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Table des matières
Restitution de biens culturels au Bénin et au Sénégal (Nouvelle lecture)
: [Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture
: [Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure de la commission de la culture
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure
Conseil européen des 10 et 11 décembre 2020
: [M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances
: [M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes
M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes
Renouvellement des concessions hydroélectriques
Extension du bail mobilité aux victimes de catastrophes naturelles
Remplacement obligatoire des chaudières fioul et charbon
Avenir des petites lignes ferroviaires dans le Massif central
Liaison ferroviaire Beauvais-Paris
Mutations des gardiens de la paix
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté
Signature authentique à distance pour les Français de l'étranger
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté
Déclarations de nationalité française à l'étranger
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture
Rémunération équitable et aides à la création
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture
Report de charges des entreprises
Inquiétudes des salariés des usines Madrange
Prises de participation étrangères dans le secteur de la santé
Transfert à la DGFiP de taxes fiscales perçues par les Douanes
Situation de la filière conchylicole normande
M. Patrice Joly, en remplacement de M. Didier Marie
Nouvelle réorganisation des services académiques
Prestation de compensation du handicap parentalité
Avenir du service de neurochirurgie de la clinique des Franciscaines de Nîmes
Prestation d'accueil et de restauration scolaire en Guyane
: [Mme Marie-Laure Phinera-Horth
Infirmières libérales en zone rurale
Hôpital de Saint-Jean-de-Maurienne
Prise en charge de l'endométriose
Ordre du jour du mercredi 16 décembre 2020
SÉANCE
du mardi 15 décembre 2020
46e séance de la session ordinaire 2020-2021
présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président
Secrétaires : M. Jacques Grosperrin, M. Loïc Hervé.
La séance est ouverte à 14 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Délégation (Nomination)
Mme le président. - J'informe le Sénat qu'une candidature pour siéger au sein de la délégation à la prospective a été publiée.
Cette candidature sera ratifiée si la Présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.
Accord en CMP
Mme le président. - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi relatif au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée, est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
Rappel au Règlement
M. Jean Louis Masson . - La démocratie implique que les sénateurs non inscrits ne soient pas discriminés. Or ils sont régulièrement évincés ou anormalement défavorisés.
Lors de l'avant-dernière Conférence des présidents, j'ai indiqué que le nombre de questions d'actualité au Gouvernement qui nous était réservé n'était pas proportionnel à notre effectif. Par un courrier à notre président, j'avais explicité le mode de calcul. En retour, il m'a été opposé une fin de non-recevoir. Comme me l'a dit avec une certaine arrogance un responsable, « en politique, la raison du plus fort est toujours la meilleure ». Soit, mais cette différence de traitement est inacceptable.
Les trois sénateurs non inscrits n'auront droit qu'à une question au Gouvernement toutes les huit semaines de séance, alors que le GEST aura le droit d'intervenir à chaque séance de questions au Gouvernement : c'est deux fois plus souvent ! Nous avons pourtant la même légitimité démocratique !
Je tenais officiellement à dénoncer ce traitement discriminatoire.
Mme le président. - Acte est donné de votre rappel au Règlement.
Restitution de biens culturels au Bénin et au Sénégal (Nouvelle lecture)
Mme le président. - L'ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal.
Discussion générale
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture . - Après l'échec de la CMP, nous sommes réunis pour la nouvelle lecture de ce texte, fruit d'un long travail débuté après le discours du Président de la République à Ouagadougou en novembre 2017.
Ce projet de restitution concerne vingt-six oeuvres du Trésor de Béhanzin ainsi que le sabre et le fourreau attribués à El Hadj Omar Tall. Il s'inscrit dans le cadre d'une politique de coopération culturelle bien engagée avec le Bénin et le Sénégal et d'une réflexion sur le rôle et les missions des musées en Europe et dans le monde.
Le droit français propose plusieurs voies pour procéder à des restitutions. En l'espèce, le Gouvernement a choisi la voie législative : c'est bien une décision du législateur et non du juge qui va répondre à ces demandes. Cette loi ne crée donc aucune jurisprudence. Ce texte déroge ponctuellement au principe d'inaliénabilité mais ne le remet pas en cause.
Le Sénat soutient les objectifs du texte. De fait, la CMP n'a échoué que sur une disposition créant un conseil de restitution des oeuvres, à mon sens inutile, car les équipes de conservation des musées réalisent déjà ce travail scientifique, et en totale contradiction avec notre volonté de dialogue direct avec les pays demandeurs et avec le Parlement.
Comme cela a été dit il y a quelques semaines, chaque demande de restitution est unique, chaque objet a son histoire qu'il convient d'étudier. Du reste, vous réclamez fréquemment que le Parlement soit mieux respecté...
Au-delà, je sais que le départ de l'ornement de dais de la reine Ranavalona III a suscité beaucoup d'interrogations. Comme je l'ai déjà dit, il ne s'agit pas d'une restitution, mais d'un dépôt. Il faudrait, sinon, en passer par la loi. Je reconnais toutefois que la concomitance de l'annonce de ce dépôt et du débat a été malheureuse.
C'est au nom de la culture et de la conservation du patrimoine que la France accepte les restitutions. Le Bénin comme le Sénégal nous ont apporté des garanties sur ce point.
La restitution des vingt-six oeuvres du Trésor de Béhanzin au Bénin et du sabre attribué à El Hadj Omar Tall et de son fourreau au Sénégal est un acte d'amitié. (Applaudissements sur les travées du GEST)
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure de la commission de la culture . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Ce texte aurait dû rapprocher les deux chambres sur l'universalisme des arts et des droits culturels, en permettant à des oeuvres de retrouver la terre de leurs origines.
Le Sénat a adopté à l'unanimité ces restitutions, dans un objectif éthique et diplomatique. Cela permettra une coopération culturelle renforcée avec le Bénin et le Sénégal.
Le Sénat avait procédé à quelques modifications sémantiques qui, sans porter atteinte au retour des biens concernés, rendaient les dispositions du projet de loi plus conformes à la réalité. Elles s'inscrivaient dans un devoir de vigilance puisqu'il s'agissait du premier texte législatif faisant sortir des collections des oeuvres et objets d'art, et que nous savons tous que d'autres demandes suivront. Ce texte dépasse donc largement son seul objet.
De plus, le débat parlementaire n'a fait qu'entériner une décision du Président de la République, alors que le Parlement est le seul habilité à faire sortir des biens des collections nationales.
C'est pourquoi nous avons souhaité créer un conseil national, non pas de restitution, mais de réflexion sur la circulation et le retour des biens culturels extra-européens pour qu'émerge une nouvelle méthode dans le traitement des demandes de restitutions à venir. Nous sommes en effet convaincus que le débat autour des restitutions doit d'abord être abordé sous un angle scientifique.
Hélas, les députés s'y sont, comme vous, opposés au motif que cela alourdirait les procédures et allongerait les délais de réponse des autorités françaises aux demandes des pays tiers. Mais, déjà, les délais parlementaires doivent être respectés.
Selon les députés, ce conseil serait redondant avec les musées : c'est un argument fallacieux car jamais ils n'ont été consultés sur la légitimité des restitutions. Cette instance, dont la composition serait resserrée, serait bien sûr capable de traiter les demandes au cas par cas, en entendant des spécialistes.
Le rapporteur de l'Assemblée nationale a tenté de nous rassurer en promettant la création prochaine d'une cellule interministérielle ad hoc. Celle-ci continuerait toutefois à faire reposer la décision sur le Gouvernement et ne garantirait nullement une réflexion indépendante, d'où l'échec de la CMP.
L'Assemblée nationale a également rétabli le terme « restitution » alors que nous préférions celui de « retour » qui rappelle que la France est bien la légitime propriétaire des biens et qui rejette toute démarche de repentance.
Les députés ne semblent pas vouloir aboutir à un compromis sur ce texte.
Nous déplorons en outre le dépôt à Madagascar, le 5 novembre, de l'élément décoratif en forme de couronne qui surplombait le dais de la reine Ranavalona III, sans information ni consultation préalable du Parlement. En réalité, ce dépôt n'est que la première étape d'une restitution et non un simple prêt, puisque Madagascar en a demandé la restitution en février dernier. C'est ce qu'indique clairement la convention de dépôt conclue par le ministère des armées français avec le ministère de la culture malgache. Elle stipule même l'engagement de la France à « initier dans les meilleurs délais les mesures préalables à la procédure législative pouvant permettre [son] transfert de propriété définitif ». Cela envoie un très mauvais signal au Parlement qui est ravalé au statut de simple chambre d'enregistrement.
Passe encore pour le sabre, déjà présent à Dakar, mais l'exemple malgache montre combien le Gouvernement compte décider seul, faisant primer les enjeux diplomatiques sur les intérêts culturels. Cela rend d'autant plus utile la création du conseil national que nous appelons de nos voeux.
Dès lors, notre commission n'estime pas nécessaire de poursuivre le débat et présentera une motion tendant à opposer la question préalable.
Il n'en reste pas moins que les restitutions doivent faire l'objet d'une réflexion approfondie. Notre commission y travaille depuis dix ans. Fin 2019, j'avais proposé à la commission de la culture de dresser le bilan de l'action de notre pays sur ce sujet sur lequel le Sénat a toujours joué un rôle moteur, comme en témoignent les deux précédentes lois de restitution, celle de la « Vénus hottentote » et celle des têtes maories. Demain, sa mission d'information présentera ses conclusions et ses recommandations pour faire avancer le débat. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; Mme Claudine Lepage applaudit également.)
M. Pierre Ouzoulias . - Walter Benjamin rappelait que celui qui remporte la victoire fait partie du « cortège triomphal » qui passe sur ceux qui jonchent le sol. Leur butin est un héritage culturel de l'humanité. Et il ajoutait dans sa septième thèse sur le concept d'histoire : « Il n'est aucun document de culture qui ne soit aussi document de barbarie. Et la même barbarie qui les affecte, affecte tout aussi bien le processus de leur transmission de main en main ».
Cette violence présida souvent à l'accaparement par la France d'oeuvres d'art en Europe, en Afrique ou ailleurs. Le Louvre est plein des fruits de ces butins. Ainsi, les primats grecs de l'île de Milos furent punis du fouet et d'une amende lorsqu'il fut connu que la Vénus de Milo avait été cédée à la France à si vil prix.
Sous la Restauration, Quatremère de Quincy défendait une conception localisée du patrimoine : pour lui, déplacer les oeuvres revenait à les démembrer, les mutiler et à en réduire la valeur. La conception républicaine du patrimoine était au contraire universaliste et donc tournée vers l'avenir. Ce projet qui liait le futur au passé a été progressivement remplacé par des références plus floues au devoir de mémoire, à l'utilité des commémorations et à l'importance des célébrations.
Le passé tend à s'incruster dans le présent nous dit François Hartog. Je considère les modalités des restitutions comme les symptômes de la vision présentiste du passé. Je reste persuadé de la dimension universaliste des biens culturels. Elle ne peut pourtant plus être systématiquement opposée à toutes demandes de restitution ou d'échanges d'oeuvres. Néanmoins, elles doivent être fondées sur une étude historique rigoureuse, non être le fait du prince. (Applaudissements sur toutes les travées)
Le groupe SER se félicite que les articles 1 et 2 relatifs aux restitutions des vingt-six oeuvres du Trésor de Béhanzin et du sabre d'El Hadj Omar Tall aient été adoptés conformes. C'était une demande ancienne de la société civile africaine. Ces restitutions sont un signal important pour sa jeunesse qui souhaite s'approprier son histoire et renforcer son identité.
Nous aurions pu en rester là - mais d'autres pays africains demanderont, à l'avenir, de récupérer leurs biens culturels.
Nous avons donc proposé la création d'un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour des biens culturels extra-européens. Nous regrettons l'opposition des députés, en CMP et en nouvelle lecture. Cette instance éviterait pourtant les retours en catimini comme la couronne du dais de la reine Ranavalona III, récemment partie à Madagascar.
La décision du gouvernement de remettre cette couronne aux autorités malgaches sans informer le Parlement et alors même que nous examinions ce projet de loi en première lecture démontre bien toute l'utilité que pourrait avoir ce conseil.
Nous pouvons compter sur l'expertise des historiens et des conservateurs. Pourquoi nous en priver dans le cadre de telles restitutions ? Pour renforcer la transparence et éviter les décisions personnelles pour raisons diplomatiques, notre groupe était favorable à cette instance. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Max Brisson . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Sur le fond et sur la forme, nous sommes opposés à la méthode du Gouvernement. En première lecture, nous avons déjà dit nos réserves tout en votant à l'unanimité les articles 1 et 2. Madame la ministre, nous vous avions appelée à davantage de méthode, notamment en acceptant la création d'un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour des biens culturels.
Même l'abandon du mot « restitution », culpabilisant, a été rejeté ! Pourtant nos craintes étaient justifiées, comme l'a montré le renvoi en catimini de la couronne du dais de la reine Ranavalona III.
Désormais, les choses sont claires : vous faites un prêt, puis vous engagez un dépôt de long terme... avant un projet de loi de transfert de propriété. Vous tenez un lit de justice au Parlement, chambre d'enregistrement. Vous contournez le Parlement, pourtant seul légitime depuis la Révolution française à autoriser toute aliénation du patrimoine national, et vous le soumettez à l'humeur du prince de l'instant.
C'est une méthode dangereuse qui porte atteinte au principe de l'inaliénabilité des collections publiques : les dons et legs individuels pourraient se tarir, alors qu'ils représentent 50 % de l'enrichissement des collections.
Les oeuvres doivent bien évidemment circuler sur leurs terres d'origines, mais j'en appelle à une réflexion sérieuse sur la méthode et je salue le travail de Catherine Morin-Desailly sur la commission scientifique nationale des collections à laquelle, hélas, il n'a jamais été fait recours.
Le discours du Président de la République à Ouagadougou a relancé la réflexion mais le rapport Sarr-Savoy a tendu et faussé le débat.
Au lendemain du transfert vers Madagascar, avec le sentiment d'avoir été trompé, je fais partie de ceux qui regrettent d'avoir voté l'article 2 de votre projet de loi, qui officialise et cautionne une méthode que je réprouve.
Il faut nous doter d'une doctrine partagée, notamment sur la circulation des biens sur leur terre d'origine. La conception de l'universalisme de nos musées doit être réaffirmée dans le cadre d'un dialogue des cultures sans toutefois abdiquer nos valeurs.
