Projet de loi de finances pour 2021 (Nouvelle lecture)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2021.
Discussion générale
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics . - Nous examinons ce texte dans des délais particulièrement serrés, puisqu'il a été adopté à 5 h 45 ce matin à l'Assemblée nationale.
Pour éclairer la représentation nationale sur les conséquences de la crise sanitaire, et dans un souci de sincérisation, nous avons actualisé l'article liminaire à chaque fois que nous recevions de nouvelles informations en modifiant les équilibres généraux.
Nous avons ainsi révisé en première lecture le taux de croissance en 2020 de moins 10 % à moins 11 %, le déficit de 10,2 % à 11,3 % du PIB et la croissance en 2021 de 8 % à 6 %. Le Haut conseil des finances publiques a qualifié nos nouvelles prévisions de prudentes, et dans ce contexte la prudence est bonne conseillère.
Nous avons dû, en conséquence, abonder à nouveau certaines mesures de soutien en nouvelle lecture : j'en ai informé, conformément à mon engagement, le rapporteur général et le président de la commission des finances avant le dépôt des amendements qui portaient ces modifications.
La dégradation anticipée en 2021 conduit à revoir à la baisse le montant des prélèvements obligatoires de 22 milliards d'euros. Nous consacrons 20 milliards d'euros aux dispositifs d'urgence, dont 13,4 milliards d'euros n'étaient pas prévus initialement : 11,4 milliards d'euros pour les salariés ; 4,4 milliards d'euros supplémentaires pour l'activité partielle en plus des 6,6 milliards d'euros déjà prévus, 400 millions d'euros pour les intermittents et 8,6 milliards d'euros pour les entreprises, dont 7 milliards d'euros pour le Fonds de solidarité, 600 millions d'euros pour le sport, la culture et les stations de montagne et 1 milliard d'euros d'aide au règlement des cotisations sociales.
Nous renforçons également le plan Jeunes de 200 millions d'euros, l'accompagnement de La Poste de 66 millions d'euros pour compenser les pertes du Fonds de présence postale territoriale ; les aéroports régionaux reçoivent une avance 250 millions d'euros, l'Agence française de développement une recapitalisation à hauteur de 500 millions d'euros. Nous prévoyons également 430 millions d'euros pour l'achat de matériel sanitaire et 120 millions d'euros au titre de l'aide alimentaire.
Le prélèvement sur recette pour l'Union européenne est aussi revalorisé à 336 millions d'euros afin de prendre en compte l'accord sur le cadre pluriannuel financier obtenu au dernier Conseil européen, qui entérine le plan de relance européen.
Le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » est revalorisé de 300 millions d'euros pour tenir compte des pertes de recettes. Nous revoyons à la hausse l'allocation adultes handicapés (AAH) et consacrons 1 milliard d'euros au crédit d'impôt en faveur des bailleurs qui consentent des abandons de loyer aux entreprises en difficulté. Comme vous le souhaitiez, les collectivités seront accompagnées dans la prise en charge des abandons de loyer en novembre.
Ces mesures portent le déficit public à 8,5 % du PIB, après 11,3 % en 2020, et le taux d'endettement public à 122,4 % du PIB, contre 119,8 % en 2020. Ce sont des niveaux jamais atteints, qui témoignent de la violence de la crise.
Ces conditions particulières n'ont pas empêché des débats riches. L'Assemblée nationale a conservé une trentaine des six cents amendements adoptés au Sénat : le doublement du plafond de la réduction d'impôt dite Coluche proposée par le rapporteur général et votée par plusieurs groupes ; la TVA à 0 % sur les vaccins ; la suppression du jour de carence pour les fonctionnaires atteints de la covid ; le filet de sécurité pour les recettes fiscales du bloc communal, même si la formule est légèrement différente ; la possibilité pour les collectivités territoriales de donner des biens aux fondations comme aux associations...
Ces exemples illustrent notre capacité à trouver des compromis au service des Français.
Le budget se traduit par une dégradation historique des finances publiques que nous assumons, car c'est la seule réponse possible à la crise, mais qui doit être temporaire : après la crise, nous devons retrouver une trajectoire et un niveau de dépense publique soutenables.
Merci encore pour la qualité de nos débats. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC, et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances . - L'Assemblée nationale a en effet terminé l'examen du PLF cette nuit à 5h50... La CMP réunie le 9 décembre n'avait pu aboutir, les divergences demeurant trop importantes sur les 285 articles restant en discussion.
En première lecture, 125 articles ont été adoptés dans les mêmes termes par les deux assemblées, qui ont également supprimé l'article 19.
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a parfois suivi le Sénat. Je citerai les aménagements sur le crédit d'impôt pour les bailleurs qui acceptent des abandons de loyer, appliqué dès l'imposition de 2021, ou encore l'article 22 bis, plus substantiel, qui reconduit en 2021 le mécanisme de garantie des ressources fiscales des communes et EPCI adopté en LFR3.
L'Assemblée nationale a aussi conservé le prolongement d'un an du plafond à 1 000 euros du dispositif Coluche et la suppression du jour de carence pour les fonctionnaires atteints par la covid-19.
