et lui donner une colonne vertébrale.
Nous sommes bien loin de l'ambition nécessaire en matière d'autonomie - ce qui inclut le handicap. C'est une sorte d'ovni législatif, la promesse du grand texte à venir... Vous avez annoncé une saisine du Conseil d'État. Le Gouvernement va-t-il sans cesse s'en remettre au juge pour résoudre les problèmes politiques ?
Ce thème majeur a été l'oublié du discours de politique générale du Premier ministre. (Mme Catherine Vautrin le conteste.)
Ce texte contient par ailleurs des orientations inquiétantes. Le forfait soins pourrait financer des actes de prévention, ce qui risque de se faire au détriment du soin comme de la prévention. Alors que près de 80 % des Ehpad publics sont en déficit, les mesures prévues affecteront la prise en charge des personnes âgées. Je regrette aussi que les dispositifs de contrôle et de sanction à l'égard des Ehpad privés à but lucratif aient été assouplis, les scandales récents ayant montré la nécessité de mettre fin à certaines pratiques.
Cette proposition de loi manque de fond et de moyens, faute de volonté politique.
Il faut prendre en compte les évolutions de la société et les besoins nouveaux des personnes qui vieillissent, mais aussi des personnes en situation de handicap - oubliées du texte.
Il est temps de revaloriser les métiers du lien et du soin. Ceux qui les exercent sont souvent en souffrance, entre sous-effectif et rémunération insuffisante. Les moyens manquent depuis des années.
Le Président de la République avait annoncé 50 000 emplois d'ici la fin du quinquennat ? Mme la ministre parle de 2030... Les mesures du Ségur sont incomplètes et inégalitaires. Un effort de formation est également nécessaire, et il faut écouter d'autres professions, comme les kinés et les mandataires judiciaires.
Nous proposerons des recettes nouvelles afin de financer un véritable service public de l'autonomie et d'atteindre le taux d'encadrement d'un personnel pour un résident - ou, du moins, l'engagement gouvernemental de huit soignants pour dix résidents.
Comptez sur nous pour vous aider, madame la ministre, à être à la hauteur des enjeux. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K ; Mme Corinne Féret applaudit également.)
Mme Guylène Pantel . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) La prise en charge de la dépendance est l'un des grands enjeux de notre société. Merci aux rapporteurs pour leur travail.
La France de 2023 comptait 26 % de personnes de plus de 60 ans ; en 2040, ce sera près d'un habitant sur trois. Cette évolution démographique entraîne d'innombrables défis.
Élue locale, j'en mesure les implications concrètes, même si mon département a été précurseur dans la construction d'établissements pour personnes âgées ou en situation de handicap. Une offre de services étoffée y répond aux besoins de sociabilisation et de lutte contre l'isolement. La Lozère est aussi le deuxième département pour l'offre de soins infirmiers à domicile rapportée à la population des plus de 75 ans.
Les tendances de fond sont moins réjouissantes. C'est pourquoi le Président de la République a annoncé en 2018 une réforme d'ampleur, maintes fois reportée.
Cette proposition de loi est modeste, mais nous saluons l'engagement de la ministre de présenter avant la fin de l'année un projet de loi de programmation sur le grand âge.
En complément de la lutte contre l'isolement et d'une meilleure rémunération des aides à domicile, il est essentiel de construire un véritable parcours de soins incluant tous les acteurs, dont les kinés, ergothérapeutes et animateurs. Il faut aborder les questions d'effectifs, de formation, de rémunération, de conditions de travail et de pénibilité. Le bien-être des professionnels est crucial pour améliorer l'accompagnement des personnes âgées.
Nous avons déposé plusieurs amendements, en attendant le grand projet de loi annoncé, notamment pour renforcer le SPDA. Attachés à un financement pérenne de la branche autonomie, nous proposerons des pistes en ce sens, pour une meilleure redistribution.
Cette proposition de loi n'est pas mauvaise en soi, mais insuffisante, notamment sur les plans humain et financier. Le RDSE restera force de proposition. (Applaudissements sur les travées du RDSE)
Mme Solanges Nadille . - (Mme Élisabeth Doineau applaudit.) Quinze millions de Français âgés de plus de 65 ans en 2023, soit 20,5 % de la population, en hausse de près de cinq points en vingt ans ! Le nombre des 75-84 ans devrait augmenter de moitié d'ici à 2030, pour dépasser les six millions. Il faut anticiper cette évolution pour garantir à tous une vie de qualité.
Mais comment atteindre cet objectif quand on connaît les difficultés structurelles du secteur ? Comment piloter efficacement des actions au niveau national pour une politique départementalisée ? Comment renforcer l'attractivité des métiers ?
C'est pour y remédier que le Gouvernement a créé en 2020 une cinquième branche de la sécurité sociale, consacrée à l'autonomie. Elle est montée en charge, avec l'attribution de 0,15 point de CSG, pour atteindre 2,4 milliards d'euros par an.
Je salue cette proposition de loi et rends hommage aux deux rapporteures de l'Assemblée nationale, Laurence Cristol et Annie Vidal, ainsi qu'à Astrid Panosyan-Bouvet, qui a coordonné l'écriture du texte.
Ce texte renforce la coordination nationale des politiques publiques de prévention de la perte d'autonomie via la conférence nationale de l'autonomie, hélas supprimée par la commission. Il prévoit le financement d'une activité physique adaptée et un renforcement des missions du médecin coordinateur. Il généralise l'expérimentation du programme de financement de la perte d'autonomie.
Il renforce aussi la lutte contre la maltraitance. Les personnes âgées sont des citoyens à part entière, disposant de libertés et de droits. Nous reconnaissons un droit de visite et de conservation du lien social et créons une instance territoriale de signalement des actes de maltraitance.
