Lutte contre la maltraitance animale (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes.
Discussion générale
Mme Anne Chain-Larché, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire . - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) La commission mixte paritaire (CMP) a trouvé un accord sur ce texte. Pour éviter le pire, nous le voterons. Le Sénat n'a pas lâché sur ses lignes rouges.
Le texte est équilibré et évite des effets de bord qui auraient pu être désastreux pour les professionnels.
Préférant l'efficacité aux effets d'annonce, le Sénat a agi selon trois axes : lutter contre l'abandon en encadrant les cessions d'animaux ; faciliter le travail des acteurs de terrain ; refuser le credo « interdire et laisser mourir » en trouvant des solutions pour le bien-être des animaux et l'avenir des professionnels.
Certaines dispositions finales nous laissent cependant un sentiment amer. Je regrette que la proposition du Sénat sur les animaux sauvages dans les cirques itinérants - qui prévoyait l'établissement d'une liste d'interdictions progressives, espèce par espèce - n'ait pas été retenue. Nous avons toutefois obtenu un délai de sept ans qui laisse le temps aux professionnels de s'organiser : c'était la moindre des choses pour les circassiens qui crient leur désespoir. Leur activité est légale, contrôlée et encadrée, mais elle est pourtant régulièrement entravée : il faut un véritable délit d'entrave pour faire cesser cette guérilla. Le Sénat a voté une proposition de loi en ce sens : la balle est désormais dans le camp des députés.
Les voleries ne relèvent pas de l'interdiction prévue, car elles sont non pas itinérantes, mais mobiles.
Les 21 dauphins et 4 orques présents en France pourront rester dans les parcs aquatiques, à certaines conditions. Nous évitons ainsi qu'ils finissent dans des piscines de luxe à l'autre bout du monde ou qu'ils soient euthanasiés.
Pour lutter contre l'abandon des animaux de compagnie, un certificat d'engagement sera signé par l'acquéreur, qui disposera en outre d'un délai de réflexion de sept jours. La cession en ligne sera contrôlée par les plateformes : c'est une avancée historique due au Sénat.
Le Sénat a rétabli la vente de tous les animaux de compagnie en animalerie, à l'exception des chiens et chats. Seuls les refuges pourront proposer leurs animaux en magasin, mais le danger de voir plonger le secteur dans l'illégalité reste entier.
Je me félicite de la reconnaissance législative des associations sans refuge, dont l'existence était menacée à l'issue de l'examen par l'Assemblée nationale : ce sont des acteurs de terrain essentiels.
Je me réjouis également des réponses apportées contre la zoophilie et la zoopornographie ; et de la suppression de l'obligation absurde imposée aux maires de faire stériliser les chats sans compensation financière ou de créer une fourrière dans chaque commune.
Ce texte est in fine équilibré, opérationnel ; il est plus pragmatique et moins idéologique. Je vous invite à l'adopter.
Je me contenterai d'un remerciement, pour conclure, aux professionnels exceptionnels, passionnés et passionnants, que j'ai eu la chance de rencontrer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du RDPI ; M. Jean-Paul Prince applaudit également.)
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État chargée de la biodiversité . - Je suis heureuse et même émue de voir aboutir cette évolution majeure pour le respect du règne animal. Nos valeurs sont vivantes, elles évoluent. Avec ce texte qui porte des mesures ambitieuses, nous assumons notre responsabilité morale collective.
En septembre 2020, Barbara Pompili annonçait le souhait du Gouvernement de voir cesser la présence d'animaux sauvages dans les cirques itinérants et les delphinariums et d'interdire les élevages de visons d'Amérique pour leur fourrure. En décembre 2020, Julien Denormandie annonçait la mise en place de certificats de sensibilisation à l'achat ou à l'adoption d'animaux de compagnie. Ces mesures sont désormais inscrites dans la loi. Et le parcours législatif l'a enrichie d'autres décisions courageuses.
Mme la rapporteure, vous avez eu le souci de la nuance et de l'équilibre. Cette CMP conclusive est une belle victoire. Les débats ont été d'excellente tenue et je remercie tous les sénateurs pour leur mobilisation.
Le Gouvernement accompagnera les professionnels dans la perspective de l'interdiction des animaux sauvages dans les cirques itinérants, comme nous le faisons depuis la crise sanitaire. Ainsi, quelque 2,4 millions d'euros ont déjà été versés aux professionnels du cirque pour le nourrissage et le soin.
