Expropriation de biens en état d'abandon manifeste
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à moderniser et faciliter la procédure d'expropriation de biens en état d'abandon manifeste, à la demande du groupe RDSE.
Discussion générale
M. Jean-Claude Requier, auteur de la proposition de loi . - Je salue l'action de Jacques Mézard, auteur de la proposition de loi, défenseur des petites villes. Le programme Action Coeur de ville, dont il est à l'initiative, vise 222 villes moyennes.
Nos territoires ont un potentiel indéniable : le départ de nombreux habitants des métropoles vers les villes moyennes au cours de la crise sanitaire le montre. Nous devons accompagner ce rééquilibrage par le développement d'activités économiques et de services publics. En somme, il faut assurer l'éveil des communes dont les centre-bourgs sont dégradés ou comprennent des terrains laissés à l'abandon, parfois devenus de véritables dépotoirs.
La proposition de loi accompagne la mobilisation des biens immobiliers victimes du désintérêt de leur propriétaire. Les collectivités territoriales doivent pouvoir acquérir le foncier, qui se fait rare et cher, pour l'aménager et ainsi lutter contre l'artificialisation des sols.
Le texte modifie les articles 2243-1 et suivants du code général des collectivités territoriales. La loi du 2 août 1989 a prévu une procédure simplifiée d'expropriation pour état manifeste d'abandon, qui dispense du recours à une enquête publique. La loi ALUR a prévu que l'EPCI ou le conseil départemental peuvent se substituer à la commune. La loi ELAN prévoit cette procédure pour les immeubles, parties d'immeubles, installations, terrains et voies privées assortis d'une servitude de service public non entretenus, dans le périmètre d'agglomération.
La procédure simplifiée demeure riche en formalités, telles que la recherche active des propriétaires, la large information du propriétaire et du public, un procès-verbal provisoire puis définitif, la constitution d'un dossier d'expropriation identifiant précisément le bien, avant validation par le préfet et transmission au juge de l'expropriation.
Cette procédure est entourée de garde-fous. Elle ne peut s'appliquer que dans le périmètre d'agglomération et doit concerner une opération d'habitat ou relevant de l'intérêt collectif.
La proposition de loi élargit la mesure à tout le territoire de la commune. Elle en étend les finalités à la constitution de réserves foncières. Enfin, elle permet de désigner l'EPCI comme destinataire du bien en amont de la procédure.
Cette procédure a surtout pour but de lutter contre l'état d'abandon. Les propriétaires ont trois mois pour sortir de l'inertie et peuvent s'engager à réaliser des travaux dans un délai fixé par convention.
L'atteinte au droit de propriété est donc limitée. Seule l'utilité publique la justifie. Le juge continuera d'appliquer la théorie du bilan mettant en balance coûts et avantages comme depuis l'arrêt « Ville Nouvelle Est » de 1971.
La priorisation au logement, prévue par le texte initial, ne devait pas être imposée de façon uniforme. Aussi, je remercie le rapporteur d'avoir modifié le texte. Cette priorisation n'avait de sens que pour les communes en déprise démographique.
Je regrette l'irrecevabilité financière de mon amendement qui ouvrait au département la possibilité d'acquérir le bien.
Cette proposition de loi est attendue par les élus locaux qui veulent récréer des bassins de vie, au profit de l'intérêt général. Le RDSE vous invite à la voter. Le Sénat est là pour écouter et servir les maires. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
M. François Bonhomme, rapporteur de la commission des lois . - Nous examinons enfin cette proposition de loi de Jacques Mézard, aujourd'hui membre du Conseil constitutionnel.
Elle apporte des modifications ciblées à la procédure de déclaration de parcelle en état manifeste d'abandon, prévue par le code général des collectivités territoriales. Il s'agit d'une des procédures exorbitantes par lesquelles les communes peuvent accéder à la propriété en dehors de toute cession à titre onéreux, au même titre que les dons et legs ou l'acquisition des biens sans maître.
Cette procédure est d'abord un moyen de pression sur le propriétaire. Le transfert de propriété n'est pas la priorité et n'a lieu que dans un second temps, si le propriétaire ne se manifeste pas.
Je remercie le RDSE car cette procédure répond à un problème souvent rencontré par les maires qui doivent payer des travaux sans pouvoir être remboursé par les propriétaires. C'est une alternative aux astreintes administratives de la loi ELAN.
