SÉANCE
du mercredi 1er mars 2023
59e séance de la session ordinaire 2022-2023
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires : M. Pierre Cuypers, Mme Victoire Jasmin.
La séance est ouverte à 15 heures.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté sous les réserves d'usage.
Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et au temps de parole.
Moyens de la justice
M. Thani Mohamed Soilihi . - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Le budget de la justice a augmenté de 40 % en cinq ans, signe que le Gouvernement a pris la mesure des enjeux. Monsieur le garde des sceaux, vous avez fait de la justice de proximité une de vos priorités ; le groupe RDPI s'en réjouit. (On ironise à gauche.)
Il faut apporter une réponse judiciaire concrète et rapide à la petite délinquance, qui nourrit le sentiment d'insécurité et entame la confiance dans l'institution judiciaire.
Ce besoin de réassurance suppose des moyens supplémentaires. Financiers d'abord, avec un budget en hausse de 8 % pour la troisième année consécutive. Humains, également, avec le lancement d'un vaste plan d'embauche.
Grâce aux 2 000 contractuels venus renforcer les magistrats depuis 2020, le nombre des affaires en attente de jugement a significativement baissé. La CDIsation de ces contractuels, annoncée à Reims, est une bonne nouvelle. Vous avez également annoncé le recrutement de 300 juristes assistants supplémentaires et la création de la fonction d'attaché de justice. Pourriez-vous nous en préciser les contours, ainsi que le calendrier du déploiement du plan d'action pour la justice ? (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice . - Grâce au budget que le Sénat a voté à chaque fois depuis trois ans, les 2 000 contractuels, dont 900 juristes assistants, que nous avons recrutés ont apporté une aide précieuse et permis un déstockage des dossiers en attente, en matière civile, de 30 %.
M. François Patriat. - Bravo !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - J'ai annoncé lundi le recrutement de 300 juristes assistants supplémentaires cette année. Leur statut actuel est précaire et insatisfaisant. C'est pourquoi j'ai décidé de créer une fonction d'attaché de justice, ouverte aux fonctionnaires et contractuels ; leurs missions seront définies, ils prêteront serment et recevront une formation donnée par l'École nationale de la magistrature (ENM). Ils formeront un vivier pour le recrutement à venir de 1 500 magistrats, avec une passerelle pour l'accès à l'ENM. Enfin, tous les contractuels justice de proximité seront CDIsés.
Fin mai, je présenterai au Sénat la nouvelle loi de programmation de la justice. Je rends hommage à votre commission des lois et à son président, François-Noël Buffet, pour l'action menée en commun. (« Ah ! » et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jérôme Bascher s'amuse.) Nous agissons pour renforcer les moyens de notre justice. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Réforme des retraites
M. David Assouline . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le débat qui va commencer au Sénat suscite une immense attente, d'autant que l'Assemblée nationale a offert un spectacle parfois désolant.
M. Marc-Philippe Daubresse. - La faute à qui ?
M. David Assouline. - Quand il a eu lieu, le débat a été éclairant : sur les femmes, premières victimes de votre projet, ou sur la retraite minimale à 1 200 euros, qui ne concernera en réalité que 10 000 à 20 000 personnes, loin des 1,8 million annoncés.
Au Sénat, la gauche va poursuivre ce travail de vérité. Nous serons en écho avec la grande majorité des Français et avec les syndicats, unis contre la régression sociale.
Nous débattrons de l'article 7, cet impôt sur la vie des plus modestes. Chacun devra prendre ses responsabilités par son vote : pour ou contre deux ans de plus pour ceux qui ont travaillé dur toute leur vie. (Protestations à droite)
Nous sommes attachés au débat de fond, qui demande du temps, de l'écoute, de l'argumentation. Le droit d'amendement et d'explication de vote est sacré. Allez-vous brutaliser ce débat en le menaçant d'interruption ? Cette limitation fait-elle partie de l'accord des droites que vous avez dépensé tant d'énergie à négocier avec la majorité sénatoriale ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion . - Le Gouvernement espère que le débat qui s'ouvre demain au Sénat permettra de discuter de chacune des dispositions du projet de loi. Le débat à l'Assemblée nationale n'a pas pu aller à son terme, mais ce n'est pas au Gouvernement qu'il faut en faire le reproche : c'est à vos alliés de La France insoumise ! (Protestations à gauche ; applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP, du RDSE, des groupes UC et Les Républicains)
Je vous confirme un chiffre : sur les 17 millions de retraités, 1,8 million bénéficieront d'une revalorisation, de 70 à 100 euros pour la moitié d'entre eux. (Exclamations à gauche) Si vous jugez cela dérisoire, c'est que vous êtes déconnecté de la réalité des petites pensions...