Elle a maintenu, contre l'avis de la commission des finances et du Gouvernement, la prolongation jusqu'en 2024 du crédit d'impôt pour les productions cinématographiques internationales.
Au sein de la mission « Économie », les 66 millions d'euros votés par le Sénat au profit du Fonds de péréquation postal pour compenser la perte de recettes liée à la baisse des impôts de production ont été conservés.
L'Assemblée nationale a enfin conservé des améliorations de rédaction ou des précisions, et la suppression de rapports jugés inutiles.
Pour autant, de nombreuses divergences subsistent. Des amendements parfois adoptés à l'unanimité ont été supprimés. Le Sénat n'est pas toujours entendu...
Il est regrettable que le Gouvernement n'ait pas su redresser l'équilibre des finances publiques lorsque les indicateurs étaient au vert pour faire face à des crises comme celle-ci. Il aurait fallu des mesures temporaires et ciblées.
L'État se finance aujourd'hui autant par l'endettement que par l'impôt. Si les taux d'intérêt venaient à remonter, l'effort serait insurmontable.
L'effort du plan de relance a mal été calibré, car l'Assemblée nationale est revenue sur toutes les mesures introduites par le Sénat pour que le plan de relance porte ses fruits, comme le report en arrière des déficits dans la limite de 5 millions d'euros.
Les entreprises doivent voir leur niveau d'imposition baisser ; c'est pourquoi le Sénat ne s'est pas opposé à la suppression des impôts de production, mais il fallait une compensation juste et pérenne pour les collectivités territoriales. L'Assemblée nationale nous a suivis sur l'article 22 bis mais pas sur la compensation intégrale pour les départements des pertes de recettes de CVAE en 2021 - alors que les régions en ont bénéficié. C'est dommage.
L'Assemblée nationale n'a pas davantage retenu nos propositions de contribution exceptionnelle pour les assureurs et les plateformes de vente à distance.
La nouvelle couverture assurantielle proposée par le Sénat n'a pas été conservée, mais nous espérons que la proposition de loi que nous avions votée en juin prospérera.
Sur la fiscalité environnementale, l'Assemblée nationale n'a pas suivi le Sénat pour un verdissement qui ne verse pas dans l'écologie punitive. Nous avions ainsi proposé un étalement sur cinq ans du malus automobile assorti d'une augmentation de la prime à la conversion.
L'Assemblée nationale a également rétabli l'article 54 sexies sur les contrats photovoltaïques et thermodynamiques, ainsi que la ponction d'1 milliard d'euros infligée à Action logement.
Le Gouvernement a enfin fait voter à l'Assemblée nationale de nouvelles mesures certes nécessaires, notamment pour les exploitants de remontées mécaniques ; mais pourquoi avoir attendu la nouvelle lecture pour augmenter le Fonds de solidarité de 5 milliards d'euros, ajouter 430 millions pour l'achat de matériel sanitaire, couvrir la prise en charge des congés payés pour certains salariés et mettre en place une aide exceptionnelle pour les saisonniers ?
Plusieurs lignes de crédit adoptées en 2020 seront reportées en 2021, notamment les 2,1 milliards ouverts par la LFR4 promulguée il y a à peine deux semaines.
Les sujets de désaccord restent donc nombreux. Même si le Sénat proposait des modifications en nouvelle lecture, il est peu probable qu'il ferait changer d'avis l'Assemblée nationale. La commission des finances vous proposera donc d'adopter la motion opposant la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. le président de la commission des finances applaudit également.)
M. Bernard Delcros . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Comment tracer des perspectives dans un contexte aussi fluctuant ? La tâche est difficile, elle l'aurait été pour tout gouvernement.
D'abord merci, monsieur le ministre, pour votre disponibilité et vos réponses toujours précises.
Les désaccords étaient trop nombreux pour que la CMP aboutisse, mais plusieurs avancées du Sénat sont actées : taux zéro de TVA pour les vaccins, doublement du plafond du dispositif Coluche, crédit d'impôt pour la sortie du glyphosate, extension du crédit d'impôt pour les investissements productifs ultramarins, entre autres.
En revanche, nous regrettons le rétablissement de l'article 54 sexies relatif au rachat de l'électricité photovoltaïque, qui pourrait avoir de lourdes conséquences pour certaines exploitations agricoles.
Je salue les avancées au bénéfice des collectivités territoriales : maintien à 1,6 milliard d'euros de la péréquation départementale des DMTO grâce à un abondement du budget de l'État, abondement de 66 millions d'euros du Fonds postal de péréquation, engagement du programme Petites villes de demain.
Je me félicite aussi de l'engagement du Gouvernement à travailler sur l'élargissement de la dotation biodiversité aux communes, juste reconnaissance des aménités apportées par la montagne et la ruralité.
En revanche, je regrette que l'harmonisation des trois régimes de versement du FCTVA ait été rejetée ; je déplore aussi la compensation des pertes de recettes tarifaires des services publics locaux qui pénalise les collectivités ayant fait le choix des régies. Sur ce dernier point, le groupe de travail initié par la ministre de la cohésion des territoires ouvre cependant des perspectives.
