Réunion du Conseil européen des 23 et 24 mars 2023
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle le débat préalable à la réunion du Conseil européen des 23 et 24 mars 2023.
Mme Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe . - C'est un plaisir de vous retrouver pour échanger avec vous sur les principaux sujets qui seront traités lors du prochain Conseil européen. La guerre en Ukraine reste le sujet le plus brûlant, mais le Conseil abordera également la réponse de l'Union européenne à l'Inflation Reduction Act (IRA) et la réforme de la gouvernance économique européenne, la situation énergétique et les questions migratoires. Il échangera sur la conférence de soutien aux populations turque et syrienne frappées par les tremblements de terre du 6 février.
La situation change tous les jours et les positions que je vais vous exposer sont encore susceptibles d'évoluer.
Sur l'Ukraine, le Conseil européen condamnera à nouveau la guerre d'agression de la Russie, en faisant référence à la résolution de l'ONU du 23 février dernier pour une paix juste et durable et au plan de paix en dix points du président Zelensky. Il insistera sur la poursuite des sanctions à l'égard de la Russie et sur la lutte contre l'impunité, avec la création du centre international pour juger du crime d'agression, et dénoncera les transferts massifs et forcés d'enfants ukrainiens en Russie.
Nous devons rester unis et fermes sur les messages envoyés. En accueillant le président de la Rada le 18 février dernier, le Sénat a témoigné du soutien indéfectible de la France à l'Ukraine.
La question de la production et la livraison de munitions à l'Ukraine sera abordée le 20 mars prochain lors du Conseil des ministres des affaires étrangères et de la défense. Les Vingt-Sept réitéreront leur engagement en faveur de la reconstruction de l'Ukraine et leur souhait de recourir aux actifs russes gelés. Enfin, nous espérons que l'initiative céréalière de la mer Noire sera prolongée.
En matière économique, le Conseil sera l'occasion de confirmer et d'amplifier la dynamique vers une souveraineté stratégique européenne. Pour passer d'un espace économique à un espace puissance, l'Europe doit démontrer une capacité d'influence. Avec son marché de 500 millions de consommateurs et son pouvoir normatif, l'Union européenne peut peser sur l'organisation des échanges internationaux.
Notre politique industrielle se veut très ambitieuse, comme l'a rappelé votre proposition de résolution du 8 février. Il s'agit d'apporter une réponse européenne forte à l'IRA, par des outils de défense commerciale et par une nouvelle politique industrielle européenne. L'affirmation de cette souveraineté européenne est dans la droite ligne du discours de la Sorbonne de 2017 ; elle est l'inspiration du sommet de Versailles de mars 2022 et de la présidence française du Conseil, et demeure notre boussole.
Il nous faut fixer des objectifs et accompagner l'implantation de capacités de production européennes pour répondre à nos besoins stratégiques - matières premières ou semi-conducteurs - afin de réduire notre dépendance et réussir notre transition écologique.
Il existe plusieurs leviers : simplifier le cadre réglementaire pour l'octroi de permis, adapter la commande publique et accélérer les procédures pour les projets importants d'intérêt européen commun (Piiec) ou les aides d'État ; mobiliser les capacités d'investissement publiques et privées ; développer un vivier de talents dans les secteurs clé ; poursuivre un dialogue soutenu et exigeant avec nos partenaires, quitte à mobiliser nos instruments de défense commerciale.
Il y aura un échange sur la nouvelle gouvernance économique adoptée hier par le Conseil des affaires économiques et financières (Ecofin). Le statu quo n'est pas tenable, au vu des exigences de transition écologique et de souveraineté industrielle. Il faut nous accorder sur des orientations communes, dans une logique de différenciation par pays tout en assurant la crédibilité des trajectoires budgétaires. Nous souhaitons que la Commission présente rapidement une proposition législative.
En matière d'énergie, nous aborderons la réforme du marché de l'électricité, quelques jours avant le Conseil des ministres de l'énergie fin mars. La Commission a fait une nouvelle proposition hier. Il faut avancer rapidement, l'objectif étant de parvenir à une adoption avant la fin de l'année pour agir rapidement sur les prix de l'énergie.
Le cadre de marché devra offrir plus de prévisibilité aux producteurs et aux consommateurs, et garantir des prix plus stables et moins dépendants des cours des énergies fossiles. Ce cadre sera plus incitatif pour investir dans les énergies décarbonées.
Le Conseil s'intéressera aussi à l'hydrogène et à notre état de préparation pour l'hiver 2023-2024. La France ne change pas de position : il faut s'y préparer le plus en amont possible, notamment concernant notre approvisionnement en gaz naturel.
En matière de migrations, l'Union européenne doit renforcer son action à l'égard des pays tiers d'origine et de transit, pour prévenir les départs irréguliers, éviter les pertes de vies humaines, lutter contre les trafics et favoriser le retour durable des déboutés du droit d'asile. Nous devons mobiliser de manière coordonnée les outils à notre disposition, responsabiliser nos partenaires face à la situation en Méditerranée centrale. L'augmentation constante des départs depuis la Libye, la Tunisie et la Turquie conduisent à trop de drames humains, comme le 26 février au large des côtes italiennes.
Il faut ensuite maintenir le cap des négociations sur le pacte sur l'asile et les migrations. Nous visons une adoption d'ici un an. Vous avez raison d'insister dans votre proposition de résolution sur le rôle clé que joue Frontex en la matière.
Le tremblement de terre du 6 février a fait 52 000 morts en Turquie et en Syrie. L'Union européenne et ses États membres se sont mobilisés pour apporter une aide financière et matérielle. La situation est très grave, les besoins immenses. Dans cet esprit de solidarité, la présidence suédoise de l'Union et la Commission européenne organisent une conférence de donateurs le 20 mars à Bruxelles en faveur des populations sinistrées, afin de bien coordonner l'aide - nous savons combien la logistique est difficile.
Voilà, en quelques mots, les enjeux de ce Conseil. Merci pour votre attention. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Pascale Gruny applaudit également.)
M. Olivier Cadic, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées . - Les 10 et 11 mars 2022, les dirigeants des Vingt-Sept se réunissaient à Versailles pour un sommet fondateur de notre politique extérieure commune. Les États membres se sont engagés pour une véritable souveraineté européenne. Alors que la guerre se poursuit dans notre voisinage, il est essentiel que l'Union européenne démontre son unité et sa détermination à devenir un acteur géopolitique à part entière.
Dès février 2022, la facilité européenne pour la paix (FEP) s'est révélée être un succès. Les sept enveloppes d'aide adoptées à l'unanimité et son refinancement témoignent de son efficacité. Mais nous rencontrons un nouvel obstacle : les limites industrielles de la production de munitions. Selon Josep Borrell, 50 000 munitions sont tirées tous les jours par l'artillerie russe. Le secrétaire général de l'Otan estime, lui, que les forces ukrainiennes utilisent des munitions plus vite que l'Alliance n'en produit.