Cette réforme améliorera les pensions pour un retraité sur quatre, avec pour objectif une retraite à 85 % du Smic pour une carrière complète.
M. David Assouline. - Vous êtes d'accord avec Les Républicains !
M. Olivier Dussopt, ministre. - Oui, chacun devra prendre ses responsabilités. Nous travaillons avec tous les groupes qui le souhaitent. Si nous pouvons avancer sur les droits familiaux avec la majorité sénatoriale, tant mieux. (On ironise à gauche.) Olivier Faure défend la retraite à 60 ans avec 43 annuités : c'est une machine à décote, à pauvreté et à petites pensions. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du RDSE et du groupe Les Républicains)
Sécheresse (I)
Mme Maryse Carrère . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) La France a subi une sécheresse préoccupante : 31 jours consécutifs sans pluie. Samedi, au Salon de l'agriculture, le Président de la République invitait les agriculteurs à la sobriété dans leur consommation d'eau.
Les Hautes-Pyrénées ont longtemps joué le rôle d'un véritable château d'eau, assurant l'irrigation jusque dans les Landes. Mais jusqu'à quand ? Le niveau des nappes phréatiques ne cesse de baisser et l'eau vient à manquer même dans des villages de montagne !
Nos agriculteurs attendent des réponses : on ne peut leur imposer des restrictions sans les accompagner dans la nécessaire adaptation face à la sécheresse. Allez-vous faciliter la création de nouvelles réserves, essentielles tant pour couvrir nos besoins en eau potable que pour la préservation de notre agriculture, garante de notre souveraineté alimentaire ? (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Pierre Louault applaudit également.)
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Veuillez excuser Christophe Béchu, actuellement au Gabon pour le One Forest Summit.
La sécheresse météorologique est préoccupante. Cinq départements font déjà l'objet d'arrêtés de restriction ; d'autres suivront. La situation à l'été doit être anticipée. L'État suit avec attention les projections, et les autorités chargées du suivi hydrologique sont mobilisées pour prendre dès maintenant, si nécessaire, des décisions de partage de l'eau.
Le mot d'ordre est la sobriété des usages. Sans eau, pas d'agriculture, pas de nourriture. Il faut trouver des compromis, ensemble.
Nous sommes pleinement mobilisés. Les préfets qui coordonnent les sept grands bassins ont été réunis le 27 février pour planifier les solutions, et le seront à nouveau le 6 mars. À la demande de la Première ministre, une cellule interministérielle de crise va être mise en place.
Le plan sur l'eau sera prochainement présenté. Il traitera de la sobriété et de la répartition des usages, notamment pour l'agriculture.
Mme Maryse Carrère. - La sobriété ne suffira pas, tant les déficits sont importants dans les bassins hydrographiques. Nous avons besoin d'une stratégie. Où en sont les propositions du Varenne de l'eau ? Nous voulons de la simplification, de l'accompagnement pour de nouvelles réserves. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Pierre Louault applaudit également.)
Soutien à l'agriculture biologique (I)
M. Joël Labbé . - (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER) L'agriculture biologique traverse une mauvaise passe : les ventes ont chuté de 4 %, après des années de croissance à deux chiffres. Mme la Première ministre a évoqué un soutien de 10 millions d'euros : c'est 166 euros en moyenne par ferme, le prix d'une paire de bottes !
Selon le ministre, la bio souffre d'un problème de demande. En 2022, la crise de la demande dans la filière porc conventionnelle a donné lieu à un plan de sauvegarde de 270 millions d'euros, et 15 000 euros d'aides à la trésorerie des exploitations.
Soutenir la demande, c'est aussi financer la communication. Pour les produits laitiers conventionnels, 20 millions d'euros ; pour l'Agence Bio, 750 000 euros...
L'État doit aussi faire respecter le 20 % de bio dans la restauration collective. Quant au chèque alimentation durable, on n'en parle plus...
Allez-vous enfin mettre en oeuvre un vrai plan de soutien à l'agriculture biologique, comme le demande la profession ? (Applaudissements sur les travées du GEST et sur plusieurs travées du groupe SER ; Mme Marie-Claude Varaillas applaudit également.)
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement . - Mon collègue Marc Fesneau étant au Salon de l'agriculture, il m'a chargé de le représenter.
La filière bio traverse une crise, notamment de la demande. C'est sur ce levier que nous devons agir. Nous avons soutenu la production avec l'écorégime, le crédit d'impôt, le financement de la campagne #BioRéflexe à hauteur de 750 000 euros, les 3 millions d'euros via France 2030.