D'autres avancées du Sénat pourraient être reprises à l'ouverture du prochain PLFR.
Le groupe Union centriste avait, dès le mois d'avril, défendu une contribution des assureurs pour faire face à la crise. Le vote du Sénat aura au moins servi d'instrument de négociation au ministre de l'Économie pour obtenir un gel des cotisations en 2021 pour les secteurs les plus touchés.
Compte tenu de l'échec de la CMP et du calendrier contraint, le groupe Union centriste, dans sa majorité, votera la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
Sur la jeunesse, vous avez toujours un plan d'urgence de retard. Concrètement, au lieu de saupoudrer des crédits avec les aides aux boursiers ou la garantie Jeunes, vous devriez écouter les associations et étendre le RSA aux 18-25 ans.
Il y a, certes, quelques points positifs : le crédit d'impôt pour aider à la sortie du glyphosate, la suppression du jour de carence pour les fonctionnaires atteints par la covid, les 5 millions d'euros de crédit pour la lutte contre la précarité menstruelle, initiative du GEST.
Hélas, l'amendement de lutte contre la fraude fiscale qu'Éric Bocquet avait fait voter a été rejeté, tout comme la taxe sur le commerce en ligne proposée par le rapporteur général, tout comme les amendements en faveur de la culture ou du logement social, pourtant votés à l'unanimité.
Plus de deux cents maires se sont mobilisés pour que le plan de relance bénéficie aussi aux quartiers politique de la ville (QPV) ; ils seront là, et nous aussi, pour s'assurer que le milliard d'euros prévu dans le plan de relance sera bien fléché.
Les demandes de RSA augmentent dans tous les départements et le Gouvernement les laisse en difficulté, alors que c'est le principal filet de sécurité pour les plus précaires.
Le budget n'est pas à la hauteur de la crise sociale ni de la crise environnementale. Le Président de la République veut intégrer la protection de l'environnement dans la Constitution ? Il aurait mieux fait de le placer dès ce budget au centre de l'action publique. (Applaudissements sur les travées du GEST)
M. Didier Rambaud . - Je m'interroge... En commission des finances ce matin, le rapporteur général a salué tous les apports du Sénat conservés par l'Assemblée nationale : le crédit d'impôt pour les bailleurs consentant à des abandons de loyer, la suppression du jour de carence en cas de covid, le prolongement du dispositif Coluche, la TVA à 0 % pour les vaccins, le crédit d'impôt pour les agriculteurs qui veulent sortir du glyphosate. L'Assemblée nationale a conservé ces ajouts. Des compromis ont été acceptés.
Mais en dépit de ces avances, voici une question préalable, presque une habitude désormais. Sur le PLF 2018, alors que le Gouvernement était à peine nommé, le Sénat votait déjà une question préalable. Sur le PLF 2019, le Sénat se dessaisissait du texte avant même la nouvelle lecture. Pour le PLF 2020, même méthode.
Ce PLF n'échappe pas à la règle. Pourtant, en cette année marquée par une crise sanitaire sans précédent, l'État n'a jamais failli dans son soutien aux entreprises, aux collectivités territoriales et aux Français. Nous avons réussi à mettre de côté nos divergences à quatre reprises, en votant les lois de finances rectificatives pour accompagner ce soutien. C'est bien fini : nous revenons aux vieilles habitudes. D'année en année, les motifs invoqués perdent en cohérence ; nous sommes plutôt dans la loi des séries.
Vous avez considéré que les nouveaux crédits votés en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale pour la culture et les stations de ski, les 5,6 milliards pour le fonds de solidarité, les crédits pour l'aide alimentaire étaient une atteinte à l'autorisation parlementaire. Mais la nouvelle lecture aurait justement été le lieu d'en discuter ; un tel renoncement ne fera certes pas changer d'avis l'Assemblée nationale...
Le RDPI votera contre cette motion et soutiendra le plan de relance du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)
M. Jean-Claude Requier . - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE) Charité bien ordonnée commence par soi-même... L'Assemblée nationale a terminé ses travaux à une heure très matinale, ce qui pose la question de notre capacité à légiférer correctement dans ces conditions de travail ubuesques.
Ce PLF a battu de nouveaux records en termes de quantités : plus de 6 000 amendements examinés à l'Assemblée nationale, près de 3 000 au Sénat, et encore 1 000 en nouvelle lecture à l'Assemblée. C'est un record dont on se passerait bien : les délais d'examen prévus par la Constitution restent, quant à eux, incompressibles.
Je regrette également que les articles non rattachés soient devenus une troisième partie du PLF, avec des mesures telles que la prorogation pour 2021 du fonds de solidarité et des prêts garantis par l'État ou la refonte des missions des Douanes.
La mission « Plan de relance » a suscité de nombreux débats ; nous veillerons à la bonne exécution de ses crédits. Les Français ne croient plus à l'argent magique, nous non plus : comment allons-nous traiter cette dette colossale ?
Je regrette l'échec de la CMP, même s'il était prévisible.