Je réaffirme ici notre soutien au cirque : je sais l'attachement des circassiens à leurs animaux et combien les évolutions prévues peuvent être douloureuses. La transition doit être la plus sereine possible.
Il faudra accompagner la reconversion des professionnels et trouver des solutions d'accueil garantissant le bien-être des animaux.
Pour les cétacés, le délai est de cinq ans, avec néanmoins quelques dérogations - sanctuaires, centres de soins et programmes scientifiques - sur lesquelles nous serons vigilants. Les refuges et les sanctuaires ont été définis dans le texte : pas d'exploitation à but lucratif ni de contact direct avec le public ou de numéros de dressage.
Je me félicite aussi de la fin des élevages de toutes les espèces non domestiques pour leur fourrure. Il y a un an, lorsque le Gouvernement annonçait son intention de les fermer, il y avait quatre élevages en France, seulement un aujourd'hui. Les trois autres ont été accompagnés dans leur transition. Voilà la preuve de l'efficacité de notre démarche.
Le texte présente des avancées pour les animaux domestiques dans le combat contre la maltraitance, avec un volet de sensibilisation et de prévention des abandons, en responsabilisant les acquéreurs via un certificat d'engagement et de connaissance. Les textes d'application seront rapidement publiés.
La vente en ligne est mieux encadrée, grâce au travail que nous avions engagé avec les vétérinaires dès la fin 2020.
La vente en animalerie des chiens et chats sera interdite en 2024 pour lutter contre les achats impulsifs et limiter les abandons.
Avec ce texte, nous confirmons notre responsabilité individuelle et collective vis-à-vis des animaux.
Une sensibilisation à l'éthique animale sera dispensée dans le cadre du service national universel (SNU) ainsi qu'à l'école primaire, au collège et au lycée dans le cadre de l'enseignement moral et civique. Je m'en félicite, car les enfants peuvent sensibiliser à leur tour leurs parents.
Nous accompagnons aussi le recueil des animaux abandonnés et je salue le rôle des refuges, des associations et des familles d'accueil qui réalisent un travail formidable. Merci aussi aux élus locaux et aux vétérinaires.
La gestion de l'errance animale a également été modernisée. L'expérimentation sur la stérilisation des chats errants nous permettra de mieux lutter contre la surpopulation féline, avec 15 millions d'euros supplémentaires prévus dans le plan de relance.
Les sanctions pour maltraitance sont renforcées. La présence d'animaux - domestiques ou non - sera interdite en discothèque, tout comme celle d'animaux sauvages sur les plateaux de télévision.
Ce texte est marqué par le progrès. Nous sommes en phase avec l'histoire et les attentes des Français. Ce texte est une fierté pour nous tous. (M. Éric Gold applaudit.)
M. le président. - Je rappelle qu'en application de l'article 42, alinéa 12, du Règlement, le Sénat examinant après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.
En conséquence, le vote sur les amendements et les articles sera réservé.
Nous passons à la présentation des amendements du Gouvernement avant d'en venir aux explications de vote des groupes.
La discussion générale est close.
Discussion du texte élaboré par la CMP
ARTICLE 2 BIS C
M. le président. - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 2, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État. - Les amendements du Gouvernement sont rédactionnels ou de précision.
Mme Anne Chain-Larché, rapporteure. - Avis favorable à tous les amendements.
M. le président. - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - À l'article L. 212-7 du code rural et de la pêche maritime, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « dernier ».
M. le président. - Amendement n°5, présenté par le Gouvernement.
Compléter cet article par une ligne ainsi rédigée :
L. 211-26 |
Résultant de l'ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de l'environnement |
M. le président. - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 18
1° Au début
Insérer la référence :
II bis. -
2° Remplacer les mots :
l'interdiction prévue au premier alinéa du I
par les mots :
les interdictions prévues aux I et II
II. - Alinéa 19
Au début
Insérer la référence :
II ter. -
M. le président. - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 1
Remplacer les mots :
de l'article 12
par les mots :
des articles 12 et 13
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État. - Défendu.
M. Daniel Salmon . - Voici une nouvelle étape dans la lutte contre la maltraitance animale. Je remercie les députés qui sont à l'origine de ce texte, ainsi que les associations, les citoyennes et les citoyens qui oeuvrent dans ce domaine.
Le GEST aurait aimé aller plus loin, mais ce texte comporte des avancées et nous saluons les apports de la commission sur les sanctions ou les associations sans refuge. Le texte, hélas, n'évoque ni la chasse ni la corrida.
