Ratification d'ordonnances pour faire face à la covid-19 (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19.

Discussion générale

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Ce projet de loi ratifie quatre ordonnances prises pour faire face à l'épidémie sur le fondement de la loi du 23 mars 2020.

Vous vous souvenez tous du contexte d'alors : un virus inconnu avait mis notre pays, notre planète, à l'arrêt. Alors députée, j'avais pu admirer l'agilité à toute épreuve de notre administration. Grâce à elle, mais aussi aux travaux des parlementaires, notre économie a tenu, un an après -  il est des anniversaires plus joyeux.

Il vous est demandé de ratifier le cadre juridique du fonds de solidarité, doté de 12 milliards d'euros en 2020, qui a permis à près de deux millions d'entreprises de garder la tête hors de l'eau.

Il vous est également proposé de ratifier l'ordonnance relative à l'octroi d'avances en compte courant par les organismes de placement collectif (OPC) de capital investissement. Ces fonds ont ainsi pu dépasser le plafond légal des avances qu'ils peuvent consentir aux entreprises dont ils sont actionnaires, en complément des moyens publics.

L'ordonnance sur la commande publique permet aux entreprises en redressement judiciaire de soumissionner aux marchés publics et ouvre aux PME un accès privilégié aux marchés publics globaux en fixant à 10 % la part d'exécution minimale qui sera confiée par le soumissionnaire à des PME. Ces deux mesures, qui figurent dans la loi ASAP, traduisent notre engagement pour le tissu économique de proximité. La commande publique doit être un accélérateur de la relance. Jusqu'au 31 décembre 2023, l'appréciation de la capacité économique et financière des soumissionnaires ne pourra porter sur la période de la pandémie : les dérèglements de la période sont le fait du virus et non du chef d'entreprise.

J'en arrive à l'article 3 qui ratifie l'ordonnance portant réorganisation de notre banque publique d'investissement, Bpifrance. L'ordonnance a pour but de donner à l'établissement de crédits une solvabilité supplémentaire pour qu'il puisse jouer pleinement son rôle au bénéfice du financement des entreprises. Sans cette opération, le lancement d'un prêt vert de 1,5 milliard d'euros d'investissements pour les entreprises dans leur transition écologique et énergétique aurait mis la banque sous tension prudentielle. En ratifiant l'ordonnance du 17 juin 2020, vous sécuriserez juridiquement le dispositif de Bpifrance et les marchés, qui reposent sur la confiance.

Tous, nous voulons aider nos entreprises dans ce contexte particulièrement difficile et les aider à aborder la reprise et la relance. (M. François Patriat applaudit.)

M. Bernard Delcros, rapporteur de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Ce projet de loi ratifie plusieurs ordonnances prises dans le cadre de la première loi d'urgence. Elles portent sur le fonds de solidarité, la commande publique, les avances des fonds d'investissement et la réorganisation de Bpifrance.

L'article premier ratifie l'ordonnance du 10 juin 2020 sur le fonds de solidarité. Son soutien aux PME a été vital : 15 milliards d'euros accordés à deux millions d'entreprises. Les prêts garantis par l'État (PGE), l'activité partielle et les exonérations de cotisations sociales sont des leviers essentiels pour sauver l'économie et l'emploi. Avec les PGE, 132 milliards d'euros de prêts ont été accordés par les banques. Si ce dispositif n'a aucun impact sur l'État pour le moment, le risque de défaut de prêt serait de 3 à 7 %, soit un coût de 5 à 10 milliards.

L'activité partielle a préservé l'emploi : 28 milliards d'euros pour huit millions de salariés. Les exonérations de charges patronales s'élèvent à 4 milliards d'euros en 2020.

Ces mesures étaient nécessaires et ont prouvé leur efficacité. Des questions demeurent néanmoins : les entreprises pourront-elles rembourser leur dette Covid ?

L'article 2 ratifie l'ordonnance du 17 juin 2020 sur la commande publique : les entreprises faisant l'objet d'un redressement judiciaire pourront se porter candidates aux marchés publics ; les PME se verront réserver 10 % des commandes publiques ; la baisse du chiffre d'affaires due à la crise sanitaire ne sera pas prise en compte par les acheteurs publics. Ces mesures permettront aux acheteurs publics, en particulier aux collectivités locales, de soutenir les entreprises et l'emploi dans les territoires.

L'article 4 ratifie l'ordonnance du 17 juin 2020 sur l'octroi d'avances en compte courant aux entreprises en difficulté par divers véhicules de capital investissement.

J'en arrive à l'article 3 qui concentre toute l'attention : il ratifie l'ordonnance de réorganisation de Bpifrance, qui justifierait à elle seule ce projet de loi. Il convient en effet de sécuriser juridiquement ce dispositif car l'ampleur de l'ordonnance est plus large que le champ de l'habilitation de mars. En outre, notre validation rassurera les investisseurs et la Banque centrale européenne.