L'Assemblée nationale a supprimé la contribution exceptionnelle sur les assureurs votée par le Sénat ; j'ose espérer que le Gouvernement a obtenu des engagements de leur part.
Je salue en revanche le maintien de l'aide à la sortie du glyphosate ainsi que du maintien du financement d'Ecophyto, objet d'un amendement de M. Henri Cabanel.
Le rapport de la Cour des comptes montre combien les collectivités territoriales sont de plus en plus fragiles, du fait de la crise, alors que les compensations aux pertes de recettes consenties par l'État sont partielles.
Rendez-vous dans un an pour analyser l'exécution de ce budget, en espérant que nous aurons réussi à maîtriser la crise sanitaire.
Le RDSE est attaché à la poursuite de la discussion parlementaire et s'opposera par principe à la question préalable, tout en en comprenant la philosophie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)
M. Éric Bocquet . - Le projet de loi de l'Assemblée nationale en seconde lecture ressemble beaucoup à celui de la première lecture. Dans le plan de relance, l'Assemblée nationale comme le Sénat n'ont pas voulu prendre en considération les propositions de la Convention citoyenne pour le climat dont le groupe CRCE s'est, avec d'autres, fait l'écho.
L'augmentation de la taxe sur les transactions financières, vous n'en voulez pas ; l'encadrement des dividendes, non plus ; la taxe sur le poids des véhicules est vidée de sa substance. Beaucoup d'autres mesures sont, de réunion en réunion, remises à plus tard alors qu'elles ont été décidées par les citoyens, pour les citoyens et pour le climat.
M. Philippe Dallier. - C'est le Parlement qui décide !
M. Éric Bocquet. - Nous avions aussi proposé des conditionnalités attachées aux aides aux entreprises, repoussées au motif qu'il ne faudrait pas contraindre les entreprises en temps de crise. Le Haut Conseil pour le climat critique vertement - c'est le cas de le dire - le plan de relance, qui n'est pas vert comme vous le prétendez : de fait, 70 % des mesures restent dans la continuité et le déni des enjeux climatiques.
Il faut un réel changement de paradigme. Par ailleurs, le soutien à l'emploi et à la formation occupe une place marginale. Au final, le plan de relance risque d'accroître les inégalités et les tensions sociales.
Vous refusez aussi de reconstituer les marges de manoeuvre des collectivités territoriales. Dans ces conditions, estime la Cour des comptes, « les possibilités de contribution des départements au plan de relance apparaissent plus qu'incertaines ». Ils seront incapables d'assumer la croissance des dépenses sociales. Leur épargne, souligne toujours la Cour des comptes, a baissé de 45 % en 2020. Face à cela, des mesurettes pour un petit sursis, alors que la bombe à retardement des avances remboursables ne demande qu'à exploser.
Vous vous cramponnez à vos certitudes sans prendre en compte la profondeur de la crise sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
Mme Vanina Paoli-Gagin . - Depuis l'adoption de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) de 2001, l'examen du budget par le Parlement se déroule dans des délais très contraints.
Cette année, malgré tout, ce texte a connu des changements majeurs. Les modifications apportées au cours du débat par le Gouvernement n'ont pas facilité notre examen, comme en témoignent les changements de prévisions sur le déficit public.
Ces modifications ont pris en compte les fluctuations du climat macroéconomique et les changements de stratégie gouvernementale.
L'essentiel est de rester cohérent dans le soutien à l'économie. En ce sens, le Gouvernement a promis de soutenir toutes nos entreprises, à commencer par nos commerçants, restaurateurs, hôteliers, acteurs de la culture...
Le Sénat a voté les quatre lois de finances rectificatives dans un esprit de responsabilité. Le désaccord en CMP tient surtout à des divergences de stratégie fiscale. Je salue cependant les apports du Sénat maintenus à l'Assemblée nationale, qu'ils concernent les collectivités territoriales ou les entreprises.
Notre assemblée obtient rarement gain de cause quand elle rejette en bloc. C'est pourquoi nous voterons contre la question préalable, en soutien au texte porté par le Gouvernement que nous avons eu plaisir à amender. (Applaudissements sur plusieurs travées du RDSE)
Mme Isabelle Briquet . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Notre amendement Coluche a fait parler de lui et je m'en félicite. Ce même Coluche disait en 1986 que la crise rend les riches plus riches et les pauvres plus pauvres : ce budget ne risque pas de changer la donne.
Attention à l'explosion de la pauvreté ! Le Gouvernement n'entend que lui-même. Ici nous avons porté une voix de gauche, face à deux voix de droite, pour défendre les plus démunis. Nous avons porté, dans une démarche cohérente et responsable, un budget alternatif soutenant les plus précaires et réellement écologique.
La jeunesse est la grande oubliée de ce budget. Elle n'a jamais été aussi fragilisée. Avoir 20 ans, ce n'est pas seulement difficile, c'est une question de survie quotidienne. Comment penser à l'avenir quand le présent est incertain ?
Dans ces conditions, le Gouvernement laisse nos jeunes sombrer dans la pauvreté. En 2019, un quart des jeunes de 18 à 30 ans vivaient sous le seuil de pauvreté. Combien désormais ?