L'article unique de la proposition de loi originelle apportait plusieurs modifications ponctuelles. D'abord, en supprimant la condition d'insertion au périmètre d'agglomération de la commune : toute la commune était concernée. Ensuite, l'expropriation pouvait se faire au profit de l'EPCI sans attendre la constitution du dossier. Enfin, seuls les projets en lien avec l'habitat auraient pu ouvrir droit à expropriation simplifiée, avec la possibilité de constituer une réserve foncière.
La commission des lois souscrit au souhait de simplification. L'article 18 de l'avant-projet de loi 4D va en ce sens.
La commission est très favorable à la suppression de l'exigence relative au périmètre d'agglomération de la commune. L'abandon de parcelles est préjudiciable lorsqu'elles sont isolées ou à l'entrée des villes, avec un effet d'image très négatif. On pourrait créer des locaux techniques et des réserves foncières : c'est une opportunité à saisir.
La commission des lois est aussi très favorable à ce que l'EPCI puisse bénéficier de l'immeuble exproprié dès le début de la procédure.
En revanche, elle n'est pas favorable à la modification technique qui ouvre les catégories de projets pouvant donner lieu à déclaration d'état manifeste d'abandon, mais, ensuite, restreint l'accès à l'expropriation simplifiée, de fait, aux seuls projets d'habitat.
Dans le droit actuel, un chantier naval peut passer par une expropriation simplifiée puisqu'il s'agit d'un projet d'intérêt collectif. Avec la proposition de loi, il aurait fallu passer par une procédure d'expropriation classique. La commission des lois y a remédié et a prévu la possibilité de créer des réserves foncières.
Le seul amendement que je vous présenterai est rédactionnel.
Je vous invite à adopter ce texte pragmatique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du RDSE)
M. Joël Giraud, secrétaire d'État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité . - Cette proposition de loi est l'occasion de débattre d'un sujet au coeur des préoccupations des territoires ruraux. Les élus locaux ne ménagent pas leurs efforts pour améliorer l'attractivité des centres-bourgs. Pour avoir été maire pendant 27 ans, je peux en témoigner.
Chacun connaît, dans sa commune, des biens abandonnés qui se dégradent, des verrues qui ruinent les efforts de valorisation du centre-ville. La récupération de ces biens est souvent la clé de la redynamisation. Les dispositions du code de l'urbanisme l'autorisent mais doivent être améliorées.
En ce moment même, l'Assemblée nationale examine le titre IV de la loi Climat et résilience sur l'artificialisation des sols. Nous devons freiner l'étalement urbain, alors que les terres stockent 10 % des gaz à effet de serre et que nos concitoyens, souvent les plus modestes, souffrent de l'autosolisme auquel l'éloignement de l'habitsat les contraint. Nous devons modifier durablement nos territoires en recyclant les zones déjà urbanisées et en rendant les zones urbaines plus agréables à vivre.
Le Gouvernement est mobilisé pour revitaliser les territoires, à partir des villes petites et moyennes. Le programme Action coeur de ville concerne 222 villes, pour 5 milliards d'euros. Plus de 2 milliards d'euros ont déjà été engagés et 50 000 logements rénovés.
Le programme Petites ville de demain, lancé avec Jacqueline Gourault en octobre dernier à Barentin, concernera 1 624 centre-bourgs. Nous accompagnons leur revitalisation économique grâce au programme Territoires d'industrie, au plan France Très Haut Débit qui couvrira l'ensemble du territoire dès l'an prochain et nous réinstallons des services publics grâce aux maisons France Service.
Le projet de loi 4D, qui sera examiné en juillet au Sénat, favorisera l'opération de revitalisation des territoires. Nous modifierons la procédure de récupération des biens sans maître, pour baisser le seuil de trente à dix ans.
Je suis favorable à la proposition de loi, très proche de ce que nous avons prévu. En effet, la procédure doit s'appliquer à l'ensemble de la commune. Le recyclage des emprises évitera la consommation de terres agricoles.
Je suis également favorable à l'amendement du rapporteur. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Bernard Fialaire . - La mobilisation du foncier est un enjeu majeur pour les maires, afin de répondre à la demande croissante de logements et au souhait de revitaliser économiquement les communes. On déplore une sous-optimisation des terrains abandonnés.
La commune, l'intercommunalité ou le conseil départemental peuvent se saisir des biens manifestement non entretenus, sans enquête préalable, trois mois après la mise en demeure du propriétaire.
La proposition de loi corrige des dysfonctionnements en portant une atteinte limitée au droit de propriété, dans le respect du cadre juridique existant. L'objectif est la cessation de l'état manifeste d'abandon et non l'expropriation.