Depuis sa création en 2012, la structure reposait sur une société holding, Bpifrance SA, chapeautant trois entités principales : Bpifrance financement, établissement de crédit, Bpifrance participations, entité intervenant en fonds propres, et Bpifrance assurance export.

La réorganisation consiste en une fusion-absorption de Bpifrance SA par l'établissement de crédit Bpifrance financement, qui devient la société de tête. Cela permettra de multiplier les fonds propres de la structure par cinq et de simplifier son organisation et sa gouvernance. La commission des finances approuve cette réorganisation.

Toutefois, les modalités retenues par le Gouvernement emportent plusieurs conséquences : jusqu'à présent, la société de tête était intégralement publique, partagé par moitié entre l'État et la Caisse des dépôts et consignations. La filiale Bpifrance financement était, quant à elle, détenue à 91 % par la société de tête et à 9 % par des investisseurs privés, essentiellement des banques françaises. L'absorption par Bpifrance financement de la société de tête se traduit par une modification des conditions de détention : 98,6 % du capital est détenu à parité par l'État et la Caisse des dépôts, et 1,4 % par des investisseurs privés. L'ordonnance de juin fixait un plancher de 95 % à la détention publique. Ce taux a permis de préserver une certaine souplesse alors que les valorisations respectives des deux entités fusionnées n'étaient pas définitivement arrêtées. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'intérêt de sécuriser un haut niveau de détention publique ?

La seconde conséquence concerne les effets de la réorganisation sur les comptes publics. L'opération permet en effet de sortir Bpifrance du périmètre des administrations publiques prises en compte pour la dette au sens de Maastricht.

Enfin, les fonds de garantie dédiés aux prêts aux PME sont abondés depuis plusieurs années par des redéploiements de crédits et par des recyclages de dividendes. La fusion pourrait aboutir à contredire le principe d'annualité budgétaire. Mon amendement prévoit d'informer le Parlement sur le financement de ces garanties.

Sous réserve de ces observations, la commission des finances propose d'adopter ce projet de loi. (Mme Nathalie Goulet applaudit.)

M. Paul Toussaint Parigi .  - (M. Daniel Salmon applaudit.) Nous devons être vigilants sur l'usage excessif des ordonnances, qui affaiblissent la démocratie et le rôle du législateur.

L'urgence ne doit pas empêcher le contrôle démocratique par la représentation nationale, ni faire dériver le régime sanitaire vers un régime d'ordonnances.

De nombreuses dispositions, prises dans le cadre de la lutte contre le Covid, auraient déjà dû être ratifiées. Plus que jamais, en cette période où l'urgence devient permanente, il est nécessaire de renforcer la relation de confiance entre représentants et représentés, et de ne point fouler aux pieds le dialogue et la concertation.

Est-il nécessaire de rappeler que concertation et débat démocratique ne sont pas contradictoires avec une décision ordonnée ?

Si la création du fonds de solidarité était nécessaire, il faudrait aussi le prolonger compte tenu de la situation sanitaire.

Mais les conditions d'éligibilité, certes élargies à l'automne, ont perdu en clarté et en visibilité. Il faudrait territorialiser le dispositif pour mieux accompagner les entreprises et prendre en charge des situations non prévues.

De nombreuses collectivités territoriales ont distribué des aides spécifiques aux entreprises.

Nous saluons le report d'un an des premiers remboursements du PGE. Mais, face à une dette alourdie, quid du remboursement par les entreprises en difficulté ? Il faudrait pérenniser le critère d'accès des PME à la commande publique et lui adjoindre des critères sociaux et écologiques.

Je terminerai par la réorganisation de la BPI dont le renforcement des moyens d'investissement pour les entreprises est un motif de satisfaction puisque le groupe doit distribuer près de 2,5 milliards d'euros de prêts verts destinés aux PME et ETI afin qu'elles réalisent des économies d'énergie.

J'appelle le Gouvernement à prendre en compte la spécificité de la Corse dans la crise, en raison de l'insularité.

Le GEST votera ce projet de loi que la menace d'un troisième confinement justifie d'autant plus.

M. Bernard Buis .  - (M. Didier Rambaud applaudit.) Un an après la promulgation de la loi d'état d'urgence sanitaire, ce projet de loi est l'occasion de prendre un peu de recul sur cette situation exceptionnelle, qui nous a conduits à confier au Gouvernement le pouvoir de légiférer par ordonnance.

Le 12 mars était décidée la fermeture des établissements scolaires, le 14 mars celle de tous les lieux publics non essentiels, et le 17 mars à midi nous étions en confinement total : la France entrait alors dans une longue période d'incertitudes...