Le groupe SER a notamment proposé une dotation pour l'autonomie des jeunes de 18 à 25 ans, l'élargissement de la prise en charge des frais de scolarité et d'alternance, le financement de projets associatifs et professionnels ; la totalité de ces mesures auraient pu être financées par le rétablissement de l'ISF.
En juin 2020, près de deux millions de foyers émargeaient au RSA. Nous avons donc proposé une augmentation du RSA, une augmentation d'1 milliard d'euros de l'aide alimentaire, un fonds d'aide pour le financement des quittances de loyer.
D'aucuns accusent les socialistes de vider les caisses de l'État, mais toutes ces propositions étaient financées, notamment par le report de la réforme de la taxe d'habitation et le décalage des baisses d'impôts pour les entreprises.
Les collectivités territoriales n'ont pas non plus été épargnées par ce budget. Le Gouvernement affirme son jacobinisme et nie la pertinence de l'action publique territoriale.
Je déplore que le redéploiement des services fiscaux se traduise par des fermetures de trésoreries. Ainsi les missions de conseil auprès des communes et de la population ne sont plus assurées, comme je le constate en Haute-Vienne.
Tous les choix du Gouvernement se sont faits au profit des plus aisés. Sur les 20 milliards d'euros supplémentaires votés à l'Assemblée nationale en seconde lecture, qui ne sont en réalité que 13,4 milliards, 8,5 milliards d'euros sont des reports et la répartition des crédits votés échappe à notre examen. Le Gouvernement refuse tout apport du Sénat, quitte à réintroduire des dispositions similaires à l'Assemblée nationale...
Pour toutes ces raisons, le groupe SER ne pourra pas voter le budget. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Jérôme Bascher . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La commission mixte paritaire a échoué.
M. Roger Karoutchi. - C'est un drame !
M. Jérôme Bascher. - En responsabilité, nous avions pourtant réussi à trouver un accord sur les quatre lois de finances rectificatives.
Des 600 amendements que nous avons adoptés, il en reste à peine 5 %. Nous regrettons que l'Assemblée nationale ait retenu si peu du Sénat...
Avec Trenet, je m'interroge : « Que reste-t-il de ces beaux jours » passés ensemble, monsieur le ministre, à examiner ce budget ? Je vous en remercie, mais vous ne pourrez transmettre mes remerciements à Bruno Le Maire, qui fut absent du Sénat pour toute la durée des débats : une première historique !
L'Assemblée nationale a adopté le PLF en nouvelle lecture à 5 h 45 ; le texte fut déclaré transmis au Sénat par le secrétariat général du Gouvernement alors qu'il ne l'était pas... Encore une première. Est-ce cela que l'on appelle une démocratie sérieuse ?
Le Sénat avait introduit un mécanisme de compensation pour le bloc communal : je me réjouis de son maintien. Vous auriez dû écouter davantage le Sénat sur les collectivités territoriales ! La pauvreté qui se développe met en grande difficulté les départements.
La prolongation du dispositif Coluche - appelons-le Coluche-Retailleau-Féraud - permettra de soutenir davantage les associations, grâce à un plafond de dons porté à 1 000 euros.
Je déplore que vous sous-estimiez la hausse du chômage.
Le soutien au Fonds postal national de péréquation territoriale a été maintenu ; vous avez fait voter une affectation de dépense, nous une affectation de recette, mais cela revient au même.
La fiscalité du stockage des déchets radioactifs proposée par Gérard Longuet depuis trois ans a finalement été adoptée par l'Assemblée nationale avec le soutien du Gouvernement, qui y était défavorable au Sénat ; mais nous vous en remercions.
Nous nous félicitons également de l'adoption du crédit d'impôt pour les productions cinématographiques et audiovisuelles internationales, voté par le Sénat à l'initiative de Laure Darcos.
Des positions du Sénat semblent avoir été entendues. Cette nuit à l'Assemblée nationale, vous avez déclaré, monsieur le ministre, que l'aide aux espaces de loisirs et aux parcs animaliers votée par le Sénat dans le PLFR4 relevait d'une mesure réglementaire. Nous confirmez-vous que vous les aiderez ?
Les appels à l'aide des stations de ski s'étaient perdus dans la vallée de Bercy. Ils ont fini par déclencher une avalanche de crédits cette nuit : quelque 600 millions d'euros ont été débloqués pour soutenir les secteurs de la culture, du sport et de la montagne. Cela compensera les charges fixes des exploitants, mais c'est toujours plus d'argent dépensé...
Le Sénat a dit oui à une relance verte mais sans culpabilisation, notamment en supprimant le malus au poids des véhicules, en lissant sur cinq ans le malus CO2 pour les poids lourds. Oui à la baisse des impôts de production, avec une baisse du plafond de la contribution économique territoriale.
Vous avez répondu non. Non à la relance de l'investissement par la contemporanéisation du FCTVA. Non au carry back. Non sur l'IR-PME. Non sur le photovoltaïque, non sur la taxe Coluche, non sur le quotient familial. Non sur la culture, non sur le logement...