Le Sénat vous a invitée, en vain, à élaborer une méthode globale croisant les questions de morale, de légalité, de légitimité, de respect des donations et des droits des descendants. Cette méthode aurait permis d'accroître la circulation des biens avec les pays demandeurs. À cela, le Gouvernement a préféré la simplification et la précipitation.
Vous nous avez toujours assuré qu'il ne s'agissait que d'un projet de loi d'exception mais nous voyons bien que le Gouvernement veut agir à sa guise.
Lors de nos auditions, nous avons été sensibilisés à l'intérêt d'une coopération internationale entre chercheurs français et étrangers. Sans cela, nous resterons à la merci de demandes de restitutions politiques. Le conseil national mettait un terme à cette dérive en plaçant les scientifiques au centre des débats.
L'existence des objets précède leur essence, nous disait un conservateur de musée, qui rappelait que l'objet avait un droit du sang mais aussi un droit du sol. C'est parfois son parcours qui lui donne sa valeur.
Le groupe Les Républicains soutient la motion de la commission tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Jean-Pierre Decool . - Les deux assemblées ont autorisé la sortie de vingt-sept biens au profit du Bénin et du Sénégal. Pourtant la CMP a échoué et nous regrettons la position du Gouvernement sur l'article 3 que nous avions introduit.
L'enjeu de ce texte dépasse son objet : il s'agit de la gestion du patrimoine culturel de la France. Le Parlement n'est pas une simple chambre d'enregistrement des décisions gouvernementales, et il est dommage d'avoir à le rappeler. Nous ne pouvons faire l'économie d'un débat contradictoire, s'agissant de collections publiques imprescriptibles et inaliénables.
Les demandes de restitution sont nombreuses et vont probablement se multiplier. À l'heure où nous examinions ce projet de loi, une couronne royale conservée au musée de l'Armée, don d'un particulier, était transférée à Madagascar. Une nouvelle fois, le Parlement est mis devant le fait accompli.
Il nous faut définir une méthode globale : c'est pourquoi le Sénat avait instauré un conseil national de réflexion pour soustraire le sort de notre patrimoine culturel aux aléas politiques mais aussi pour fonder les transferts de biens culturels sur une démarche scientifique et démocratique.
L'actuelle commission scientifique nationale des collections s'est déclarée incompétente pour expertiser les demandes de restitution, s'éloignant de l'esprit de la loi qui l'avait créée. Je partage le point de vue de Mme la rapporteure sur les conclusions caricaturales du rapport Sarr-Savoy, qui plaidait pour une restitution massive des oeuvres africaines.
Nos musées doivent être les témoins du caractère universel de l'art.
Passé d'imitation du réel à expression libre, l'art africain a bouleversé des pans entiers de l'art occidental : Picasso, Braque, Matisse, Derain... Les masques Fang au Gabon, les portes Dogon au Mali, les poupées Ashanti au Ghana ont marqué nos artistes, comme le montre André Malraux. Ces oeuvres ont une vocation universelle.
Madame la ministre, je connais votre attachement à la culture mais je soutiendrai la position de la commission et voterai la motion.
J'espère que la mission d'information débouchera sur une proposition de loi à la hauteur des enjeux que représentent les restitutions d'oeuvres pour les collections publiques françaises.
M. Thomas Dossus . - Ces biens ont été acquis pendant une période de notre histoire qu'il faut regarder avec lucidité.
Ces restitutions sont des gestes forts pour la coopération culturelle qui doivent être salués. Plus qu'un symbole, c'est un acte concret qui affirme que notre pays sait regarder son histoire en face, dans un esprit d'amitié. Mais ces vingt-sept objets ne sont que la partie émergée de l'iceberg. Cinq autres pays ont formulé des demandes pour la restitution de quelque 13 246 biens appartenant aux collections publiques françaises.
Ce projet de loi est le point de départ d'une coopération culturelle entre la France et les pays africains dont nous nous réjouissons. Il y va de la réconciliation de la France avec ces États. Il marque la fin d'une époque, une ère peu glorieuse de notre histoire où l'homme africain n'avait pas voix au chapitre, même si encore récemment, certains considèrent qu'il n'est pas rentré dans l'histoire...
Ces biens restitués au Bénin et au Sénégal sont des prises de guerre. Aujourd'hui, les esprits changent et les pratiques aussi, heureusement. C'est un mouvement de fond qui touche aussi les collectionneurs privés et qui se traduit par une nouvelle éthique relationnelle. Il faut rendre à l'autre pour s'enrichir tous.
Ce projet de loi apporte sa petite pierre à ce grand édifice ; le GEST le votera. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe RDPI)
M. Abdallah Hassani . - Les transferts de biens au Bénin et au Sénégal ne relèvent pas de la repentance mais d'une volonté d'apaisement de la mémoire, dans un partenariat équilibré avec ces pays. Leur population pourra alors s'approprier ces oeuvres, motifs de fierté.
La CMP a achoppé sur une question sémantique - le Sénat préférait le terme de « retour » à celui de « restitution » - et sur la création d'un conseil national.
Cette initiative du Sénat aurait ouvert la voie à de nouvelles restitutions - en laissant penser que le Parlement ne saurait exercer sa tâche avec discernement. En outre, la création d'un tel conseil aurait donné un caractère global à ce texte. Les demandes béninoises et sénégalaises ont fait l'objet d'une démarche diplomatique, scientifique et historique. Le débat parlementaire rationalise ces demandes, sans qu'il soit besoin d'une commission.
Le groupe RDPI regrette vivement qu'un consensus n'ait pu être trouvé. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)
M. Bernard Fialaire . - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE) Comme vous tous, je regrette l'échec de la CMP. Je partage l'avis du Sénat et le RDSE soutient la démarche de la commission de la culture.
Le Parlement ne doit pas être une chambre d'enregistrement.
Il ne s'agit pas de restitutions de biens mal acquis. Une restitution est un acte diplomatique mais le retour d'un bien culturel nécessite une réflexion culturelle approfondie. Les objets dont nous parlons témoignent des us et coutumes d'une époque dont nous sommes les héritiers.
La notion d'inaliénabilité doit être réinterrogée, comme le fut la notion d'imprescriptibilité avec Paul Ricoeur. Le retour d'un bien culturel est un don ; il acte la légitimité de la propriété, puisqu'on ne peut donner ce qui ne nous appartient pas.
Le retour n'est concevable que si des garanties de conservation sont apportées par les pays d'accueil, qu'il oblige. L'objet devient ensuite le vecteur de la culture du donneur.
Certains biens n'auraient jamais acquis leur valeur culturelle sans le travail scientifique mené en France. C'est leur parcours qui leur donne leur valeur.
Ce débat est beau et mérite mieux que le fait accompli. Le retour est un don qui enrichit autant celui qui donne que celui qui reçoit. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme Annick Billon . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Sans surprise, la CMP a échoué sur la question du conseil national de réflexion. Sans surprise, le groupe UC votera la motion de procédure, même si nous ne nous opposons pas à ces retours : comme le reste du Sénat, nous avons autorisé la sortie des collections publiques des vingt-sept biens concernés. Mais nous regrettons un grave problème de méthode. On traite le Parlement comme une simple chambre d'enregistrement ; le transfert en catimini d'une couronne malgache en est une preuve supplémentaire... Et ce n'est qu'en CMP que nous avons appris la création d'une cellule interministérielle dédiée à la question des restitutions.
Les biens culturels français ne seraient-ils que des goodies diplomatiques distribués lors des voyages présidentiels ? À la commission scientifique nationale des collections, supprimée par la loi ASAP, nous voulions substituer un comité national de réflexion. Car la boîte de Pandore est ouverte et le chef de l'État ne doit pas penser que les collections publiques sont à sa disposition... Un cadre scientifique est nécessaire. Le Gouvernement nous répond que le cadre existe. Dans ce cas, pourquoi créer une cellule interministérielle ad hoc ?
La démocratie, c'est compliqué : l'argument de la simplification ne tient pas. Il est indéniablement toujours plus simple de décider tout seul... (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)
La discussion générale est close.
Question préalable
Mme le président. - Motion n°1 présentée par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission de la culture tendant à opposer la question préalable.
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal (n°196, 2020-2021).
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure . - Cette motion ne remet pas en cause le retour des biens au Bénin et au Sénégal, qui a déjà été voté sans modification et n'est donc plus en discussion.
Nous sommes opposés au terme de « restitution », préférant le terme plus neutre de transfert. Les objets ont déjà été transférés aux pays concernés.
L'objet de la motion porte sur la méthode. Le Sénat souhaite une procédure pérenne, transparente et démocratique, applicable systématiquement et à laquelle la communauté scientifique doit systématiquement prendre part. Les députés de la majorité mettent en avant le lien de confiance avec les pays demandeurs et légitiment a posteriori les décisions.
Il aurait été souhaitable de trouver un accord car nous débattons de biens inaliénables, propriété de la Nation. L'Assemblée nationale est revenue sur les apports du Sénat. Nous regrettons les choix sémantiques qui dénotent la contrition, d'autant que le rapporteur de l'Assemblée nationale n'avait pas évoqué cette question en CMP.
La remise aux autorités malgaches de l'objet décoratif en forme de couronne qui ornait le dais de la reine Ranavalona III a perturbé nos débats. Le Gouvernement passe une nouvelle fois par la voie du dépôt, plaçant le Parlement devant le fait accompli.
Cet été, vingt-quatre crânes ont été envoyés en dépôt en Algérie et inhumés le surlendemain ; il a été indiqué que le Parlement devait régulariser ensuite la situation. C'est un véritable dévoiement de la procédure de dépôt, destinée à une sortie par nature temporaire des collections. Le Gouvernement se dispense systématiquement de l'aval préalable du Parlement, faisant prévaloir les enjeux diplomatiques sur l'intérêt culturel, scientifique et patrimonial des biens composant les collections publiques françaises.
Ces retours en catimini ne sont pas optimaux à long terme, même d'un point de vue diplomatique. Ils sont dommageables pour la science et privent la communauté nationale d'un geste fort.
La méthode du Gouvernement renforce la pertinence du conseil national de réflexion souhaité par le Sénat et rejeté par l'Assemblée nationale.
Les points de vue étant irréconciliables, la commission de la culture vous propose d'adopter cette motion opposant la question préalable. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et SER)
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Avis défavorable. Je me suis déjà beaucoup exprimée sur le sujet : la position du Gouvernement est suffisamment éclairée.
M. Thomas Dossus. - Après l'échec de la CMP, la rapporteure nous propose cette motion. Le cynisme de la ministre, le 4 novembre dernier lorsqu'elle a voulu rassurer le Sénat, est regrettable : l'annonce du transfert de la couronne à Madagascar a eu lieu le lendemain même !
Pour des restitutions sereines et durables, dans les meilleures conditions, il faut une loi-cadre. La majorité sénatoriale ne veut hélas pas en entendre parler, mais il est quelque peu hypocrite de rejeter la méthode strictement diplomatique du Gouvernement tout en se contentant d'être saisi par ce dernier, par le biais d'un projet de loi, à chaque fois qu'il juge utile de rendre une oeuvre à son pays d'origine. Telle n'est pas notre vision.
Le vote de la motion enverrait le message selon lequel le Sénat ne veut pas le retour des objets. Nous nous abstiendrons.
M. Max Brisson. - Nous voterons cette motion. Nous avons voté les deux premiers articles prévoyant le retour des objets dans leur pays d'origine. Ne nous méprenons donc pas sur le sens de notre vote !
Le problème, c'est la méthode : un dévoiement de la procédure du dépôt afin de conforter le seul fait du prince qui utilise les objets à des fins diplomatiques. Le patrimoine national ne se divise pas, ne se partage pas.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure et M. Pierre Ouzoulias. - Très bien !
M. Max Brisson. - Nous voulons non que le politique dise son fait mais que les scientifiques éclairent la Représentation nationale, seule à même de juger du caractère inaliénable des collections.
Nous ne sommes pas opposés aux circulations d'objets ni au dialogue des cultures. C'est leur cheminement qui donne leur valeur aux objets. Votez la motion ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Pierre Ouzoulias. - Très bien !
M. Bernard Fialaire. - Nous partageons toutes les réflexions et analyses de la commission. En revanche, par principe, le groupe RDSE, attaché au débat, ne vote jamais les motions opposant la question préalable.
La motion n°1 est adoptée.
En conséquence, le projet de loi n'est pas adopté.
Conseil européen des 10 et 11 décembre 2020
Mme le président. - L'ordre du jour appelle le débat à la suite de la réunion du Conseil européen des 10 et 11 décembre 2020.
M. Clément Beaune, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes . - L'ordre du jour de ce sommet européen était particulièrement chargé, à la hauteur des enjeux. Des décisions importantes et urgentes étaient attendues.
Nous pouvons nous réjouir d'avancées notables : les décisions prises sur la Turquie, l'ambition climatique, le paquet budgétaire et le plan de relance.
Jeudi après-midi se sont conclues les discussions entre le Parlement, la Commission et le Conseil européen sur le retrait des contenus terroristes en ligne. La Commission présente aujourd'hui son texte législatif sur ce sujet.
Le paquet financier, massif, a été adopté : plus de 1 800 milliards d'euros de 2020 à 2027, dont 750 milliards d'euros de relance pour les trois prochaines années.
Il est apparu que la Pologne et la Hongrie peuvent déposer un recours devant la Cour de justice de l'Union européenne pour contester la conditionnalité liée à l'État de droit. Tant qu'il sera en cours de jugement, ce qui devrait durer un an, la Commission s'est engagée à ne pas poursuivre ces pays - ce qui n'empêche pas le recueil d'informations, si nécessaire, sur de possibles manquements à l'État de droit.
La corruption ou le manque d'indépendance de la justice seront visés, avec un lien entre soutien budgétaire et strict respect de l'État de droit. Le blocage constaté ces dernières semaines est désormais levé.
Le règlement fixant le cadre financier pluriannuel, le budget 2021 et le plan de relance peuvent donc désormais être adoptés et entrer en vigueur dès le 1er janvier 2021. Chaque Parlement national s'exprimera sur les ressources propres, selon les règles en vigueur. Cette décision sera présentée dans les premières semaines de l'année 2021 devant l'Assemblée nationale et le Sénat, puisque votre autorisation est un préalable à la ratification de cet acte juridique qui permettra de financer le budget européen et la dette relative au plan de relance.