Dès le 18 mars, le projet de loi d'état d'urgence sanitaire était déposé au Sénat tandis que l'Assemblée nationale examinait le premier projet de loi de finances rectificative, ce dernier étant adopté définitivement le 20 mars.

Le 23 mars, les deux lois étaient promulguées. Je rends hommage à la célérité des services de l'État et du Parlement qui ont travaillé nuit et jour.

Durant les trois premiers mois, 62 ordonnances ont été prises pour soutenir les entreprises, les collectivités territoriales et l'ensemble des Français. Ce projet de loi en ratifie quatre. La première est celle du 10 juin sur le fonds de solidarité qui a permis de soutenir deux millions d'entreprises grâce à 12 milliards d'euros. Dans la Drôme, 120 millions ont été distribués à 17 215 entreprises. Le rapporteur de l'Assemblée nationale a élargi la ratification aux autres ordonnances portant sur le fonds de solidarité.

La deuxième ordonnance assouplit les conditions d'accès des PME à la commande publique. La troisième a réorganisé Bpifrance pour lui permettre d'octroyer davantage de prêts aux entreprises. La quatrième permet d'octroyer plus d'avances par des sociétés de capital-investissement aux entreprises en difficulté en raison de la crise.

Nous nous réjouissons de ratifier ces ordonnances pour en sécuriser les dispositifs. Nous nous félicitons aussi de l'ampleur de la réponse du Gouvernement pour faire face à la crise.

Le groupe RDPI votera ce texte. (MM. François Patriat et Didier Rambaud applaudissent.)

M. Jean-Claude Requier .  - Ce projet de loi ne devrait pas susciter de passions, même si son objet est crucial. Plus d'une centaine d'ordonnances ont été adoptées l'an dernier, dont 62 sur le fondement de la loi d'état d'urgence sanitaire.

Le recours aux ordonnances était important sous le précédent quinquennat, avec l'état d'urgence lié aux attentats terroristes et la crise des frondeurs.

Le Gouvernement Philippe y a eu également recours, pour la réforme du code du travail de 2017-2018 notamment.

Une marche supplémentaire a été franchie l'année dernière. Les ordonnances seront-elles toutes ratifiées ? Quelles sont les marges réelles de manoeuvre des parlementaires ?

Ce projet de loi avait été déposé en juillet dernier. Nous regrettons l'inscription tardive à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

La ratification de l'ordonnance relative au fonds de solidarité va de soi. La première ordonnance sur le sujet, celle du 25 mars 2020, avait été succincte ; il avait fallu attendre la publication du décret quelques jours plus tard pour connaître le détail du fonctionnement de ce fonds.

L'article 2 sur la commande publique ne pose pas non plus de problème : des mesures exceptionnelles ont ainsi pu être prises pour faire face à l'arrêt des chantiers lors du premier confinement.

L'article 3 ratifie l'ordonnance du 17 juin sur Bpifrance, avec la fusion de la SA Bpifrance et de sa filiale Bpifrance financement. Le nouvel ensemble disposera de fonds propres plus importants, avec cependant une participation publique qui reste très majoritaire. La dette de Bpifrance sera néanmoins sortie de celle des administrations publiques au sens de Maastricht.

La dernière ordonnance concerne les octrois d'avances en compte courant aux entreprises en difficulté.

L'Assemblée nationale a adopté ce projet de loi en apportant des améliorations, notamment sur trois ordonnances relatives au fonds de solidarité. Le groupe RDSE votera ce texte. (M. Bernard Fialaire applaudit.)

M. Pascal Savoldelli .  - Le recours abusif aux ordonnances contourne le débat parlementaire.

Le Gouvernement a décidé de régler la crise sanitaire par ordonnance : 62 ont été prises ; vous nous en soumettez quatre ; quid des 58 autres ? (Sourires)

L'urgence peut justifier le recours à ce dispositif mais ces habilitations sont floues et larges. Vous réorganisez complètement Bpifrance alors que vous n'étiez autorisé qu'à « renforcer sa capacité à accorder des garanties ». Vous dépossédez Bpifance au profit d'acteurs privés. Les règles du débat parlementaire nous contraignent à valider cette décision stratégique : nous saurons nous en souvenir.

L'objectif de permettre à la Bpifrance d'accorder massivement des prêts aux entreprises est louable mais nous invite à beaucoup de prudence : 20 % des entreprises - 650 000 - se sont endettées à des taux d'intérêt supérieurs à 2 % alors que l'État emprunte à cinquante ans à - 0,14 % !

Les banques s'enrichissent pendant la crise avec la complicité de l'État qui garantit les prêts à 90 % ! Le risque de défaut pourrait atteindre 7 % des souscripteurs. Les banques pourraient réaliser 2 milliards d'euros de bénéfices tandis que l'État couvrira 8 milliards d'euros de pertes...

Les crédits de Bpifrance risquent d'échapper au contrôle du Parlement.