Le Sénat, dans sa sagesse, a été au rendez-vous en 2020. Mais dès que la bise fut venue, ce Gouvernement cigale nous oblige à crier famine pour nos amendements. « Il se faut entraider, c'est la loi de nature », nous dit La Fontaine dans la fable « L'âne et le chien ». Vous avez choisi d'aller seuls, vous assumerez seuls. L'âne finit dévoré par le loup car le chien ne lui vient plus en aide. Or le loup du chômage rôde...
Vous n'avez pas repris les propositions du Sénat, le groupe Les Républicains votera donc la question préalable. (« Bravo » et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
La discussion générale est close
Question préalable
Mme la présidente. - Motion n°I-1, présentée par M. Husson, au nom de la commission.
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement du Sénat ;
Considérant que l'absence d'effort de maîtrise des dépenses publiques au cours des années passées, alors que les indicateurs économiques du pays étaient encore favorables, n'a pas permis à la France de retrouver les marges de manoeuvre budgétaires utiles pour répondre le plus efficacement possible à toute nouvelle crise telle que la crise sanitaire, sociale et économique résultant de la pandémie de Covid-19 ;
Considérant, alors que l'État se finance désormais autant par l'endettement que par l'impôt, qu'il convient de garder à l'esprit l'impact de nos décisions actuelles sur l'état de nos finances publiques à moyen terme et le fait que toute hausse de taux d'intérêt pourrait très rapidement devenir insoutenable ;
Considérant qu'à ce titre, le Gouvernement aurait dû privilégier des mesures temporaires, puissantes et mieux ciblées pour favoriser la sortie de crise dans le cadre du plan de relance ;
Considérant que, plus globalement, ce plan de relance paraît trop tardif et mal calibré, tout en s'appuyant insuffisamment sur la réalité des territoires ;
Considérant qu'il est regrettable que l'Assemblée nationale soit revenue sur toutes les mesures adoptées par le Sénat pour renforcer le plan de relance et lui faire porter ses fruits à plus court terme, telles que le report en arrière des déficits dans la limite de 5 millions d'euros, les dispositifs spécifiques de suramortissement ou encore la contemporanéisation du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCVTA) qui permet de soutenir l'investissement local ;
Considérant qu'indépendamment de la nécessité de soutenir spécifiquement certains secteurs qui restent durement affectés par la crise, à l'instar des exploitants de remontées mécaniques des stations de ski ou de certains acteurs de la culture, le Sénat ne peut que déplorer le fait que le Gouvernement ait fait le choix d'attendre la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale pour abonder de 5,6 milliards d'euros le programme 357 « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire », pour créer un nouveau programme « Matériels sanitaires pour faire face à la crise de la covid-19 » doté de 430 millions d'euros, et pour renommer le programme 357 « Prise en charge du chômage partiel et financement des aides d'urgence aux employeurs et aux actifs précaires à la suite de la crise sanitaire » afin de tenir compte du fait qu'il devrait désormais couvrir la prise en charge de congés payés de certains salariés et une aide exceptionnelle aux actifs « permittents » saisonniers ou extras ;
Considérant qu'à ce titre, il est très critiquable, au regard de l'atteinte portée à l'autorisation parlementaire du volet « dépenses » du projet de loi de finances, que plusieurs milliards d'euros de crédits ouverts en 2020 soient de fait prévus pour être reportés sur l'année 2021, en particulier les 2,1 milliards d'euros ouverts sur le programme 356 par la quatrième loi de finances rectificative pour 2020, promulguée il y a seulement deux semaines, d'autant que ces crédits contribueront aussi au financement de dépenses nouvellement décidées ;
Considérant que, sans revenir sur la réforme des impôts de production prévue par le projet de loi de finances, dans la mesure où les entreprises, en particulier dans le secteur industriel, doivent voir leur niveau d'imposition se réduire pour rester compétitives, le Sénat rappelle qu'il importe aussi d'assurer une juste et pérenne compensation aux collectivités territoriales ;
Considérant qu'en conséquence, il convient de saluer le fait que l'Assemblée nationale a su rejoindre la position du Sénat en conservant, sous réserve de quelques aménagements, la reconduction du mécanisme de garantie des ressources du bloc communal pour l'année 2021, même si d'autres mesures tendant à améliorer la situation financière des collectivités territoriales auraient mérité d'être conservées, notamment pour couvrir les baisses de recettes tarifaires des régies municipales dotées de la seule autonomie financière ou encore les hausses de dépenses sociales pour les départements ;
Considérant qu'il est regrettable que l'Assemblée nationale n'ait pas conservé la compensation de la perte de recettes de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) subie en 2021 par les départements et le bloc communal, identique à celle prévue pour les régions dans le cadre de la réforme des impôts de production ;
Considérant que l'Assemblée nationale a fait le choix de supprimer les deux contributions exceptionnelles adoptées par le Sénat et visant, d'une part, les assureurs et, d'autre part, les grandes plateformes de la vente à distance, alors que l'impératif de solidarité nationale aurait dû imposer de tels efforts ;
