Financement de la sécurité sociale pour 2022 (Nouvelle lecture)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022.
Discussion générale
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie . - Nous sommes réunis pour la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022. Je me fais peu d'illusions : vous allez sans doute adopter la question préalable et rejeter le texte. Je le regrette, car c'est un texte de soutien à notre système de santé et de réforme ambitieuse, avec la création d'un service public de l'autonomie. La branche nouvellement créée sera dotée de 1,3 milliard d'euros à l'horizon 2025, financés par des moyens rendus disponibles dès 2024. Les départements sont accompagnés. L'offre de service à domicile sera clarifiée avec un tarif national de référence et un objectif de qualité.
Les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) seront tarifés selon les besoins des personnes. Nous améliorons aussi la qualité de vie au travail des professionnels et simplifions les services d'autonomie à domicile, avec un interlocuteur unique.
Nous portons également une réforme transformatrice pour les établissements : généralisation des astreintes d'infirmiers de nuit, postes de soignants supplémentaires, hausse du temps de médecins coordinateurs en Ehpad ; ces derniers deviendront des centres de ressources dans leur bassin de vie.
L'expérimentation d'une carte de professionnels de l'aide à domicile s'est avérée nécessaire avec la crise sanitaire ; il fallait également reconnaître leur place dans la communauté du « prendre soin ». La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) accompagnera les départements expérimentateurs.
Le PLFSS consacre plus de 10 milliards d'euros aux revalorisations salariales ; il comporte de nombreuses innovations sur l'accès aux soins comme le remboursement des consultations de psychologie, crée des droits nouveaux, accélère l'innovation en santé, améliore notre souveraineté pharmaceutique et facilite l'accès aux droits sociaux.
Les débats au Sénat ont amélioré le texte avec des évolutions consensuelles : relèvement de l'Objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) de 1,7 milliard d'euros, entrée en vigueur dès novembre 2021 des revalorisations salariales pour le personnel des foyers et établissements pour personnes handicapées, conformément aux annonces du Premier ministre. La CNSA en compensera le montant.
Le périmètre d'intervention du Fonds de lutte contre les addictions est élargi pour tenir compte des nouvelles problématiques. Signalons aussi la mise en place du capital décès pour les familles des travailleurs non salariés agricoles.
Aussi, je salue votre travail et votre mobilisation. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales . - Après l'échec de la CMP, l'Assemblée nationale a conservé bien peu d'apports du Sénat : sans les amendements du Gouvernement sur le Ségur de la santé, nous ne serions pas loin d'un duplicata de son texte de première lecture...
Je salue néanmoins l'extension des revalorisations salariales du Ségur pour les professionnels du médico-social ; la suppression du plafonnement de la participation de la CNSA au financement des dépenses induites des départements au titre de l'avenant 43, portée par Philippe Mouiller, rapporteur pour la branche autonomie ; l'extension du droit à un capital décès aux ayants droit des non-salariés agricoles, initiative de Françoise Férat, d'Henri Cabanel et du Gouvernement.
Mais le compte n'y est pas.
L'Assemblée nationale a ainsi rétabli l'article 23 qui approuve l'annexe B - ce qui se comprend au point de vue de la régularité du texte, mais valide l'absence de stratégie de retour à l'équilibre des comptes. En 2025, nous atteindrons un plateau de déficit à 13 milliards d'euros. C'est inacceptable. Comment, dans ces conditions, apurer la dette qui corsète, anéantit, obère, réduit toute générosité à l'avenir ?
Nous sommes également opposés à la reprise par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) d'une partie de la dette hospitalière : aussi ne pouvons-nous accepter l'article 5.
L'Assemblée nationale a supprimé toutes les propositions du Sénat visant à améliorer le solde de 2021, comme la compensation intégrale à la sécurité sociale du coût de sa subvention au financement de Santé publique France, qui a encore explosé - sans que le Parlement ait son mot à dire.
L'article 58 bis prévoyant une conférence de financement, proposé par René-Paul Savary, rapporteur pour la branche vieillesse, a également été supprimé. Des mesures paramétriques sur l'âge de la retraite, la durée de cotisation et l'alignement des régimes spéciaux devaient être mises en oeuvre à défaut d'accord entre les partenaires sociaux
Enfin, des cavaliers sociaux supprimés par le Sénat ont été rétablis pour masquer l'absence de vraies lois pour le grand âge et les professionnels de santé.
À l'article 54, nous avions prévu que la loi fixe un montant de dotations aux fonds et organismes financiers par l'assurance maladie. Cela n'a pas été repris, ce qui augurait mal de l'accord en CMP.
Nous sommes arrivés au bout du dialogue utile entre nos deux assemblées ; aussi vous proposons-nous une motion opposant la question préalable.
La loi n'est plus le fruit d'une réflexion parlementaire, mais de plus en plus un instrument de communication. Le débat est fermé d'avance ; je le regrette.
M. Xavier Iacovelli . - Nous voilà à nouveau réunis sur le PLFSS, texte important et ambitieux qui traduit notamment les revalorisations salariales historiques du Ségur.
Ce texte consacre de nombreuses avancées pour les Français : possibilité de se faire prescrire des lunettes par un orthoptiste, généralisation de la télésurveillance pour les malades chroniques, gratuité de la contraception jusqu'à 25 ans pour les femmes. Chaque article contient une amélioration sociale.
Nous regrettons de ne pouvoir débattre, une fois de plus, des points de désaccord avec l'Assemblée nationale. Une habitude désormais, avec une alliance sénatoriale étendue à la gauche de cet hémicycle.
Pourtant, l'Assemblée nationale a conservé certains apports du Sénat, comme aux articles 13 et 40. Elle a également réintroduit l'article 5 et supprimé la réforme des retraites déguisée votée par le Sénat, ce dont nous nous félicitons.
D'autres dispositions, comme l'élargissement du fonds de lutte contre les addictions aux nouvelles pratiques addictives, ont été votées conformes.
Votre posture fragilise le bicamérisme que vous prétendez défendre, chers collègues. Le PLFSS mérite mieux qu'une manoeuvre politicienne.
M. Laurent Burgoa. - Garde à vous !