Pour faire face à la crise sanitaire, nous avons salué la création du fonds de solidarité. Pour autant, ce dispositif souffre encore d'une grande complexité. Les entreprises subissent les conséquences des incertitudes qui l'entourent. Dans mon département du Val-de-Marne, depuis le 11 février, 19,6 % des entrepreneurs individuels, soit 4 500 personnes, n'ont toujours pas touché le fonds de solidarité de décembre. En outre, un cinquième des entreprises en auraient bénéficié à tort.

Pour pallier les carences de personnel, vous devez recruter des contractuels du fisc pour récupérer 30 millions.

Notre amendement - jugé irrecevable - prévoyait une compensation de la perte du chiffre d'affaires, et non l'aide inéquitable de 1 500 euros.

Finissons-en avec le seuil qui exclut une entreprise n'ayant perdu « que » 49 % de son chiffre d'affaires !

Ce projet de loi comprend une partie des réponses à la crise. Si nos amendements sont retenus, nous voterons le texte ; sinon, le groupe CRCE s'abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Thierry Cozic .  - Ce projet de loi fait l'objet d'un consensus assez large. La situation de crise l'exige. Ce n'est jamais de gaieté de coeur que nous déléguons notre pouvoir à l'exécutif, mais l'urgence nous y contraint.

La première ordonnance prolonge le fonds de solidarité, outil incontournable pour soutenir notre tissu économique.

La deuxième comporte des dérogations temporaires au code de la commande publique pour soutenir les opérateurs économiques les plus fragilisés.

La troisième renforce la solidité financière de Bpifrance qui va jouer un rôle prépondérant dans le cadre du plan de relance. L'établissement a fusionné sa holding de tête et sa filiale Bpifrance financement ; le niveau des fonds propres et sa capacité de financement des entreprises en seront accrus. Mais nous ne sommes pas dupes des jeux d'écriture qui nuisent à la sincérité budgétaire et sont contraires au principe d'universalité. Je note qu'un amendement du rapporteur y remédie.

La quatrième ordonnance vise à répondre aux besoins de trésorerie des entreprises pendant la crise.

Dès l'élection présidentielle, puis avec la crise des gilets jaunes et désormais la crise sanitaire, on observe un recul des prérogatives du Parlement et une pratique gouvernementale visant à maintenir ce dernier à distance.

« La première raison de la servitude volontaire, c'est l'habitude », écrivait La Boétie. Cette habitude dans laquelle nous sommes plongés depuis un an, au rythme des « 20 heures » anxiogènes, annonçant couvre-feu, confinement, déconfinement, nouveau couvre-feu...

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Qu'auriez-vous fait ?

M. Thierry Cozic.  - La Ve République autorise le Président de la République à prendre des décisions unilatérales, décrétées être l'intérêt commun, mais qui ruinent la politique au sens de l'action publique, comme bien commun.

Je ne dis pas que le Gouvernement a failli, mais souligne que les grands absents du processus décisionnel sont les parlementaires, remplacés par un conseil de défense qui n'a aucune onction démocratique.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Comme nous tous !

M. Thierry Cozic.  - Le rapport sur la dette dite Covid a été confié à une commission extraparlementaire, et non à nos commissions des finances. Je m'étonne que le Gouvernement n'en ait pas directement chargé le cabinet McKinsey !

On essaie de nous convaincre qu'entre le Président de la République et le Rassemblement national, il n'y a pas d'alternative. Le présidentialisme est au régime présidentiel ce que l'intégrisme est aux religions, l'absolutisme aux monarchies, le sectarisme aux convictions. La République est aux mains du président. (Mme la secrétaire d'État s'exclame.)

Trop d'ordonnances tuent sans aucun doute la démocratie parlementaire. Inutile de nous renvoyer aux gouvernements Rocard : c'était il y a très longtemps et les circonstances étaient très différentes.

Les délais - dix mois après l'adoption du projet de loi d'habilitation - montrent que vous considérez le Parlement comme une caisse enregistreuse.

« Autant l'union fait la force, autant la discorde expose à une prompte défaite », disait Ésope.

Parce que nous ne voulons pas de défaite pour la France, le groupe SER votera ce texte. (M. Julien Bargeton ironise.) Mais il faudra rapidement revenir à un fonctionnement du Parlement plus conforme à l'esprit de notre Constitution : le parlementarisme rationalisé n'est pas un parlementarisme au rabais. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Stéphane Sautarel .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La loi d'urgence économique du 23 mars 2020 a autorisé le Gouvernement à prendre des ordonnances pour faire face à la crise. Depuis, 62 ordonnances ont été publiées. Ce projet de loi nous propose d'en ratifier quatre.

L'article premier ratifie l'ordonnance relative au fonds de solidarité qui a permis de soutenir les PME et TPE à hauteur de 13 milliards d'euros.