Considérant qu'au contraire du ministre de l'économie, des finances et de la relance qui a exclu l'instauration d'une assurance pandémie, le Sénat considère qu'une couverture assurantielle applicable au risque sanitaire, avec une répartition des responsabilités entre les assureurs d'une part, et l'État d'autre part, serait seule capable de garantir l'ensemble des entreprises contre un tel risque ;
Considérant que la majorité Gouvernementale a refusé les dispositifs proposés par le Sénat pour renforcer l'aide aux plus précaires et à ceux qui se trouvent le plus en difficulté face à la crise, comme par exemple une aide à l'embauche pour six mois supplémentaires, un fonds de solidarité renforcé pour mieux couvrir les charges fixes, ou encore les nombreuses mesures destinées à soutenir des secteurs comme la culture ;
Considérant que du point de vue de la fiscalité écologique et énergétique, les mesures prises par la majorité Gouvernementale ne permettent pas d'accompagner le changement nécessaire, en particulier s'agissant de la hausse du malus automobile sur trois ans qui, cumulée à la création du « malus poids », intervient alors que le secteur automobile traverse difficilement la crise et que les ménages ne pourront pas tous adapter leur comportement d'achat ;
Considérant qu'à ce titre, l'étalement de la hausse du malus sur cinq ans, accompagné d'un renforcement de la prime à la conversion, préconisés par le Sénat, aurait permis d'inciter davantage les automobilistes à faire le choix de solutions plus respectueuses de l'environnement sans tomber dans la fiscalité punitive ;
Considérant que le Sénat s'était à la quasi-unanimité opposé à plusieurs dispositions du projet de loi de finances qui ont, depuis, été rétablies par l'Assemblée nationale, à l'instar de l'article 7 relatif à la suppression progressive de la majoration de 25 % des bénéfices des entreprises qui n'adhèrent pas à un organisme de gestion agréé (OGA) ou de l'article 47 qui prévoit une ponction d'un milliard d'euros sur la trésorerie d'Action Logement ;
Considérant que le Sénat a également rejeté les crédits des missions « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », « Immigration, asile et intégration » et « Sport, jeunesse et vie associative » ainsi que des comptes d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » et « Développement agricole et rural » dont les crédits ont été rétablis par l'Assemblée nationale sans réponse aux objections qui avaient été soulevées ;
Considérant que l'Assemblée nationale a rétabli plusieurs articles qui ne relèvent pas du domaine des lois de finances selon la jurisprudence établie par le Conseil constitutionnel ;
Considérant que, certes, l'Assemblée nationale a par ailleurs conservé, en nouvelle lecture, plusieurs apports du Sénat de première lecture, à l'instar du prolongement pour un an du plafond à 1 000 euros de la réduction d'impôt au titre de dons aux organismes d'aide aux personnes en difficulté, dit « dispositif Coluche », de la suspension, pendant l'état d'urgence sanitaire, de l'application du jour de carence pour les agents publics dont l'arrêt maladie est directement lié à l'épidémie de Covid-19, des aménagements apportés au nouveau crédit d'impôt aux bailleurs consentant des abandons de loyers à des entreprises particulièrement touchées par la crise, en vue de prévoir son application dès 2021 et d'élargir le périmètre des bailleurs éligibles et des entreprises locataires susceptibles d'en ouvrir le bénéfice, ou encore des 66 millions d'euros de crédits votés par le Sénat en faveur du fonds de péréquation postale, permettant de compenser les conséquences de la réforme des impôts de production sur ce fonds ;
Considérant que, pour autant, l'Assemblée nationale est revenue sur beaucoup des amendements adoptés par le Sénat, même lorsqu'ils ont été votés à une très grande majorité voire à la quasi-unanimité, notamment dans le secteur du logement ;
Considérant, en conséquence, que l'examen en nouvelle lecture par le Sénat de l'ensemble des articles restant en discussion du projet de loi de finances pour 2021 ne conduirait vraisemblablement ni l'Assemblée nationale ni le Gouvernement à revenir sur leurs positions ;
Le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2021, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture n° 236 (2020-2021).
M. Jean-François Husson, rapporteur général . - Nous avons déjà exposé les raisons qui motivent cette question préalable, qu'il s'agisse de mesures macroéconomiques ou sectorielles.
Monsieur le ministre, je salue votre présence constante et votre éternelle bonne humeur, qui n'aura connu qu'une brève éclipse. (Sourires) Reste que l'examen de ce projet de loi de finances nous laisse un goût amer d'inachevé.
Nous avions fait un travail approfondi, avons formulé des propositions précises et abouties. Le Gouvernement et sa majorité devraient être plus attentifs aux sujets portés par le Sénat et les territoires. Vous avez l'importante responsabilité de ne pas laisser s'installer la défiance chez les élus des territoires. Les 550 000 élus locaux, dont 90 % sont des bénévoles, sont notre plus beau bouclier démocratique. Le Sénat porte leurs voix, dans leur diversité, des grandes métropoles aux plus petites communes.
Dans ces temps inédits, écoutez-les. Nous avons fait preuve de responsabilité lors des quatre PLFR de 2020 tout autant que dans ce projet de loi de finances, ce qui n'empêche pas les divergences.