Nous avons abondé de 15 millions d'euros le fonds Avenir Bio, au lieu des 8 millions initialement prévus, dont 2 millions d'euros pour la filière porc bio. Lors des Assises de la bio, le ministre a demandé à l'Agence Bio d'engager un travail de structuration de la filière. La consommation en restauration collective sera stimulée grâce à la campagne de communication financée par le programme de promotion européen.
Les régions qui le souhaitent pourront verser des crédits Feader non utilisés. Le futur programme Ambition bio accompagnera la structuration de la filière.
Face aux difficultés conjoncturelles, la Première ministre a annoncé un fonds d'urgence de 10 millions d'euros pour soutenir les exploitations. L'État versera une aide à la trésorerie. Nous encouragerons tous les acteurs, notamment la grande distribution et les collectivités territoriales, à faire la promotion du bio.
M. Joël Labbé. - C'est très insatisfaisant. L'agriculture biologique répond à des enjeux considérables : préserver la qualité mais aussi la quantité d'eau, la qualité du sol, de l'air, de la biodiversité, des pollinisateurs, de la santé humaine. Il faut lui donner de véritables moyens ! (Applaudissements sur les travées du GEST et sur plusieurs travées du groupe SER ; Mme Marie-Claude Varaillas applaudit également.)
Plan Écophyto 2030
M. Pierre Médevielle . - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) « En matière de produits phytosanitaires, nous respecterons désormais le cadre européen, rien que le cadre européen » : ces mots de la Première ministre, lundi au Salon de l'agriculture, ont été salués par la profession.
Nos agriculteurs demandent un cadre européen commun, cohérent et réaliste. Stop aux technocrates qui veulent laver plus vert que vert, aux surtranspositions made in France mortifères.
Il y a eu des progrès, mais nous devons rester vigilants, car l'agriculture est à la croisée des chemins. Moins d'eau, plus d'aléas climatiques, moins de phyto, maintien de la production : l'équation est délicate. Nous devons miser sur la recherche, l'innovation et la formation. Il faut optimiser la ressource en eau, utiliser des plantes de nouvelle génération, accélérer la mise sur le marché de molécules prometteuses.
La profession se réjouit du nouveau plan Écophyto 2030, qui assurera plus de cohérence au niveau européen. Comment l'État accompagnera-t-il la profession dans ce virage historique ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées du groupe UC)
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement . - La réduction du nombre de substances actives au niveau européen - mouvement qui se poursuit - est un enjeu de souveraineté alimentaire et de transition écologique. Nous entendons concilier ces deux impératifs via le plan d'action stratégique annoncé par la Première ministre pour renforcer le pilotage et l'adaptation des techniques de protection des cultures.
Nous devons développer les alternatives, y compris non chimiques. Cela passe par plus d'agronomie, par le renouvellement des pratiques agricoles et des systèmes de production, par davantage de moyens pour accompagner les agriculteurs et massifier les solutions.
Le ministre travaille dans cet esprit de planification, pour anticiper et non plus réagir au coup par coup. Nous voulons avancer avec les professionnels et les instituts techniques et de recherche, afin que ce qui peut sembler une impasse devienne une opportunité.
Notre approche doit être globale. Il faut aussi optimiser l'usage des produits phytosanitaires, grâce à l'innovation. Nous nous appuierons sur le travail fait, notamment dans la filière fruits et légumes. (MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.)
M. Pierre Médevielle. - Sur la planification, nous sommes d'accord. Nos agriculteurs ont besoin de lisibilité, d'égalité entre agriculteurs européens et de confiance. Arrêtons avec les tabous sur l'agriculture productiviste ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées des groupes UC et Les Républicains)
Carte scolaire
M. Max Brisson . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le ministre de l'éducation nationale, mercredi dernier, vous avez partagé l'émotion des élèves et professeurs du lycée Saint-Thomas d'Aquin de Saint-Jean-de-Luz. Ce drame absolu n'a pas grand-chose à voir avec la violence à l'école, ou la détection de la détresse des adolescents - sujets dont nous reparlerons.
Je veux vous parler d'un inspecteur d'académie venu dans un village calculer le nombre d'élèves attendus pour la prochaine rentrée. Par la fenêtre, on voit se construire un lotissement qui accueillera bientôt de nouvelles familles. Mais M. l'inspecteur n'en a cure. À la rentrée, l'école perd trois élèves : c'est une classe qui ferme
Tel est le rituel immuable de la carte scolaire, fleurant bon la IVe République, qui conduit chaque année les inspecteurs à sortir leur règle à calcul pour compter les effectifs. Pourtant, dans les Sraddet, Scot, PLUi, on impose aux élus de voir loin. Jusqu'à quand, monsieur le ministre, resterez-vous le seul de vos collègues à adapter les postes au nombre d'usagers à l'unité près ?