Autre avancée majeure : les chefs d'État et de Gouvernement ont renforcé leur coordination face à la pandémie Six contrats ont été conclus pour 1,5 milliard de doses de vaccin dont les premières devraient être distribuées avant Noël. Nous devons encore mieux coordonner nos efforts pour lever progressivement, comme nous l'espérons, les restrictions sur les déplacements et pour la reconnaissance mutuelle des nouveaux tests. Le Conseil européen a appelé la Commission à proposer une recommandation sur un cadre commun de reconnaissance mutuelle des tests et des vaccins.
Nous avons tiré les conclusions des échecs du printemps. C'est une véritable Union européenne de la santé que nous commençons à bâtir. La Commission a appelé à créer, dans cet esprit, une agence européenne de la santé. Un programme sanitaire figurera dans le prochain budget.
Des ambitions fortes ont été affirmées pour lutter contre le changement climatique, à la veille du cinquième anniversaire de l'accord de Paris. L'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'au moins 55 % d'ici 2030 par rapport à 1990 a été adopté dans la nuit de jeudi à vendredi. Ainsi pourra-t-il être procédé au dépôt d'une nouvelle contribution collective de l'Union européenne aux Nations unies, en vue de la prochaine COP organisé par l'Italie et le Royaume-Uni. L'Union européenne respectera les principes de coût, d'efficacité, de solidarité et d'équité dans ce processus.
La Banque européenne d'investissement sera mobilisée. Plus de 20 % des 750 milliards d'euros du plan de relance européen seront consacrés à la lutte contre le changement climatique.
L'ambition commune d'un mécanisme européen d'ajustement carbone à nos frontières a été affirmée pour 2023, qui entraînera le dépôt de propositions législatives dès l'an prochain.
Les États membres se sont aussi engagés à renforcer la lutte contre la menace terroriste, conformément à l'objectif du Président de la République, après les tragiques attaques connues par notre pays et l'Autriche.
Le Conseil européen a fixé en conséquence des objectifs qui devront être précisés et que la France soutient : lutte contre les contenus terroristes, responsabilité des plateformes en ligne, lutte contre l'influence étrangère sur les organisations civiles, religieuses, nationales, au moyen de financements parfois non transparents, nécessité d'avancer sur la conservation des données. Nous pourrons ainsi agir avec plus de réactivité et de force.
Le Conseil européen a été l'occasion de faire le point sur les discussions avec le Royaume-Uni. L'échéance du Brexit effectif est imminente : le 1er janvier prochain. Le Conseil européen a témoigné de son unité : aucun État membre n'a rouvert le débat ni remis en cause le mandat de négociation.
Au cours du dîner du 10 décembre, comme il est de coutume, puis dans la matinée de vendredi, les chefs d'État et de Gouvernement se sont entretenus de questions diplomatiques. Sur la Turquie et la situation en Méditerranée orientale, la France a tenu un discours de fermeté qui porte ses fruits : nous avons en effet adopté de nouvelles sanctions à l'unanimité, face à l'attitude unilatérale et provocatrice de la Turquie. C'était un test de crédibilité pour l'Union européenne. Rendez-vous a été pris avant mars pour envisager d'autres sanctions.
Cette unité a été difficile à construire et à tenir, mais la France a réussi à entraîner l'Europe vers la fermeté. Un rapport a été confié à M. Borrell pour envisager le cas échéant de nouvelles mesures.
Sur la relation transatlantique, le président Charles Michels a évoqué la nécessité d'identifier des pistes de nouveaux partenariats avec nos amis américains.
A également été évoqué le voisinage Sud. Vingt-cinq ans après le processus de Barcelone, il faut renouveler les relations avec les pays du pourtour méditerranéen, notamment sur les questions environnementales, d'éducation et de culture.
Il a aussi été question de la Lybie, de la centrale nucléaire biélorusse et des droits de l'homme.
Vendredi matin, un sommet de la zone euro s'est tenu en présence de Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE). La mise en place d'un filet de sécurité, via la réforme du mécanisme européen de stabilité (MES) qui offre une assistance financière supplémentaire en cas de crise, est une étape de plus vers l'union bancaire.
Le sommet fut long, chargé, mais, dans un moment difficile, qui pouvait faire craindre un risque de délitement ou de désunion, l'Union européenne a montré sa force et son unité. La France y a joué un rôle utile et central. Nous allons poursuivre les réformes que j'ai mentionnées dans les prochaines semaines, notamment sur la sécurité et sur l'État de droit. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP)
M. Pascal Allizard, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées . - De report en report, nous abordons une phase extrêmement critique du Brexit. Le Royaume-Uni retire des dispositions controversées sur le marché intérieur, mais le problème reste entier. Nous ne devons pas faiblir sur les principes que les 27, derrière Michel Barnier, se sont fixés dans la négociation : une concurrence équitable, un accès durable aux eaux britanniques pour la pêche et une gouvernance robuste.
Pour des raisons internes, les chances d'arriver à un accord sont hélas ténues. Qu'adviendra-t-il pour nos frontières, nos entreprises ? Une cohue indescriptible est annoncée à Calais, où déjà les camions se pressent, à cause des stocks constitués par les entreprises britanniques. Quid des mesures d'urgence prises par la Commission européenne en cas de no deal sur la pêche, par exemple ?
La mobilisation de la Royal Navy est un signe très inquiétant. Elle a d'ailleurs été dénoncée par notre collègue Tobias Ellwood, qui préside la commission de la Défense de la chambre des Communes.
Nous avons fêté l'anniversaire de l'accord de Lancaster House ; espérons que le Brexit ne gêne pas la coopération militaire franco-britannique. Le Sénat jouera tout son rôle pour la conforter.
Nous devrions pouvoir associer l'armée britannique - avec celle de la France, l'une des deux qui comptent en Europe - à la défense de l'Europe.
Il semblerait qu'on assiste à une prise de conscience sur la Turquie, même si elle est tardive. La manoeuvre turque visait à diviser les Européens. Le résultat est ambigu. Une condamnation verbale, c'est bien, mais une simple extension de la liste noire, c'est peu : nulle remise en question de l'union douanière ni embargo sur les ventes d'armes, ce qui a permis à la Turquie d'acheter des S-400 à la Russie... La Turquie sait que l'Europe est toujours liée par l'accord migratoire.
La démarche dite de « boussole stratégique » sur l'autonomie européenne est porteuse d'espoir ; elle devrait s'achever au premier semestre 2022, lorsque la France prendra la présidence de l'Union européenne, mais attention à ce qu'elle ne se borne pas à reprendre les concepts de l'OTAN. Il faudra intensifier le dialogue avec les pays d'Europe centrale, les sensibiliser aux problématiques du flanc sud de l'Europe, leur expliquer que l'attention que celle-ci doit y porter ne se fera jamais au détriment du flanc est ni de l'OTAN. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Jean-François Longeot, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - Plus personne ne se satisfait d'un objectif de réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre pour 2030. Le Conseil européen était - encore ! - un conseil de la dernière chance. L'Europe s'est depuis longtemps posée comme leader en la matière, notamment lors de la COP21 et de l'ambitieux accord de Paris, signé par 195 pays. Après le désengagement américain, elle s'en est fait le gardien.
Alors que la crise sanitaire se double d'une crise économique, nombreux étaient ceux qui appelaient à revoir à la baisse les objectifs. Je me réjouis que ce n'ait pas été le cas.
Les Français, soucieux des enjeux environnementaux, ne nous l'auraient pas pardonné.
Les décisions prises au Conseil ont montré que l'Europe était au rendez-vous, ayant abouti au renforcement des quotas carbones et à la création d'un mécanisme d'ajustement aux frontières pour éviter les fuites de carbone. Dès janvier dernier, le Sénat défendait cette proposition avec l'adoption d'une proposition de résolution de Jean-François Husson et Bruno Retailleau...
M. Stéphane Piednoir. - Eh oui !
M. Jean-François Longeot, président de la commission. - L'Europe a lancé un signal fort, en étant la première à réviser son objectif à la hausse.
Si l'Europe est la bonne échelle pour répondre à ce défi, je salue la diplomatie climatique française. Chine et Japon évoquent la neutralité carbone d'ici 2050 et 2060.
Nous suivrons avec attention la prochaine étape : en juin 2021, la Commission européenne présentera le plan d'action pour mettre en oeuvre cet objectif de 55 %.
La France a joué un rôle actif dans les réussites européennes ; elle doit être au rendez-vous lors de la future loi Climat. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La commission des finances s'est particulièrement intéressée à ce Conseil européen.
L'adoption du prochain cadre financier pluriannuel et de la décision sur les ressources propres était suspendue au véto hongrois et polonais. La pomme de discorde de la conditionnalité des fonds européens au respect de l'État de droit a été finalement levée par une déclaration du Conseil européen qui réaffirme le principe de souveraineté de chaque État membre, et précise que le lien entre la violation de l'État de droit et l'atteinte qu'elle constitue pour le budget de l'Union européenne devra être objectivement établi.
C'est un soulagement, mais cela n'éteint pas les interrogations sur la capacité du budget européen et du plan de relance à accompagner les États membres face à la crise actuelle.
Le cadre financier pluriannuel devra être décliné dans chaque pays. Son adoption tardive retarde le décaissement des fonds. Quelles mesures le Gouvernement prend-il pour y remédier ?
La décision « ressources propres » doit être ratifiée par tous les Parlements de la zone euro - en janvier au Sénat. À quelle échéance pensez-vous que le processus de ratification pourra être mené à son terme, monsieur le ministre ? Alors que le plan de relance européen doit financer 40 % du plan de relance français, faudra-t-il finalement attendre 2022 pour que la France en bénéficie, outre l'enveloppe de 4 milliards d'euros de préfinancement ?
Un sommet de la zone euro s'est aussi tenu en marge du Conseil. Les États membres se sont félicités de l'adoption du filet de sécurité. Une déclaration rappelle que l'Union doit jouer un rôle majeur dans le domaine de la finance verte. Quelles pistes proposez-vous ?
Le Brexit, même s'il n'était pas à l'ordre du jour, s'est imposé comme sujet de discussion. La commission des finances est très attentive à la conduite des négociations avec le Royaume-Uni. De fait, les enjeux budgétaires et financiers de notre future relation sont considérables.
Monsieur le ministre, je ne vous demanderai pas si vous voyez un accord possible, tant les rebondissements fréquents nous ont appris à nous méfier des certitudes. Je vous demande plutôt dans quelle mesure l'absence d'accord serait préjudiciable pour les prévisions de croissance économique de la France en 2021, alors que notre économie est déjà fragilisée par la crise. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes . - L'ordre du jour de ce Conseil était particulièrement lourd ; je m'en tiendrai à trois points.
Concernant la pandémie, une bonne nouvelle : nous en sommes à discuter de stratégie vaccinale. Mauvaise nouvelle : Sanofi, à qui l'Union européenne a précommandé 300 millions de doses, ne pourra pas livrer avant fin 2021.
Pourquoi, dans cette course aux vaccins, trouve-t-on en tête les biotechs américaines et chinoises ? J'y vois une incitation à encourager l'Europe de la recherche, et à presser le pas pour enfin mettre en place le brevet unitaire européen, compromis par la défection britannique et le retard pris par l'Allemagne dans la ratification de l'accord sur la juridiction unifiée du brevet.
Sur le numérique, nous attendons les propositions de la Commission pour forcer les plateformes à assumer leurs responsabilités. Il faut accélérer l'interopérabilité entre les organes de régulation nationaux notamment.
L'adoption de l'accord sur le cadre financier pluriannuel et le plan de relance européen est une avancée décisive, sans sacrifier l'État de droit si l'on en croit le Gouvernement. Je veux le croire, mais la déclaration du Conseil qui a levé les vétos polonais et hongrois est d'une portée juridique incertaine : il faudra que la violation de l'État de droit porte directement préjudice aux finances de l'Union. N'en sommes-nous pas réduits à l'impuissance dans laquelle nous étions déjà, en raison de l'unanimité que l'article 7 du traité requiert au Conseil pour constater l'existence d'une violation grave et persistante par un État membre des valeurs fondamentales de l'Union ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
Mme Laurence Harribey . - Ce Conseil européen aboutit à des clarifications et à la conclusion d'accords essentiels pour l'avenir de l'Union, mais laisse un certain nombre de questions en suspens. Certains verront le verre à moitié vide, d'autres à moitié plein...
Attachés à l'État de droit et à l'Europe sociale, nous aimerions vous faire part de quatre points qui nous interpellent.
Les garanties données à la Pologne et à la Hongrie ouvrent la voie à une Europe à deux vitesses : l'État de droit n'est pas conforté et la suspension du mécanisme donne une impression d'impunité, d'autant qu'elle sera décidée par la Commission seule.
De plus, la restitution rétroactive des fonds de cohésion et du plan de relance est juridiquement douteuse.
Ce genre de compromis acrobatiques, bâtis sur un échafaudage fragile, recèle des pièges. Espérons que l'accord avec le Royaume-Uni ne sera pas de ce type !
J'en viens au plan de relance et au séquençage du déblocage des fonds européens. Quid de la conditionnalité des prêts à des réformes structurelles, combattue par la France mais obtenue par les Pays-Bas ? Cela semble anachronique quand il s'agit d'aider des pays frappés par une crise exogène.
Si le pacte de stabilité a été suspendu, les contraintes du semestre européen perdurent.
Quid de l'articulation entre le plan national et l'enveloppe européenne de relance destinée aux régions, React EU ? On assiste à deux dynamiques parallèles, voire à la mise en concurrence des appels à projets, qui pourrait nuire à la consommation des crédits.
Notre troisième interrogation concerne le lien entre le plan de relance et la transition écologique. Comment se fera la répartition entre pays ? Comment parviendra-t-on à des ressources propres ? Les rachats d'obligations par la BCE ont semble-t-il bénéficié à 68 % à des entreprises liées aux énergies fossiles... Il faut recentrer son action.
Enfin, quatrième point : l'Europe, si elle a seulement une compétence d'appui dans le domaine sanitaire, doit être proactive. Il faut notamment un accès équitable au vaccin pour tous, or le Conseil considère que c'est l'accès à la vaccination, non le vaccin lui-même, qui constitue un bien commun. Cela n'ouvre pas la voie à une cession de la propriété intellectuelle. Pourtant, la commande publique a largement contribué à la mise au point des vaccins !
La pandémie a mis en lumière la dépendance de l'Europe à l'égard des géants du numérique pour la maîtrise des données de santé. La France a confié sa base de données à Microsoft ! On a mesuré combien le numérique conditionne la souveraineté économique. Le pack digital de la Commission est donc une avancée, mais il faudra rester très vigilant.