Le GEST se félicite de l'interdiction très attendue de la vente des chiens et chats en animalerie à l'horizon 2024, à l'exception des animaux de refuge.
Le certificat d'engagement est utile, tout comme le délai de réflexion de sept jours.
Nous nous félicitons également du renforcement des sanctions et de l'interdiction des animaux dans les cirques itinérants et dans les delphinariums. Restons cependant vigilants sur la sédentarisation des cirques itinérants. L'État doit accompagner les cirques à aller vers des spectacles sans animaux.
Nous nous réjouissons aussi de l'interdiction à effet immédiat des élevages de visons et autres espèces non domestiques destinés à l'industrie de la fourrure.
Nous avons cependant quelques regrets, notamment sur le système de labellisation des sites de vente en ligne : l'interdiction pure et simple de la vente sur les sites non spécialisés aurait été autrement plus efficace. Seuls les professionnels doivent être autorisés à vendre en ligne, sur des sites spécialisés.
Les chats errants sont un problème de santé publique. L'État doit davantage soutenir les collectivités. Nous suivrons avec attention les travaux de l'Observatoire de la protection des animaux de compagnie en ce domaine.
Mais il reste encore beaucoup à faire, notamment sur les conditions d'élevage industriel. Pour lutter contre la souffrance animale, notre agriculture doit changer de modèle. Nous y reviendrons.
Le GEST votera ce texte encore timide, mais qui acte des progrès majeurs.
M. Fabien Gay . - Malgré ses imperfections, cette proposition de loi est une avancée dans la lutte contre la maltraitance animale. En la matière, nous partions de loin. C'est pourquoi le CRCE l'avait votée en première lecture.
Le texte de compromis de la CMP comporte des avancées, notamment pour les cirques et les delphinariums. Merci à notre rapporteure d'avoir proposé une solution pour accueillir ces animaux, promis à l'euthanasie par l'Assemblée nationale.
Nous sommes plus mitigés sur les animaleries. Oui, les animaux qui y sont vendus proviennent souvent d'élevages d'Europe de l'Est, sevrés trop tôt et transportés dans de mauvaises conditions.
M. Stéphane Piednoir. - Caricature !
M. Fabien Gay. - Les animaux ne sont pas des objets ou des marchandises que l'on pourrait jeter après achat. Et il n'est plus acceptable que des animaux sauvages soient maintenus en captivité pour être exhibés dans un environnement qui n'est pas le leur.
Ce texte doit réellement s'appliquer, notamment s'agissant des delphinariums : attention aux dérogations prévues.
L'accord en CMP nous oblige à une action plus globale en faveur des animaux. Il faut revoir notre modèle d'élevage intensif avec le monde agricole. L'impact des pesticides est également néfaste à la biodiversité.
Nous ne pourrons plus occulter le sujet de la souffrance animale. La recherche effrénée du profit dans nos sociétés capitalistes se fait au détriment de la vie animale. (M. Stéphane Piednoir le conteste.)
Ce mode de production réduit l'animal à une marchandise parmi tant d'autres ; aucune compensation ne pourra jamais remédier à la disparition des espèces.
Il faudra se saisir vraiment de cette question qui préoccupe nos concitoyens et aller plus loin.
Madame la ministre, et chers collègues qui avancez des arguments que j'aimerais entendre plus souvent à la tribune, et moins souvent en échos lancinants derrière un masque, il faudra engager une réflexion sur notre rapport aux autres espèces. Vos interpellations ne me feront pas reculer ; je ne l'ai jamais fait sur un terrain de rugby, je ne le ferai pas davantage ici.
Le groupe CRCE votera cette proposition de loi qui constitue une première étape. (Applaudissements sur les travées du RDPI, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)
M. Jean-Paul Prince . - La CMP est parvenue à un accord le 21 octobre. Le dialogue entre le Sénat et l'Assemblée nationale a été apaisé et les débats fructueux, sur un sujet pourtant si délicat et passionné. Merci à notre rapporteure et à notre présidente. Je me réjouis que de nombreux apports du Sénat aient été conservés.
Les relations entre l'homme et l'animal ont considérablement évolué. Autrefois, nous utilisions leur force dans l'agriculture et les transports ; les énergies fossiles et renouvelables les ont libérés de cette servitude.
Descartes les considérait comme des machines, le code napoléonien comme des choses. La reconnaissance de leur sensibilité est venue progressivement, puis inscrite dans la loi du 10 juillet 1976.