M. André Reichardt. - Très bien !
M. Max Brisson. - À quand une carte scolaire pluriannuelle, adaptée à notre époque ? Au ministère de l'éducation nationale, à quand l'entrée dans la modernité ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)
M. Pap Ndiaye, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse . - Je m'associe à l'hommage que vous venez de rendre à Agnès Lassalle, assassinée dans l'exercice de ses fonctions. Elle consacrait sa vie à ses élèves : mes pensées vont à eux, à ses collègues, à sa famille. Toute atteinte à un professeur porte atteinte à la République.
La carte scolaire tient compte de la baisse des effectifs, très importante l'année prochaine. Ici nous fermons des classes, là nous en ouvrons. Dans les Pyrénées-Atlantiques, il y aura 450 élèves de moins. Nous veillons à ce que le taux d'encadrement continue de s'améliorer, en particulier dans les régions rurales. Des ajustements auront lieu d'ici le mois de juin sur quelques points sensibles, en donnant la priorité aux regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI).
Notre regard pluriannuel s'appuie sur les statistiques fournies par le ministère et les rectorats, mais il faut également tenir compte des déménagements et construire une carte scolaire annuelle. (M. François Patriat applaudit.)
M. Max Brisson. - Je vous ai parlé de la procédure de la carte scolaire. Les maires n'en peuvent plus de cette vision comptable à courte vue : il est temps d'adopter une démarche pluriannuelle ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur de nombreuses travées des groupes INDEP, SER, CRCE, du RDSE et du GEST)
Soutien à l'agriculture biologique (II)
M. Jean-Michel Arnaud . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Longtemps favorisée par les pouvoirs publics, l'agriculture biologique a cessé d'être une priorité gouvernementale. L'aide au maintien est supprimée et l'Agence Bio sous-financée, les modes de production sobres en énergie et respectueux de la biodiversité sont peu reconnus et les ventes baissent.
Envolée des coûts de production, ralentissement des exportations, signature de traités de libre-échange synonymes de concurrence déloyale, comme le Mercosur : les causes sont multiples. Le marché bio est en situation de surproduction avec une demande freinée par l'inflation. Le ver est dans la pomme. Que compte faire le Gouvernement face à cette situation extrêmement difficile ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du GEST)
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement . - On aime le bio ! Nous avons besoin de nourrir les Français et de développer la filière bio, pour la consommation nationale comme pour l'export.
La loi Égalim prévoit 50 % de produits de qualité et durables dans la restauration collective, dont 20 % de bio : c'est un levier majeur. Depuis 2018, les vents ont été contraires : crise du covid, puis contexte d'inflation...
Les gestionnaires de restaurants collectifs doivent renseigner leurs résultats sur la plateforme « Ma cantine », nous aurons donc bientôt des données plus détaillées. Il faut accompagner la filière dans la lutte contre le gaspillage, la réflexion sur les quantités servies ou les recettes.
La circulaire de la Première ministre du 29 septembre 2022 aide les établissements publics à renégocier leurs contrats et acheter au juste prix. Une réflexion est en cours avec les ministres concernés sur chaque volet de la restauration collective. L'atteinte de l'objectif Égalim représentera un potentiel d'augmentation de 10 % du chiffre d'affaires de la filière bio, ce qui fera plus que compenser la baisse des ventes en 2022. (M. François Patriat applaudit.)
M. Jean-Michel Arnaud. - Il faut promouvoir la filière bio, clarifier les labels, inclure systématiquement le bio dans les projets alimentaires territoriaux.
La souveraineté alimentaire suppose aussi de rendre le métier d'agriculteur plus attractif. Nos arboriculteurs en particulier ne s'en sortent pas. Alors que nombre de traitements sont homologués au niveau européen, l'Anses maintient une interdiction générale, y compris pour des traitements bio. J'ai souvent entendu, dans les couloirs du Salon de l'agriculture : « Nous avons le droit de manger ce que nous n'avons pas le droit de produire. » (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Financiarisation des terres agricoles
M. Éric Bocquet . - Selon le rapport de l'association Terre de Liens, publié hier, seulement 35 % des terres cultivées en France appartiennent aux agriculteurs. On voit se développer des sociétés agricoles financiarisées, qui possèdent aujourd'hui 14 % de la surface, contre 7 % il y a vingt ans ; Auchan, Chanel ou L'Oréal achètent des terres. Nous connaissions la finance des villes, voici la finance des champs, qui possède 640 000 hectares et fait flamber les prix à l'hectare, favorisant les exploitations de grande taille.