La crise oblige à repenser la nature et les modes opératoires des politiques européennes. À la veille de la présidence française, il faudra trouver de nouvelles coopérations entre parlementaires et gouvernements. Nous n'avons que peu d'éléments concernant la convention sur le futur de l'Union européenne, notamment sur l'association des parlements nationaux. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)
M. Jean Louis Masson . - Le dernier Conseil européen s'est soldé par un échec global, qui dépasse le seul Brexit. Cela résulte de choix discutables.
Hostile à l'origine à l'entrée du Royaume-Uni dans l'Union européenne, je me réjouis que Boris Johnson en sorte. Hélas, l'Union se refuse à la moindre concession dans la négociation, sans doute pour éviter de créer un précédent : certains semblent avoir intérêt à ce que cela se passe mal. Une frontière douanière entre l'Irlande et la Grande-Bretagne serait absurde - un peu comme si l'Allemagne demandait l'instauration de postes frontières entre l'Alsace-Lorraine et le reste de la France...
L'Union européenne a exercé un chantage financier à l'égard des gouvernements légitimement élus de la Pologne et de la Hongrie pour qu'ils se soumettent à un soi-disant État de droit, qui est une notion artificielle, sans légitimité juridique. (Rires ironiques sur diverses travées) De quel droit bafoue-t-on ainsi la volonté de leurs peuples ?
Enfin, l'Union n'est pas à la hauteur de l'impérialisme turc qui multiplie les menaces et les agressions. M. Erdogan ne comprend que les rapports de force. Au lieu de nous comporter comme Dalladier et Chamberlain face à Hitler en 1938, nous devons prendre de véritables sanctions.
Mme le président. - Merci de conclure.
M. Jean Louis Masson. - L'Union européenne est devenue un véritable boulet.
Mme Colette Mélot . - L'année 2020 a été éprouvante pour l'Europe et je me réjouis des avancées du dernier Conseil européen, notamment en matière d'accès coordonné des peuples à la vaccination. La coordination doit s'intensifier également en matière de tests. Je plaide pour une Europe de la santé, complémentaire de nos politiques nationales.
La révision des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre à 55 % à l'horizon 2030, premier pas vers la neutralité carbone, est une bonne chose. Certains États membres sont très dépendants du charbon - l'accord était d'autant plus important. Beau clin d'oeil pour l'Europe de se donner comme nouvel objectif une sortie du charbon, elle qui est née de la Communauté européenne du charbon créée en 1950 par Robert Schumann.
Il est temps de nous doter d'une vision diplomatique commune et je me réjouis de la nomination de Josep Borrell pour dresser un état des lieux de la relation avec la Turquie.
La levée du veto polonais et hongrois sur le budget et le plan de relance n'a pas été obtenue en rognant sur le respect de l'État de droit, mais l'Union a su faire preuve de compromis en prévoyant un rôle central de la Cour de justice de l'Union européenne dans le mécanisme de l'État de droit : c'est heureux. Aucun peuple ne doit être laissé de côté dans le cadre de la relance européenne.
Il reste à franchir l'étape du Brexit, mais les discussions ne sauraient aller au-delà de 2022, car l'Union européenne doit se concentrer sur son avenir. Nous espérons tous un accord respectueux de nos valeurs et de nos intérêts. Le « rêve ardent de l'Europe », selon les mots de Valéry Giscard d'Estaing, est toujours d'actualité. Faisons-le vivre au travers de notre jeunesse ardente !
Les Européens doivent décider d'un cap et regarder dans la même direction. L'Europe a toujours dansé au bord de l'abîme ; aidons-la à vivre plutôt qu'à survivre ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC)
M. Jacques Fernique . - L'Union européenne tient ; elle ne déçoit pas. Le Conseil européen a répondu à nos attentes avec l'adoption du paquet budgétaire qui consacrera des quotités contraignantes à la transition écologique et mettra en oeuvre des ressources propres. Certains pays ont obtenu des délais, mais la Cour de justice sera garante de l'État de droit et les subsides européens pourront être suspendus à la majorité qualifiée si les règles ne sont pas respectées : il ne s'agit pas d'un recul face à la Pologne et à la Hongrie.
Les objectifs en matière d'émission de gaz à effet de serre devaient être rehaussés, car nous étions loin des engagements de l'accord de Paris. Les écologistes européens seront vigilants sur ce point.
Les parlements nationaux devront donner leur assentiment à l'endettement pour financer le plan de relance européen. Nous y sommes favorables et agirons partout pour que ce feu vert soit donné. Il faudra que les quotités contraignantes pour l'environnement - de 30 % sur le changement climatique et 10 % sur la reconquête de la biodiversité - se traduisent en actions concrètes à court terme, et non pas en ces petits pas dont la France a la spécialité.
Il ne serait pas acceptable d'évaluer l'effort en la matière sans critères fiables, comme le fait hélas le Gouvernement français.
Les ressources propres devront s'appuyer des assiettes et des taux pertinents. Il s'agit d'activer des leviers écologiques et de faire contribuer ceux qui profitent de l'Europe.
Nous sommes attachés à la future taxe carbone et entendons qu'elle ne soit pas renvoyée aux calendes grecques. Nous resterons optimistes et résolument exigeants. (Applaudissements sur les travées du GEST)
M. André Gattolin . - C'est un bonheur de parler d'Europe à une heure décente, même si l'auditoire est clairsemé...
M. Gérard Longuet. - Mais la qualité y est !
M. André Gattolin. - ... devant un ministre qui allie maîtrise technique des dossiers et sens politique - grâce auquel il évite l'écueil du technicisme roboratif et déshumanisé.
Les conclusions du Conseil européen sont connues. Souvent, ce type de débat a un intérêt limité. Beaucoup d'orateurs ont évoqué le Brexit, sujet crucial, même s'il n'était pas inscrit à l'ordre du jour officiel du Conseil. Nous sommes attachés au maintien de la place à accorder aux parlementaires dans les discussions qui s'ouvriront sur l'avenir de l'Europe et à l'approche de la présidence française de l'Union européenne.
La présidence allemande s'achève. Pour la première fois, un dirigeant européen, Angela Merkel, a assumé par deux fois cette fonction. Seul Viktor Orban peut espérer faire aussi bien s'il se maintient jusqu'en 2024.
Cela montre la place centrale de l'Allemagne dans l'Europe. Ce fut une grande présidence allemande, avec notamment l'adoption du plan de relance. Il ne manque plus qu'un accord sur le Brexit !
Pour assurer le succès de sa présidence, l'Allemagne a accepté de renoncer à de nombreux dogmes, notamment sur le déficit budgétaire, le niveau des aides d'État, l'endettement de l'Union pour financer le plan de relance ou encore la mutualisation de cette nouvelle dette.
La puissance commerciale et financière de l'Allemagne, ainsi que sa rigueur budgétaire, sont au fondement de sa réussite. Depuis quinze ans, ce pays vit en harmonie avec ses voisins, mais cela a un prix, qui se situe dans le cadre financier pluriannuel et le plan de relance. Le mécanisme de l'État de droit ne sera pas opérationnel avant 2023...
Quant aux sanctions ciblées pour les violations des droits de l'homme, l'Europe ne saurait être un tigre de papier. Les États-Unis ont inscrit 250 normes sur la liste Magnitski, le Canada 70 et le Royaume-Uni 25. L'Europe doit elle aussi faire ce travail, sauf à se ridiculiser. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)
Mme Véronique Guillotin . - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE ; M. Jean-François Husson applaudit également.) Tandis que le Brexit n'a pas encore trouvé d'issue, un compromis a été trouvé avec la Pologne et la Hongrie sur le plan de relance. Le Conseil européen a rappelé son attachement à l'État de droit : c'est essentiel.
Au-delà des questions financières, Varsovie et Budapest avaient besoin de l'instrument de relance, qui représente environ 4 % de leur PIB.
La décision sur les ressources propres doit encore être concrétisée.
L'Europe doit rapidement lever de l'argent sur les marchés, car la crise sanitaire dure. De fait, aucun pays ne semble avoir trouvé de méthode miracle pour lutter contre le virus, et l'Allemagne hier applaudie est aujourd'hui dans une situation dégradée, tandis que la France, mauvais élève avant l'été, offre un meilleur exemple...
Il est heureux que l'Union européenne ait contracté avec des laboratoires pour des achats anticipés de doses de vaccins. Où en sommes-nous, monsieur le ministre ?
Il faudra adopter une approche coordonnée des certificats et éviter les blocages transfrontaliers observés lors du premier confinement.
La crise sanitaire a révélé notre dépendance en matériel et produits médicaux. L'Europe dépend de l'Asie pour 80 à 85 % des principes actifs. Il faut construire une Europe de la santé, capable de produire des médicaments.
La validation de l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre est une décision forte, un signal à l'égard des États-Unis et de la Chine.
Le RDSE soutient cet objectif. Il faudra à la fois accélérer la transition écologique du système de production et dégager l'horizon économique européen en employant l'instrument de relance. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE ; MM. Claude Kern et Jean-François Husson applaudissent également.)
M. Pierre Laurent . - Le Conseil européen s'est terminé par un « ouf » de soulagement. Ces sommets ne font plus rêver personne. La crise est permanente et les problèmes toujours devant nous.
L'objectif de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport au niveau de 1990 est un progrès - tardif - qui nous laisse toujours hors des clous de l'accord de Paris. Mais surtout, où sont les moyens pour l'atteindre ? Vous nous dites que 30 % des 800 milliards d'euros du plan de relance sont fléchés vers l'environnement. Mais c'est très insuffisant. Et comment y croire, quand la Convention citoyenne pour le climat voit ses propositions, fret ferroviaire ou rénovation de l'habitat, retoquées ? Quand le projet Hercule qui vise à démanteler EDF se négocie à Bruxelles ? Quand la loi du marché continue de régner ?
Les vétos hongrois et polonais ont été levés, au prix d'un arrangement confus sur l'État de droit : une nouvelle usine à gaz pour donner le change... C'est une honte d'entendre les gouvernements hongrois et polonais se réjouir.
Face à la pandémie, l'Union européenne s'est mieux coordonnée, sur la recherche ou sur la production de vaccins. Mais nous finançons des firmes américaines. La question de notre souveraineté reste entière. Il faut une reprise en main publique, comme nous le proposions avec la création d'un pôle public du médicament.
Le Brexit risque de signer un échec retentissant pour l'Europe. Un no deal plongera la pêche française dans l'inconnu pour 2021.
Tout reste à faire, nous aurons besoin d'une refondation au grand jour, avec les citoyens de toute l'Europe. Il faudra changer les traités en profondeur. C'est aussi le rôle de la Banque centrale européenne qu'il faut revoir. Elle a fait de récentes annonces sur sa politique de rachat d'actifs, prolongée jusqu'en 2022, et sur le mécanisme de soutien au crédit bancaire, avec une grille de taux négatifs : à quoi va servir tout cet argent ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
M. Claude Kern . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le Brexit n'était pas à l'ordre du jour de ce Conseil européen. Dans quinze jours, le Royaume-Uni sortira de l'Union européenne. Or jusqu'ici, le no deal semble être la seule issue des négociations en cours. La tension monte pour de nombreux secteurs.
Trois obstacles demeurent : la pêche, la concurrence équitable et la gouvernance. L'Union européenne ne peut pas céder sur ses principes. Les populations frontalières sont inquiètes. Le déploiement de quatre navires britanniques n'est pas rassurant. Comment les secteurs concernés peuvent-ils s'adapter ? Où en sont les négociations, notamment sur la pêche et la bande des 6 à 12 milles ?
L'Union européenne joue un rôle international de premier plan dans la lutte contre le changement climatique. Les États membres ont décidé à l'unanimité de rehausser leur objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre, pour le porter à une diminution de 55 % par rapport au niveau de 1990. Nous nous félicitons de cet accord, cinq ans après les accords de Paris. Mais voter un accord est une chose ; mettre en place des politiques nationales en est une autre. La future loi Climat sera-t-elle à la hauteur ?
Je reparlerai de Strasbourg à une autre occasion. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mme Marta de Cidrac . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le dernier Conseil européen a accouché de plusieurs accords importants.
Sur le Brexit, la dernière date butoir a été ignorée et les négociateurs ont décidé... de ne rien décider. Ce nouveau délai est-il le reflet du refus des négociateurs d'endosser la responsabilité d'un échec juste avant le Conseil ? En cas de no deal, les Européens et les Britanniques sauront-ils retisser leur relation ?
Je salue le compromis sur le paquet financier pluriannuel. L'Europe a évité l'écueil de la paralysie budgétaire. Quel est le calendrier pour soumettre au Parlement la décision sur les ressources propres ?
S'agissant du rehaussement de nos objectifs sur le réchauffement climatique, après la question du combien, c'est la question du comment qui émerge. Nous n'avons pas encore beaucoup d'éléments. Les conclusions du Conseil sont avares de précisions quant au cadre facilitateur de la transition énergétique vis-à-vis des États membres les moins riches et les plus dépendants des énergies fossiles. Quelques pistes ont été évoquées, comme le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, que je salue : il faut le mettre en place au plus vite, tant pour l'économie que pour l'écologie.
Sur la Turquie, le bilan du Conseil est en demi-teinte. Les chefs d'État et de gouvernement ont durci le ton face à la politique néo-ottomane de M. Erdogan, mais l'approche n'a pas changé : il s'agit encore d'une politique de petits pas, notamment sur les forages turcs dans les eaux territoriales chypriotes. Le Conseil de mars réexaminera cette question. Les Européens doivent prendre leurs responsabilités face à Ankara ! (Applaudissements à droite)
M. Pierre Louault . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Ce dernier Conseil européen a été fructueux. Il met en place une véritable solidarité financière. L'accord sur le Brexit permet de lever les incertitudes.
L'Union européenne a acheté des vaccins : c'est une avancée tardive mais réelle, qui montre que l'Europe sait progresser. Les objectifs rehaussés sur le climat sont une autre avancée forte.
Les incidents avec la Turquie se sont multipliés, en Méditerranée orientale, en Libye, à propos du Haut-Karabagh, sans compter les insultes à l'égard du Président de la République et l'appel au boycott des produits français, et enfin les actions illégales contre la Grèce et Chypre. Il est loin le temps où l'on évoquait une adhésion de la Turquie à l'Union européenne ! Plus personne n'est dupe. La France a plaidé pour la fermeté et des sanctions ciblées ont été décidées : c'est un premier pas pour se faire respecter d'Ankara. Pourtant, la Turquie est notre alliée au sein de l'OTAN depuis 1952...