Quels sont les leviers dont dispose l'Union européenne pour accélérer les cadences de production ?
À moyen terme, l'épreuve actuelle doit jouer un rôle de catalyseur pour construire une base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) autonome. Nous accusons un réel retard : seulement 18 % des dépenses de défense sont réalisées en commun, cela nuit à notre crédibilité et à notre unité. Gare à ne pas accroître notre dépendance à l'industrie de défense américaine. De quels instruments disposons-nous pour défendre notre souveraineté en la matière ? Quelle est la position de la France sur l'instrument Edirpa d'achat d'armements en commun, actuellement devant le Parlement européen ?
À long terme, nous devons envisager les conséquences diplomatiques de la guerre en Ukraine, et notamment le risque de déstabilisation des Balkans occidentaux. L'ouverture des négociations d'adhésion avec l'Albanie et la Macédoine du Nord doivent aboutir à des améliorations concrètes pour les populations. Nous devons leur donner des gages de notre engagement en faveur de l'élargissement. Quelle est la position de la France sur la stratégie européenne dans les Balkans ?
Enfin, quel est le bilan de l'initiative française de la Communauté politique européenne, dont le deuxième sommet aura lieu en Moldavie en juin ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP et du RDPI)
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances . - Après avoir suspendu l'application des règles du Pacte de stabilité et de croissance en 2020 lors de la crise sanitaire, la Commission européenne a engagé une réflexion sur la révision de la gouvernance des finances publiques en Europe.
Les règles bien connues - déficit inférieur à 3 % du PIB, endettement inférieur à 60 %, correction des écarts - n'auront pas permis d'assainir les finances de l'ensemble des États membres. Trop uniformes, elles ne tenaient pas compte des particularités des pays. Trop complexes, elles reposaient sur des variables économiques difficiles à évaluer. Trop rigides, elles ne permettaient pas de distinguer les dépenses à maîtriser et les dépenses utiles.
J'ai donc salué l'ouverture de la réflexion sur la gouvernance budgétaire de l'Union. La Commission européenne a présenté hier des pistes au Conseil Ecofin. Sans revenir sur la règle de limitation de la dette et du déficit, elle propose : de maintenir le cadre commun de surveillance avec des sanctions plus automatiques ; de demander aux États de s'engager sur des trajectoires pluriannuelles en décrivant les réformes et les investissements envisagés ; de tenir compte des investissements pour la transition écologique, le numérique et la défense ; de différencier les objectifs en fonction des finances publiques de chaque État. Des initiatives législatives sont attendues.
Les règles de convergence budgétaire en Europe sont la condition de notre participation à la monnaie unique et au marché commun.
Le pragmatisme du cadre de gouvernance proposé engage la France. Vu notre endettement et notre déficit, le Gouvernement doit faire plus d'efforts pour réduire les dépenses publiques d'ici 2027. La loi de programmation des finances publiques n'était pas conforme à nos engagements européens ; il est temps d'anticiper et d'agir.
Depuis la crise énergétique, l'État a engagé des dizaines de milliards d'euros pour en contrer les effets. Ces dépenses étaient nécessaires pour soutenir les entreprises et les ménages les plus fragiles ; mais à plus long terme, la situation n'est pas tenable. Une réforme structurelle du marché de l'électricité est indispensable. Hélas, le Gouvernement semble ne pas avoir su faire valoir nos intérêts. Prix du gaz et de l'électricité ne seront pas décorrélés : lors de la prochaine crise des prix, il faudra encore prendre des mesures d'urgence palliatives, coûteuses et peu efficaces. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes . - Ne perdons pas de vue les décisions structurantes à venir lors de la réunion du prochain Conseil européen. Nous avons été sensibles à votre présence, madame la ministre, à Strasbourg hier, où nous étions venus échanger avec des eurodéputés français et rencontrer le commissaire Thierry Breton.
Le conflit en Ukraine, nous a-t-il dit, entre dans une phase critique : les prochaines semaines seront décisives. En matière de munitions - sujet sur lequel le Sénat alerte depuis plusieurs années - comment la France peut-elle répondre aux besoins ukrainiens ? Allons-nous entrer dans une économie de guerre ?
Nous sommes également préoccupés par le sort de la Moldavie, qui pourrait devenir la prochaine Ukraine. Vous vous êtes rendue à Chisinau la semaine dernière pour soutenir la Présidente Maia Sandu. Le Conseil européen de juin 2022 a en effet décidé d'accorder à la Moldavie le statut de pays candidat, et Chisinau accueillera le deuxième rendez-vous de la communauté politique européenne. Notre commission se propose de prolonger cette démarche au plan parlementaire. Madame la ministre, pourriez-vous appuyer un éventuel déplacement, en solidarité avec le Parlement moldave ?
Le deuxième enjeu du Conseil est de finaliser la réponse européenne à l'IRA. M. Breton nous en a présenté les grands traits : de trop nombreuses entreprises sont proprement aspirées vers les États-Unis, et la réponse européenne a tardé. Elle semble cependant satisfaisante ; elle favorisera l'autonomie européenne sur les matières premières critiques et prévoit un nouvel assouplissement du régime des aides d'État, avec une clause d'alignement pour prévenir les délocalisations, ainsi qu'un règlement zéro émission nette.
La durée de l'assouplissement prévu sera-t-elle alignée sur ce que prévoit l'IRA ? Les technologies nucléaires seront-elles incluses dans le périmètre du règlement zéro émission nette ? Le levier de la commande public sera-t-il activé ? Quid de la préférence européenne ?
La dernière brique de la réponse à l'IRA est la réforme du marché de l'électricité, destinée à juguler les prix de l'énergie. Or les principes fondamentaux ne sont pas modifiés. Les mix nationaux seront-ils bien pris en compte, et observera-t-on un bénéfice sur la facture des consommateurs ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et du RDPI)
Mme Véronique Guillotin . - Plus d'un an après l'agression russe, le conflit s'installe et se durcit. Doit-on craindre sa généralisation ? Le flou de Pékin sur d'éventuelles livraisons d'armes à Moscou interroge, de même que les efforts russes pour pousser l'Iran à l'offensive contre l'Occident.
Aussi l'Union européenne doit-elle affûter ses armes. Une chose est claire : face à la Russie de Vladimir Pouline, les États de l'Union doivent partager les craintes exprimées par les pays d'Europe centrale et baltes. Présidente du groupe d'amitié France-Moldavie, je m'inquiète des tentatives de déstabilisation de ce pays par la Russie. Je ne doute pas que le prochain Conseil européen réaffirmera son soutien à l'Ukraine ainsi qu'à tous ses voisins menacés par l'impérialisme russe.
Le RDSE soutient le plafonnement du prix des produits pétroliers, ainsi que les mesures restrictives et les dispositifs anti-contournement qui les accompagnent. Le dernier Conseil européen a exprimé son soutien au plan Zelensky en dix points. En attendant, le conflit est dans l'impasse.