D'éventuels contentieux seront évités grâce à ce texte qui élargit le périmètre concerné et améliore l'esthétique des paysages. Un bien abandonné reste gênant, quelle que soit sa situation.
Cette proposition de loi aidera aussi les maires à réussir l'objectif de zéro artificialisation des sols et participera à la simplification voulue par le projet de loi 4D, que nous examinerons prochainement, je l'espère.
M. François Bonhomme, rapporteur. - Il arrive, c'est comme la vaccination !
M. Bernard Fialaire. - La procédure d'acquisition d'un bien sans maître est trop longue - trente ans - et doit être révisée.
Cette proposition de loi est très attendue par les élus locaux engagés dans la redynamisation de leur territoire. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER, RDSE et UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
Mme Cécile Cukierman . - Face aux grands textes du Gouvernement, l'initiative parlementaire est l'occasion d'évoquer la réalité des élus locaux. On songe à la proposition de loi sur les biens sectionnaux et communaux, source de réelles avancées.
Au quotidien, les biens abandonnés rendent difficile l'aménagement communal. Je salue le travail du rapporteur qui a élargi le périmètre au-delà du périmètre d'agglomération de la commune.
Nous avons tous en tête des bâtiments menaçant ruine, qui posent de réels problèmes. Avec cette proposition de loi, les communes pourront se réapproprier la maîtrise de ces biens.
Nous sommes vigilants à ce que les bâtiments d'habitation restent consacrés à cet usage, ou du moins servent l'intérêt général. Un terrain délabré est toujours à déplorer et mieux vaut qu'il accueille un local technique, à défaut de logements.
Le groupe CRCE votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et RDSE)
M. François Bonhomme, rapporteur. - Très bien.
M. Jean-Pierre Moga . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Ce texte bienvenu soutient les maires dans leurs opérations d'aménagement. Nous ne pouvons nous résoudre à la décrépitude des villages.
Cette proposition de loi fait suite aux lois SRU et ALUR. L'urbanisme et l'aménagement sont les deux versants de la vitalité des territoires. Grâce à ceux-ci, nous renforcerons leur dynamisme.
Dès lors, nous soutenons ce texte qui prend en compte la diversité de nos communes.
Je partage la position de la commission des lois qui ne souhaite pas restreindre l'accès à la procédure simplifiée.
Nous anticipons le projet de loi 4D dont l'article 18 traite de ce sujet ; nous débattrons également prochainement du projet de loi Climat et résilience dont une disposition porte sur le recyclage du foncier déjà artificialisé et la densification des tissus urbanisés. Alors que l'artificialisation des sols a augmenté de 70 % quand la population croissait de 20 %, ce texte est un point de départ bienvenu.
M. Hussein Bourgi . - Cette proposition de loi porte sur un sujet qui représente un véritable enjeu pour de nombreuses communes. Nous en partageons les objectifs. Nous avons tous, dans nos circonscriptions, des exemples de friches, hangars, bâtiments à l'abandon, autant de verrues face auxquelles les outils existants sont insuffisants.
Ce texte dote les élus locaux d'un nouveau levier à l'encontre des propriétaires en simplifiant la procédure.
Aujourd'hui, deux restrictions entravent l'action des maires : le périmètre d'agglomération et les raisons justifiant l'expropriation. La limitation au périmètre d'agglomération, qui date de 1989, ne se justifie plus car, en réalité, il y a peu de terrains provisoirement en friche dans une zone agricole. Il fallait faire sauter le verrou.
Les auteurs de la proposition de loi ont aussi voulu élargir la liste des fins justifiant l'expropriation par la procédure simplifiée. À l'origine, ces objets et motifs étaient tout bonnement supprimés, ce qui créait une insécurité juridique. Le recours à l'expropriation - atteinte au droit constitutionnellement garanti de propriété - doit être motivé par l'intérêt général. Dans sa sagesse, la commission des lois a apporté des garanties auxquelles groupe SER souscrit pleinement.
La commission a aussi prévu que l'expropriation se fasse au profit de l'intercommunalité, ce qui est, là aussi, bienvenu puisqu'elle a plus de moyens que la commune.
Nous partageons la philosophie du RDSE et saluons le travail du rapporteur. Le groupe SER votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur le banc de la commission.)
M. Pierre-Jean Verzelen . - L'abondance de textes rend difficile la compréhension des normes en vigueur. Aussi cette simplification de la procédure est-elle à saluer.