Depuis trente ans, le ministère ne recueille presque plus aucune donnée. N'est-il pas temps de procéder à un audit complet et de renforcer la régulation foncière agricole, à l'occasion de la future loi d'orientation agricole ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur quelques travées du groupe SER et du GEST)
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement . - Vous avez raison de soulever cette question. La préservation des terres agricoles est une priorité pour le Gouvernement (on en doute à gauche), car c'est un enjeu de souveraineté. Grâce aux outils de régulation mis en oeuvre dans l'après-guerre - contrôle des structures, Safer, statut du fermage - le prix du foncier en France est parmi les moins chers d'Europe et nous avons maintenu une diversité des modèles. (M. François Patriat le confirme.)
Plus récemment, il y a eu l'objectif Zéro artificialisation nette (ZAN), sur lequel le Sénat est très engagé (exclamations à droite et au centre), et la loi Sempastous qui impose une autorisation administrative préalable en cas de cession au-delà d'un certain seuil d'agrandissement.
Enfin, nous avons lancé une vaste consultation sur la loi d'orientation et d'avenir agricole. Les questions foncières y seront abordées. Nous travaillons avec les élus locaux.
M. Éric Bocquet. - Il y a urgence : une ferme sur dix est une société financiarisée. Terre de Liens le dit : « le jour où nos ancêtres ont fait de la terre une marchandise est un jour noir pour l'humanité ». (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et du GEST ; Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
Situation du monde agricole (I)
M. Laurent Somon . - On achète des oeufs venus de l'étranger, des cerises de l'étranger parce que nous avons arraché nos cerisiers - et bientôt nos pommiers, nos noisetiers. On achète le poisson débarqué de bateaux étrangers alors que nous avons le deuxième domaine maritime mondial. Le sucre et les lentilles sont importés de pays où l'on utilise des traitements interdits en France.
Les règlements, les contrôles, les injonctions contradictoires, les incertitudes sur les revenus rendent les choses difficiles pour les agriculteurs. Ils ont bien du mal à croire au conte de fées de la compétitivité de la Ferme France, qui s'expose en grand cette semaine...
Or les agriculteurs n'ont pas attendu les déclarations du Président de la République sur la fin de l'abondance pour s'engager dans les économies d'énergie. Ils ont réduit leur utilisation de produits phytosanitaires et leur consommation d'eau. Dans la Somme, la société Cristal Union réutilise l'eau des betteraves pour ne pas puiser dans la nappe phréatique.
Allez-vous vous résigner à une agriculture in vitro ? La Ferme France a besoin d'un cap. Quels sont les moyens alloués, quelle est l'ambition du Gouvernement ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Pierre Louault applaudit également.)
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement . - Je souscris à votre constat : les agriculteurs n'ont pas attendu le Gouvernement. J'ai visité l'usine Cristal Union que vous évoquez et j'ai pu constater qu'elle avait réduit sa consommation énergétique et presque arrêté de consommer de l'eau.
Nous devons colliger ces bonnes pratiques et les diffuser dans toutes les entreprises françaises et sur tout le territoire : c'est cela, restaurer la compétitivité de notre agriculture. Nous apprenons de ce qui fonctionne sur le terrain, de celles et ceux qui aiment profondément cultiver et nourrir les Français.
Un récent rapport du Sénat montre combien la compétitivité de la Ferme France s'est effritée depuis 1990. Mais, depuis 2017, nous avons agi : je pense à la loi Égalim 2, qui a mis le revenu agricole au coeur de l'action publique. Vous avez aussi voté le prolongement du SRP+10.
Nous avons organisé le Varenne de l'eau, afin d'identifier les besoins et les solutions, réformé l'assurance récolte. Les agriculteurs savent que souveraineté alimentaire et adaptation au changement climatique relèvent du même combat, porté à bras-le-corps par le ministre de l'agriculture et la Première ministre. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)
M. Laurent Somon. - Notre industrie décline : nous importons des voitures, des médicaments, et même de l'électricité, alors que nous les produisions. Demain, ce sera le tour des agriculteurs ! Redonnez confiance à nos agriculteurs, pour éviter que ce qu'écrivait Fénelon à Louis XIV en 1694 ne devienne réalité : « La France entière n'est plus qu'un grand hôpital désolé et sans provision. » (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Yves Détraigne applaudit également.)
Situation du monde agricole (II)
M. Christian Redon-Sarrazy . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE) Hier deuxième puissance agricole, la France est passée au cinquième rang en vingt ans. Les importations représentent désormais la moitié des produits consommés : nous ne sommes plus le grenier de l'Europe. Le taux de déconversion chez les agriculteurs bio est inquiétant.
La situation des agriculteurs ne s'est pas améliorée depuis 2017 : ils présentent le plus fort taux de suicide de toutes les catégories socioprofessionnelles. Dans dix ans, 50 % des chefs d'exploitation partiront à la retraite.