L'article 2 ratifie l'ordonnance du 17 juin 2020 sur la commande publique, dont l'accès sera ouvert aux entreprises en redressement judiciaire : c'est une mesure de simplification bienvenue. Les PME de proximité auront un accès privilégié aux marchés publics, avec une part minimale de 10 % du marché, et ce jusqu'au 31 juillet 2021. Enfin, la baisse du chiffre d'affaires liée à l'épidémie ne pourra pas être prise en compte par les acheteurs publics.

L'article 3 ratifie l'ordonnance portant réorganisation de Bpifrance, qui permettra d'augmenter le volume de prêts accordés aux entreprises. Cette mesure avait été censurée par le Conseil constitutionnel comme cavalier législatif dans le cadre du projet de loi ASAP.

Enfin, l'article 4 ratifie l'ordonnance sur les avances en compte courant accordées aux entreprises en difficulté par les OPC de capital-investissement et les sociétés de capital-risque qui en sont actionnaires, en portant le plafond à 20 % de leur actif jusqu'en juin 2022. Un débat sur les quasi-fonds propres des entreprises et le recours aux prêts participatifs mériterait d'être engagé.

Les ordonnances vont dans le bon sens : le groupe Les Républicains votera le texte, conformément aux recommandations de notre commission des finances. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Pierre Médevielle .  - Il y a un an, jour pour jour, les journaux annonçaient le premier décès de la covid en France. Personne n'aurait alors imaginé que nous aurions, un an après, à déplorer plus de 80 000 morts et une récession inédite depuis 1945.

Le 14 mars, moins d'un mois après, le premier confinement était décrété ; le 25 mars, une ordonnance créait le fonds de solidarité pour aider les petites entreprises face à la crise.

Le Parlement a permis au Gouvernement d'agir rapidement et efficacement, par voie d'ordonnances.

Loin de se résorber, la pandémie s'est installée, et nous devons adapter nos réponses à la crise sanitaire. Depuis la création du fonds de solidarité, les critères d'éligibilité, le niveau d'intervention, la durée n'ont cessé d'évoluer. Certes, les entreprises fermées demandent avant tout à rouvrir, mais tous saluent ce dispositif qui est monté en charge. Il faut poursuivre, notamment en étendant la prise en charge de certains coûts fixes, en fonction des secteurs.

L'article 2 s'inscrit dans cette même logique de soutien à l'économie de nos territoires, via le puissant levier qu'est la commande publique. Les assouplissements prévus sont pertinents ; le Sénat les avait déjà adoptés dans la loi ASAP. Ces mesures sont aujourd'hui plus salutaires que jamais.

Je soutiens l'objectif de renforcer les fonds propres de Bpifrance, jusqu'à atteindre une capacité de financement de 50 milliards d'euros d'ici 2024. Mais cette restructuration ne doit pas nous engager sur le chemin de la dette. Plus que jamais, le sort de nos finances publiques dépendra de la bonne santé de nos entreprises, qui ont contracté des prêts garantis par l'État, et du respect de nos engagements européens.

Le groupe INDEP votera ce texte, nouvelle pierre à l'édifice de la relance. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Sylvie Vermeillet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Cette crise sanitaire est inédite, ses conséquences économiques considérables. Entre mars et juin 2020, 62 ordonnances ont été prises, notamment dans le domaine économique et financier. Les quatre qui nous sont soumises aujourd'hui sont particulièrement importantes.

La première est relative au fonds de solidarité, remodelé à plusieurs reprises depuis sa création. Au 16 février, il a soutenu deux millions d'entreprises, pour environ 15 milliards d'euros, dont plus de 6 200 entreprises dans le Jura.

La réponse de l'État a été rapide, diversifiée et massive, avec un large panel d'aides pour permettre aux entreprises de surmonter la crise et d'amorcer la reprise. Quid de l'éventuelle annulation des charges sociales et fiscales ?

Les agents de la DGFiP s'emploient à débloquer rapidement les aides, mais il faut aussi un contrôle rigoureux afin de traquer toute fraude. Nous nous réjouissons de l'équilibre trouvé entre efficacité économique et équité sociale.

La deuxième ordonnance assouplit opportunément les conditions d'accès à la commande publique, essentiellement au bénéfice des PME. Nous avions déjà voté ces dispositions dans la loi ASAP, et saluons, là encore, un pragmatisme profitable à tous.

La troisième ordonnance porte réorganisation de Bpifrance. C'est aussi un motif de satisfaction pour notre groupe. Comme l'a bien exposé notre rapporteur Bernard Delcros, dont je salue le travail, outre la simplification de l'organisation et de la gouvernance de Bpifrance, ses fonds propres seront multipliés par plus de cinq, passant de 4 à 25 milliards d'euros. Bpifrance pourra s'endetter dans des conditions favorables sans que cela soit pris en compte dans la dette des administrations publiques au sens de Maastricht.