L'accord sur le paquet financier permettra à l'Europe d'emprunter solidairement. C'est un signal fort. Chacun en Europe doit aussi comprendre que le respect de l'État de droit est incontournable : le mécanisme mis en oeuvre à cet égard est une autre avancée forte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. Gérard Longuet . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je suis de conviction européenne et suis un libéral : je crois en l'économie de marché.
Or la position de l'Union européenne à l'égard du marché unique de l'électricité me déconcerte. Un marché unique de l'électricité est une absurdité. L'électricité ne se stocke pas, ce qui empêche de lisser les pointes de productions ; elle se transporte mal, ce qui empêche de lisser les disparités géographiques ; et surtout son offre est contrôlée par la volonté politique de la puissance publique. Certains pays, comme l'Allemagne et la Belgique, ont choisi de renoncer au nucléaire et veulent désormais priver les consommateurs français des avantages retirés de nos 56 centrales nucléaires. Nous avons consenti dans le passé un investissement important, payé dans nos factures ; notre solution est désormais moins coûteuse.
Or la communauté européenne voudrait que le prix de l'électricité en France s'aligne sur le coût marginal de la plus mauvaise centrale thermique allemande. C'est inacceptable. J'entends se diffuser sournoisement un message insidieux : on nous annonce l'hydrogène vert mais on laisse entendre que l'hydrogène issu du nucléaire par électrolyse n'aurait pas droit de cité et serait taxé. Quelle est la position de la France ?
Le nucléaire nous permet de disposer d'une électricité fiable et abondante à un prix compétitif.
En outre, nous devons dégager des marges pour renouveler nos installations. La concurrence devrait permettre de choisir le meilleur outil de production. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC)
M. Laurent Duplomb . - Le Conseil européen a abouti à la signature d'un accord sur la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre. Mais cet effort doit être collectif, européen et mondial.
Selon les termes de l'accord, il s'agit de créer des emplois et contribuer à la compétitivité de l'Union... Le diable se cache souvent dans les détails. J'ai donc examiné la réforme de la PAC, pour vérifier comment les objectifs étaient mis en musique. Le green deal européen prévoit moins 25 % d'engrais, moins 50 % de pesticides. Ces chiffres sont-ils réalistes sans une réduction de la production agricole ? Aucun producteur n'utilise ces produits de gaieté de coeur, mais parce qu'il n'a pas le choix. Sans alternative crédible, c'est une condamnation à mort.
Le green deal prévoit aussi une décroissance de 10 % de la surface productive, pour rendre des espaces à la biodiversité. La part du bio doit monter à 25 % de la production totale : autre facteur de baisse du volume de la production agricole européenne. L'Union européenne ne l'assume pas et ne la chiffre dans aucune étude d'impact. Mais les États-Unis le font pour nous : 12 %...
Et la Commission européenne accélère la signature d'accords commerciaux dans lesquels nos agriculteurs sont perdants ! Notre souveraineté est en danger, non seulement vis-à-vis de la concurrence extracommunautaire mais encore plus à l'intérieur de l'Europe. Il y aura toujours les bons et les mauvais élèves ; la France se veut à la pointe, mais elle perdra des parts de marché au profit de nos concurrents polonais, allemands ou néerlandais.
La nouvelle PAC renforce les obligations environnementales à travers les « eco-schemes », en français « écorégimes », mais elle prévoit également une subsidiarité jamais égalée, avec la possibilité pour chaque pays de ne pas respecter ses obligations environnementales en accordant davantage d'aide aux revenus à ses paysans.
Derrière les grands discours, le diable est dans les détails. Le Conseil européen a fixé un cap clair, mais veillons à ne pas faire émerger un monstre décroissant qui sape les fondements de la PAC.
Mme le président. - Veuillez conclure.
M. Laurent Duplomb. - Comme le disait Saint-François de Sales en 1604 : « L'enfer est pavé de bonnes volontés ou désirs ». Et encore : « C'est au nom du bien que les hommes se font du mal. »
M. Clément Beaune, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes . - Monsieur Allizard, nous avons recruté plus de 700 douaniers et 300 vétérinaires supplémentaires pour le contrôle sanitaire des produits britanniques ainsi que 300 policiers aux frontières, car au 1er janvier, la durée de séjour des ressortissants britanniques dans l'espace Schengen devra être vérifiée.
C'est un travail très lourd que nous menons avec les collectivités et les autorités portuaires. Il convient de rappeler que, deal ou no deal, des changements s'opéreront au 1er janvier, dans le contrôle douanier, sanitaire ou celui des passagers.
Dans un cadre à adapter, l'Union européenne poursuivra sa coopération, sécuritaire et sanitaire notamment, avec le Royaume-Uni. Un sommet franco-britannique se tiendra prochainement.
L'accord européen avec la Turquie comporte des faiblesses, dites-vous. Je partage vos réserves : il faudrait aller plus loin. Mais la posture européenne a changé. Sur la Méditerranée orientale, les sanctions individuelles sont une étape importante. Le prochain rendez-vous est en mars prochain : avec Josep Borrell, nous adopterons d'autres mesures si nécessaire.
Vous avez raison, l'Union européenne ne doit pas se contenter de copier le concept stratégique de l'OTAN. Elle travaille de façon autonome à une « boussole stratégique » qui devrait aboutir en 2022 sous la présidence française.
Monsieur Longeot, je partage votre reconnaissance de l'effort environnemental européen, avec le relèvement des objectifs pour 2030. Ce n'est pas de la naïveté : au contraire, notre exemplarité entraîne d'autres grandes puissances - ainsi la Chine a annoncé un objectif de neutralité carbone pour 2060. Sur l'environnement, nous avons tenu bon, malgré les reculs américains, et le retour des États-Unis dans l'accord de Paris est une bonne nouvelle.
Monsieur Husson, je ne crois pas que nous ayons perdu six mois dans l'adoption du plan de relance européen : c'est le jeu normal de la démocratie. Le 21 juillet, les chefs d'État et de gouvernement ont trouvé un accord. Les actes législatifs qui le traduisent ont été pris par le Parlement européen le 16 novembre. Entre cette date et le 10 décembre, soit moins d'un mois, nous avons oeuvré à lever le blocage hongrois et polonais.
Le prochain cadre financier pluriannuel commence en janvier. En revanche, la mise en oeuvre du plan de relance européen mettra un peu plus de temps en raison des ratifications nationales de la décision « ressources propres » ; elles devraient s'achever début février. Notre « plan national de relance et de résilience » sera déposé à Bruxelles entre fin janvier et début février, et les premiers fonds européens arriveront au cours du printemps. Nous prévoirons un préfinancement pour ne pas perdre de temps.
L'impact financier d'un no deal serait de 0,1 point de croissance en 2021, comme le ministre de l'économie l'a annoncé hier matin. Cela reste modeste mais, notamment pour la pêche, nous souhaitons un accord. Cependant, nous n'accepterons pas des conditions dégradées.
Monsieur le président Rapin, si certaines start-up sont en avance sur le vaccin, c'est parce qu'elles font appel à des technologies innovantes. Beaucoup produisent en Europe. Certaines d'entre elles, comme BioNTech, ont reçu des financements européens pour la phase de recherche fondamentale. C'est un motif de fierté. Nos outils de protection industrielle ne seront pas remis en cause.
Le mécanisme liant l'attribution de fonds européens à l'État de droit est une avancée majeure. Couvre-t-il toutes les atteintes ? Non. Ce sont principalement la lutte contre la corruption et l'indépendance de la justice qui sont ainsi défendues. Mais c'est une étape importante, un outil complémentaire à la fois de l'article 7, qui permet les pressions politiques, et de l'action de la CJUE, qui a déjà sanctionné les violations de l'État de droit par la Pologne et la Hongrie. De plus, le mécanisme fonctionne à la majorité qualifiée, et non à l'unanimité. La Commission européenne ne suspendra pas l'outil en cas de recours de la Hongrie et de la Pologne devant la CJUE : nous ne perdrons pas de temps dans sa mise en oeuvre.
Je ne sais pas si l'on peut parler de rétroactivité, madame Harribey, mais l'intégralité du plan de relance et du budget européen seront concernés par le mécanisme dès le 1er janvier 2021.
ReactEU est un instrument financier qui ira directement aux régions, disponible à partir du printemps. La France recevra 4 milliards d'euros à ce titre.
Nous devons attendre les propositions de la Commission européenne sur le « mécanisme d'ajustement carbone aux frontières », autrement dit la taxe carbone. La partie n'est pas gagnée, mais c'est un combat juste et de bon sens. Nous ne pouvons accepter que les partenaires de l'Union européenne ne fassent pas les mêmes efforts en matière de climat. C'est bien un ajustement. La discussion législative européenne pourrait s'achever entre la fin 2022 et le début 2023.
Les discussions sur le Traité sur la charte de l'énergie n'avancent pas. D'autres ministres et moi-même venons de signer un courrier à la Commission pour accélérer le dialogue, faute de quoi nous sortirons du cadre car les dispositions existantes ne conviennent plus.
Afin de faire vivre la proclamation des vaccins comme bien public, portée par la France depuis le printemps dernier, la présidente de la Commission européenne a annoncé des dons de doses de vaccins aux pays qui en auront le plus besoin.
Nous espérons que la Conférence sur l'avenir de l'Europe pourra se tenir au prochain semestre, sous la présidence portugaise. Les parlements nationaux seront appelés à contribuer à ce travail. Monsieur Laurent, toutes les institutions, les associations pourront y participer, ainsi que des panels citoyens, le Président de la République l'a encore dit hier.
Monsieur Masson, je défends avec ardeur la solidarité européenne. Je l'assume, y compris quand elle est difficile à expliquer. En revanche, quand on est attaché à la souveraineté de la France, je ne vois pas comment l'on peut accepter des versements sans contrepartie à des pays qui bafouent l'État de droit.
Madame Mélot et monsieur Kern, vous avez évoqué le maintien du siège du Parlement européen à Strasbourg. Nous avons remporté une bataille avec le retour symbolique du Parlement européen dans l'hémicycle de Strasbourg. Il faut une reprise rapide des sessions, et nous signerons le prochain contrat triennal avec la ville début 2021.
Monsieur Fernique, je salue la mobilisation des écologistes pour le plan de relance européen. La ratification française interviendra au premier trimestre ; il est très peu probable que les pays dits « frugaux » s'y refusent.
Monsieur Gattolin, j'appelle moi aussi de mes voeux un Magnitsky Act à l'européenne.
Madame Guillotin, la date d'autorisation de mise sur le marché du vaccin Pfizer BioNTech pourrait être avancée au 21 décembre. Les certificats de vaccination sont une piste à explorer ; mais tant qu'une immense partie de la population n'est pas vaccinée, les exiger créerait des barrières illégitimes alors que nous comptons 350 000 travailleurs frontaliers.
Monsieur Laurent, je ne suis pas chargé du dossier Hercule mais le temps du débat parlementaire viendra. Quant au mécanisme sur l'État de droit, je suis le premier à souhaiter son élargissement, mais l'avancée obtenue n'est pas négligeable.
Vous demandez également à quoi sert la BCE : cela me surprend car il fut une époque où votre famille politique lui reprochait d'être trop allemande, trop orthodoxe. Elle investit désormais massivement pour soutenir la croissance et maintenir des taux d'intérêt bas : soutenons-la.
Monsieur Kern, nous défendons l'accès de nos pêcheurs à la bande des 6 à 12 milles. L'initiative de la Royal Navy n'était, j'ose le croire, qu'une provocation aberrante, une manoeuvre tactique dans la négociation.
Madame de Cidrac, le Fonds pour une transition juste pourra être utilisé pour soutenir la transition énergétique ; le Fonds pour la modernisation sera également l'un des paramètres discutés pour la mise en oeuvre de l'objectif de réduction de 55 % des émissions en 2030.
Monsieur Louault, il y a bien une convergence euro-américaine vis-à-vis de la Turquie, notamment pour sanctionner l'achat de matériel de défense russe.
Monsieur Longuet, nous défendons le choix stratégique du nucléaire, de plus en plus attaqué au niveau européen. Chaque pays doit avoir une marge de manoeuvre pour atteindre les objectifs à travers son mix énergétique. Concernant le mécanisme de fixation des prix de l'électricité, l'Arenh - accès régulé à l'électricité nucléaire - fait l'objet de discussions avec la Commission européenne.
Monsieur Duplomb, il y a des dérogations mais nous travaillons pour que les éco-régimes, qui limitent les distorsions de concurrence, soient bel et bien obligatoires. Nous serons vigilants. Pour atteindre 30 % de dépenses pro-climat, il faudra nécessairement mobiliser la PAC. Pour cela, il faut également que les accords commerciaux négociés par la Commission européenne ne ruinent pas les efforts de nos producteurs. C'est la raison de notre opposition à l'accord avec le Mercosur.
M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes . - J'ai gardé le Brexit pour mon intervention conclusive... Monsieur le ministre, nous sommes tous épuisés par ces négociations qui n'aboutissent pas. Dimanche dernier avait été fixé le troisième rendez-vous pour conclure les négociations... et nous voilà repartis pour quelques jours encore...
Une chose est certaine : dans 15 jours, le Royaume-Uni quitte l'Union européenne. Comment allons-nous appréhender le jour d'après ? La transition sera difficile à aborder.
Je me suis rendu à de nombreuses reprises sur les sites des Hauts-de-France et de Normandie. Au stade de la répétition, tout à l'air d'aller bien. Nous verrons le 1er janvier... Je proposerai aux membres du groupe Brexit une visite sur site le 4 janvier, pour voir comment les choses se passent.
Ensuite, la mise en place du Cadre financier pluriannuel (CFP) nous pose encore des problèmes : la ratification par les parlements nationaux avant février semble non pas impossible mais presque folle, tant l'enjeu est grand. Au-delà des ressources propres, c'est un engagement sur trente ans, mais aussi une vision plus fédéraliste qui s'impose. Le Parlement aura à se prononcer sur l'orientation que doit prendre l'Europe.
Enfin, lors du prochain Conseil européen en 2021, j'espère une position plus forte face à la Turquie. L'Union européenne doit être un outil de gestion de notre relation avec ce pays. Espérons que le fog londonien ne nous aveuglera pas plus longtemps ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe UC)
La séance, suspendue à 18 h 5, reprend à 18 h 20
Questions orales
Mme le président. - L'ordre du jour appelle trente questions orales.
Renouvellement des concessions hydroélectriques
Mme Frédérique Espagnac . - La société hydro-électrique du Midi (SHEM), troisième opérateur hydroélectrique français, sera soumise au renouvellement de ses concessions sur trois vallées pyrénéennes : la vallée d'Ossau, la vallée du Louron et la vallée de la Têt.