La procédure actuelle autorise la commune, l'intercommunalité ou le conseil départemental à réaliser une expropriation simplifiée pour créer des logements sociaux ou des projets d'intérêt collectif de restructuration, rénovation ou aménagement.
Cette proposition de loi remédie à des dysfonctionnements dans la mise en oeuvre de la procédure. D'abord, elle élargit le périmètre au-delà de l'agglomération. Le texte distingue deux régimes : une procédure simplifiée sous enquête publique préalable pour certains biens, et une procédure de droit commun relevant du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique pour d'autres.
La commission des lois est revenue sur une disposition restreignant le périmètre de l'expropriation simplifiée, sans quoi la proposition de loi perdait de sa pertinence.
Toujours attentif aux politiques des communes, le groupe INDEP votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
M. Guy Benarroche . - Cette proposition de loi étend la procédure d'expropriation des biens en état d'abandon manifeste dans son périmètre et dans ses motifs. C'est un réponse bienvenue à un problème concret.
Une alerte cependant : le droit limite les finalités d'utilisation des biens saisis à l'habitat ou à des projets d'intérêt collectif ; la proposition de loi supprime ces limites pour faciliter les opérations de valorisation économique des territoires.
Alors que l'Assemblée nationale débat de la loi Climat et résilience, cette réécriture ne facilite-t-elle pas l'expropriation de friches hors agglomération pour construire des entrepôts, alors qu'elles pourraient servir à l'agriculture ?
L'arrêt de l'artificialisation des sols, voire la désartificialisation, sont des leviers majeurs de la lutte contre le changement climatique.
Chers collègues qui défendez si ardemment le droit de propriété, pourquoi y déroger si facilement ici ? Nous devons être prudents. On évoque une simple publicité par affichage ou dans les journaux locaux quand l'adresse du propriétaire est inconnue.
Le droit de propriété vous semble beaucoup plus important quand il s'agit de réquisitionner des logements inoccupés alors qu'il y a pénurie que quand il y va de la valorisation d'activités économiques. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)
Le droit de ne rien faire de son bien est donc à géométrie variable : pas question d'héberger des mal-logés...
En raison de ces sérieuses réserves, le GEST ne votera pas ce texte. (Marques de déception sur diverses travées)
M. Ludovic Haye . - Cette proposition de loi est bienvenue et amorce un débat sur un levier important pour la valorisation de nos territoires. J'en remercie le RDSE.
La procédure d'expropriation des biens en état d'abandon manifeste permet aux communes d'accéder à la propriété et de répondre aux nécessités de leur territoire en matière d'habitat ou d'aménagement, et de mettre fin à des situations ubuesques de biens vides, non entretenus, sans perspective d'évolution.
Ce texte s'inscrit dans la continuité des lois ALUR et ELAN qui facilitent déjà les expropriations. Le texte initial créait un régime hybride d'expropriation, aux effets incertains. La commission l'a modifié à bon escient.
Nous approuvons les trois apports de la proposition de loi : l'extension de la procédure de déclaration en état d'abandon manifeste au-delà du périmètre d'agglomération de la commune, l'extension à la finalité de constitution d'une réserve foncière, et l'ajout des EPCI comme bénéficiaires potentiels de l'expropriation.
La procédure d'expropriation simplifiée de ces biens répond très concrètement aux besoins des maires, souvent contraints de se substituer aux propriétaires défaillants sans pouvoir se faire rembourser.
Le RDPI votera ce texte, sachant que le débat se poursuivra dans la loi 4D. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Dominique Estrosi Sassone . - En 2017, Jacques Mézard, alors ministre du logement, reconnaissait que la procédure d'expropriation de biens sans maître était peu opérationnelle. Sa proposition de loi y remédie, et je salue le travail de simplification opéré par le rapporteur François Bonhomme.
Quelle commune ne compte pas de maison vacante ou de terre abandonnée ? Cette situation suscite désarroi et défaitisme. Pourtant, des moyens existent pour permettre aux communes de redonner vie à un patrimoine en déshérence, sans remettre en cause les fondements du droit de propriété.
La multiplication des arrêtés de péril, les dépenses d'entretien jamais recouvrées, les risques de squat font obstacle à une politique d'urbanisme et dégradent un centre-bourg ancien. D'où l'intérêt de la procédure d'expropriation des biens en état d'abandon manifeste.
Cette proposition de loi élargit le périmètre d'intervention au-delà de l'agglomération. Cette simplification est bienvenue dans un contexte de crise du logement et d'effondrement de la construction, car la commune pourra revendre le bien à un bailleur social ou à un particulier.