La question de l'énergie sera une nouvelle fois à l'ordre du jour. Madame la ministre, comment recevez-vous les propositions de Bruxelles sur le marché de l'électricité ? La réforme promise par la présidente de la Commission s'éloigne au profit d'une simple stabilisation des prix. La possibilité pour les États membres de réduire la facture des consommateurs est cependant bienvenue, en cette période d'inflation galopante, tout comme le régime de garantie ou le soutien à l'achat de combustibles non fossiles pour les PME.
Mais il faudra aussi des mesures de long terme pour retrouver une part de souveraineté énergétique. Difficile de nous passer de nos centrales nucléaires, mais la France doit aussi combler son retard en matière d'énergies renouvelables ; j'espère que la loi récemment adoptée tiendra ses promesses.
Le Bureau européen des unions de consommateurs réclame l'interdiction des allégations climatiques trompeuses sur les aliments, telles que « banane climatiquement neutre », qui induisent en erreur. Veillons aussi à la protection des indications géographiques protégées (IGP) : une approche harmonisée ne doit pas remettre en cause la diversité de nos produits d'excellence. Or il serait question d'externaliser les cahiers des charges des indications d'origine vers l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle. Nos viticulteurs s'inquiètent. Merci de rassurer nos producteurs et artisans du goût ! (Applaudissements sur les travées du RDSE et des groupes Les Républicains et INDEP)
Mme Pascale Gruny . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Parmi les nombreux sujets abordés les 23 et 24 mars figurera la compétitivité de l'Union européenne. Elle doit être ardemment soutenue dans les domaines agricole et industriel ; c'est l'objet du Pacte vert, dont l'ambition est de décarboner notre économie et enrayer notre déclin industriel. Il y a urgence !
Depuis plusieurs décennies, nous subissons la concurrence croissante des pays émergents, y compris dans l'aéronautique, le nucléaire ou la grande vitesse ferroviaire. Pendant que l'Europe s'évertue à respecter les règles multilatérales, la Chine continue ses pratiques déloyales, les États-Unis se réfugient dans un néoprotectionnisme assumé, illustré par l'IRA qui creusera encore les écarts de compétitivité et augmentera le risque de délocalisation de nos entreprises. Sans réaction européenne, la France pourrait perdre 10 milliards d'euros d'investissements et 10 000 emplois potentiels.
Bâtir une politique industrielle européenne est désormais une obligation. Pour jouer à armes égales avec nos concurrents, exigeons la réciprocité dans les relations commerciales, adaptons notre politique de concurrence au XXIe siècle, conditionnons les subventions à des exigences de localisation des approvisionnements et de la production.
La réponse européenne engagée avec le règlement « zéro émission nette » est pourtant bien timide, alors qu'il faut un changement de paradigme. Comment comprendre que le nucléaire soit exclu du champ d'application ? Comment être à la fois compétitif et sobre en carbone en snobant l'atome ? L'alliance du nucléaire lancée par Agnès Pannier-Runacher semble mal partie.
Le risque de déclassement touche aussi le secteur agricole. Le sucrier Tereos vient d'annoncer la fermeture de deux usines en France, conséquence directe de la pression réglementaire sur les betteraviers. Les surtranspositions nationales et les distorsions de concurrence aboutissent à une attrition des surfaces de betteraves. Le choix politique d'interdire les néonicotinoïdes a mis la filière dans l'impasse. Allez-vous activer la réserve de crise agricole de l'Union européenne pour lui venir en aide ?
Un mot sur la création d'un espace européen des données de santé. Il convient, comme l'a demandé le Parlement européen, que ces données soient protégées, et donc hébergées sur le territoire de l'Union européenne et soumises au règlement général sur la protection des données (RGPD). Cela suppose des technologies de pointe, donc un investissement accru dans le numérique. Il y va de la compétitivité de nos entreprises.
Il faut aussi être attentif à certaines propositions, comme le projet de révision du système de redevances perçues par l'Agence européenne des médicaments. La future réforme de la législation pharmaceutique devra permettre le développement d'une industrie pharmaceutique innovante sur le territoire de l'Union mais également la production de médicaments plus matures, pour éviter les pénuries.
Je travaille également sur la directive sur les travailleurs de plateforme, pour laquelle les négociations patinent. Peut-on espérer un accord sous présidence suédoise, ou faudra-t-il attendre la présidence espagnole ? La France est-elle prête à des concessions ?
Sur tous ces sujets, le volontarisme s'impose ; à défaut, l'Europe sera balayée par ses concurrents internationaux. Nous sommes à la croisée des chemins ; l'Europe deviendra-t-elle un continent sous influence ? Choisissons le sursaut, et non le renoncement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP et du RDPI)
Mme Colette Mélot . - Plus d'un an que les atrocités continuent en Ukraine, que des enfants ukrainiens sont déplacés, naturalisés, renommés en Russie ; on leur réinvente même une filiation. Je salue le travail des nombreuses organisations qui font la lumière sur ces faits. À l'initiative d'André Gattolin, la commission a préparé une résolution européenne sur ce thème. L'Union européenne doit continuer à faire pression sur la Russie, documenter les faits pour que justice se fasse en temps et en heure.
Le 7 février, le groupe INDEP a fait adopter à une large majorité une proposition de résolution de soutien à l'Ukraine, condamnant la guerre d'agression menée par la Russie et appelant au renforcement de l'aide. J'espère que la France relaiera ces propositions au Conseil européen.
La Commission européenne a présenté son projet de réforme du marché de l'électricité. Madame la ministre, que défendrez-vous au-delà du découplage des prix du gaz et de l'électricité, qui n'a visiblement pas été retenu ? Que se passera-t-il l'hiver prochain ? Les citoyens européens ont besoin de prévisibilité sur les prix de l'énergie, sans compter que notre compétitivité est affectée à long terme.
L'IRA met en danger le marché commun, malgré des objectifs louables en matière de limitation des émissions de gaz à effet de serre. Nous ne pouvons pas laisser partir notre industrie et voir notre marché envahi par des produits fabriqués hors Union européenne. Les règles de concurrence doivent rester équitables.
La souveraineté n'est pas une option. Le plan industriel vert présenté demain prévoit notamment la simplification de l'autorisation des aides d'État. Madame la ministre, comme le Gouvernement pourra-t-il s'assurer que ces règles s'appliquent rapidement et correctement ? Une ingénierie locale est-elle prévue pour nos concitoyens, parfois démunis face aux règles européennes ?
Last but not least, notre relation avec le Royaume-Uni. Nous avons été émus du choix des Britanniques, dénoncé l'attitude de notre partenaire dans les négociations, sommes restés fermes face aux tentatives de renégociation du Northern Ireland Protocol. Enfin, le 27 février, le cadre de Windsor a posé une première pierre pour une relation nouvelle, à tel point que certains ont parlé de normalisation. Mais la relation entre le Royaume-Uni et l'Union européenne sera toujours extraordinaire...