Pour un meilleur accompagnement à domicile, il améliore la reconnaissance des aides à domicile via une carte professionnelle et encourage le développement de l'habitat inclusif, des résidences autonomie et de l'accueil familial, alternatives à l'Ehpad.
Nous nous réjouissons, madame la ministre, que vous ayez confirmé l'engagement de votre prédécesseur de faire adopter une loi de programmation pluriannuelle sur le grand âge avant la fin de l'année. Elle est très attendue.
Nous soutenons cette proposition de loi et saluons le travail des rapporteurs pour la condenser - malgré notre désaccord sur certains points, comme la suppression de la conférence nationale de l'autonomie. Les élus et les acteurs déplorent l'absence d'outil national de pilotage. La CNSA est souvent critiquée pour son manque d'incarnation. C'est pourquoi nous avons besoin d'une telle conférence, pour mieux coordonner les acteurs et agir avec plus d'efficacité.
Nous sommes attachés au développement de l'accueil familial, à la formation des professionnels, à l'accompagnement des proches aidants.
Enfin, nous souhaitons revenir à l'intitulé initial du texte. Parler de « diverses mesures » est méprisant, car il s'agit d'un ensemble cohérent en faveur d'une société du bien-vieillir.
Même si le Gouvernement a annoncé un plan de rattrapage en 2021 pour l'outre-mer, il faut aller plus loin, et la future loi de programmation devra tenir compte du vieillissement en outre-mer.
Mme Corinne Féret . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Depuis six ans, nous attendons la loi Grand âge promise par le Président de la République. Depuis six ans, les gouvernements successifs nous présentent des écrans de fumée, provoquant frustrations et colères. La transition démographique est pourtant un enjeu central, qui devrait tous nous mobiliser.
Les plus de 75 ans représentent 10 % de la population française ; dans les vingt prochaines années, leur nombre va doubler pour atteindre onze millions. Au-delà des chiffres, nous parlons de notre capacité à prendre soin de nos proches.
Le titre de la proposition de loi est prometteur : il est urgent de poser des fondements solides et durables pour la prise en charge des personnes âgées. Malheureusement, le texte accumule des dispositifs inégaux, sans unité. Faute d'orientation politique, il colmate des brèches mais contourne les problèmes structurels.
Quelles orientations et quels financements pour la cinquième branche ? Comment rendre accessibles les Ehpad et réduire le reste à charge ? Comment revaloriser les métiers du grand âge et leur permettre d'assurer correctement leurs missions ? Comment aider les personnes âgées à rester chez elles ? Pas de réponse, faute de volonté politique et de moyens.
Les députés socialistes, rejoints par d'autres, notamment de la majorité, ont inséré un article 2 bis B prévoyant une loi de programmation pluriannuelle sur le grand âge tous les cinq ans, pour fixer des priorités et des moyens. Où sont les 9 à 10 milliards d'euros que le rapport Libault estimait nécessaires voilà cinq ans ? Les décisions sont sans cesse repoussées, à l'image des 50 000 emplois pour le grand âge, annoncés pour 2027 et désormais prévus pour 2030.
Élisabeth Borne promettait une loi de programmation pluriannuelle le 22 novembre dernier. Aurore Bergé, auteure de la proposition de loi, s'était engagée à faire adopter un texte au second semestre 2024. Que reste-t-il de ces engagements ?
Madame la ministre, vous-même restez bien évasive, indiquant que l'agenda reste à définir ; vous dites même vouloir faire passer un maximum de mesures par la voie réglementaire.
Les professionnels sont en plein désarroi, faute de pouvoir exercer correctement leur métier. Leurs directions les soutiennent, n'ayant plus les moyens de financer leurs missions. Les élus locaux se mobilisent, les familles s'interrogent sur leur capacité à financer les soins dont leurs proches auront besoin.
Les réponses réglementaires ne suffiront pas. Les familles en détresse sont trop nombreuses, trop d'inégalités territoriales persistent, trop de professionnels sont en souffrance.
La proposition de loi comporte certes quelques avancées, comme la création du SPDA, qui décloisonne les politiques sanitaires et médico-sociales. Nous nous félicitons aussi de la généralisation du dépistage précoce de la perte d'autonomie. De même, la délivrance d'une carte professionnelle répond à une demande des intéressés, tout comme le soutien à leur mobilité.
Mais cela ne suffit pas. Il faut améliorer le repérage de la maltraitance ; les insuffisances actuelles des services ne sont pas acceptables. Sur l'habitat inclusif, il faut aller plus loin.
Les ajustements pratico-pratiques ne sont pas à la hauteur de l'enjeu : il faut légiférer en grand.
Le vieillissement n'est pas la fin de vie. Les personnes âgées ont besoin d'un accompagnement adapté pour vieillir dans la dignité et rester actrices de leur vie. Nous ferons des propositions constructives pour que notre société réponde à ce défi majeur. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
M. Philippe Mouiller . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC) Prévention de la perte d'autonomie, prise en charge des personnes dépendantes, promotion de la bientraitance, accompagnement des professionnels, hébergement des personnes âgées et en situation de handicap : ces questions sont majeures. Hélas, la proposition de loi est un catalogue de mesures sans grande portée.
Je salue le travail des rapporteurs pour la recentrer et mettre en évidence des mesures structurantes, comme la création du SPDA et la généralisation d'Icope.
Le texte encourage les établissements publics à se regrouper en adhérant à un groupement hospitalier de territoire (GHT) ou un nouveau type de groupement, le groupement territorial social et médico-social (GTSMS), évolution soutenue par les professionnels du secteur.
La commission a considéré que ce nouveau type de groupement pouvait également concerner le champ du handicap. Elle a donc prévu que le projet d'accompagnement partagé du groupement comporte un volet relatif à l'accompagnement des personnes en situation de handicap vieillissantes. Un récent rapport de la Cour des comptes a souligné les lacunes dans ce domaine.