L'objectif de création de réserves foncières encouragera les opérations d'urbanisme ou de revitalisation du territoire qui nécessitent beaucoup de foncier.
Dans la perspective de la lutte contre l'artificialisation des sols, cette procédure permettra aux communes de se réapproprier des espaces urbanisés.
Nous en reparlerons dans la loi 4D. Il faudra aussi se pencher sur l'identification des héritiers, qui prend beaucoup de temps et coûte cher aux communes, notamment rurales.
Le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, INDEP et RDSE)
Mme Nadia Sollogoub . - Le RDSE nous offre de traiter ce soir un vrai sujet de communes : un sujet concret, un sujet d'élus ; un sujet casse-tête aussi : la ruine moche, parfois dangereuse, qui conduit les voisins à venir râler dans le bureau du maire. Celui-ci se mue en Sherlock Holmes pour retrouver la piste des propriétaires. Parfois on les trouve, ils ne font rien - ne le veulent ou ne le peuvent. Et on en a pour des années.
L'édifice est une verrue, on finit par ne voir que lui. Il est insupportable de voir un espace précieux occupé pour rien.
D'où l'intérêt de pouvoir recycler les biens en état d'abandon manifeste - mais c'est un parcours de l'élu combattant.
Le groupe UC votera ce texte, qui comporte des avancées. (M. Antoine Lefèvre s'en réjouit.)
J'en profite pour inviter à faire mieux connaitre la possibilité pour les élus d'utiliser la DETR pour la démolition de bâtiments abandonnés. Pourquoi ne pas la mobiliser également pour les travaux urgents que les municipalités doivent parfois engager en lieu et place de propriétaires défaillants, et pour couvrir le coût des démarches et procédures ?
Ce texte envoie un message musclé aux propriétaires absents. Pour faire disparaitre les biens abandonnés, il faut des lois et des aides financières. L'économie circulaire de l'habitat doit se mettre en place, avec l'aide du Gouvernement.
Mme Catherine Belrhiti . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Cette proposition de loi démontre la volonté du Sénat de simplifier la vie des collectivités territoriales.
Nous sommes régulièrement interpellés par nos maires sur le problème de ces biens délaissés. La négligence, l'éloignement, les problèmes successoraux font que, non entretenus, ils se dégradent, empêchant les municipalités d'aménager l'espace.
La procédure d'expropriation des biens en état d'abandon manifeste permet de faire pression sur le propriétaire, qui a trois mois pour se manifester avant notification de l'état d'abandon définitif et éventuelle expropriation.
La commission des lois a amélioré le texte. Elle a conservé l'extension du périmètre au-delà de l'agglomération et la possibilité pour l'EPCI de bénéficier de l'expropriation. En revanche, elle n'a pas souhaité réserver la procédure d'expropriation simplifiée aux seules opérations liées à l'habitat.
Le rapporteur a judicieusement élargi la liste des projets justifiant la procédure, tout en sécurisant le dispositif et en veillant au respect du droit de propriété. Je rends hommage à ce travail qui permettra aux maires de valoriser leur territoire. Cette proposition de loi est un bon prélude à la loi 4D. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Antoine Lefèvre . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous les conditions d'une juste et préalable indemnité », selon l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
L'impératif de nécessité publique conduit désormais à faire évoluer le droit et à renforcer les prérogatives des collectivités territoriales.
Les lois ALUR puis ELAN, la création de l'ANCT ont fait évoluer le droit de l'urbanisme.
Les biens abandonnés créent des retombées délétères pour les communes. Ces biens sans maître, qui immobilisent des parcelles parfois précieuses, nuisent à l'attractivité et à l'image de la commune, favorisent le développement des squats et font peser une responsabilité périlleuse sur les maires.
Enrichir l'arsenal des maires est de bon sens. L'extension du périmètre est positive, à l'heure de la montée en compétence des intercommunalités, de même que l'inclusion des EPCI dans les bénéficiaires des terrains expropriés. Cela assurera une plus grande connexion entre les territoires. L'objectif de création de réserve foncière est une bonne idée du rapporteur.
Ces propositions apportent une réelle plus-value. Le groupe Les Républicains votera ce texte d'avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du RDSE)
La discussion générale est close.
Discussion de l'article unique
M. Patrick Chaize . - Je regrette que l'article 40 ait été opposé à mon amendement qui étendait la procédure d'expropriation de biens en état d'abandon manifeste aux parcelles boisées non exploitées. Elles sont potentiellement dangereuses pour la sécurité des citoyens et peuvent gêner l'exploitation des forêts communales.