La quatrième ordonnance facilite l'octroi aux entreprises en difficulté d'avances de trésorerie en compte courant. Nous approuvons aussi cette mesure.

Le groupe UC se réjouit de pouvoir discuter du fond de ces ordonnances : le Parlement ne doit pas être contourné au prétexte de l'urgence. Nous espérons que cette démarche sera poursuivie dans les semaines et mois à venir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article premier est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article premier

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article 1er de l'ordonnance n°2020-317 du 25 mars 2020 portant création d'un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, les mots : « d'au plus » sont remplacés par le mot : « de ».

M. Pascal Savoldelli.  - Chaque prolongation du fonds de solidarité devrait être de six mois minimum, afin de donner de la visibilité aux entreprises et aux associations. Elles ne peuvent pas être suspendues aux annonces sur les ondes : le 12 décembre, on fixe l'échéance au 31 décembre, le 8 février, on prolonge de deux mois... Vous parlez d'ajustements, j'y vois plutôt des tergiversations.

Le temps politique n'est pas celui du chef d'entreprise et du responsable associatif : la durée donne de la confiance.

M. Bernard Delcros, rapporteur.  - Demande de retrait ou avis défavorable, car l'amendement est inopérant. La loi de finances pour 2021 autorise le pouvoir réglementaire à proroger le fonds de solidarité, comme il vient de le faire, par le décret du 8 février, jusqu'au 30 juin. Si la pandémie l'obligeait à le prolonger encore, le Parlement serait consulté.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Avis défavorable, même si je comprends le sens de cet amendement. Début novembre, dans le PLFR4, les parlementaires ont voté des crédits supérieurs aux besoins -  11 milliards d'euros - pour permettre le tuilage et éviter toute rupture de charge. Ce fonds évolue en fonction de la crise sanitaire. Le plus vite le virus disparaîtra, le plus vite nous pourrons retrouver un fonctionnement économique normal. Les entrepreneurs préfèrent de loin cela aux aides, c'est l'ancien chef d'entreprise que je suis qui vous le dit.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 3-1 de l'ordonnance n 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d'un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, il est inséré un article 3-... ainsi rédigé :

« Art. 3-....  -  Les conditions d'éligibilité et d'attribution des aides du fonds de solidarité sont conditionnées par un nombre d'emplois équivalent au solde de l'année précédente. »

M. Pascal Savoldelli.  - Cet amendement est cohérent avec notre position constante lors de l'examen des différentes lois de finances rectificatives. Il est encore temps de conditionner les aides au maintien des salariés dans l'emploi. Bruno Le Maire avait demandé aux grandes entreprises qui touchaient des aides publiques de ne pas verser de dividendes : lorsqu'elles l'ont fait, y a-t-il eu des sanctions ? Non. Pas davantage quand elles ont licencié.

C'est une question de responsabilité, et de justice. Quand on bénéficie de la solidarité nationale, on ne licencie pas !

Dans le Val-de-Marne, l'État a versé 336 millions d'euros à 40 000 entreprises ; si l'on excepte les autoentrepreneurs, c'est 176 millions d'euros qui ont été distribués à 17 000 entreprises. C'est beaucoup d'argent, surtout sans contrôle. Il faut des règles : on ne peut pas à la fois toucher l'argent public et provoquer du chômage partiel.

Les 2 163 licenciements au sein du ministère de l'Économie ont amputé sa capacité à réaliser les contrôles. Moins de 5 % des entreprises ont été contrôlées, et l'administration n'a récupéré que 3 des 30 millions d'euros usurpés au niveau national.

M. Bernard Delcros, rapporteur.  - Conditionner le bénéfice du fonds de solidarité au maintien de l'emploi instaure une rigidité qui risque de fragiliser et l'entreprise, et l'emploi. Le fonds de solidarité ne garantit pas l'activité. La survie de l'entreprise pourrait être conditionnée à sa capacité à ajuster ses effectifs à l'activité. Avec cet amendement, il lui faudrait reconduire les CDD arrivés à terme, mais il lui serait interdit de recruter. Avis défavorable.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Je vous reconnais le mérite de la cohérence, monsieur Savoldelli. Nous avons aussi la nôtre. Ce qui maintient l'activité et l'emploi, c'est avant tout la confiance. Le signal envoyé aux PME-TPE, qui représentent 99 % de l'emploi, serait désastreux : le non-recours aux aides, déjà très fort, s'envolerait.

M. Michel Canevet.  - Effectivement, il faut un maximum de souplesse. Bercy a fait diligence pour attribuer les aides et il faut l'en féliciter, même s'il est bien sûr légitime de lutter contre la fraude.