Veillons à éviter une troisième flambée de tensions sociales, après les bonnets rougets et les gilets jaunes. Dans un cas comme dans l'autre, le déclencheur avait été une mesure à caractère écologique.
Aussi, nous avons eu des débats soutenus sur ce sujet comme sur d'autres. Au Sénat bat le coeur de la démocratie. La crise sanitaire, engendre des difficultés économiques qui peuvent conduire à une grave crise sociale en 2021. Pour tenter de trouver une oreille attentive, une dernière voie de compromis, nous avons déposé cette motion.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. - Le Gouvernement entend que les positions exprimées par le Sénat sont autant de points d'alerte et d'appel à l'action, au-delà de nos désaccords sur les solutions retenues.
Lors de la discussion générale, j'ai entendu des points de convergence comme de divergence, sur des mesures structurelles et des dispositions sectorielles. Chacun ici poursuit ce qu'il pense être l'intérêt général.
J'ai aussi entendu la critique sur les délais imposés par les règles organiques, qui nous privent, en nouvelle lecture, du temps nécessaire pour trouver un accord. Plutôt que de se livrer à un vain exercice, vous en prenez acte avec cette motion. Bien sûr, le Gouvernement ne peut être favorable à ce qui revient à rejeter son texte. Je m'en remets à votre sagesse.
M. Rémi Féraud. - Même en cette année exceptionnelle, certaines choses sont immuables. Nous comprenons les motifs de cette motion, à commencer par la défiance du Gouvernement vis-à-vis du Sénat, même si nous ne partageons pas les mêmes convictions politiques.
Nous nous abstiendrons comme chaque année.
Nous regrettons cependant de ne pouvoir de ce fait débattre du plan d'urgence abondé de 20 milliards d'euros à l'Assemblée nationale alors qu'il aurait très bien pu l'être au Sénat. Non pour inverser le cours des choses, mais pour faire vivre la démocratie...
Mme Sophie Taillé-Polian. - Le GEST votera contre la motion.
L'année est effectivement exceptionnelle. Plus de 5 milliards d'euros inscrits dans le PLF n'ont pu être examinés par le Sénat, parce qu'annoncés au fil de l'eau. Il s'agit pourtant souvent de sujets que nous avions soulevés ici...
Nous aurions pu trouver quelques heures pour débattre au moins de ces nouveaux crédits et adopter une position sénatoriale.
Peut-être cela aurait-il mérité un aménagement particulier de la procédure.
M. Philippe Dallier. - Ce n'est pas possible !
Mme Sophie Taillé-Polian. - Il y avait, me semble-t-il, matière à ce que le Sénat s'exprime.
M. Pascal Savoldelli. - Un paradoxe est une opinion qui vit toujours aux dépens de la vérité. Cette question préalable l'illustre parfaitement.
Certes, l'Assemblée nationale a balayé la plupart des propositions du Sénat mais cela ne doit pas pour autant vous conduire à vous exonérer de vos propres contradictions, chers collègues !
Vous ne pouvez à la fois critiquer le recours à la dette et refuser de voter de nouvelles ressources !
Autre paradoxe, par quatre fois vous avez voté les PLFR « en responsabilité »...
M. Philippe Dallier. - Nous l'assumons.
M. Pascal Savoldelli. - ... mais il a fallu attendre le PLF pour que vous votiez enfin la notion d'établissement stable pour les GAFA ou la contribution exceptionnelle des assureurs !
On ne peut pas à la fois soutenir l'industrie coûte que coûte et se plaindre que l'ambition écologique demeure limitée ; regretter le manque d'aides aux plus pauvres et rejeter une taxe de 0,01 % sur la valeur ajoutée des transactions financières ; déplorer la situation financière des collectivités territoriales et supprimer les impôts de production pour préserver les dividendes !
Le Parlement est certes bicaméral, mais votre motion a un côté bipolaire ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains) Cela dit, je vous souhaite d'excellentes fêtes ! (Sourires)
Mme Christine Lavarde. - Le ministre nous appelle à la sagesse. Être sage, c'est reconnaître les divergences avec l'Assemblée nationale, et conclure qu'un nouveau débat n'apporterait pas grand-chose. Comment d'ailleurs discuter d'un texte que dont nous ne disposions toujours pas ce matin, à 11 h 30 ?
J'entends la demande de Sophie Taillé-Pollian de débattre de certains crédits d'urgence que le Gouvernement a inscrits à l'Assemblée nationale en deuxième lecture. Nous les aurions sans doute votés, s'agissant de soutien aux entreprises, comme nous l'avons fait en lois de finances rectificatives - tout en restant vigilants. Je note au passage que certains crédits votés dans les PLFR n'ont pas été consommés.
Le groupe Les Républicains votera la motion.
La motion n°I-1, tendant à opposer la question préalable, est mise aux voix par scrutin public ordinaire de droit.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°52 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 273 |
Pour l'adoption | 195 |
Contre | 78 |
Le Sénat a adopté.
Le projet de loi de finances pour 2021 n'est pas adopté.