Il faudra y revenir dans le cadre de la loi 4D.
M. Marc Laménie . - Je salue l'initiative du RDSE et le travail de la commission des lois. Ce problème de biens vacants sans maîtres concerne de nombreuses communes. Au bout de quelques années, une maison à l'abandon est rapidement squattée. Ce sont des verrues, en effet. Malheureusement, les maires sont face à un vide juridique, notamment quand il s'agit d'une succession en indivision. Le partenariat avec les notaires et les services de l'État est indispensable. Le financement par le DETR ou la DSIL doit être facilité.
Cette proposition de loi permettra d'aménager les coeurs de villes et e villages, de rendre nos communes plus accueillantes.
M. François Bonhomme, rapporteur. - C'est tout à fait ça.
M. Marc Laménie. - Je soutiendrai ce texte.
M. Daniel Gremillet . - Je me réjouis de cette proposition de loi, très équilibrée sur le droit de la propriété. Elle permettra de régler le problème de la fiscalité différente entre le bâti à l'abandon et les anciens corps de ferme. Car les parties habitables et non habitables sont traitées de manière différente. Merci au RDSE !
M. le président. - Amendement n°4, présenté par M. Bonhomme, au nom de la commission.
I. - Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) Le mot : « organisme » est remplacé par les mots : « établissement public de coopération intercommunale ou d'un organisme » ;
II. - Alinéa 9
1° Après les mots :
3° , les mots : «
insérer le mot :
la
2° Remplacer les mots :
commune, l'établissement public de coopération intercommunale, l'organisme ou le concessionnaire mentionné au premier alinéa de l'article L. 2243-3
par les mots :
le bénéficiaire
M. François Bonhomme, rapporteur. - Amendement rédactionnel. Il précise que la déclaration d'état manifeste d'abandon ne peut être prononcée que pour les EPCI détenant une compétence habitat ou aménagement correspondant aux opérations justifiant l'expropriation, et que les règles fixant la forme des arrêtés pour déclarer l'utilité publique prennent en considération toutes les catégories de bénéficiaires.
M. le président. - Sous-amendement n°5 à l'amendement n 4 de M. Bonhomme, au nom de la commission, présenté par le Gouvernement.
Amendement n° 4, alinéa 3
Remplacer les mots :
d'un organisme
par les mots :
de tout autre organisme
M. Joël Giraud, secrétaire d'État. - Ce sous-amendement est purement rédactionnel. N'excluons pas un département du bénéfice de l'expropriation.
Avis favorable à l'amendement n°4 sous-amendé.
M. François Bonhomme, rapporteur. - Même si la commission des lois n'a pu se prononcer, avis favorable, à titre personnel, au sous-amendement.
Le sous-amendement n°5 est adopté.
L'amendement n°4, sous-amendé, est adopté.
L'article unique constituant l'ensemble de la proposition de loi est adopté.
(Applaudissements)
Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 15 avril 2021, à 10 h 30.
La séance est levée à minuit quinze.
Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du jeudi 15 avril 2021
Séance publique
De 10 h 30 à 13 heures et de 14 h 30 à 16 heures
Présidence : M. Pierre Laurent, vice-président M. Georges Patient, vice-président
Secrétaires de séance : M. Loïc Hervé - Mme Marie Mercier
(Ordre du jour réservé au groupe INDEP)
1. Proposition de loi visant à orienter l'épargne des Français vers des fonds souverains régionaux, présentée par Mme Vanina Paoli-Gagin et plusieurs de ses collègues (n°385, 2020-2021)
2. Proposition de loi d'expérimentation visant à favoriser le retour à l'emploi des bénéficiaires du Revenu de Solidarité Active (RSA), présentée par M. Claude Malhuret et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°518, 2020-2021
De 16 heures à 20 heures
Présidence : M. Georges Patient, vice-président
(Ordre du jour réservé au groupe CRCE)
3. Proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution, invitant le Gouvernement à envisager la poursuite de la procédure de ratification du CETA, présentée par de M. Fabien Gay et plusieurs de ses collègues (n°249 rect., 2020-2021)
4. Proposition de loi visant à garantir effectivement le droit à l'eau par la mise en place de la gratuité sur les premiers volumes d'eau potable et l'accès pour tous à l'eau pour les besoins nécessaires à la vie et à la dignité, présentée par Mme Marie-Claude Varaillas, M. Gérard Lahellec et plusieurs de leurs collègues (n°375, 2020-2021)