Sur les 750 000 dossiers déposés, 110 000 sont en attente, madame la ministre. Est-ce à cause des contrôles accrus ? Les entreprises, deux mois après avoir formulé leur demande, ont besoin de ce soutien pour faire face à leurs nombreux engagements.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Ce ne sont pas les contrôles qui entraînent ces files d'attente, mais les changements de modalités et de périmètre. J'ai demandé plus d'informations que je partagerai avec le Sénat. Je rappelle que l'aide est rétroactive.

L'amendement n°3 n'est pas adopté.

L'article premier bis est adopté, ainsi que les articles 2 et 3.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 3

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 1A de l'ordonnance n°2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d'investissement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Elle privilégie la transformation de la dette des entreprises en quasi-fonds propres dans les secteurs industriels et stratégiques ».

Avec le retour à la normale, il n'y aura plus chômage partiel ni fonds de solidarité, mais nous ferons face à un mur de faillites et de destructions d'emplois.

Cet amendement renforce la participation de Bpifrance en quasi-fonds propres dans les PME-TPE stratégiques, pour enrayer la spirale de la dette privée. Au Gouvernement de fixer un cap, de dire quels sont les secteurs stratégiques pour la relance.

C'est un amendement d'appel mais important, face à un endettement privé vertigineux - 175 milliards d'euros, d'où un risque d'insolvabilité et d'effet boomerang sur la dette publique.

M. Bernard Delcros, rapporteur.  - Les PGE ont vocation à être remboursés - sauf les 5 à 10 milliards d'euros qui ne pourront l'être. Les prêts participatifs, distribués en mars et avril à hauteur de 20 milliards d'euros, devraient remédier au problème que vous identifiez. Avis défavorable.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Oui, 20 milliards d'euros de prêts participatifs et d'obligations subordonnées seront lancés prochainement pour renforcer les fonds propres des PME et ETI. Plusieurs instruments complémentaires existent : garantie en quasi-fonds propres, soutien à l'innovation, intervention en véritables fonds propres...

Je partage votre anticipation, monsieur le sénateur, même s'il ne faut pas toujours voir le pire. Le pessimisme est d'humeur, mais l'optimisme de volonté. En janvier, 96 % de l'activité économique a été maintenue. La cascade de faillites annoncées n'est pas certaine.

M. Jérôme Bascher.  - Une fois n'est pas coutume, je suis d'accord avec M. Savoldelli. L'économie est totalement sous perfusion. C'est pourquoi, paradoxalement, il y a eu moins de défaillances en 2020 que les années précédentes. C'est logique, si vous fonctionnarisez tout le monde ! Mais les entreprises de la restauration, par exemple, ont mangé toute leur trésorerie. Il faudra recapitaliser...

La troisième ordonnance réorganise Bpifrance pour renforcer sa capacité de lever des fonds. Nous en aurons besoin, mais ce ne sera pas suffisant, pas plus que les prêts participatifs.

Je ne voterai pas cet amendement, car il ne fonctionne pas réellement, mais je m'abstiendrai.

M. Vincent Segouin.  - Moi aussi, je trouve cet amendement d'appel intéressant. Nous avons accordé des PGE à hauteur de 25 % du chiffre d'affaires, à rembourser sur cinq ans, or la moyenne de rentabilité des entreprises est de 2 % : cinq fois 2 %, ça fait 10 % du chiffre d'affaires, pas 25 %. Nous n'avons pas le choix, il faudra recapitaliser les entreprises. J'ai déjà interrogé Bruno Le Maire, sans obtenir de réponse. J'imagine que vous n'en avez pas non plus. (Mme la secrétaire d'État s'exclame.)

L'amendement n°7 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 3° du I de l'article 6 de l'ordonnance n°2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d'investissement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Contribuer et pérenniser les financements de longs termes dans les entreprises stratégiques afin de garantir la souveraineté sanitaire, technologique et s'inscrivant dans la transition écologique du pays. »

M. Pascal Savoldelli.  - Cet amendement nous donne l'occasion de parler des orientations de Bpifrance. Pourquoi s'être retiré du capital dans certains secteurs, à commencer par celui de la recherche vaccinale ? Pourquoi avoir retiré 25 millions, 9 % de son capital ? C'est une question de stratégie, de souveraineté !

J'avais interrogé à ce sujet Agnès Pannier-Runacher qui a dû reconnaître que le vaccin Valneva allait être livré plus tard que les autres...

Nous devons avoir une maîtrise publique complète de Bpifrance pour assurer une vraie souveraineté et orienter les investissements, d'urgence et d'avenir. Il est naturel que les acteurs privés entrés au capital ne se soucient que de profitabilité. J'attends un avis de sagesse !