Ces concessions, arrivées à échéance en 2012 et prorogées, représentent 40 % de la puissance installée de cette société.
La mise en concurrence sur ces concessions risque de condamner la SHEM et, à terme, l'ensemble de ses 320 salariés. L'atelier de maintenance des centrales hydrauliques du groupe est basé à Laruns et emploie 50 personnes, en plus du personnel opérant à la centrale hydraulique. Au total, 100 personnes sont employées dans ce village de montagne de 1 000 habitants.
La SHEM est impliquée aux côtés des acteurs locaux : elle gère 67 millions de mètres cubes de lâchers pour les besoins agricoles ou pour les activités sportives, des prélèvements pour l'eau potable, la montaison et la dévalaison des poissons.
Elle s'est engagée dans une démarche de responsabilité sociale (RSE), devenant la première entreprise industrielle labellisée Lucie et ISO 26000 et elle s'est investie dans la promotion d'un tourisme responsable ainsi que sur les thématiques de l'emploi ou de la précarité des personnes.
Que compte faire le Gouvernement pour pérenniser l'activité de la SHEM et préserver le tissu socio-économique existant dans ces territoires de montagne ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - La Commission européenne a engagé un contentieux avec la France sur l'absence de mise en concurrence des concessions. Cette situation nuit aux investissements dans le secteur et elle est source d'incertitude pour les entreprises, les salariés et les collectivités.
Le Gouvernement travaille à une solution ; aucune décision n'a été prise. Il sera attentif à ce que le parc hydroélectrique soit préservé : il s'agit d'une activité essentielle à la transition écologique et à l'aménagement du territoire. Le Gouvernement veille aussi aux enjeux humains ; il est en contact permanent avec la SHEM et son actionnaire Engie.
Mme Frédérique Espagnac. - J'attendais une réponse plus précise sur l'atelier de la SHEM, qui emploie 50 personnes. Il y a urgence.
Extension du bail mobilité aux victimes de catastrophes naturelles
Mme Patricia Demas . - La tempête Alex a détruit, le 2 octobre 2020, des équipements publics essentiels à la vie des vallées, mais aussi de nombreux logements.
Le cadre juridique des locations meublées à usage de résidence principale, qui impose une durée de bail d'un an avec tacite reconduction obligatoire au bénéfice du locataire, n'incite pas les bailleurs à louer à des personnes ayant subi de tels drames, leur solvabilité étant objectivement obérée.
En revanche, le bail mobilité pourrait être adapté à leur situation, dans la mesure où il est suffisamment souple dans sa durée - librement fixée jusqu'à dix mois. Or son champ d'application défini par la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs n'est pas ouvert aux victimes de catastrophes naturelles.
Une extension ne pourrait-elle pas être envisagée, pendant un certain délai et lorsque l'état de catastrophe naturelle est reconnu sur le territoire de la commune ? Cela permettrait aux bailleurs et aux locataires de bénéficier du dispositif de garantie des loyers Visale, expression de la solidarité nationale, ce qui serait opportun dans ces situations exceptionnelles.
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - La loi ELAN a créé le bail mobilité, dérogatoire au droit commun, afin de satisfaire aux besoins temporaires de logement.
Il doit être strictement limité aux missions temporaires : formations professionnelles, études supérieures, contrats d'apprentissage, stages, services civiques, mutations professionnelles.
La Visale est, en revanche, accessible à l'ensemble des jeunes de moins de 30 ans, aux salariés en nouvelle embauche ou en mutation. Il est financé par Action logement.
Les victimes de catastrophes naturelles ne sont pas éligibles au bail mobilité pour ce seul motif et une modification législative serait nécessaire pour aller plus loin.
Une adaptation du périmètre du dispositif Visale ne nécessite pas le même formalisme, et pourrait peut-être mieux répondre aux besoins locaux. Nous allons donc envisager son extension aux victimes de catastrophes naturelles, lors des négociations qui sont en cours avec Action logement.
Mme Patricia Demas. - Merci, monsieur le ministre. Le bail mobilité aurait pu offrir une alternative. S'il faut modifier la loi pour l'ouvrir aux victimes, nous tenterons de le faire. Je salue cependant votre ouverture s'agissant de Visale.
Remplacement obligatoire des chaudières fioul et charbon
M. Pascal Martin . - À compter du 1er janvier 2022, l'installation de chaudières au fioul et à charbon dans les bâtiments neufs et le remplacement d'un matériel existant par ce type de matériel seront interdits.
Alors que le Premier ministre a défendu la nécessité d'une « écologie de proximité de quartier et de terrain », cette décision va fragiliser l'emploi des 15 000 salariés de la distribution des énergies hors réseaux, dans un contexte économique déjà difficile. Cela revient à s'attaquer à l'énergie de chauffage principale des territoires ruraux. Le fioul domestique est aujourd'hui la troisième énergie de chauffage en France.
Les consommateurs de fioul vivent majoritairement dans les territoires ruraux, dans des maisons individuelles qui, le plus souvent, ne sont pas accessibles au gaz de réseau.
La mesure ne prend pas en considération l'absence de solutions alternatives aux combustibles liquides. Le fioul, utilisé dans des zones où les températures hivernales sont basses, ne peut pas être remplacé par des pompes à chaleur géothermiques sans un coût financier élevé - de 18 000 à 20 000 euros.
Elle ne va pas laisser le temps aux distributeurs de fioul de s'adapter aux changements d'énergies et va fragiliser la sécurité d'approvisionnement des autres énergies.
Enfin, cette décision semble ignorer le virage écologique que la filière fioul a amorcé depuis deux ans. En effet, les distributeurs ont engagé un processus de transition rapide vers le bio fioul, un bio liquide de chauffage qui intègre une part d'ester méthylique d'acide gras (EMAG), via un colza cultivé et transformé en France. Cette énergie renouvelable, locale, répond aux enjeux de transition écologique, d'indépendance nationale et de justice sociale. Il faut donc autoriser les consommateurs chauffés au fioul domestique à passer progressivement au bio fioul de chauffage.
Quelle est la position du Gouvernement sur ce point ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - La date retenue est mi-2021 pour les logements neufs et mi-2022 pour les bâtiments existants. Il s'agit d'inciter les Français à opter pour un chauffage plus économe et moins émetteur de gaz à effet de serre, comme l'a proposé la Convention citoyenne sur le climat.
Un décret est en cours de préparation avec les professionnels de la filière. La part du fioul domestique a baissé de 30 % entre 2011 et 2018.
Plusieurs solutions de remplacement existent pour les particuliers, comme les chaudières biomasse à granulés, les pompes à chaleur ou les cycles solaires combinés. De nombreuses aides ont été mises en place comme Coup de pouce chauffage ou MaPrimeRénov'. Ce sont ainsi près de 150 000 chaudières au fioul qui ont été retirées en 2019.
Le Gouvernement est conscient des efforts demandés aux professionnels. Une procédure pour un biofioul à 30 % est en cours d'étude. Il ne permettrait toutefois que de réduire de 15 % les émissions de gaz à effet de serre, soit beaucoup moins qu'une pompe à chaleur.
M. Pascal Martin. - Je souhaitais insister sur la période transitoire. En outre, les Français qui habitent dans les territoires ruraux ne doivent pas être oubliés.
Aménagement de la RN 149
M. Bruno Belin . - La RN Nantes-Limoges traverse le département des Deux-Sèvres. Entre Partenay et Poitiers, sa structure date des années 1960 et des accidents sont régulièrement à déplorer. Des études doivent être lancées sur cette RN 149. Le Contrat de plan État-Région (CPER) pourrait y aider.
En complément, des études sur la « complétude » de la RD 347 vers la RN 147 pourraient être menées, ainsi que sur l'axe Poitiers-Limoges que vous connaissez bien, monsieur le ministre.
Les conseils départementaux de la Vienne et de la Haute-Vienne se sont prononcés et attendent de pouvoir participer aux opérations. Il y a urgence.
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - Une étude est commandée sur l'axe Bressuires-Poitiers, afin d'en améliorer l'aménagement. Cette étude d'itinéraire vise à traiter les enjeux de sécurité, de fiabilisation des temps de parcours pour les usagers et de réduction des nuisances pour les riverains ; elle proposera un scénario d'aménagement de la RN 149. Les premiers résultats paraîtront mi-2021.
Sur la section entre Poitiers et Limoges, nous travaillons avec les collectivités territoriales. Je compte sur leur volontarisme pour accompagner l'ambition du Gouvernement.
M. Bruno Belin. - Nous attendons les résultats de l'étude depuis juillet 2019. Le trafic n'a cessé d'augmenter : il y a urgence à agir. Il en va de la responsabilité de l'État tant en termes de sécurité qu'en termes d'aménagement du territoire. Je compte sur vous, monsieur le ministre !
Lignes ferroviaires du Cantal
M. Stéphane Sautarel . - La contractualisation que l'État a consentie avec les régions a permis d'engager des plans de sauvegarde des petites lignes. Les CPER devraient permettre de répondre aux enjeux essentiels de desserte de nos territoires ruraux et du Cantal en particulier, dans un cadre respectueux de l'environnement.
Les crédits du plan de relance ont permis de programmer 2,1 millions d'euros de travaux de sauvegarde pour la ligne Aurillac-Brive. Cela est loin, hélas, d'être suffisant pour régénérer cette ligne et assurer une circulation à une vitesse décente.
Les besoins sont estimés à plus de 50 millions d'euros pour éviter qu'Aurillac ne devienne un « cul-de-sac ferroviaire » ce qui constituerait un véritable risque pour l'avenir du réseau ferré cantalien.
Les temps de trajet vers Paris via Clermont ou via Brive sont dissuasifs : presque sept heures ! S'il convient d'améliorer ces temps d'accès, une nouvelle opportunité s'est ouverte avec l'expérimentation des trains de nuit engagée à la suite du Grenelle de l'environnement et de la Conférence citoyenne sur le climat. En effet, la suppression du train de nuit Aurillac-Paris a marqué un vrai recul du service public dans le Cantal.
De même, la ligne Neussargues-Béziers est gravement fragilisée alors qu'elle présente un intérêt tant pour le transport des voyageurs que pour le fret.
La réintroduction du train de nuit Aurillac-Paris permettrait aussi de connecter le Cévenol et l'Aubrac dans des conditions de confort et de sécurité modernes.
Quelles sont les réponses du Gouvernement sur ces sujets ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - Après des décennies de sous-investissement sur le réseau ferroviaire, le Gouvernement a engagé un plan d'investissement de 3 milliards d'euros par an sur dix ans, soit le double de l'effort de régénération de 2010.
Nous avons également établi un plan de sauvetage des petites lignes, doté de 6,5 milliards d'euros, avec l'aide des régions. Ce plan répond à une attente forte des territoires. Le 20 février, nous avons signé avec Centre-Val de Loire et Grand Est. Depuis, les régions PACA, Pays-de-la-Loire, Bourgogne-Franche-Comté et Normandie ont délibéré favorablement.
La ligne Neussargues-Béziers est concernée par l'accord que le Premier ministre a signé avec le président d'Auvergne-Rhône-Alpes le 5 octobre. Elle sera donc préservée. Quelque 130 millions d'euros sont en cours de distribution.
Sur Aurillac-Brive, des travaux d'urgence ont commencé.
Nous souhaitons également rénover et développer les trains de nuit. Nice et Tarbes devraient ainsi être desservis, pour un budget de 100 millions d'euros.
Un rapport sur le sujet sera prochainement remis au Parlement qui étudie les possibilités de desserte sur de nombreux corridors. J'ai le plaisir de vous confirmer que Paris-Aurillac en fait partie.
M. Stéphane Sautarel. - J'ai bien noté l'expérimentation pour deux lignes de nuit en 2021. Cela me semble insuffisant. Il faut aussi investir dans le matériel roulant.
Avenir des petites lignes ferroviaires dans le Massif central
M. Bernard Delcros . - Je reviens sur les petites lignes ferroviaires du Cantal. Le département est desservi par plusieurs lignes qui relient la préfecture Aurillac à Brive, Clermont-Ferrand, Figeac, et aussi par la ligne Aubrac-Clermont-Beziers via Neussargues et Saint-Chély d'Apcher.
Le Massif central dispose d'un large maillage ferroviaire qui pourrait répondre aux attentes de nos concitoyens et des entreprises. Pourtant, plusieurs lignes du Cantal sont menacées de fermeture à court terme, faute d'entretien.
Aucun train ne circule plus sur la ligne Aubrac, entre Saint-Flour et Saint-Chély d'Apcher, pour des raisons de sécurité, ce qui prive l'Auvergne de toute connexion ferroviaire avec Millau, Béziers et la Méditerranée.
Alors que le 14 juillet dernier, le Président de la République a annoncé vouloir relancer les petites lignes, alors que le gouvernement a prévu d'engager un programme de 4,7 milliards d'euros en faveur de leur modernisation dans le cadre du plan de relance, m'assurez-vous que les lignes du Cantal seront maintenues sans exception ? Des crédits complémentaires aux 2,1 millions d'euros prévus pour la ligne Aurillac-Brive seront-ils prévus pour sauver toutes les lignes du Cantal, les besoins étant estimés à 50 millions d'euros ? Enfin, dans quel délai le tronçon Neussargues-Saint-Chély d'Apcher sera-t-il rouvert ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - Votre question s'inscrit dans la continuité de celle de M. Sautarel et rappelle l'engagement des parlementaires pour le ferroviaire, qui est un mode apprécié par les Français parce qu'il est rapide, fiable, sûr et sobre pour la planète.
Le Gouvernement a lancé un plan d'investissement ambitieux dans le ferroviaire et un plan inédit visant à préserver les 9 000 kilomètres de « petites lignes » sur tout le territoire. D'ici 2022, 130 millions d'euros seront débloqués pour neuf lignes de la région Auvergne-Rhône-Alpes. C'est une première étape avant la signature d'un protocole sur dix ans.
Les lignes interrégionales que sont la ligne Nîmes-Clermont-Ferrand et la ligne Béziers-Clermont-Ferrand feront l'objet d'un traitement spécifique avec les régions concernées, car les besoins de financement sont importants.
Enfin, l'État a massivement investi pour la ligne Paris-Clermont : 350 millions d'euros pour le matériel roulant, 760 millions d'euros pour les infrastructures et 87 millions d'euros pour connecter Clermont à Paris en 3 h 15.
Les attentes sont grandes et nous serons au rendez-vous.