La proposition de loi pour lutter contre l'accaparement du foncier agricole, votée avant la dernière élection présidentielle, n'a rien changé. L'État manque d'ambition.
L'été 2022 a mis en évidence notre fragilité. La France subit une sécheresse depuis un mois. Pour préserver notre indépendance, il faut défendre un modèle humain, pérenne, familial, respectueux des sols. C'est une question de survie.
Les accords de l'Union européenne avec le Mercosur, le Canada et la Nouvelle-Zélande sont autant de portes ouvertes à la concurrence déloyale. Le temps presse. Quand proposerez-vous une véritable politique agricole ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées du groupe CRCE)
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement . - On ne peut que partager vos constats. Oui, il faut entrer dans une logique d'accompagnement des transitions, en tirant parti du renouvellement des générations comme ce fut le cas dans les années 1960.
Il faut répondre à la demande des jeunes agriculteurs qui aiment profondément la terre, veulent être propriétaires de leur exploitation et vivre décemment de leur travail. La question du revenu est centrale.
Les lois Égalim 1 et 2 ont mis fin à la spirale déflationniste et à la destruction de valeur. Il faut maintenant veiller à leur pleine application.
Nous voulons une alimentation saine, sûre, durable et respectueuse de l'environnement et de la biodiversité ; tout cela a un prix. Nous voulons ne plus dépendre des importations : la souveraineté alimentaire aussi a un prix. C'est pourquoi lors de notre présidence du Conseil de l'Union européenne nous avons mis la question de la réciprocité des normes au coeur du débat.
Concernant les retraites agricoles, il faut mentionner les lois Chassaigne 1 et 2, ainsi que la proposition de loi visant à calculer la retraite de base des non-salariés agricoles sur les 25 années d'assurance les plus avantageuses, récemment adoptée par le Sénat. Enfin, avec la réforme des retraites que vous allez examiner, 350 000 petites retraites seront revalorisées de 100 euros en moyenne. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)
Sécheresse (II)
M. Jean Sol . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le réchauffement climatique soulève la question de la gestion de l'eau, nous l'avons constaté l'été dernier.
Notre législation vise à équilibrer les usages, grâce à un ensemble d'outils dont le débit réservé : il est interdit d'opérer des prélèvements qui feraient passer le débit d'un cours d'eau en dessous d'un certain seuil. Le principe est vertueux, mais son application source de dérives. Ainsi, pour la Têt dans les Pyrénées-Orientales, le juge administratif, s'appuyant sur des études contestées, a fixé un débit réservé bien trop important, au risque de condamner les activités maraîchères locales et de faire disparaître le système des canaux.
De telles interprétations maximalistes peuvent même menacer une centrale hydroélectrique comme à Sallanches, en Haute-Savoie. Allez-vous modifier les modalités d'application de ce débit réservé ? (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - En 2022, pas moins de 93 départements ont dû adopter des restrictions d'eau, 75 se sont trouvés en situation de crise. En 2023, cinq départements déjà sont concernés. La situation est globalement dégradée par rapport à l'année dernière. Le niveau de précipitations ces prochains mois sera crucial.
Nous devons anticiper et encourager la sobriété : c'est le travail que je poursuis avec M. Béchu. Dès le mois de décembre, nous avons demandé aux préfets d'identifier les collectivités fragiles. Les agences de l'eau pourront mobiliser 100 millions d'euros d'aides supplémentaires en 2023. Une première réunion des préfets coordonnateurs de bassin a eu lieu le 27 février. Un plan sur l'eau sera présenté dans les prochaines semaines dans le cadre de la planification écologique voulue par la Première ministre. (M. François Patriat applaudit.)
M. Jean Sol. - Les acteurs de terrain ne veulent plus de réponses dilatoires. Il faut modifier la législation. Emparez-vous des propositions du rapport de notre délégation à la prospective, intitulé « Éviter la panne sèche » ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
Retenues collinaires
M. Alain Duffourg . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La sécheresse de 2022 semble devoir se reproduire cette année. Au Salon de l'agriculture, le Président de la République s'est déclaré favorable à la mise en place de retenues collinaires. J'avais déposé une proposition de loi facilitant l'installation, dans la limite de 150 000 mètres cubes, de ces petits équipements qui ne sont pas contraires à l'écologie.
Madame la ministre, soutiendrez-vous ce dossier ? C'est une solution pertinente, car les agriculteurs et les vignerons de ce pays attendent des réponses précises et efficaces. Ils veulent être rassurés ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Sur les retenues collinaires, point de dogmatisme, mais une appréciation au cas par cas. Le stockage hivernal, quand il s'inscrit dans un projet concerté, peut être une solution parmi d'autres. Mais ce n'est pas la seule. Dans nombre de territoires, elle est impossible à mettre en oeuvre. Nous serons vigilants sur le taux de remplissage des retenues. (M. François Patriat applaudit.)