Nous avons renommé le texte « proposition de loi portant diverses mesures relatives au grand âge et à l'autonomie », pour mieux rendre compte de son contenu.
Pour réussir le virage domiciliaire et améliorer la vie en Ehpad, il faut des réformes structurelles et des financements. Nous attendons donc la loi de programmation pluriannuelle annoncée par l'article 2 bis B - mesure sans portée juridique.
Nous avons besoin d'une vision à moyen et long termes, de nouveaux financements et d'une redéfinition des relations entre État et départements. L'enjeu financier est essentiel, mais la répartition des compétences ne l'est pas moins. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC)
M. Stéphane Ravier . - Liberté, égalité, fraternité : que faisons-nous de la fraternité française entre générations ?
Début 2023, la France comptait 14 millions de personnes âgées, dont 4 millions de plus de 85 ans. En 2021, 530 000 personnes âgées se trouvaient en situation de « mort sociale ». Selon la Drees, les plus de 75 ans se suicident deux fois plus que le reste de la population. Cet abandon de nos anciens est une intolérable euthanasie cachée.
Dans les dix prochaines années, le nombre de Français âgés de 75 à 84 ans va augmenter de 50 %. En 2030, les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 20 ans.
Le vieillissement est un phénomène progressif - donc, par définition, prévisible. La première nécessité consiste à garantir le renouvellement des générations par une politique familiale ambitieuse, depuis trop longtemps abandonnée. Nous ne préviendrons pas la perte d'autonomie ni n'assurerons le maintien à domicile des personnes âgées sans remédier à la dénatalité. Les mesures techniques les plus inventives ne remplaceront pas la présence humaine et l'échange entre générations.
Les scandales avérés de maltraitance appellent à une prise de conscience des dérives de certains groupes privés. Mais il ne faut pas oublier la responsabilité du Gouvernement, qui a aggravé l'enfermement des personnes âgées durant le covid : M. Véran et le Conseil scientifique ont empêché les familles de visiter leurs aînés et même de les accompagner vers la mort, allant jusqu'à leur refuser l'adieu au visage. Dans son rapport pour le ministère de la santé, Laurent Frémont parle à ce propos de « rupture anthropologique inédite ». Voilà le vrai visage des progressistes ! Je salue donc l'avancée de la commission pour faire du droit de visite en Ehpad un droit absolu.
La problématique des déserts médicaux, liée à l'abandon des personnes âgées, doit être intégrée dans la prochaine loi de programmation sur le grand âge - dont on espère qu'elle ne passera pas à la trappe avec le ministre qui la promettait.
Bâtir une société, c'est d'abord ne pas se couper de ses racines. Respectons les personnes âgées, qui nous ont transmis le passé - et surtout, donné la vie.
M. Daniel Chasseing . - (Mme Corinne Bourcier applaudit.) Je félicite les rapporteurs pour leur excellent travail. Ils ont supprimé de nombreux articles redondants et renommé de façon plus modeste cette proposition de loi.
De nombreux rapports ont été publiés, de celui de Philippe Bas en 2007 à celui de Dominique Libault en 2019.
Nous avons besoin de plus de personnels, car le nombre des plus de 85 ans va doubler d'ici 2040. Je soutiens l'engagement du Président de la République de créer 50 000 emplois d'ici 2027. Le temps consacré par les aides-soignants à chaque résident passerait de 35 à 50 minutes.
Nous espérons que le projet de loi de programmation sur le grand âge verra le jour avant la fin de l'année.
L'article 1er bis prévoit un SPDA, reprenant une proposition du rapport Libault. Cela doit s'accompagner d'un accueil téléphonique dédié 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, comme dans mon département, pour rediriger les demandes vers un relais local compétent.
Le département doit être le chef de file pour le maintien à domicile. Il faut notamment lui transférer les budgets des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad). L'ARS aurait compétence sur le budget soins et dépendance fusionné en établissement.
La carte professionnelle et l'aide à la mobilité des professionnels sont appréciables.
La création d'une cellule départementale de signalement des maltraitances est bienvenue. Mais pourquoi une nouvelle entité, alors qu'on pourrait recourir au service autonomie ? La prévention de la maltraitance passe aussi par un personnel suffisant.
L'article 11 permettra d'utiliser le forfait soins pour la prévention, ce qui est une bonne chose.
Nous sommes favorables au développement de l'habitat inclusif et des résidences autonomie. La présence d'un animal de compagnie en collectivité est souhaitable, mais un droit opposable pour tout résident nous paraît ingérable.
Le groupe INDEP soutient les petites avancées de ce texte, mais attend surtout le projet de loi de programmation sur le grand âge, pour une prise en charge décente de nos aînés. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)
Mme Anne-Sophie Romagny . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Cette proposition de loi n'est pas l'alpha et l'oméga de la politique de la dépendance pour les années à venir. Cela dit, saluons quelques avancées : simplification et déflation normative, avec la suppression de 31 articles par nos rapporteurs, gage de lisibilité, création du SPDA, de la carte professionnelle, généralisation du programme Icope, droit garanti des résidents à recevoir des visites.
S'agissant de l'hébergement des personnes âgées, le texte prévoit de contraindre les Ehpad publics à se regrouper, afin d'élaborer une stratégie commune d'accompagnement et une logique de parcours, de rationaliser les modes de gestion et de former des synergies. Cette mesure est soutenue par le secteur.
La proposition de loi conforte l'habitat inclusif, créé par la loi Elan du 23 novembre 2018, sans l'assimiler à un établissement recevant du public (ERP), ce qui serait source de contraintes supplémentaires.
La commission a adopté l'article 11 bis F, qui prévoit une expérimentation sur l'accueil de nuit dans les Ehpad, afin d'offrir aux proches aidants une solution de répit. Les rapporteurs ont proposé de l'étendre aux résidences autonomies.