M. Bernard Delcros, rapporteur.  - Avis défavorable. Bpifrance intervient déjà en participation dans les entreprises, ses capacités vont être accrues par la fusion. Évitons d'ajouter des rigidités. L'amendement parle d'entreprises stratégiques - qu'entendons-nous par cela ? Il faut aussi pouvoir soutenir des entreprises non stratégiques mais innovantes.

Bpifrance et la Banque des territoires vont engager 40 milliards d'euros sur le plan Climat. Enfin, les investissements stratégiques sont au coeur de missions de l'Agence des participations de l'État.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°4 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du deuxième alinéa du a du 1° de l'article 2 de l'ordonnance n°2020-739 du 17 juin 2020 portant réorganisation de la Banque publique d'investissement, le taux : « 95 % » est remplacé par le taux : « 98,6 % ».

M. Pascal Savoldelli.  - Cet amendement maintient une maîtrise publique de Bpifrance à 98,6 %, à défaut d'un taux de 100 %, qui aurait été irrecevable.

Luc Fayard le dit bien : « l'actionnaire est une personne morale amorale, affectée d'un trouble oculaire spécifique : dans des comptes financiers, elle ne peut lire que la ligne du bas, celle du résultat ».

Le résultat net de Bpifrance a été de 1,02 milliard d'euros en 2018 et de 1,36 milliard d'euros en 2017. Pourquoi s'en priver ?

L'État actionnaire doit jouer son rôle. C'est un paradoxe de laisser le privé faire irruption au capital de Bpifrance. Celle-ci n'a pas à financer les canards boiteux en laissant les activités les plus profitables aux acteurs privés.

Nous vous demandons de clarifier la doctrine d'investissements de cette entité et de l'APE et de sécuriser ses participations et leur rémunération, au seul profit de l'État.

M. Bernard Delcros, rapporteur.  - La commission souhaite entendre le Gouvernement sur ce sujet.

Le seuil minimum de détention publique était fixé à 95 % avant la fusion ; il est aujourd'hui de 98,6 % ; est-il intéressant de le consolider à ce niveau ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement partage la préoccupation de M. Savoldelli de garantir à Bpifrance un contrôle et un actionnariat publics. Mais 95 % - État et Caisse des dépôts et consignations - est suffisant pour cela.

Notez que les modalités de composition du conseil d'administration et de nomination du directeur général ne changent pas !

Les actionnaires minoritaires privés étaient déjà au capital de Bpifrance financement. Cette présence est donc le fruit de l'histoire et elle a un sens, permettant un alignement d'intérêts avec les établissements de place ; elle est nécessaire du reste pour que ces banques et sociétés de financement privées puissent obtenir des garanties de prêts.

Avis défavorable.

M. Bernard Delcros, rapporteur.  - Avis défavorable, ces arguments sont convaincants.

À la demande du groupe CRCE, l'amendement n°5 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°81 :

Nombre de votants 331
Nombre de suffrages exprimés 319
Pour l'adoption   80
Contre 239

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 3 bis est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 3 bis

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par M. Delcros, au nom de la commission.

Après l'article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La seconde phrase du 5° du I de l'article 179 de la loi n°2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 est complétée par les mots : « , ainsi que du niveau des financements dédiés aux fonds de garantie gérés par la société anonyme Bpifrance et de l'évolution des politiques relatives à ces garanties ».

M. Bernard Delcros, rapporteur.  - Cet amendement concerne les recyclages des dividendes et les redéploiements de crédits internes à Bpifrance. La pratique existe déjà mais elle contourne l'autorisation parlementaire, comme l'avait souligné la Cour des comptes en 2016.

Le Gouvernement doit rendre compte de l'effort financier global de l'État consenti pour les PME via des fonds publics.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Merci de cet amendement. Je partage sans réserve votre souci de la pérennité financière de l'activité de Bpifrance en matière de garantie de prêts. Je m'y suis penchée lorsque je siégeais à la commission des finances de l'Assemblée nationale, et aussi comme parlementaire membre du conseil d'administration de Bpifrance. Il faut améliorer l'information sur cette activité. Celle-ci a fait ses preuves et quelque 400 millions d'euros y sont consacrés dans la loi de finances pour 2021. Crédits budgétaires, reprises de provisions et recyclage des dividendes alimentent ce fonds, comme il est d'usage.

Il importe néanmoins que le Parlement puisse continuer à débattre de ces grands paramètres. L'activité de Bpifrance est décrite dans les projets annuels et les rapports annuels de performance ; mais le Gouvernement s'engage ici à créer un jaune budgétaire spécifique sur les relations entre Bpifrance et l'État.

Retrait au profit de cet engagement ferme.

M. Bernard Delcros, rapporteur.  - Vos garanties nous satisfont. L'information du Parlement est essentielle.

L'amendement n°8 est retiré.

L'article 4 est adopté.

Le projet de loi est définitivement adopté.

La séance est suspendue quelques instants.