Les règles adoptées sur l'Irlande du Nord permettent-elles de protéger le marché unique européen ? D'un point de vue pratique, sommes-nous sûrs de pouvoir assurer les contrôles à la frontière irlandaise ? Quelles étapes restent à franchir dans le cas contraire ? Le prochain Conseil européen sera crucial.
Vous n'avez d'autre choix que de réussir, mais vous avez toute notre confiance ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, du RDSE, du RDPI et au banc des commissions)
M. Jacques Fernique . - (Applaudissements sur les travées du GEST) Hier, la Commission européenne a présenté sa proposition de réforme du marché de l'électricité pour soulager le consommateur, orienter le marché vers les énergies renouvelables et moins dépendre du coût des fossiles. Sur ces enjeux, faut-il se résigner à voir notre pays se comporter comme un petit État obnubilé par la défense de sa spécificité nucléaire ?
Le Gouvernement a obtenu la promotion des contrats différents pour les technologies non soumises à la concurrence d'une nouvelle entrée sur le marché ; son lobbying s'est étendu à la performance énergétique des bâtiments, à l'hydrogène nucléaire... Pendant ce temps, la France reste le seul État membre à débourser 500 millions d'euros pour n'avoir pas atteint son objectif d'énergie renouvelable pour 2020. Nous sommes à la traîne sur l'éolien et le solaire, qui est en plein boom mondial et dont les bas coûts sont avérés.
Le Giec le martèle : c'est dans les dix années à venir que les investissements dans le renouvelable doivent produire leurs résultats pour le climat. Chaque euro dans le nucléaire est perdu pour le renouvelable. Incidents à Penly, déchets, pollution, électricité coûteuse, autant d'arguments pour ne pas nous engager dans cette voie.
Votre lobbying confine au cynisme : a contrario de ses demandes de moratoire sur l'uranium russe, la Commission a plié face à Emmanuel Macron, renonçant à sanctionner des cadres importants du nucléaire russe, comme ceux de Rosatom. La France a triplé ses importations d'uranium enrichi depuis l'aire d'influence russe et exporté vers la Russie l'intégralité de son uranium de retraitement !
Notre secrétaire d'État à la mer, la semaine dernière, qualifiait le traité sur la haute mer d'historique, tout en défendant le chalutage de fond dans les aires marines protégées ! L'écart entre la communication et les pratiques réelles est sidérant, s'offusque Jacques Attali...
Les scientifiques du Conseil international pour l'exploration de la mer invitent à fermer les zones de pêche concernées pendant les pics d'échouage de dauphins tout en indemnisant les pêcheurs. La mort de centaines de dauphins sur la côte atlantique finira par nous valoir une condamnation par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE).
Je salue néanmoins le cap maintenu par le Gouvernement sur l'échéance européenne de fin de vente de véhicules à moteur thermique en 2035 ; le revirement allemand est inacceptable, sous la pression d'un parti libéral-démocrate en déconfiture électorale, de mèche avec de petits constructeurs et sous-traitants. L'échéance 2035 est une nécessité écologique et industrielle. C'est le Green Deal qui réduira l'écart avec les constructeurs chinois et répondra à l'IRA. Tenons bon sur 2035 !
Je salue enfin le vote par le Parlement européen d'un revenu minimum européen, avec pour objectif de réduire la pauvreté de moitié d'ici à 2030. En France, une personne pauvre sur deux a moins de 30 ans ; la France doit mettre un terme à la discrimination des moins de 25 ans dans l'accès au RSA. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER)
M. André Gattolin . - (M. Olivier Cadic applaudit.) L'Union européenne se trouve dans une situation paradoxale. Après avoir honorablement fait face à trois crises existentielles, elle semble menacée par un banal accident de voiture...
Les trois crises, ces trois astres noirs qui ont fait irruption dans la galaxie Europe, nous les connaissons.
D'abord le Brexit, le Royaume-Uni claquant la porte et posant des conditions irréalistes, donnant lieu à des négociations et renégociations prolongées. Nous avons cependant évité les divisions fratricides entre États européens et sommes parvenus à une résolution acceptable du problème douanier en Irlande du Nord avec le protocole de Windsor. Le récent sommet bilatéral scelle les bases d'une nouvelle relation constructive. La nouvelle donne internationale et surtout la dégradation de la situation économique outre-Manche semblent ouvrir la voie à des relations plus apaisées. Qu'en est-il ?
La seconde crise est sanitaire, économique et sociale : c'est la pandémie. L'Union a vite réagi, notamment dans le secteur de la santé, qui ne relevait pas de ses compétences. Elle a agi dans le domaine économique en suspendant les sacro-saintes règles sur le déficit et l'endettement. Le rebond des économies européennes en 2021, inespéré, s'est fait au prix d'un endettement important, et la Commission appelle désormais à la responsabilité. Quelle est la philosophie de la Commission européenne, notamment au regard des conséquences économiques de la guerre en Ukraine ?
Troisième crise : la terrible guerre d'agression menée par la Russie, et ses conséquences politiques et économiques très lourdes. L'instabilité géopolitique est grande, ce ne sera peut-être pas la dernière crise...
L'Union a réagi plus vite que nous n'aurions pu l'imaginer. Ce réveil géopolitique de l'Europe nous frappe plus par le contraste avec l'inanité qui régnait auparavant face à la menace extérieure que par le volume financier - l'effet « waouh » n'est pas encore là ! Il faut cependant admettre que l'Union a su faire preuve de cohérence et de résilience, même si la Hongrie fait un peu tache. Viktor Orban pourra-t-il bloquer des sanctions nouvelles ou de nouvelles adhésions ? Son attitude aura au moins mis à bas le groupe de Visegrad et permis un rééquilibrage Est-Ouest. Pologne et Roumanie prennent un virage qui pourrait favoriser leur intégration politique et économique.
Nous restons encore loin de « l'Union », cette prophétie auto-réalisatrice choisie en 1992. Nous commençons à peine à devenir une vraie « communauté » de nations et de peuples. Le progrès vers la souveraineté n'est pas linéaire, et nous ne sommes jamais à l'abri d'une régression.
J'en reviens à l'accident de la route : l'Allemagne vient soudainement remettre en cause interdiction de la vente des voitures thermiques à partir de 2035. Jean-Claude Juncker, en 2018, s'était précipité à Washington pour préserver des foudres de la taxe Trump les véhicules européens - allemands à 80 % - au détriment des vins et produits de luxe, majoritairement français et italiens. Cette attitude de cavalier seul est délétère, comme le fut le choix allemand de la dépendance au gaz russe. Berlin semble renouer avec une posture plus nationale qu'européenne, plus mercantile que politique au sein de l'Union. Il faudra y remédier rapidement. (Mme Colette Mélot, MM. Olivier Cadic et Jacques Fernique applaudissent.)