M. Alain Duffourg. - Les Français attendent des résultats tangibles. Ne soyez pas dans l'incantation, mais dans l'action ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Réserves de gaz en Lorraine
Mme Catherine Belrhiti . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La crise actuelle a mis en évidence la dépendance énergétique de la France et le besoin de consolider nos filières de production d'énergie.
Or en Moselle, trois forages de recherche ont mis au jour un volume de 190 milliards de mètres cubes de gaz, soit cinq années de consommation. Son extraction ne nécessiterait pas de recourir à la fracturation hydraulique, ce qui réduirait l'empreinte carbone.
Une entreprise française se tient prête à investir 20 millions d'euros pour l'exploiter. Il serait même possible d'enfouir du CO2 dans les cavités libérées par l'extraction. La concession d'exploitation est attendue depuis trois ans : le temps de l'action est venu. Ne manque que l'accord du Gouvernement. Madame la ministre, peut-on compter sur votre soutien ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique . - La politique de réduction de notre dépendance énergétique que je mène repose sur trois piliers.
D'abord, l'efficacité et la sobriété, avec un objectif de réduction de 40 % de notre consommation à l'horizon 2050. Avec le plan de sobriété présenté en octobre 2022, nous avons réussi en trois mois à réduire de 10 % notre consommation énergétique globale, ce que nous n'avions pas su faire en trente ans.
Ensuite, la production massive d'énergies renouvelables, à laquelle contribuera le projet de loi que vous venez d'adopter ; enfin, une relance historique de la filière nucléaire, objet d'un autre texte que vous avez également adopté.
Nous devons privilégier les énergies les moins carbonées. Le projet d'exploitation des gaz de couche que vous évoquez a donné lieu à une enquête publique ; 500 observations ont été recueillies, la plupart défavorables ; les associations locales de défense de l'environnement ont manifesté leur opposition. L'instruction est en voie de s'achever, et je me prononcerai dans quelques semaines. (M. Thani Mohamed Soilihi applaudit.)
M. Bruno Retailleau. - Pendant ce temps, on importe du gaz de schiste !
Mme Catherine Belrhiti. - Plutôt que d'importer du gaz de schiste américain, ne vaut-il pas mieux exploiter le gaz mosellan ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Abus de l'intérim médical
Mme Annie Le Houerou . - Malgré le Ségur de la santé et ses promesses d'attractivité, l'hôpital public continue de souffrir d'un absentéisme important. L'intérim médical est donc nécessaire, mais l'usage en est abusif. Vous avez vous-même dénoncé, monsieur le ministre de la santé, un intérim « cannibale » qui « rémunère injustement le nomadisme professionnel, détruit la cohésion des équipes et enferme dans un cercle vicieux les établissements qui y ont recours ».
Certains professionnels sont en effet devenus de véritables mercenaires qui font monter les enchères jusqu'à 3 000 euros la journée, alors qu'un jeune praticien touche, pour son engagement sans limite, 4 500 euros par mois.
Une loi de 2021 fixe un tarif plafond de 1 070 euros bruts pour 24 heures. Son application, prévue pour octobre 2021, a été décalée au 1er avril 2023. À un mois de cette échéance, les praticiens hospitaliers des urgences signalent que, faute d'intérimaires, ils auront du mal à boucler leurs plannings. Allez-vous réquisitionner ceux qui profitent du système au mépris du serment d'Hippocrate ? Comment éviter un nouveau recul dans le respect des patients et du temps médical ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du GEST et sur plusieurs travées du groupe CRCE)
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention . - La régulation de l'intérim est une préoccupation constante du législateur depuis deux mandatures ; en témoigne notamment la loi Rist de 2021. Je sais combien le Sénat est attentif à l'application des lois. En l'espèce, je me suis engagé à prendre les décrets d'application dès début avril.
Nous ne visons pas l'intérim en tant que tel mais ses dérives, minoritaires. Au-delà de la question éthique, le coût pour les hôpitaux a atteint 359 millions d'euros en 2021. Le tarif journalier peut même atteindre 5 000 euros... C'est en effet un outil à détruire la cohésion des équipes et l'engagement des médecins, lorsqu'un membre de l'équipe est payé quatre ou cinq fois plus qu'un autre.
J'ai demandé aux agences régionales de santé (ARS) d'animer des concertations locales avec les préfets et les élus pour affiner les diagnostics par établissement. Nous construisons des solutions avec les professionnels du territoire. J'en appelle aussi aux cliniques privées, qui se sont engagées à une rémunération raisonnée de l'intérim médical. Aucun territoire ne restera sans solution.