Le texte reste toutefois très lacunaire et nous attendons de pied ferme la loi Grand Âge. Quid de la place des résidences seniors ou résidences services, de leur financement et de la péréquation avec les Ehpad ? À quand un bilan comparatif financier de l'APA établissement et de l'APA domicile ? Le coût du virage domiciliaire est-il supportable ? Alors que l'on manque d'intervenants à domicile, ces derniers perdent du temps en trajet, au détriment du soin et de l'accompagnement. Quelle orientation en matière de maintien à domicile ? Recruter c'est bien, mais revaloriser les métiers, c'est indispensable.
Il faut travailler avec toutes les parties pour avancer. Les acteurs de terrain ont des solutions de proximité à proposer, écoutons-les ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mme Christine Bonfanti-Dossat . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Déjà critiqué par les parlementaires et les professionnels du secteur, ce texte n'est pas la loi tant attendue sur le grand âge.
En 2030, près du quart de la population française aura plus de 65 ans, dont 6 millions entre 75 et 84 ans ; en 2050, un tiers aura plus de 60 ans. Il faut répondre à cette urgence démographique.
Or ce texte ne prévoit rien pour améliorer l'aide à domicile, et surtout pas de moyens financiers. Il impose aux Ssiad de se doter d'une activité à domicile, soit par regroupement avec des structures existantes, soit en intégrant une nouvelle activité. Pourquoi créer une obligation, au risque de déstabiliser ? Restons-en à une simple faculté.
Alors que 80 % des Français veulent rester chez eux, nous devons amplifier les mesures en faveur d'un virage domiciliaire et supprimer les barrières actuelles. Il faut mieux organiser la coordination entre soignants et auxiliaires de vie, avec un référent responsable du planning et de l'accompagnement, dans le même esprit que la carte professionnelle.
Il est urgent de conférer un véritable statut aux auxiliaires de vie, qui doivent être mieux formés et mieux reconnus comme aidants professionnels, avec la rémunération qu'ils méritent, alors que la profession souffre d'un grand turnover.
La création, dans chaque département, d'un institut et d'une formation diplômante pour ces métiers devrait être explorée. Le manque de professionnels conduit à envoyer les personnes âgées en Ehpad, dont le coût de journée est bien plus élevé que celui du maintien à domicile. Les personnes âgées ont besoin d'un accompagnement plus professionnel et plus humain.
Bien vieillir en France, c'est garantir des prestations de qualité grâce à des professionnels accompagnés et soutenus.
Ne nous voilons pas la face : les services à domicile sont en train de mourir. Il faut un vrai projet de loi sur le grand âge et l'autonomie. On nous promettait une véritable révolution, mais, aujourd'hui, le compte n'y est pas. (M. Philippe Mouiller applaudit.)
M. Khalifé Khalifé . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Bien vieillir est un choix politique stratégique, qui doit tenir compte de notre capacité à assumer une telle charge.
En tant qu'élu impliqué, j'espérais enfin voir arriver la loi Grand Âge, tant attendue. Nous nous contenterons de cette proposition de loi, qui ne tient malheureusement pas compte de toutes les expériences menées par les collectivités territoriales, en particulier par les départements. D'ampleur modeste, elle ne répondait pas à son intitulé initial.
Près de la moitié des 65 dispositions votées par l'Assemblée nationale, jugées inutiles ou satisfaites, ont été supprimées en commission, tandis que d'autres ont été réécrites.
Je salue la création d'un SPDA : le département est un acteur historique, dont la légitimité a malheureusement été contestée. Vos propos à ce sujet ont été rassurants, madame la ministre. En 1982, ici même, feu Jean-Marie Rausch appelait à une clarification des compétences des départements. Mais la loi NOTRe est passée par là...
Leur mission ne doit pas être étouffée par des instances complexes de coordination et de régulation qui bloqueront les initiatives. Quid de l'intégration de ce service aux instances existantes ? De grâce, madame la ministre, appliquons enfin le choc de simplification !
Le parcours des séniors doit être lisible et adapté à chacun. Certains départements manquent cruellement de places en Ehpad, quand d'autres ont des places inoccupées. Ce texte aurait pu proposer d'expérimenter le transfert de places d'un département à l'autre, sur la base du volontariat.
Conforter le rôle du médecin coordinateur ne suffit pas : il faut anticiper, « aller vers », notamment sur les soins dentaires, pour éviter le renoncement aux soins.
Certains métiers cumulent pénibilité et faible rémunération. Ce texte ne propose aucune mesure de valorisation, même si certaines dispositions sont à saluer.
Difficile d'améliorer les registres dits Canicule des mairies du fait des contraintes de la Cnil.
Nous aurions préféré un texte global. J'espère qu'il ne s'agit ici que de l'avant-garde de la grande loi annoncée, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Solanges Nadille et Corinne Bourcier applaudissent également.)
M. Philippe Mouiller, président de la commission. - Très bien.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Permettez-moi de répondre aux orateurs, que je remercie.
Monsieur Sol, merci d'avoir souligné l'intérêt du service public départemental, qui consacre une logique de parcours et de guichet unique. Mesdames Guidez, Bonfati-Dossat, Romagny, Pantel, la carte professionnelle valide deux années d'expérience - c'est un début de validation des acquis de l'expérience. La convention collective nationale unique est un pas vers une meilleure reconnaissance de ces métiers.
L'attractivité des métiers de l'humain est un autre élément. Où sont les personnes qui vont s'y consacrer, au-delà des chiffres ? Notre responsabilité porte aussi sur l'évolution de ces métiers et les parcours professionnels.
M. Vanlerenberghe l'a dit, l'enjeu démographique est majeur. Nous devons construire des réponses ensemble.
Madame Schalck, j'ai entendu votre critique sur le travail en silo. Concernant le mandat de protection de droit commun et le mandat de protection future, un registre unique national va être créé. J'ai bien noté les réserves du Conseil d'État. Cette question relève du ministère de la justice, mais j'en mesure l'urgence.