M. Bernard Delcros. - Il y a unanimité sur l'importance du ferroviaire dans le Cantal. Merci pour vos engagements : nous veillerons à leur application effective.
Charles de Gaulle Express
M. Pierre Laurent . - Le CDG Express est une liaison de 32 kilomètres et de 2 milliards d'euros qui doit relier en vingt minutes la gare de l'Est à l'aéroport de Roissy, moyennant un billet à 24 euros.
Ce projet n'a aucun intérêt pour les transports du quotidien et sa mise en oeuvre se ferait au détriment de la nécessaire amélioration de ces transports en grande souffrance car il utiliserait, pendant les travaux, le réseau ferré existant déjà saturé.
Il aurait aussi un impact environnemental discutable. Sur ce dernier point, le tribunal administratif de Montreuil a annulé l'autorisation environnementale concernant le chantier. Dans ses motivations, le tribunal a remis en question les deux raisons d'être du projet avancées par le Gouvernement : une meilleure desserte de l'aéroport de Roissy, et les prochains Jeux olympiques de Paris 2024 - alors que le chantier sera achevé au mieux fin 2025.
Malgré ce jugement, la filiale gestionnaire d'infrastructure chargée du CDG Express s'entête à vouloir continuer les chantiers non concernés par le jugement et veut faire appel du jugement.
Il est encore temps que le Gouvernement arrête de vouloir imposer ce projet inutile, nuisible, coûteux et contesté et s'occupe enfin des transports du quotidien.
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - Ce projet va mettre l'aéroport à vingt minutes de Paris pour les passagers mais aussi les nombreux travailleurs de la plateforme aéroportuaire.
Le CDG Express est complémentaire, et non concurrent, des transports du quotidien, notamment du RER B. L'annulation de ce projet aurait des conséquences délétères pour les transports du quotidien.
Avec plus de 500 millions d'euros en ressources propres, le projet permet de rénover les voies existantes ce qui limite l'impact sur l'environnement. Il économisera 330 000 tonnes de CO2 sur cinquante ans. L'annulation du CDG Express serait donc une catastrophe.
Au-delà du réseau du Grand Paris Express, qui représente plus de 40 milliards d'euros, le plan de relance prévoit 670 millions d'euros d'ici 2022 pour les transports collectifs franciliens, qui s'ajoutent aux 410 millions d'euros déjà prévus, portant l'effort global de l'État à plus d'un milliard d'euros.
M. Pierre Laurent. - Vous dites que les deux projets sont complémentaires. En vérité, les choses sont plus compliquées, vu l'état de souffrance des transports du quotidien en Île-de-France.
Le Syndicat des transports d'Ile-de-France estime à 1,5 milliard d'euros le déficit de recettes lié à la perte de ponctualité pour le seul RER B.
Liaison ferroviaire Beauvais-Paris
M. Édouard Courtial . - Le désenclavement est une condition de l'avenir d'un territoire. Je plaide depuis trois ans pour une liaison ferroviaire Beauvais-Paris en une heure. Je salue l'engagement de Caroline Cayeux et de Xavier Bertrand.
Beauvais, situé à seulement 80 kilomètres de Paris, dispose d'un aéroport international : elle devrait aussi bénéficier d'une liaison rapide vers Paris plusieurs fois par jour.
Cela permettrait d'attirer de nouveau habitants et de limiter la saturation des autoroutes franciliennes.
La SNCF n'y est pas opposée par principe mais estime que les conditions nécessaires ne sont pas réunies à ce stade. Une réunion est encore prévue cette semaine pour faire avancer le dossier. Les investissements de modernisation du réseau doivent se poursuivre. Peut-être l'ouverture de la ligne à la concurrence incitera-t-elle la SNCF à améliorer son offre.
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - La mobilité quotidienne est au coeur des préoccupations de mon ministère. La desserte Beauvais-Paris est assurée par le TER ; elle dépend donc de la région, seule autorité compétente pour définir le schéma de la désserte. L'État n'intervient pas dans ce processus. Le trajet actuel dure 1 h 14.
La réduction du temps de trajet à moins d'une heure, étudiée par SNCF Voyageurs, n'est pas possible à itinéraire constant. Il faut des travaux : tunnel, noeud ferroviaire de Creil... L'État a aidé aux travaux dont la première phase s'est achevée fin 2019. Les études pour une deuxième phase démarreront début 2021.
Au-delà de la question complexe des temps de parcours, les voyageurs veulent un service fiable. Nous oeuvrons en ce sens, grâce à l'effort inédit de ce Gouvernement en faveur du ferroviaire avec, notamment, 35 milliards d'euros de reprise de dette de la SNCF.
M. Édouard Courtial. - Là où il y a une volonté, il y a un chemin ; que le Gouvernement le prenne au-delà des alibis techniques et juridiques !
Protection des abeilles
Mme Dominique Estrosi Sassone . - Je regrette l'absence du ministre de l'Agriculture...Les apiculteurs mettent en évidence les difficultés des abeilles qui doivent se battre contre un parasite originaire d'Asie du Sud-Est, le Varroa destructor, qui décime les ruches.
En France, le miel dont la production est en hausse, est un produit essentiellement artisanal découlant d'un savoir-faire local comme dans la région Sud, première région productrice.
Face à ce parasite, les apiculteurs ont peu de moyens. Le Gouvernement entend-il appuyer un programme européen de recherche ambitieux sur le sujet ?
Certains traitements existent, mais les modalités d'application ne sont pas harmonisées. Le Gouvernement compte-t-il les adapter localement ? Ainsi, dans les Alpes-Maritimes, les hivers sont doux, et les abeilles, non plus que leur parasite, n'hibernent pas. Une stratégie à long terme pour est-elle prévue ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - Je lis la réponse du ministre de l'Agriculture, qui est en réunion à Bruxelles.
Ce parasite provoque en effet des pertes importantes en apiculture et il est l'une des causes de la chute des colonies d'abeilles. Un plan pollinisateur sera prochainement présenté par le ministre de l'Agriculture, en lien avec Mme Pompili, et en concertation avec les acteurs concernés.
Des mesures de lutte contre les agresseurs de la ruche seront prévues avec la mise en place de réseaux de surveillance, de nouveaux médicaments et la recherche de nouveaux moyens de lutte. Le frelon asiatique n'est pas oublié. Ce plan accompagnera toute la filière apicole. La France doit inverser la courbe descendante de sa production de miel.
Mme Dominique Estrosi Sassone. - Le Gouvernement doit s'impliquer auprès des apiculteurs, notamment pour que des évolutions aient lieu au niveau de l'Union européenne. La question de l'étiquetage du miel est également importante. Nous attendons un décret qui doit sortir prochainement, espérons dès le 1er janvier, sur l'étiquetage du miel, afin de le préserver de la concurrence étrangère. J'entends que le Gouvernement continue à suivre ces mesures.
Agrivoltaïsme
M. Philippe Bonnecarrère . - Je souhaitais interroger Mme la ministre de la Transition écologique sur la contradiction entre le droit de l'environnement, le droit agricole et le droit de l'urbanisme.
Dans le cadre des politiques environnementales, l'agriculture est une réponse à la production d'énergies renouvelables, au travers de l'agrivoltaïsme avec le développement d'ombrières, permettant de maintenir les prairies plus longtemps, ou de panneaux verticaux, compatibles avec la culture des céréales et prenant moins de place au sol.
Comment faciliter l'installation de centrales photovoltaïques au regard du droit de l'urbanisme ?
Les terrains occupés par ces installations ne sont plus considérés comme agricoles, ce qui pose de multiples problèmes, notamment pour les aides de la PAC. Comment améliorer cette situation ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - L'agrivoltaïsme connaît en effet un véritable engouement. C'est un enjeu pour nos territoires mais son développement pose aussi la question de l'artificialisation des sols.
La jurisprudence montre que le code de l'urbanisme autorise ces installations au sol en terrain agricole, sous certaines conditions, car elles sont effectivement considérées comme une artificialisation des sols. Il est impératif que ces projets ne concurrencent pas l'activité agricole, qu'ils doivent au contraire soutenir. Il faudra en effet un cadre juridique clair.
L'installation des panneaux peut se faire en harmonie avec l'activité agricole. Le fonctionnement des panneaux pourrait même optimiser le développement de la plante, voire le confort des animaux et donc devenir un outil partenarial de l'économie agricole Des travaux sur ces questions doivent donc se poursuivre.
M. Philippe Bonnecarrère. - Je salue votre déclaration de principe en faveur de l'agrovoltaïsme et votre annonce d'un nouveau cadre juridique, mais quand ?
Alimentation
M. Frédéric Marchand . - La crise sanitaire sans précédent que nous connaissons a mis en lumière l'importance de notre alimentation, qui n'est pas, funeste erreur, acquise ad vitam aeternam. Cette crise nous rappelle ainsi combien la sécurité alimentaire est vitale.
Cette question est posée dans l'ouvrage de Stéphane Linou, Résilience alimentaire et sécurité nationale, qui a servi de base à la proposition de résolution du Sénat sur la résilience alimentaire des territoires et la sécurité nationale.
Cette résolution invitait le Gouvernement à engager une révision de la loi de programmation militaire pour réfléchir à l'intégration de la production et du foncier agricole nourricier comme secteur d'activité d'importance vitale (SAIV).
Ainsi serions-nous peut-être en capacité de doter par exemple notre pays de véritables indicateurs sur les flux d'approvisionnement alimentaire sur le territoire, permettant une approche plus précise et préventive de la réalité alimentaire nationale.
Le Gouvernement semble globalement favorable à cette proposition de résolution. Où en sommes-nous, monsieur le ministre, sur cette question ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports . - La préservation de la santé de la population est une priorité absolue du Gouvernement. Hippocrate disait déjà que l'alimentation est le premier des médicaments. Pendant la crise, ce secteur a montré sa résilience.
L'article R. 1332-2 du code de la défense, auquel vous faites référence, définit les SAIV. Il contient certaines dispositions pour assurer l'approvisionnement alimentaire en cas de crise. L'alimentation figure depuis 2006 parmi les douze secteurs d'importance vitale et il a été élargi depuis 2016. En cas de crise, ces opérateurs sont suivis et protégés.
Le code rural organise la transmission foncière dans notre pays. Les dispositions sur le contrôle des investissements étrangers ont été renforcées. Le plan de relance consacre 1,2 milliard d'euros à l'agriculture et à l'alimentation. C'est un budget inédit pour reconquérir la souveraineté alimentaire française et offrir une alimentation de qualité à tous.
M. Frédéric Marchand. - La question de la sécurité alimentaire est primordiale.
Mutations des gardiens de la paix
Mme Nadia Sollogoub . - Les concours d'accès au métier de gardien de la paix imposent au minimum une dizaine d'années dans la première région d'affectation.
Pour ces jeunes gens, heureux de leur réussite au concours, l'échéance de ce contrat de huit ans doit sembler bien irréelle. Mais les années passent, et ils se retrouvent pris au piège.
Le rapport de la commission d'enquête du Sénat relative à l'état des forces de sécurité intérieure fait état d'un mal-être généralisé au travail et comporte de trop nombreux témoignages de gardiens de la paix qui cohabitent dans de minuscules logements parisiens, séparés de leurs conjoints, de leurs enfants.
Dans l'intérêt général, il serait souhaitable que les conditions d'évolution de carrière soient concordantes avec les projets de vie.
Est-il envisagé d'assouplir les conditions de mutation des gardiens de la paix ou de modifier les durées de leur contrat ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté . - Les policiers assurent chaque jour, avec dévouement, professionnalisme et courage la protection des Françaises et des Français dans des conditions souvent extrêmement difficiles.
Les lauréats des concours sont nommés pour des durées minimales de cinq et huit ans pour leur première affectation, selon le concours qu'ils ont passé. Les candidats ont bien sûr connaissance de cette obligation. Cet engagement géographique est relatif puisque, durant cette période, les policiers peuvent solliciter une mobilité au sein de leurs zones de défense et de sécurité, lesquelles recouvrent plusieurs départements. En Île-de-France, les policiers du corps d'encadrement et d'application bénéficient de primes tout au long de leur durée d'affectation, ainsi que de différents dispositifs d'action sociale.
Les services opérationnels ont besoin d'un minimum de visibilité et de prévisibilité pour la gestion. En outre, ces règles permettent la mixité des équipes.
Au terme de ces délais, la mobilité est possible entre régions. Un barème de points prend en compte la vie professionnelle et personnelle.
Des réflexions sont engagées pour un meilleur équilibre des territoires en tension, entre primo-affectation et possibilités de mouvements. Le ministère de l'Intérieur est particulièrement attentif à cette question.
Mme Nadia Sollogoub. - Une jeune gardienne de la paix m'a lancé un appel à l'aide, « une bouteille à la mer », selon ses propres termes. La dépression la guettait et elle se sentait à bout de forces en raison de son éloignement géographique, malgré son implication au service de l'État depuis longtemps. Il a fallu batailler pendant des années pour obtenir sa mutation. Il faut vraiment que cela change.
Signature authentique à distance pour les Français de l'étranger
Mme Jacky Deromedi . - Nos compatriotes expatriés rencontrent des difficultés pour signer des actes notariés à distance.
Le décret du 20 novembre 2020 sur la procuration notariée à distance a pérennisé le régime de tels actes. Mais il faudrait aussi la signature authentique à distance, pour un mariage par exemple.
La situation sanitaire aggrave les complications liées à l'éloignement, lors du décès d'un proche, lorsqu'il faut régler la succession.
Le Sénat a voté deux fois cette possibilité grâce à la proposition de loi de M. Bruno Retailleau, dont j'étais rapporteure, sans opposition du Gouvernement. Les trois quarts des offices notariaux de France sont déjà équipés d'outils de visioconférence totalement sécurisés. Une expérimentation, au moins, ne pourrait-elle être mise en place ? Des conventions de coopération entre institutions notariales françaises et étrangères pourraient-elles aussi être envisagées ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté . - C'est un sujet important et le Gouvernement entend garantir le bon fonctionnement et la sécurité des échanges.
Jusqu'à récemment, la présence physique du signataire était requise mais le décret du 20 novembre 2020 adapte le notariat à l'ère numérique en autorisant la désignation d'un mandataire à distance, par exemple un clerc de l'étude. On peut donc signer à distance une procuration, sans avoir besoin de se déplacer.
La poursuite de l'activité notariale est ainsi assurée. Ce décret est important pour les Français à l'étranger. Si l'expérimentation est satisfaisante, son extension à d'autres actes sera envisagée.