Mme Annie Le Houerou. - Entendez le cri d'alarme des professionnels. Je crains que le plafonnement ne soit impossible à mettre en oeuvre. Ce serait une preuve supplémentaire de l'échec de votre politique de santé, un poisson d'avril au mépris de ceux qui servent l'intérêt général, sans reconnaissance. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE)
Production d'hydroélectricité
M. Jean-Claude Anglars . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La France dispose du parc hydroélectrique le plus important de l'Union européenne ; il contribue pour 12 % à notre production d'électricité.
Or l'hydroélectricité est aujourd'hui fragilisée par des années d'indécision, qui se traduit par l'absence de renouvellement des concessions de service public échues. C'est le cas pour de nombreux ouvrages dans les vallées aveyronnaises de la Truyère et du Lot.
Le parc hydroélectrique nécessite une action urgente et déterminée. Après le projet Hercule de privatisation et de démantèlement d'EDF, sur lequel je vous avais interpellée, le Gouvernement est resté dans l'expectative. La Cour des comptes vous a adressé une mise en garde le 6 février dernier : il faut sortir au plus vite de cette situation.
L'hydroélectricité n'a pas été abordée dans le projet de loi Énergies renouvelables. Madame la ministre, que pensez-vous du constat de la Cour des comptes sur l'inaction du Gouvernement ? Quelles sont vos difficultés ? Nous pouvons vous aider ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique . - Le Gouvernement est très attentif au développement de l'énergie hydroélectrique, essentielle à la sécurisation de notre approvisionnement, mais aussi à la bonne gestion de notre ressource en eau.
On dénombre 2 600 installations en France, qui représentent 11 % de la production électrique. Le secteur contribue à l'emploi local dans les vallées de la Truyère et du Lot, en Dordogne ou dans les Pyrénées.
La Commission européenne a engagé un précontentieux contre la France sur les concessions échues. En réponse à la Cour des comptes, le Gouvernement explore plusieurs scénarios, à l'aune de plusieurs objectifs : relancer rapidement les projets bloqués par le contentieux européen, garder la pleine maîtrise de notre parc, favoriser les synergies, faire en sorte que les bénéfices profitent à la collectivité, privilégier des contrats souples, adaptables à l'évolution des besoins.
Cela vous a sans doute échappé, mais le projet de loi Énergies renouvelables permet de réaliser les investissements de pérennisation des concessions échues. Le Gouvernement veillera à la bonne santé du parc hydroélectrique et à son ancrage territorial. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)
Hausse des prix de l'énergie pour les stations de ski
M. Cyril Pellevat . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) J'associe à ma question les membres du groupe d'études « Développement économique de la montagne ».
L'envol des coûts de l'énergie menace d'asphyxie les stations de ski, en particulier les plus petites. Les domaines skiables subissent une double peine : une discrimination tarifaire liée au mode d'attribution de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh), et, malgré les aides, un dispositif d'écrêtement qui pénalise les petites structures.
Plus de 40 % des domaines ont dû renouveler leurs contrats de concession d'électricité, à des coûts parfois multipliés par dix. La faillite menace si le Gouvernement n'agit pas. Pour les collectivités support, cela signifierait une mise sous tutelle de la chambre régionale des comptes.
Il y a urgence. Comment faire, quand le coût de l'énergie passe parfois de 3 à 20 % du chiffre d'affaires ? Comment éviter que l'écrêtement n'annule le bénéfice des aides ? Comment prendre en compte les spécificités des stations dans la réforme de l'Arenh ? Comment renégocier les contrats, maintenant que les prix se stabilisent ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme . - Le Gouvernement a mis en place un certain nombre d'aides. Très tôt, les sénateurs et députés élus de la montagne ont été associés à la réflexion. Les régies de montagne sont couvertes par l'amortisseur électricité en tant qu'entreprises de moins de 250 salariés.
Comme ministre en charge des PME et du tourisme, je suis proche des élus de la montagne et je veille à l'accompagnement des collectivités concernées. À ce stade, je n'ai pas eu de remontées inquiétantes sur les régies. N'hésitez pas à me signaler des difficultés éventuelles.
Le tableau assez noir que vous brossez ne doit pas occulter les résultats remarquables du tourisme de montagne : 42 % de nos compatriotes ont l'intention d'aller au ski l'hiver prochain. En janvier 2023, le taux d'occupation était supérieur de 17 % à son niveau de 2022. Les perspectives sont bonnes ! (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)
La séance est suspendue à 16 h 15.
Présidence de M. Roger Karoutchi, vice-président
La séance reprend à 16 h 30.