Mesdames Brulin, Féret et Souyris, monsieur le Premier ministre a déclaré tout à l'heure que nous continuerions « à bâtir une société où chacun peut vieillir dignement, en facilitant le maintien à domicile de ceux qui le souhaitent et en améliorant le quotidien en Ehpad. Le défi humain et financier est immense. » Il a donc bien évoqué le sujet ! (Quelques mouvements à gauche)
L'article 34 de la Constitution ne retient pas la notion de loi de programmation pour le secteur médico-social. Nous attendons la réponse du Conseil d'État le 8 février.
J'échangeais ce matin avec le président Sauvadet sur le lien avec les départements. Monsieur Chasseing, le sujet de la ligne téléphonique est purement réglementaire : n'allons pas imposer dans la loi de telles obligations aux présidents de département !
La fusion entre les Ssad et les Ssiad est en cours. Une nouveauté : des actions de prévention pourront être financées dans le cadre de la dotation de soins Ehpad-ARS.
Monsieur Ravier, l'isolement est un vrai problème.
Madame Nadille, vous avez tout dit : ce texte est une première brique qu'il conviendra de compléter. J'ai noté vos propos sur les outre-mer.
Monsieur Khalifé, merci de votre plaidoyer pour le département et pour la proximité territoriale.
Monsieur le président Mouiller, vous dites avoir souhaité recentrer ce texte. J'arrive en fin de parcours, je trouve un texte recentré. Comme vous, je suis attachée à la prévention. Les nouveaux régimes de tarification et les groupements sont des éléments importants, car derrière les groupements, il y a mutualisation et structuration de l'offre.
Vous l'avez tous dit : quel modèle ? Quel financement ? Quelle gouvernance ? (Mmes Anne-Sophie Romagny et Élisabeth Doineau applaudissent.)
Discussion des articles
Avant l'article 1er
M. le président. - Amendement n°89 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Fialaire, Grosvalet et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant les contours de l'instauration d'une prestation universelle d'autonomie. Cette prestation serait un droit ouvert à toute personne, quels que soient son âge ou sa situation de handicap, prenant en compte la nature et l'importance des besoins de compensation au regard des projets de vie des personnes. Le rapport précise les conditions d'éligibilité, ainsi que le périmètre de cette nouvelle prestation et les besoins de financements y afférents, afin de répondre à l'objectif d'une prestation individualisée, intégrale, universelle et sans restes à charge pour les personnes concernées.
Mme Guylène Pantel. - Les dispositifs de soutien à l'autonomie sont insuffisants et trop parcellaires. Ils instaurent par ailleurs des barrières dans l'accès aux droits, notamment en fonction de l'âge. C'est pourquoi nous demandons un rapport sur l'instauration d'une prestation universelle d'autonomie.
M. Jean Sol, rapporteur. - Les barrières d'âge sont une préoccupation de longue date de notre commission. En témoigne le rapport de Bernard Bonne et Michelle Meunier, qui prévoyait de confier à la CNSA la conception d'une prestation universelle d'autonomie.
Cela dit, la commission s'oppose par principe à l'inscription dans la loi des demandes de rapport : avis défavorable.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - L'APA est dotée d'un volet établissement, contrairement à la PCH, qui vise à compenser le handicap dès le plus jeune âge. Les besoins tout au long de la vie d'une personne handicapée sont différents de ceux d'une personne en perte d'autonomie, d'où ces deux prestations différentes matérialisées notamment par la limite d'âge. Avis défavorable.
L'amendement n°89 rectifié n'est pas adopté.
Article 1er
M. Stéphane Demilly . - La population française vieillit : elle comptera 20 millions de plus de 60 ans en 2030, 24 millions en 2060. Le mode de vie de notre société doit donc changer : nous sommes tous responsables pour lutter contre la solitude. Les personnes en perte d'autonomie font face à un réel parcours du combattant. Il faut agir à l'échelon local. Les acteurs se débattent dans des situations inextricables dues au manque de moyens, de personnel, de temps.
Ce texte propose un regroupement des Ehpad pour mieux s'en sortir. Mais, dans certains territoires, les Ehpad ont déjà fusionné, et cela n'a rien réglé ! Les budgets sont toujours en déficit, et les effectifs diminuent. Certes, le Gouvernement a revalorisé les professionnels, mais sans donner les moyens financiers aux établissements. Or les charges de personnel représentent 80 % des dépenses, d'autant que l'absentéisme est important, et qu'il faut aussi rémunérer les remplaçants !
Le chantier n'est pas simple, mais il faut remettre la personne au centre des dispositifs, en renforçant l'aide à domicile et l'habitat inclusif.
Mme Laurence Harribey . - Il est logique de faire de l'autonomie un service public départemental - les départements se sont battus pour. Je m'interroge toutefois. D'abord, sur le financement de l'autonomie et de sa répartition entre les différents acteurs, car les départements récupèrent des miettes du financement de la CNSA.
Ensuite, sur la création des groupements territoriaux sociaux et médico-sociaux (GTSMS) : les départements, cofinanceurs des Ehpad, doivent être associés à leur gestion.
Enfin, sur la rupture d'égalité devant l'impôt entre les Ehpad territoriaux, exonérés de la taxe sur les salaires, et les Ehpad autonomes, qui ne le sont pas, met nombre de ces derniers en péril.
J'espère que la future loi Grand Âge répondra à ces problématiques. Quel modèle ? Quelle gouvernance ? Quel financement ? Le texte n'apporte pas de réponses.
M. le président. - Amendement n°226 rectifié, présenté par Mme Bourcier, M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Brault, Verzelen et Capus, Mme Lermytte et M. Chevalier.