M. Jean-Yves Leconte . - En 2021, les recettes commerciales de l'Union atteignaient 55 milliards d'euros. En 2022, son déficit commercial était de 430 milliards.
Ne cherchons pas des boucs émissaires. Le défi commun est bien de changer de modèle. Nous devons avancer vers le Green Deal, de manière solidaire.
N'en déplaise aux écopessimistes, nous restons une forte puissance commerciale. L'atout est réel, mais insuffisant. Voyez le Brexit : difficile de faire du commerce sans s'aimer.
Construire un nouveau modèle passe par des accords commerciaux acceptés par les populations, respectant l'environnement et les exigences de développement durable. La Commission européenne envisagerait de dissocier les volets commerce et politique, pour éviter de passer devant les parlements nationaux ? Ce n'est pas sérieux. Ne négocions pas comme au siècle dernier. Il faut agir de manière plus politique.
Nous devons nous mobiliser aux côtés de l'Ukraine, lui fournir des armes, accueillir les réfugiés. La Cour pénale internationale doit pouvoir lancer des mandats d'arrêt - je salue la proposition de résolution européenne d'André Gattolin sur les enfants. Il ne faut tolérer aucune impunité, et faire respecter l'État de droit. La résolution doit être totale, vis-à-vis des États membres comme des candidats à l'adhésion - pas question de transiger sur la liberté de la presse, par exemple.
Le statut de candidat accordé à l'Ukraine était indispensable ; il doit être source d'un nouveau dynamisme, notamment pour les Balkans. Les perspectives d'adhésion doivent être crédibilisées. Il ne faudra pas décevoir le peuple ukrainien, qui s'est battu d'abord car il souhaitait devenir européen.
Les procédures d'adhésion seront difficiles. L'Ukraine est une puissance agricole sans équivalent en Europe, mais tous les pays européens y gagneront.
Nous devons aussi avancer sur tous les aspects du Pacte sur la migration et l'asile, au-delà du seul volet répressif, notamment en matière de liberté de circulation des personnes et des travailleurs, en nous inspirant de la protection temporaire consentie aux Ukrainiens. La politique de visas européenne donne de nous une bien mauvaise image, notamment en Afrique.
Enfin, nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la situation en Tunisie. L'Europe n'est elle-même que lorsqu'elle reste fidèle à ses valeurs et se tient résolue aux côtés de la liberté, auprès de tous les peuples du monde. « Femme, vie, liberté », voilà un message que nous devons soutenir sans limites. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; MM. Jacques Fernique et André Gattolin applaudissent également.)
M. Pascal Savoldelli . - En cette période de disette de progrès social, réjouissons-nous que le Parlement européen ait entériné, avec 376 votes pour, la directive sur la présomption de salariat des travailleurs de plateformes. On est loin de la démarche d'Emmanuel Macron, qui s'intéresse aux retraites avant de s'intéresser au travail. En France, l'ubérisation représente 6 milliards d'euros de cotisations perdues pour les finances publiques. Voilà une piste de financement qui ferait d'une pierre deux coups. Le Gouvernement continuera-t-il à dénier des droits nouveaux aux travailleurs des plateformes ?
Comme en Espagne, la réforme des retraites est exigée par la Commission européenne. N'y voyez aucun complotisme : après une première injonction le 5 juin 2019, le Conseil européen a recommandé le 1er juillet 2022 que la France « s'attache en 2022 et 2023 à réformer le système de retraite pour uniformiser progressivement les règles des différents régimes de retraite afin de renforcer l'équité du système tout en soutenant sa durabilité ». Où est l'équité dans cette réforme ?
L'Union européenne aurait préféré une retraite par points, s'orientant moins sournoisement que le Gouvernement vers la capitalisation. Une manne à venir pour les banques ! Quand les banques américaines font faillite sans garantie des dépôts, cela devrait nous faire réfléchir. Il ne suffit pas de répéter « Calm down ! », comme Bruno Le Maire !
Je le dis solennellement : les réformes contre le progrès social réarment les extrêmes droites ; en affaiblissant les parlements, on prépare des régimes autoritaires. Notre idéal démocratique est mis à l'épreuve.
Les volontés austéritaires de l'Union européenne - 3 % de déficit, une hérésie ; 60 % de dette, une fable - sont inapplicables, car inappliquées. Jamais le peuple n'a décidé de telles trajectoires.
La Commission propose de nouvelles méthodes. Il n'y aurait plus de règles uniformes, chaque État définissant sa trajectoire sur quatre ans. Mais si des délais supplémentaires étaient accordés, ce ne serait qu'à la condition de réformes structurelles et d'investissements stratégiques en faveur de la croissance. Quel chantage ! C'est le libéralisme contre les classes populaires. Mais quelle croissance ? Pour quels emplois, quels progrès sociaux ? On ne peut plus vouloir la croissance pour la croissance.
« Plus de marges de manoeuvre pour plus de rigueur », comme l'écrivait un média allemand ? Je vois bien la rigueur, moins les marges de manoeuvre. Avec le maintien de la procédure pour déficit excessif, nous savons que nous allons prendre perpétuité, et sans remise de peine ! Sanctions financières, sanctions de réputation telle que la convocation à une audition au Parlement, blocage des fonds structurels... Mais rassurez-vous : ce sera préventif ! La Grèce a bien connu les effets de ces méthodes. Les piliers du pacte budgétaire sont d'ailleurs maintenus.
Les finances publiques, c'est aussi un patrimoine financier et immobilier. En en tenant compte, la dette de la France n'est plus que de 87 % du PIB. Nous serions plus près de l'objectif infondé, et nos concitoyens auraient le droit de décider de leurs propres politiques. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
M. Jean-Michel Arnaud . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je m'intéresserai à la compétitivité et à l'énergie.
La crise énergétique a affecté la balance commerciale de tous les pays de l'Union, mais le déficit commercial atteint 160 milliards d'euros en France. Les aides de l'IRA laissent craindre une nouvelle perte de compétitivité. Comment éviter la fuite de l'industrie vers les États-Unis ? Le renchérissement du dollar face à l'euro pourrait être un levier de réindustrialisation, mais comment éviter la concurrence entre États membres de l'Union européenne ?
Depuis peu, les plans de relance incluent un volet REPowerEU sur l'énergie, dans le cadre duquel la France pourrait recevoir 2,32 milliards d'euros. Il est aussi possible de puiser dans le fonds européen de développement régional (Feder) à hauteur de 5,7 % ; mais cela se fera-t-il au détriment des investissements essentiels dans nos régions ?
Les collectivités ont été tenues à l'écart des plans de résilience et de redressement. Je le regrette.
La commissaire européenne à l'énergie Kadri Simson a annoncé trois mesures majeures : le merit order a été maintenu - la demande de la France d'un découplage des prix du gaz et de l'électricité n'a donc pas été entendue ; pour le bas-carbone, la Commission européenne plaide pour des contrats différenciés, ce qui favoriserait nos investissements dans le nucléaire ; enfin, l'agence européenne des régulateurs de l'énergie accroîtrait sa surveillance sur les régulateurs nationaux. Quelle est la position de la France ?