Les animaux sauvages de spectacle souffrent du dressage et de la vie itinérante. Il était nécessaire d'agir, mais de manière ordonnée, en laissant le temps aux professionnels de s'adapter et trouver des hébergements convenables pour leurs animaux. Les délais prévus par le texte sont appropriés et la création d'une commission consultative pour la faune sauvage captive par le Sénat est utile.
L'Assemblée nationale a voté l'interdiction de la vente en animalerie à l'horizon 2024 : c'est discutable, car ces établissements sont déjà strictement réglementés. De plus, il est à craindre que la vente en ligne entre particuliers bénéficie des nouvelles restrictions. L'interdiction de la présentation des animaux en vitrine, introduite par le Sénat, a heureusement été conservée.
Concernant l'interdiction des manèges à poneys, le terme de carrousel, trop générique, risquait de dépasser l'intention du législateur et de toucher de nombreuses activités impliquant des chevaux, comme le Cadre noir de Saumur ou les animations équestres de Chambord et du Puy du Fou. La réécriture de l'article par le Sénat a été conservée.
Dans l'ensemble, ce texte est porteur de progrès. J'espère que son adoption contribuera à l'apaisement dans ce domaine, marqué par des oppositions virulentes et des débordements.
La majorité du groupe UC votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. Éric Gold . - On oublie trop souvent que, sur de nombreux textes, le travail de concertation entre députés et sénateurs permet d'aboutir à un accord.
Nous renforçons la protection des animaux. Certaines dispositions vont dans le sens de l'Histoire. Les mentalités ont évolué : il est bon que le législateur s'y conforme.
D'ici deux ans, loups ou ours seront interdits dans les spectacles itinérants. D'ici cinq ans, ce sont les cétacés qui seront concernés et d'ici sept ans, les animaux sauvages des cirques itinérants. Ce texte marque en outre la fin des élevages de visons pour la fourrure. Une liste limitative des animaux non domestiques pouvant être détenus comme animaux de compagnie sera établie.
Il fallait en finir avec les 100 000 abandons d'animaux domestiques constatés chaque année, un record européen qui nous fait honte. Un certificat d'engagement et un délai de réflexion de sept jours seront imposés, afin d'éviter les achats compulsifs. Il ne sera plus possible de céder ou donner un animal de compagnie à un mineur sans assentiment préalable de ses représentants légaux.
La vente de chiens et chats en animalerie sera interdite - sauf pour les animaux de refuge - à l'horizon 2024. Les autres animaux ne pourront plus être présentés en vitrine. La vente en ligne d'animaux de compagnie sera mieux encadrée. Le RDSE a d'ailleurs fait adopter un amendement imposant la mention du nombre de portées de la femelle au cours de l'année écoulée.
Les animaux ne sont pas des biens de consommation courante : ce sont des êtres doués de sensibilité. L'arsenal juridique contre la maltraitance animale sera renforcé, avec notamment la levée du secret professionnel des vétérinaires. Les peines pour atteinte sexuelle, abandon, mise à mort, sévices graves ou actes de cruauté seront aggravées, avec une circonstance aggravante si ces actes sont commis devant un mineur.
Le renforcement des dispositions pénales s'accompagnera de mesures de prévention : le stage de prévention remplacera ou complétera les peines d'emprisonnement dans un objectif de lutte contre la récidive. Un module sur l'éthique animale figurera au programme du service national universel et de l'enseignement moral et civique.
Le groupe RDSE votera sans réserve ce texte, fruit d'un travail de concertation transpartisan. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; Mme Michelle Meunier et M. Jean-Paul Prince applaudissent également.)
Mme Esther Benbassa . - Les résultats des travaux du Sénat en première lecture étaient décevants. La CMP a redonné de la consistance au texte, mais mon engagement contre la maltraitance animale m'oblige à signaler ses lacunes.
L'interdiction de l'exploitation d'animaux sauvages dans les spectacles de divertissement est une avancée, mais je regrette le délai excessif laissé aux acteurs concernés. Deux ans, c'est injustifiable : que deviendront les animaux nés dans cet intervalle ?
Je félicite néanmoins les cirques qui ont mis en place des alternatives innovantes comme les hologrammes animaliers : il est possible de divertir sans causer de souffrance.
L'encadrement du commerce des chiens et chats est également une avancée louable : l'offre trop importante facilite les acquisitions non réfléchies, et par conséquent les abandons - il y en a 300 000 par an !