Rédiger ainsi cet article :
Le chapitre III du titre III du livre II du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
I. - Au début, il est inséré une section 1 ainsi rédigée :
« Section 1
« Conférence nationale de l'autonomie
« Art. L. 233-1 A. - Une conférence nationale de l'autonomie assure le pilotage national de la politique de prévention de la perte d'autonomie et sensibilise notamment à la prévention primaire pour le bien-vieillir. Elle est présidée par le ministre chargé de la politique de prévention de la perte d'autonomie et sa composition est définie par décret. Elle se réunit au moins une fois par an.
« Dans le cadre d'un plan pluriannuel, elle fixe les priorités de la politique de prévention et d'accompagnement de la perte d'autonomie et les indicateurs permettant de l'évaluer.
« Elle coordonne les acteurs impliqués dans la politique de prévention et d'accompagnement de la perte d'autonomie et les stratégies de communication des politiques publiques en faveur de l'autonomie et contre l'âgisme.
« Elle s'appuie notamment sur la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie pour la déclinaison de cette politique.
« À cet effet, elle s'appuie sur l'expertise d'un centre national de ressources probantes intégré au sein de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Il est chargé :
« 1° De capitaliser et de diffuser les actions de prévention de la perte d'autonomie ;
« 2° D'élaborer des référentiels d'actions et de bonnes pratiques ;
« 3° D'évaluer et de labelliser les équipements et les aides techniques individuelles favorisant le soutien à domicile ou la prévention de la perte d'autonomie en établissement.
« La conférence nationale de l'autonomie assure également le suivi et l'évaluation de la mise en oeuvre du plan pluriannuel dans les conférences des financeurs mentionnées à l'article L. 233-1. »
II. - Avant l'article L. 2331, il est inséré une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Conférence des financeurs »
III. - L'article L. 233-1 est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « définit », sont insérés les mots : « , en lien, le cas échéant, avec le gérontopôle compétent, » et sont ajoutés les mots : « dans le respect des priorités définies dans le plan pluriannuel établi par la conférence nationale de l'autonomie mentionnée à l'article L. 233-1 A » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Le développement d'actions de lutte contre l'isolement des personnes âgées. »
Mme Corinne Bourcier. - Cet amendement vise à rétablir l'article 1er tel que voté à l'Assemblée nationale, rétablissant ainsi la conférence nationale de l'autonomie, qui pilote la politique de prévention et définit les priorités dans un cadre pluriannuel.
M. le président. - Amendement identique n°307, présenté par Mme Nadille et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Mme Solanges Nadille. - Les politiques existent, mais personne ne sait qui tient la barre, qui fixe le cap. Il manque un organe de pilotage national pour coordonner les actions menées dans les territoires. C'est pourquoi les auteurs de la proposition de loi avaient proposé la création d'une conférence nationale de l'autonomie, sur le modèle de la conférence nationale sur le handicap, pour définir les priorités et fixer les objectifs.
Le principe d'un pilotage national était défendu par des députés de toute sensibilité. Nous avons été surpris de sa suppression en commission, et proposons donc son rétablissement.
M. Jean Sol, rapporteur. - La conférence nationale de l'autonomie que la commission a supprimée ne répond à aucune attente des acteurs et complexifierait inutilement le paysage. Mieux vaut que les priorités soient définies dans le cadre du SPDA. Avis défavorable.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Le Gouvernement n'y était pas forcément favorable, craignant une redondance. Sagesse, cependant.
Les amendements identiques nos226 rectifié et 307 ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°46 rectifié, présenté par MM. Daubet, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots suivants :
liée à l'âge ou au handicap
Mme Guylène Pantel. - Il s'agit d'engager une réflexion globale sur l'autonomie, en englobant les sujets du grand âge, mais aussi du handicap, pour une meilleure cohérence entre politiques publiques.
M. Jean Sol, rapporteur. - S'il est en effet souhaitable de ne pas cloisonner les politiques d'autonomie et de prendre en compte le handicap, la notion de « prévention de perte de l'autonomie » est utilisée pour les personnes dépendantes du fait du vieillissement. Avis défavorable.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Même avis pour les mêmes raisons.
L'amendement n°46 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°118 rectifié, présenté par Mme Féret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'État pris après avis des représentants des départements vient préciser le fonctionnement et la composition du centre national de ressources probantes. »
Mme Corinne Féret. - Le centre national de ressources probantes, dont le CNSA est responsable, fournit aux acteurs des savoirs issus de la recherche. Or son comité d'orientation ne compte aucun représentant des départements, pourtant premiers concernés. En demandant l'avis de leurs représentants dans le cadre d'un décret en Conseil d'État précisant la composition du centre, nous corrigerions cette omission.
M. Jean Sol, rapporteur. - Ce renvoi au pouvoir réglementaire ne nous semble pas nécessaire : ces précisions relèvent de l'organisation interne de la CNSA. Avis défavorable.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - La mise en place de ce comité est assurée par la CNSA, l'amendement est donc satisfait. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°118 rectifié n'est pas adopté.
L'article 1er est adopté.