J'en viens à la stratégie mobilités. L'Allemagne vient de surprendre tous ses partenaires en s'opposant à la fin du moteur thermique en 2035, entraînant dans son sillage, entre autres, la Hongrie. Il faut des alternatives au tout électrique. Il ne faudrait pas imposer une technologie précise aux industriels.
M. Loïc Hervé. - Très bien !
M. Jean-Michel Arnaud. - Sur l'utilisation de carburants synthétiques que propose Berlin, quelle voix la France entend-elle porter au Conseil, alors que plusieurs de nos constructeurs, dont Renault et Stellantis, pourront produire des véhicules zéro émission d'ici 2030 ?
Deux directives vont entrer en vigueur pour mieux réguler le numérique - je rappelle que les Gafam ont un chiffre d'affaires égal à la totalité de nos recettes fiscales. Le DMA (Digital Markets Act) vise à stimuler l'innovation sur le marché numérique en favorisant une concurrence loyale. Le DSA (Digital Services Act) rendra illégal en ligne ce qui l'est déjà hors ligne. Quelle sera la position de la France au Conseil ? Il est aussi question ici de lutter contre la manipulation de l'information - le Sénat a d'ailleurs lancé une commission d'enquête sur TikTok. Le Gouvernement français et l'Europe doivent être très volontaires sur le sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI)
Mme Martine Berthet . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Loïc Hervé et André Gattolin applaudissent également.) Guerre en Ukraine, difficultés d'approvisionnement en matières premières, pénurie de semi-conducteurs, hausse sans précédent des prix de l'énergie : l'Europe traverse une période de turbulences. Le doublement, le triplement des factures d'électricité place nos entreprises et nos collectivités territoriales dans une situation délicate. Le bouclier tarifaire les protège, mais pour combien de temps ?
Le marché européen de l'électricité est incapable de protéger les consommateurs des problèmes d'approvisionnement en gaz, comme l'a reconnu la commissaire européenne à l'énergie. Les règles européennes, qui font dépendre le prix de l'électricité du cours d'énergies fossiles, sont dépassées. Nous ne pouvons sacrifier notre modèle pour conserver un marché dérégulé qui ne joue plus son rôle. Le mécanisme mis en oeuvre par nos voisins espagnol et portugais est efficace, mais engendre une concurrence déloyale. Nous avons besoin d'une réponse commune.
Le 12 octobre, la Première ministre a reconnu devant le Sénat qu'il fallait réviser les règles européennes. Pourtant, les annonces de la commissaire Kadri Simson montrent que la Commission n'a pas pris la mesure du problème : des mesures ciblées, sans refonte complète des règles. Le système du merit order est conservé, le découplage des prix du gaz et de l'électricité n'est toujours pas à l'ordre du jour.
La Commission souhaite aussi lancer une stratégie de décarbonation massive de nos productions industrielles, mais en excluant le nucléaire des énergies éligibles. C'est un anachronisme : nous avons besoin du nucléaire, le Giec nous le rappelle régulièrement. Les États décident souverainement de leur mix énergétique. L'Allemagne, en doublant sa production de centrales à gaz, place l'Europe en situation de dépendance. Partout, le nucléaire fait son retour. Comme le rappelle Fatih Birol, directeur de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), l'Europe ne doit pas manquer le saut technologique du nucléaire.
La réforme du marché de l'électricité est un enjeu économique, mais aussi de compétitivité. Nos États subissent à la fois les conséquences de l'IRA et l'absence de choix forts au niveau européen.
Il faut inciter nos industriels à relocaliser et à accélérer les investissements de transition vers une économie décarbonée. Or notre industrie n'a aucune visibilité sur ses coûts d'approvisionnement, alors que ses concurrents ont une visibilité de dix, voire vingt ans, et une électricité peu chère. Le rétablissement des contrats de long terme est indispensable.
La Savoie compte plusieurs industries hyperélectrointensives. Si elles ne peuvent renouveler leurs contrats de long terme, elles devront réduire, voire arrêter leur production. Seules alternatives, la Chine et la Russie. Le rétablissement de ces contrats fait partie des mesures ciblées de la Commission ; c'est une bonne nouvelle, mais il faudra prendre en compte le nucléaire.
La nécessité d'une nouvelle politique énergétique fait l'unanimité ; saisissons l'occasion du prochain Conseil européen pour défendre une réforme ambitieuse du marché de l'électricité, sans oublier la question du renouvellement des concessions hydroélectriques. Nous comptons sur vous, madame la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Patrice Joly . - En l'espace d'un an, le paysage énergétique a changé. Les prix mondiaux du pétrole ont augmenté de 200 %, ceux du charbon de 400 %, ceux du gaz européen jusqu'à 1 000 %, avec de lourdes conséquences sur les ménages, notamment modestes, et les entreprises, en particulier les PME. Les États membres ont instauré des mécanismes d'urgence - contrôle des prix et amortisseurs.
La réforme ciblée du marché européen de l'électricité annoncée par la Commission est-elle suffisante ? Ses objectifs - électricité non fossile abordable, transparence accrue pour les consommateurs, élargissement du choix de fournisseurs, contrats de long terme pour les entreprises - sont à saluer, mais les fondamentaux du fonctionnement du marché sont maintenus, alors qu'il est défaillant.
De plus, le découplage strict entre électricité et gaz n'est pas prévu, alors que le ministre en avait fait son cheval de bataille. Aucun calendrier n'a été évoqué. La baisse des prix n'est pas certaine, car elle dépend de beaucoup d'autres facteurs, comme la disponibilité du parc nucléaire, la météo ou le marché mondial du gaz.
Les ménages, les États auront-ils à temps une énergie à tarif compétitif, alors qu'il faut relocaliser et investir dans l'industrie verte ? Le coût de l'énergie, central dans les coûts de production, reste le nerf de la guerre.
Que penser de ce texte qui se présente comme une facette de la réponse européenne à l'IRA ? L'Europe doit-elle s'aligner ? La reconquête industrielle, la transition écologique ne peuvent plus attendre. Le logiciel pseudo-économique de l'Union européenne est à bout de souffle. L'IRA ne doit pas se réduire à une tentative protectionniste : Joe Biden s'est engagé auprès d'Ursula von der Leyen à ne pas attiser une concurrence délétère pour attirer les industries vertes. Ce serait une « compétition à somme nulle », selon ses mots. Il est heureux que les États-Unis souhaitent réduire de moitié leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030, même s'ils autorisent l'exploitation de pétrole en Alaska.
Il est vital de mettre en place une politique industrielle et de transition écologique. Il s'agit d'accélérer les investissements bas-carbone en s'attachant à la racine de la crise : notre dépendance aux énergies fossiles.
La transition doit aussi prendre en compte un pilier social : pas de durabilité environnementale sans durabilité sociale. Augmentons le budget du Fonds social pour le climat.