Mais cela ne dissimule pas le bilan décevant de ce quinquennat : où est la vidéosurveillance des abattoirs promise par Emmanuel Macron, l'encadrement du transport, l'amélioration des conditions de vie ?
La faune sauvage est complètement oubliée. Pour des raisons clairement électorales, des avantages exagérés sont accordés aux chasseurs. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Laurent Burgoa. - Vive la chasse !
Mme Esther Benbassa. - Une réforme globale et ambitieuse du droit animal aurait été bienvenue; mais je voterai ce texte.
M. Franck Menonville. - Oui, vive la chasse !
M. Jean-Claude Tissot . - La CMP est parvenue à un compromis sur ce texte. Au cours de son examen, nous avons constaté la mobilisation et l'émoi que suscitait cet enjeu. Les débats ont été très animés : c'est la vitalité de notre démocratie.
Les attentes de nos concitoyens et des associations étaient fortes.
Plusieurs dispositions ambitieuses ont été confirmées en CMP : le certificat d'engagement et de connaissance avant toute acquisition, la suppression de la vente des chats et chiens en animalerie, l'encadrement de la vente en ligne, les sanctions renforcées contre la maltraitance et la zoophilie, l'interdiction à terme de l'exhibition d'animaux sauvages dans les cirques itinérants et les delphinariums - dans des délais que la CMP a fixés au bon niveau.
Le texte ignore pourtant certains sujets sensibles, soigneusement évités par la majorité présidentielle à l'approche de l'élection. Il aurait fallu ainsi aborder la question de l'élevage.
Nous avons pu défendre les collectivités territoriales, qui assumeront leur juste part dans la lutte contre la maltraitance, sans qu'il leur soit demandé d'effort financier incohérent, notamment pour la stérilisation des chats errants. Sur ce point, l'expérimentation dans les communes volontaires est une bonne solution.
J'ai voté les conclusions de la CMP, au nom du groupe SER, et je réaffirme notre soutien à ce texte ambitieux. Notre mobilisation pour le bien-être animal se poursuivra. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Bernard Buis . - Nous n'étions pas tous optimistes sur l'issue de la CMP. Mais nous y sommes arrivés ! Ce texte apporte des mesures concrètes qui changeront le quotidien de nos animaux. Le RDPI le votera sans réserve.
Entre l'approche pragmatique du Sénat et l'approche volontariste de l'Assemblée nationale, il paraissait difficile de trouver une issue commune. À force de concertation et de compromis, nous avons su dépasser les logiques partisanes. Les discussions ont abouti - certes tard le soir - à un vote de bon sens et de sagesse.
Un compromis a été trouvé sur les cirques itinérants : une interdiction des animaux sauvages dans un délai de sept ans a été votée, si toutefois une solution d'accueil est trouvée pour ces animaux. Pour les delphinariums, l'échéance est à cinq ans, avec possibilité d'accueil dans des refuges.
L'interdiction de vente en animalerie des chiens et chats en 2024 a été maintenue sur l'insistance de l'Assemblée nationale, mais les ventes d'animaux en refuge seront possibles. Une coopération entre les animaleries et les associations s'engagera afin de favoriser les adoptions.
Sur la stérilisation des chats, une expérimentation de cinq ans sera mise en oeuvre dans le cadre de conventions de gestion. Je salue particulièrement les maires drômois présents en tribune. Je songe à ma commune de Lesches-en-Diois, cinquante habitants, ou à Rochefourchat, qui n'en a qu'un seul.
Je me réjouis de la fin immédiate des élevages de visons.
Au total, les propositions de ce texte amélioreront le bien-être des animaux. Le Sénat et l'Assemblée nationale ont su faire oeuvre commune pour le bien de nos concitoyens. J'en appelle à cette même coconstruction sur le texte relatif à la régulation du foncier agricole. Notre crédibilité en sortirait grandie. (Mme la présidente de la commission des affaires économiques sourit.)
M. Emmanuel Capus . - « Le véritable test moral de l'humanité, ce sont ses relations avec ceux qui sont à sa merci : les animaux. » Milan Kundera avait raison... Si nous ne nous saisissons pas du sujet de la maltraitance animale, personne ne le fera.
Il faut se féliciter de l'accord trouvé par la CMP, qui s'inscrit dans une tendance de fond. C'est un texte d'équilibre.