Après l'article 1er
M. le président. - Amendement n°99 rectifié, présenté par Mme Féret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L'article L. 113-2 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa du I est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il organise un réseau de lieux labellisés « Je réponds aux aînés » et « Je réponds aux aidants » à destination, respectivement, des personnes âgées et des proches aidants, mentionnés à l'article L. 121-1 » ;
b) Après le troisième alinéa du II, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elles peuvent aussi préciser les modalités de mise en oeuvre de chaque réseau départemental de lieux labellisés mentionné au I » ;
2° L'article L. 121-1 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Le département organise, en lien avec l'agence régionale de santé, un réseau de lieux labellisés « Je réponds aux aînés » et « Je réponds aux aidants » ayant pour missions l'accueil, l'information et l'orientation, respectivement, des personnes âgées, et des proches aidants, conformément à un cahier des charges national défini par décret. Ce réseau est présenté pour avis au Conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie mentionné à l'article L. 149-1 et à la conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie mentionnée à l'article L. 233-1, homologué par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
« Le département élabore un rapport d'activité annuel de ce réseau. Il le transmet à l'agence régionale de santé, au conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie, à la conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie et à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
« Les conditions d'application, dont les modalités d'attribution et de retrait des labels, sont fixées par décret. »
3° Après le 5° de l'article L. 149-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Le réseau départemental de lieux labellisés « Je réponds aux aînés » et « Je réponds aux aidants » mentionné à l'article L. 121-1. À ce titre, il est destinataire du rapport d'activité annuel de ce réseau, élaboré par le département. »
4° L'article L. 233-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie est consultée pour avis sur le réseau départemental de lieux labellisés « Je réponds aux aînés » et « Je réponds aux aidants » tels que mentionnés à l'article L. 121-1. À ce titre, elle est destinataire du rapport d'activité annuel de ce réseau, élaboré par le département. »
II. - Le c du 2° de l'article L. 1431-2 du code de la santé publique est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Elles participent à la constitution du réseau des lieux labellisés « Je réponds aux aînés » et « Je réponds aux aidants » mentionné à l'article L. 121-1 du code de l'action sociale et des familles, dans les conditions définies par décret. À ce titre, elles sont destinataires du rapport d'activité annuel de ce réseau élaboré par le département. »
Mme Annie Le Houerou. - L'accès à l'information des personnes âgées est inégal, d'autant plus que l'illectronisme touche 30 % des seniors. L'accès à des rendez-vous physiques est également réduit, d'où un non-recours aux prestations et un sentiment d'abandon.
Cet amendement crée un service de proximité dédié, via des points de contact dits d'autonomie dans tous les départements pour aider aînés et aidants, en étroite collaboration avec les ARS. Ce réseau développerait l'orientation, l'information et la prise en charge des seniors par les pouvoirs publics, coordonnerait les actions des acteurs impliqués dans le maintien à domicile et favoriserait la prévention de la perte d'autonomie. C'est une préconisation de la proposition de loi de Jérôme Guedj. On pourrait l'appeler France aînés ou France aidants...
M. Jean Sol, rapporteur. - Ces missions ont vocation à être mises en oeuvre par le SPDA. Il ne serait pas opportun de créer un service parallèle. L'amendement est en outre incompatible avec la suppression de la conférence des financeurs à l'article 1er bis A. Avis défavorable.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Le SPDA a vocation à s'organiser différemment dans chaque département, pour répondre aux spécificités locales. Plaquer un modèle unique ne correspondrait pas à la démarche. Avis défavorable.
L'amendement n°99 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°100 rectifié, présenté par Mme Féret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du dixième alinéa de l'article L. 142-1 du code de l'action sociale et des familles est complétée par les mots : « ainsi que sur les enjeux liés à la transition démographique et aux solidarités générationnelles dans l'ensemble des politiques publiques et dans les secteurs des transports, du logement, de l'aménagement, de la cohésion des territoires, de la culture et de la vie associative ».
Mme Corinne Féret. - L'amendement élargit la consultation obligatoire du Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA) aux enjeux liés au vieillissement, dans toutes les politiques publiques - transport, logement, cohésion territoriale, culture, etc.
D'ici à 2040, un habitant sur quatre aura plus de 65 ans : il est urgent de créer un environnement public permettant de s'y adapter. Cette proposition s'inscrit dans la lignée du rapport Libault, qui invite à favoriser la participation des personnes âgées dans les décisions les concernant.
M. Jean Sol, rapporteur. - La définition actuelle des missions du HCFEA lui permet déjà de mener cette réflexion prospective. Votre précision est superfétatoire. Avis défavorable.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - C'est l'article 142-1 du code de l'action sociale et des familles. Votre amendement est satisfait : avis défavorable.
L'amendement n°100 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°253, présenté par Mme Corbière Naminzo et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 6° de l'article L. 312-4 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Prévoient, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à la Réunion, la mise en place d'actions spécifiques pour garantir le soutien à l'autonomie et à la qualité de vie des personnes âgées. Ces actions prennent en compte le rôle des aidants, particulièrement sur les territoires dépourvus d'établissements accueillant des personnes âgées. »
Mme Silvana Silvani. - Cet amendement, cher à Mme Corbière Naminzo, vise à tenir compte des spécificités des territoires ultramarins, où l'âge moyen de départ à la retraite est plus tardif qu'en hexagone : 64,3 ans à La Réunion, 65 ans en Guyane, contre 62,7 ans en métropole, en raison de la faiblesse des pensions. Or l'espérance de vie y est également plus faible : 73,9 ans à Mayotte, 81,4 ans en Martinique, contre 85,5 ans dans l'Hexagone.
Certaines maladies professionnelles y sont encore mal reconnues, comme les cancers dus à l'exposition au chlordécone.
Selon le Conseil économique, social et environnemental (Cese), le vieillissement rapide de la population, notamment en Martinique et en Guadeloupe, pourrait entraîner une augmentation de la pauvreté.
Avec cet amendement, nous demandons l'intégration du grand âge dans les schémas d'organisation sociale et médico-sociale de Guadeloupe, Martinique, Guyane et de La Réunion.