L'industrie européenne doit aussi être préparée aux objectifs du Pacte vert, et tenir une position de leader international. Pour cela, il faut des subventions, de la planification, des pouvoirs publics forts et, parfois, protéger nos industries.
Il faudra activer plusieurs leviers financiers. L'Union doit se doter de nouvelles ressources propres - extension des marchés carbone, ajustement carbone aux frontières, taxe sur les transactions financières, taxation des bénéfices des multinationales. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST)
M. Olivier Cadic . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Véronique Guillotin a opportunément évoqué les menaces de la Russie sur la Moldavie. La Géorgie fait face à un mouvement contestataire d'ampleur contre l'adoption par le Parlement d'une loi, inspirée de la législation russe, destinée à museler les ONG et les médias d'opposition. Le Gouvernement, inféodé à la Russie, a plié devant une population acquise à plus de 80 % à la cause de l'Europe. Lavrov n'a pas hésité à comparer ces événements à la révolution ukrainienne de 2014...
En juin 2022, l'Union européenne a accordé le statut de pays candidat à la Géorgie : quelles sont les prochaines étapes ? Cette question sera-t-elle évoquée lors du prochain Conseil européen ?
Alors que les combats en Ukraine s'intensifient, l'Europe prévoit l'utilisation de la FEP à hauteur de 1 milliard d'euros et la libération des stocks de munitions. Thierry Breton appelle à identifier les freins à une production européenne massive. Cette stratégie conduira-t-elle à augmenter notre production de munitions et à préserver notre souveraineté européenne ?
La récente proposition de résolution européenne d'André Gattolin dénonce les transferts massifs d'enfants ukrainiens vers la Russie. La France et l'Europe prévoient-elles des moyens d'enquête ?
En Indo-Pacifique, le président chinois, qui appuie Moscou, combat le monde démocratique. Alors que les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie y affirment une stratégie commune, l'Union européenne peine à se faire entendre. La zone est pourtant au centre d'une concurrence géopolitique intense, la Chine affirmant son expansionnisme et augmentant son budget militaire. En décembre 2022, le Japon a prévu de doubler son budget annuel de la défense pour le porter à 2 % du PIB d'ici à 2027. Le président philippin a convoqué l'ambassadeur chinois pour dénoncer les menées chinoises dans ses eaux. La situation dans l'Indo-Pacifique n'a jamais été aussi dangereuse depuis la Seconde Guerre mondiale, selon Gillian Bird, ambassadrice d'Australie en France. La question sera-t-elle discutée au Conseil européen ?
Le procès à Hong Kong de 47 personnes ayant organisé une primaire non officielle en 2020 a débuté le mois dernier. Il vise à écraser la dissidence. Seize de ces personnes seront jugées, les autres ayant plaidé coupables. Pékin s'est affranchi de ses engagements internationaux. L'Union européenne prendra-t-elle position sur ces procès politiques, qui nous rappellent les procès staliniens et qui montrent que le slogan « un pays, deux systèmes » a vécu ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI)
M. Guillaume Chevrollier . - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) Le Conseil européen des 23 et 24 mars intervient dans un climat compliqué pour l'Union européenne, confrontée à plusieurs crises.
La première est la guerre russo-ukrainienne. L'Europe tangue face aux répercussions de ce conflit. Je salue nos collectivités, nos élus et nos concitoyens qui, en Mayenne, ont accueilli des réfugiés.
La France envoie des camions Caesar et des munitions ; l'Union européenne attribuera 2 milliards d'euros d'aides. La fin de la paix en Europe interroge nos capacités militaires aux niveaux national et européen. Quel est l'état de nos coopérations militaires ? Existe-t-il une ligne rouge dans l'aide à l'Ukraine ? Le Conseil va-t-il aborder la boussole stratégique pour l'Europe de la défense ?
Autre sujet au menu du Conseil européen : l'augmentation vertigineuse des prix de l'énergie, qui frappe nos artisans et commerçants. Entre le sous-investissement dans la filière nucléaire et l'arrêt de plusieurs réacteurs, la France a échappé de peu à la catastrophe, mais qu'en sera-t-il l'an prochain ?
Une réforme du marché européen de l'électricité est indispensable. Le couplage de l'électricité et du gaz est devenu totalement inéquitable, le gaz ne représentant que 7 % de la production totale d'électricité. La France peut-elle peser pour faire aboutir ces négociations avant l'été ?
L'Union européenne subit aussi l'IRA : 370 milliards de dollars de subventions destiné à stimuler le développement des énergies renouvelables. C'est une offensive économique pour attirer nos entreprises aux États-Unis, car pour être éligible aux subventions, il faut produire sur place. L'Europe doit agir très vite pour éviter une fuite des cerveaux et, pis encore, de nos savoir-faire technologiques.
La réponse du Pacte vert semble insuffisante. L'assouplissement des aides d'État est bienvenu, mais risque de créer une distorsion en faveur des États membres à fortes capacités fiscales. L'Europe aurait besoin de 350 milliards d'euros d'investissements supplémentaires par an pour atteindre son objectif de réduction des émissions à l'horizon 2030, pour les seuls systèmes énergétiques.
Le projet de taxe carbone ne peut qu'être salué. L'Union européenne a importé l'équivalent du PIB de la France en 2019. C'est aussi une mesure de compétitivité économique, avec les conditions d'une concurrence loyale entre entreprises européennes et mondiales, et un outil de lutte contre les délocalisations. La taxe sera-t-elle bien effective en 2026 ?
L'empilement des réglementations européennes est un vrai point noir. Quelque 116 propositions de la Commission seraient en attente ! Madame la ministre, pensez à nos agriculteurs, si fragilisés dans leur compétitivité par cette surcharge réglementaire.
Je rappelais récemment combien les initiatives européennes en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) laissaient craindre un choc de complexité pour nos PME. Peut-on espérer une Europe moins technocratique ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Non !
M. Guillaume Chevrollier. - Peut-on espérer une Europe moins naïve au plan militaire et au plan économique ?
Nous sommes tous attachés à l'Europe, mais il faut nous adapter à un monde qui change. C'est la condition sine qua non d'une Europe puissante face aux menaces, au retour des empires, mais aussi face aux défis enthousiasmants du XXIe siècle. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP, du RDPI et du RDSE)
Mme Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe . - Je vous remercie pour vos interventions et toutes vos questions.
Les combats restent très intenses en Ukraine. Les discussions sur l'aide militaire et les munitions se poursuivent à Bruxelles. Les Russes tirent 10 000 obus par jour ! Une initiative de 2 milliards d'euros prélevés sur la FEP est envisagée. Il faut encourager la cession des stocks, faciliter les achats conjoints via l'Agence européenne de défense et renforcer les capacités de production européennes.
Le Président de la République a été clair sur les lignes rouges : rien n'est exclu, mais nos envois de matériel sont soumis à trois critères. Il faut qu'ils aient une efficacité immédiate, qu'ils ne contribuent pas à l'escalade et qu'ils n'obèrent pas nos propres capacités de défense.