Près de la moitié de nos concitoyens possèdent un chat ou un chien. Nous ne croyons pas qu'un animal domestique soit un animal maltraité. Le lien avec l'animal fait partie de l'histoire de l'humanité - pour le chien, cela date de plusieurs dizaines de millénaires ! Il ne faut pas y renoncer, mais mieux protéger les animaux, qui ne sont pas les égaux des humains mais des êtres sensibles. Le certificat d'engagement va dans ce sens ; même s'il peut paraître symbolique, il permet de s'assurer que les fondamentaux sont connus.
La vente en ligne d'animaux de compagnie sera interdite, et c'est heureux : les animaux ne sont pas de simples marchandises.
Les animaux en animalerie ne devront pas être visibles depuis la rue, afin d'éviter les achats impulsifs. Je doute toutefois de la pertinence d'une interdiction générale de la vente de chats et de chiens dans ces commerces : il fallait soit considérer que ces professionnels sont compétents - ce que nous croyons - soit interdire la vente de tous les animaux. Une exception est ménagée pour les animaux de refuge, afin d'éviter l'euthanasie - un échec - pour les 100 000 animaux abandonnés chaque année.
L'État et les collectivités territoriales se coordonneront mieux, grâce à ce texte, pour traiter le problème des chats errants - particulièrement sensible dans le Nord, comme l'a rappelé Jean-Pierre Decool.
Le montant de l'amende pour l'importation d'espèces protégées est porté de 7 500 à 30 000 euros.
Je salue aussi le renforcement des sanctions contre la maltraitance, en particulier quand les faits sont commis en présence de mineurs. Cependant, la réponse pénale n'est pas la panacée, au vu de l'engorgement de la justice, du fait du manque de magistrats. La sensibilisation et l'éducation sont à privilégier.
Enfin, la CMP a décidé l'arrêt progressif des spectacles animaliers : dans cinq ans pour les delphinariums, dans sept ans pour les cirques.
Ce texte, pragmatique, apporte de nombreuses avancées. Malgré quelques regrets, le groupe Les Indépendants votera ce texte.
Mme Marie-Christine Chauvin . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il faut rappeler que la protection des animaux n'est pas une préoccupation nouvelle. Dès 1850, la France a puni les mauvais traitements infligés publiquement.
En 2015, les animaux ont été reconnus comme des êtres vivants doués de sensibilité.
Face à l'attente sociétale importante, le texte issu de l'Assemblée nationale n'était pas une loi structurante. Mais son périmètre réduit a permis à notre rapporteure, malgré des délais restreints, de faire une analyse poussée.
Le Sénat a amplifié des mesures qui vont dans le bon sens, évité les effets de bords et cherché à maintenir une place pour les animaux dans notre société. La tentation est en effet grande, pour certains, de vouloir interdire toute détention d'animaux. La relation entre les hommes et les animaux doit pourtant être préservée.
Le Sénat a préféré des mesures opérationnelles, assorties de critères objectifs, pour améliorer les conditions de vie des animaux, par un statut dédié pour les 3 200 associations sans refuge mais actives et nécessaires. Il a autorisé la vente en animalerie à l'exception des chiens et des chats, car une interdiction sèche aurait favorisé un transfert vers des modalités de vente moins vertueuses. Il a encadré la vente en ligne - la première animalerie de France !
Le Sénat a également aggravé les sanctions contre les maltraitances, les actes de cruauté, le vol d'animaux domestiques pour alimenter le trafic, la zoopornographie et a créé un délit d'atteinte sexuelle sur animal domestique.
Le groupe Les Républicains votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
À la demande de la commission, la proposition de loi est mise aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°44 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 333 |
Pour l'adoption | 332 |
Contre | 1 |
Le Sénat a adopté.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. - J'ai entendu l'engagement pour le bien-être animal du Gouvernement, qui voit dans ce texte un mouvement historique ; mais il a fait une erreur de méthode. Il aurait fallu un projet de loi, avec un avis du Conseil d'État et un texte travaillé avec les professionnels et non contre eux - je songe notamment aux circassiens, particulièrement malmenés au début de l'examen. Je regrette les propositions de certains, dogmatiques pour être médiatiques, qui n'ont pas fait avancer le débat.
Jamais je n'avais examiné un texte dans de telles conditions...
Je remercie néanmoins les membres de la commission, les sénateurs et les ministres pour la qualité des échanges.
Les circassiens aiment leurs animaux. Je veux les assurer du soutien total du Sénat. Nous serons attentifs à la façon dont la loi sera mise en oeuvre. (Mmes Anne Chain-Larché, rapporteure, et Marie-Christine Chauvin applaudissent.)
La séance est suspendue quelques instants.