M. Jean Sol, rapporteur. - Les schémas d'organisation sociale et médico-sociale sont par définition établis en fonction des besoins de la population et des spécificités du territoire. Inutile de prévoir une disposition spécifique à ces territoires. Avis défavorable.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Je suis sensible aux enjeux spécifiques du vieillissement démographique en outre-mer, mais l'ajout proposé n'est pas nécessaire. Ces schémas ont vocation à inscrire des actions dans le champ médico-social en cohérence avec les programmes régionaux de santé des ARS. La demande est donc satisfaite. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°253 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°101 rectifié, présenté par Mme Féret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 1434-10 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les contrats locaux de santé comportent un volet consacré au grand âge qui tient compte du projet territorial sur le grand âge. Ils s'emploient à assurer une action coordonnée des établissements de santé, des établissements d'hébergement des personnes âges dépendantes, des établissements d'hébergement des personnes âges dépendantes à domicile et des logements inclusifs. »
Mme Corinne Féret. - Les contrats locaux de santé (CLS) participent d'une dynamique territoriale visant à réduire les inégalités de santé par une offre de soins de proximité. Il s'agit d'agir sur les déterminants de la santé comme le transport ou le logement.
Nous proposons d'ajouter un volet grand âge aux CLS et de favoriser la coordination des acteurs. Cela permettra de concevoir des initiatives spécifiques répondant aux défis liés au vieillissement dans un territoire.
M. Jean Sol, rapporteur. - Multiplier les outils de coordination territoriale risque d'être contre-productif : la coordination a vocation à s'organiser dans le cadre du SPDA. Avis défavorable.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Les CLS déclinent les projets régionaux de santé. Ils doivent s'ajuster au plus près des besoins locaux de santé et être en phase avec les projets portés par les collectivités. Laissons de la souplesse aux territoires. Avis défavorable.
Mme Émilienne Poumirol. - Les CLS visent à porter des projets territoriaux, souvent à l'échelle intercommunale. Ajouter un volet grand âge permettrait une déclinaison de proximité. En Haute-Garonne, nous avons développé des maisons de proximité, avec des ambassadeurs du conseil départemental, pour aider à constituer les dossiers en matière de handicap ou d'autonomie, avec un grand succès. Le grand âge doit figurer dans toutes nos politiques publiques. Ce serait un plus pour les CLS d'intégrer la notion.
Mme Laurence Harribey. - À Sauveterre-de-Guyenne, en Gironde, un Ehpad risque de disparaître dans une restructuration, alors qu'il répond à un réel besoin en milieu rural. L'ARS, le département et la commune se sont mis autour de la table. C'est ce que nous proposons avec cet amendement, afin de faire émerger un nouveau mode de gouvernance territoriale.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Rien ne l'empêche, et d'ailleurs vous le faites déjà.
Mme Laurence Harribey. - Dans un cas de crise !
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Vu l'évolution démographique, que vous avez tous rappelée, l'enjeu du vieillissement est de facto un des enjeux majeurs de santé publique.
Mme Véronique Guillotin. - N'imposons pas par la loi le contenu des CLS. Les acteurs locaux définissent leurs priorités, et prennent naturellement en compte le vieillissement. Lâchons la bride, laissons de la liberté aux acteurs du territoire.
L'amendement n°101 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°224 rectifié, présenté par Mme Bourcier, MM. Capus, Verzelen et Brault, Mme Lermytte et M. Chevalier.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport d'évaluation détaillé de l'activité de la conférence nationale de l'autonomie et du centre de ressources probantes.
Mme Corinne Bourcier. - Cet article, inséré en commission à l'Assemblée nationale, prévoit la remise au Parlement d'un rapport d'activité de la conférence nationale de l'autonomie et du centre de ressources probantes.
M. Jean Sol, rapporteur. - Avis défavorable : il s'agit d'une demande de rapport, et nous avons supprimé la conférence nationale de l'autonomie à l'article 1er.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°224 rectifié est retiré.
Article 1er bis A
M. Daniel Chasseing . - La création d'un SPDA est une bonne décision, car le département doit être chef de file - à condition d'avoir un point d'entrée unique, de jour comme de nuit. Sans obliger les présidents de conseil départemental à avoir un téléphone dédié, le responsable local doit pouvoir se rendre au domicile de l'appelant pour mettre en oeuvre des réponses adaptées aux besoins.
Pour plus d'efficacité, il faudrait décentraliser le budget Ssiad dans le service autonomie, pour que le département ait les moyens de mettre en place une action coordonnée entre les Ssiad et les Saad.
M. le président. - Amendement n°172, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
I. - Alinéas 3, 13, 14, 16, 19, 21, première et deuxième phrases, 22, 33, 36, 37 et 42
Remplacer le mot :
départemental
par le mot :
territorial
II. - Alinéa 80
Remplacer le mot :
départementaux
par le mot :
territoriaux
Mme Anne Souyris. - Nous voulons modifier le nom du nouveau service public de l'autonomie pour ne pas le réduire à une construction institutionnelle. L'intérêt de la réforme est de ne plus faire reposer l'action gérontologique sur le seul conseil départemental mais d'y associer tous les acteurs du territoire. La mention d'un service public territorial de l'autonomie, plus compréhensible, permet en outre d'adapter la sémantique aux territoires à statut particulier. L'amendement reprend le titre du rapport Libault.
M. Jean Sol, rapporteur. - La dénomination de « service public départemental de l'autonomie » est pertinente, car l'échelon départemental est celui des décisions. Cela ne remet pas en cause la pluralité des parties prenantes.
En revanche, l'appellation de conférence territoriale de l'autonomie a été conservée - d'autant que cette conférence pourrait être mise en place à une échelle infradépartementale. Avis défavorable.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - La maille départementale est celle de la gouvernance, et le SPDA est bien sous pilotage du conseil départemental, chef de file pour les politiques sociales et l'autonomie.
Votre commission a prévu que des coalitions d'acteurs puissent être organisées à un niveau infradépartemental, avec l'accord du conseil départemental et de l'ARS.
Les territoires à statut particulier pourront adapter le nom du service. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°172 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°354, présenté par M. Sol, au nom de la commission des affaires sociales.
Alinéa 10
Après la seconde occurrence du mot :
financeurs
insérer les mots :
de la prévention
L'amendement rédactionnel n°354, accepté par le Gouvernement, est adopté.