Le dixième paquet de sanctions a déjà permis de sanctionner quatre personnes responsables des ignobles transferts forcés d'enfants ukrainiens en Russie, dont le vice-premier ministre de la République de Bachkirie, le numéro deux de l'oblast de Moscou, et la commissaire russe pour les droits de l'homme.
Je ne peux que vous encourager à aller apporter votre soutien à la Moldavie. J'y étais la semaine dernière et nous avons évoqué avec la présidente le développement de nos coopérations sur l'État de droit et la justice, le soutien à la société civile et la préparation du deuxième sommet de la Communauté politique européenne. La diplomatie parlementaire a un rôle à jouer.
J'ai reçu ce matin la présidente de la commission des affaires étrangères du Parlement géorgien. Sur douze recommandations, onze enregistrent des progrès, mais le sujet de la polarisation de la vie politique reste difficile. Nous avons échangé sur les points de convergence, pour mettre en oeuvre toutes les recommandations de l'Union européenne.
Pour les Balkans occidentaux, il faut les accompagner, pour ne pas les laisser dans une salle d'attente trop longtemps.
Le fossé de compétitivité européen est bien lié au prix de l'énergie. La réforme du marché est donc essentielle, et tout le Gouvernement s'est mobilisé, pour protéger les consommateurs, lutter contre la volatilité des prix et donner plus de visibilité aux entreprises. La proposition de la Commission est une base solide et large, car elle inclut le nucléaire existant. Les contrats à long terme permettront de sécuriser entreprises et particuliers. Nous espérons une adoption avant la fin de l'année.
Le plan Zéro émission nette est une réponse à l'IRA, très offensive en matière industrielle et commerciale, même si vous regrettez l'absence d'effet « waouh ».
Nous devons mettre en place une plateforme d'investissement pour mobiliser rapidement toutes les ressources sur nos secteurs stratégiques.
Nous travaillons à la réduction des délais d'autorisation, pour faire de la rapidité des procédures un avantage compétitif. C'est bien une réduction de la bureaucratie européenne, monsieur Husson. La liste des technologies doit toutefois être encore étendue, pour intégrer le nucléaire, la chaleur renouvelable et la biomasse.
L'accord de Windsor permet d'avancer sur le protocole nord-irlandais. Des produits resteront sur le marché britannique, avec des tests aléatoires, et des produits iront sur le marché unique, avec des tests systématiques. Un système de contrôle des données d'échanges commerciaux permettra d'identifier les fraudes. Notre ligne est la suivante : exigence maximale sur le respect des accords conclus dans le cadre du Brexit ; ouverture maximale au travail avec le Royaume-Uni.
L'interdiction des véhicules thermiques en 2035 doit rester un signal clair. C'est nécessaire sur le plan écologique comme industriel. La ministre de l'environnement allemande ne dit pas autre chose, ce qui me donne beaucoup d'espoir.
M. Franck Menonville. - Oui, de l'espoir !
Mme Laurence Boone, secrétaire d'État. - Pas seulement, du travail aussi.
Lorsque le Premier ministre hongrois s'est rendu à Paris, il lui a été rappelé que la Hongrie devait ratifier l'entrée de la Finlande et de la Suède dans l'Otan et que nous devions être unis dans notre soutien à l'Ukraine face à l'agression russe.
Il est vrai qu'il n'y a pas eu de progrès sur les travailleurs des plateformes sous la présidence suédoise. Les discussions se poursuivent. La France défendra une position équilibrée.
Je le redis : la Commission européenne n'exige en rien une réforme des retraites, c'est une recommandation, et non un jalon du plan de relance.
La mise en oeuvre du DMA-DSA est en cours. Un projet de loi vous sera soumis à la fin du premier semestre. (Applaudissements)
M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Merci de vos réponses, précises.
La situation en Ukraine est vraiment dramatique, sur le plan humain, politique et géopolitique. Notre effort doit être constant, nous devons y consacrer tous les moyens possibles. Notre chambre vous apporte un soutien très large.
Nous devons avancer pour réviser le cadre financier pluriannuel - les lignes, à budget égal, vont bouger - et le pacte de stabilité. Le président Raynal s'y intéresse ; nous attendons des lignes directrices claires. (Applaudissements)
Prochaine séance demain, jeudi 16 mars 2023, à 9 heures.
La séance est levée à 23 h 45.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du jeudi 16 mars 2023
Séance publique
À 9 heures, à 14 h 30 et le soir
Présidence : M. Gérard Larcher, président,M. Alain Richard, vice-président, Mme Pascale Gruny, vice-président
Secrétaires : M. Jean-Claude Tissot - Mme Marie Mercier
1. Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (demande du Gouvernement en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution)
2. Proposition de loi visant à mieux protéger les locataires bénéficiant d'une allocation de logement et vivant dans un habitat non-décent, présentée par M. Jean-Louis Lagourgue et plusieurs de ses collègues (n°821, 2021-2022)
3. Proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités, présentée par M. Dany Wattebled et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°414, 2022-2023)
4. Proposition de loi visant à permettre une gestion différenciée de la compétence « Eau et Assainissement », présentée par M. Jean?Yves Roux et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°382, 2021-2022)
5. Proposition de loi portant réforme de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique, présentée par M. Bernard Fialaire et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°403, 2022-2023)
6. Suite de la proposition de loi visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au coeur des territoires, présentée par M. Jean-Baptiste Blanc, Mme Valérie Létard et plusieurs de leurs collègues (procédure accélérée) (texte de la commission, n°416, 2022-2023) (demande de la commission spéciale)
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Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du jeudi 16 mars 2023
Séance publique
À 9 heures, à 14 h 30 et le soir
Présidence : M. Gérard Larcher, président,M. Alain Richard, vice-président, Mme Pascale Gruny, vice-président
Secrétaires : M. Jean-Claude Tissot - Mme Marie Mercier
1. Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (demande du Gouvernement en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution)
2. Proposition de loi visant à mieux protéger les locataires bénéficiant d'une allocation de logement et vivant dans un habitat non-décent, présentée par M. Jean-Louis Lagourgue et plusieurs de ses collègues (n°821, 2021-2022)
3. Proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités, présentée par M. Dany Wattebled et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°414, 2022-2023)
4. Proposition de loi visant à permettre une gestion différenciée de la compétence « Eau et Assainissement », présentée par M. Jean?Yves Roux et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°382, 2021-2022)
5. Proposition de loi portant réforme de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique, présentée par M. Bernard Fialaire et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°403, 2022-2023)
6. Suite de la proposition de loi visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au coeur des territoires, présentée par M. Jean-Baptiste Blanc, Mme Valérie Létard et plusieurs de leurs collègues (procédure accélérée) (texte de la commission, n°416, 2022-2023) (demande de la commission spéciale)