Mme Jacky Deromedi. - Une telle procuration ne permet pas de signer un contrat de mariage ou un testament. Le Conseil supérieur du notariat est pourtant prêt à l'expérimenter.
Déclarations de nationalité française à l'étranger
M. Jean-Yves Leconte . - Ma question porte sur les déclarations de nationalité française (DNF) relevant du ministère de la justice et souscrites à l'étranger. Adressée à M. le garde des Sceaux, le 8 août dernier, en question écrite, elle n'a à ce jour pas obtenu de réponse.
L'article 29 du décret du 30 décembre 2019 différencie le traitement des catégories de DNF, selon que le déclarant réside en France ou est établi hors de France.
Avant ce décret, les résidents à l'étranger qui souscrivaient une DNF se voyaient délivrer par les postes consulaires un récépissé, tel que prévu par le code civil. Ceci assurait une parfaite égalité de traitement avec les souscriptions réalisées en France auprès du tribunal judiciaire. Si le récépissé est toujours remis le jour de la souscription, l'article 29 précité ne permet cependant plus sa remise par nos postes à l'étranger, l'autorité consulaire se contentant de transmettre le dossier au ministère de la Justice. Le ministère délivre le récépissé dès qu'il a reçu la totalité des pièces nécessaires à la preuve de la recevabilité de la déclaration ; il l'adresse au déclarant.
La nouvelle procédure pose plusieurs difficultés pour les déclarants résidant à l'étranger. La date de délivrance du récépissé constitue le point de départ du délai d'enregistrement des déclarations. Celui-ci sera donc significativement allongé. La remise de documents exigés en originaux ne sera plus établie le jour même par la délivrance du récépissé.
Une circulaire permettant de réduire ces différenciations est-elle envisagée ?
Des instructions imposant la remise par les autorités consulaires d'un bordereau des pièces effectivement déposées ou d'une attestation de dépôt ont-elles été données ?
Mme le président. - Veuillez conclure.
M. Jean-Yves Leconte. - Ce récépissé sera-t-il daté du jour du dépôt des pièces au poste, ou bien du jour où le ministère recevra le dossier ? Ce récépissé sera-t-il bien envoyé par le ministère de la justice au poste avec obligation pour ce dernier de convoquer l'intéressé pour la remise du récépissé en main propre ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté . - Le décret du 30 décembre 2019, prenant en considération une différence objective, a prévu un régime différent selon que la DNF est instruite en France ou à l'étranger.
À l'étranger, l'autorité consulaire n'a aucune compétence pour instruire ou décider des suites à donner. Cette compétence incombe exclusivement au ministère de la Justice.
Celui-ci sollicitait a posteriori les pièces complémentaires indispensables au traitement de la déclaration souscrite. La charge de travail des postes consulaires, ajoutée au temps d'acheminement des envois diplomatiques, conduisait également à entamer le délai de six mois imparti pour instruire, décider et notifier la décision.
Les deux exemplaires de la déclaration, accompagnés des originaux des pièces produites, sont transmis au ministère de la Justice par la valise diplomatique. L'autorité diplomatique ou consulaire conserve une copie des pièces envoyées. Elle remet ensuite en main propre au déclarant le récépissé que lui fait parvenir le ministère de la Justice.
Guides-conférenciers
Mme Laurence Harribey . - La situation des guides-conférenciers de France est difficile. La crise sanitaire révèle au grand jour leur précarité. Ils ont une activité très saisonnière et travaillent souvent à la mission.
J'ai déjà interpellé le Gouvernement - par une question écrite en mai 2020 - qui m'a répliqué que les conditions résultant des réformes successives étaient satisfaisantes. Les guides-conférenciers sont pourtant confrontés à une concurrence déloyale avec une forme d'ubérisation de la profession. On m'a aussi rétorqué qu'il y avait un risque juridique européen à règlementer la profession alors que la moitié des pays européens la règlementent strictement, comme l'Italie, par exemple.
Dans ce cadre, pourquoi ne pas revoir le statut des guides-conférenciers qui se sentent laissés pour compte, et dans l'urgence, pourquoi ne pas leur ouvrir la mesure de l'année blanche appliquée aux intermittents du spectacle ?
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture . - Les quelque 7 000 guides-conférenciers de notre pays, dont la profession est réglementée par l'article L.221-1 du code du tourisme, jouent un rôle de premier plan pour la transmission du patrimoine historique et culturel.
Leurs difficultés sont réelles, à cause de la crise sanitaire. Ils ont été privés d'activité pendant le confinement et sont frappés par l'effondrement de la fréquentation des lieux où ils travaillent.
Leur situation a rapidement été prise en compte par le Gouvernement puisque ces professionnels sont éligibles aux aides telles que l'activité partielle et les PGE.
Cette profession connaît de grandes disparités. Il y a une part d'économie grise considérable. Un groupe de travail interministériel a été mis en place pour travailler sur la sécurisation des cartes professionnelles et la mise en place d'un registre numérique, notamment, afin d'éviter les fraudes.
Une étude monographique du secteur a été lancée - la dernière datait de dix ans. Les guides-conférenciers sont appelés à jouer un rôle majeur dans la reprise des activités culturelles et du tourisme dans les semaines et les mois à venir.
Soyez assurés que le Gouvernement est pleinement engagé à leurs côtés.
Mme Laurence Harribey. - Je prends acte de la concertation en cours. Prenez en compte l'aspect illégal des plateformes de free tours et agissez comme la Grèce et l'Italie, où ces professions sont beaucoup plus protégées.
Rémunération équitable et aides à la création
Mme Sylvie Robert . - Le secteur culturel est gravement fragilisé par la crise sanitaire. L'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 8 septembre 2020 menace aussi la création.
La CJUE a posé le principe selon lequel les États membres ne peuvent « exclure les artistes interprètes ou exécutants qui sont ressortissants d'États tiers à l'espace économique européen (EEE) du droit à une rémunération équitable », en vertu de la directive de 2006. En d'autres termes, la diffusion de phonogrammes fixés hors EEE, singulièrement américains, doit entraîner le versement de ce droit voisin aux artistes-interprètes et producteurs concernés.
Or tel n'était pas nécessairement le cas jusqu'à présent. En France, les organismes de gestion collective (OGC) n'étaient pas tenus de reverser les sommes perçues au titre de la rémunération équitable, dès lors que les phonogrammes provenaient d'États n'ayant pas ratifié les traités internationaux protégeant ladite rémunération, en particulier la convention de Rome de 1961, à l'image des États-Unis.
Ces droits voisins, considérés comme irrépartissables, étaient destinés à l'action artistique et culturelle des OGC. Ils prenaient la forme d'aides à la création de 25 millions à 30 millions d'euros. Cet arrêt fragilise brusquement le modèle de financement de la création artistique en France et, plus globalement, en Europe.
Envisagez-vous, à court terme, de compenser et de soutenir les aides à la création artistique ? Entendez-vous mener les actions nécessaires au niveau européen, afin d'obtenir une application pleine et entière du principe de réciprocité avec les États tiers, tout particulièrement avec les États-Unis, quant au droit à une rémunération équitable ?
Protégeons mieux les artistes français et européens !
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture . - Ce sujet est extrêmement important. La CJUE a en effet décidé qu'il n'appartenait pas au législateur national de répartir les droits voisins.
Cela bouleverse la pratique française et remet en cause l'usage des sommes irrépartissables, aujourd'hui utiles aux festivals, qui sont en partie financés par ce moyen.
La rétroactivité de la décision est encore en cours d'examen. Dans le contexte économique de la pandémie, cette décision de la CJUE est partiellement inopportune.
Nous avons agi. En premier lieu, l'article 35 de la loi dite Ddadue, du 3 décembre 2020, sécurise pour le passé le système français d'aide à la création et à la production musicale, sous réserve des actions contentieuses introduites avant la publication de la loi. Cela répond à un motif d'intérêt général manifeste : la promotion de la diversité culturelle et artistique. En second lieu, j'ai très fortement sensibilisé nos partenaires européens et alerté le commissaire Thierry Breton ainsi que les eurodéputés français.
Je souhaite qu'un texte législatif soit très rapidement présenté pour conforter notre dispositif de rémunération équitable et appliquer le principe de réciprocité.
Mme Sylvie Robert. - Dans la période actuelle, cette décision malencontreuse pénalisera encore plus le monde de la culture. Espérons que la présidence portugaise facilitera les choses.
Report de charges des entreprises
Mme Florence Lassarade . - Certaines entreprises de tous secteurs bénéficient aujourd'hui d'un report de charges auprès de l'Urssaf ou de la mutualité sociale agricole (MSA) ; or ces dettes fiscales cumulées depuis le début de la crise sanitaire sont évidemment importantes.
Compte tenu des pertes subies, les entreprises ne pourront faire face à ces charges fiscales sans mettre en péril leur pérennité. Dans un contexte de crise inédit, quelles seront les dispositions en faveur des entreprises, pour accompagner la sortie du confinement ? L'effacement des dettes fiscales est-il envisagé ?
M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques . - Le Gouvernement est particulièrement sensible aux difficultés des entreprises et travailleurs indépendants. Il a créé différents dispositifs de soutien aux entreprises en difficulté, comme vous le savez.
Les services de l'État sont mobilisés auprès des entreprises. Les services des impôts des entreprises sont les interlocuteurs privilégiés pour accorder des délais de paiement pour les impôts directs, au cas par cas.
Des plans de règlement spécifique sont prévus, concernant les impôts dus entre le 1er mars et le 31 mai sur 12, 24 ou 36 mois, en fonction du niveau d'endettement. La demande d'étalement de la dette fiscale est à déposer avant le 31 décembre 2020.
Mme Florence Lassarade. - Une troisième phase de covid est possible.
Vous me répondez sur les impôts en général mais ma question était plus précise : les charges sociales et la fiscalité sont deux choses différentes. Un geste sur les contributions sociales des petites entreprises en particulier serait le bienvenu.
Inquiétudes des salariés des usines Madrange
Mme Isabelle Briquet . - Le 16 juillet 2020, l'Autorité de la concurrence a condamné la société Cooperl à une amende de plus de 35 millions d'euros pour des faits d'entente. La société a fait appel de la décision et a également déposé une requête de sursis à l'exécution.
Je ne me prononce pas sur le fond de la décision, mais la sanction fait peser un risque sur l'activité du groupe et sur l'emploi, à commencer par les 500 salariés des sites de Feytiat et Limoges. Le communiqué publié par le ministre de l'Économie et des finances le 21 octobre montre que le Gouvernement est vigilant. Quelles mesures concrètes mettra-t-il en oeuvre pour éviter toute casse sociale dramatique ?
M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques . - La société Cooperl Arc Atlantique a en effet été sanctionnée à hauteur de 35 millions d'euros pour avoir formé un cartel avec six autres producteurs de jambon et de charcuterie en vue de faire monter les prix entre 2010 et 2012.
Agnès Pannier-Runacher et moi-même sommes tenus au respect de la décision de l'Autorité de la concurrence, qui est une autorité administrative indépendante.
Pour autant, nos services sont en contact avec Cooperl. Un sursis à l'exécution du paiement pourrait être envisagé, ou à défaut, un échelonnement du paiement de l'amende organisé par le service des créances spéciales du Trésor.
Un accord confidentiel a été signé entre Cooperl et la DGFiP sur les modalités d'exécution de l'amende, pour ne pas faire peser de risques sur l'activité du groupe. Cooperl a déclaré que les emplois n'étaient plus menacés.
Mme Isabelle Briquet. - Merci de votre réponse. Beaucoup d'emplois sont en jeu. N'ajoutons pas de difficultés pour les entreprises dans ce contexte de crise.
Prises de participation étrangères dans le secteur de la santé
M. Stéphane Demilly . - Nous assistons à une prise de participations d'investisseurs étrangers dans certains secteurs stratégiques pour notre pays, notamment celui de la santé, et en particulier des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).
En France, près de 7 400 Ehpad accueillent un peu plus de 650 000 personnes âgées dépendantes. Durant la crise du Covid-19, plus de 10 400 personnes y sont malheureusement décédées.
Alors que l'épidémie a mis en évidence le manque de moyens et de personnel dans certains Ehpad, les intérêts privés continuent à s'attaquer à ce véritable business de la santé.
Ainsi, un important groupe d'Ehpad en France, dont l'actionnaire majoritaire est un fonds britannique, bénéficierait d'une structure domiciliée à Jersey pour optimiser ses avantages financiers.
Pour le dire autrement, des profits conséquents réalisés en France par des établissements français s'envolent vers des pays à la fiscalité avantageuse. Les sociétés concernées mobilisent de l'ingénierie financière pour échapper aux règles comptables en vigueur en France. Cette opacité financière est particulièrement choquante.
Pourtant, l'article R153-2 du code monétaire et financier inclut la protection de la santé dans les domaines où les investissements étrangers doivent être soumis à autorisation préalable. La France doit réaffirmer sa souveraineté sanitaire. En outre, ces prises de participation se font au détriment d'investisseurs français. C'est un comble !
On ne peut pas applaudir nos personnels soignants tous les soirs à la fenêtre, regretter les manques de moyens humains et financiers de nos établissements, y injecter des milliards d'euros, tout en fermant les yeux sur cette course indécente au profit dans le secteur juteux de la santé business.
Que compte faire le Gouvernement pour protéger les entreprises françaises des prises de participation étrangères ?
M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques . - La circulation des capitaux est libre, mais par exception, dans certains secteurs, l'article L151-3 du code monétaire et financier impose une autorisation préalable aux investissements étrangers, à travers la procédure dite IUF. Il y a trois conditions cumulatives : la provenance des financements, la nature de l'opération et la nature de la société cible. Si l'une de ces conditions n'est pas remplie, l'autorisation préalable n'est pas requise.
Le ministre de l'Économie, des finances et de la relance a pris un arrêté incluant les biotechnologies dans la liste des technologies critiques, et les seuils de participation étrangers déclenchant l'autorisation préalable ont été abaissés de 25 à 10 % pour les sociétés cotées, dont l'actionnariat est souvent dispersé.
La France, avec l'Allemagne et l'Italie, a obtenu le règlement européen d'octobre 2020 sur le filtrage des investissements étrangers, qui facilite les échanges entre États membres sur les projets d'investissement. La France a anticipé cette évolution, comme en témoigne la refonte de l'IUF engagée dès 2018.
Transfert à la DGFiP de taxes fiscales perçues par les Douanes
M. Laurent Burgoa . - Je m'interroge quant à l'opportunité du transfert, à l'horizon 2022-2024, des principales taxes fiscales perçues par la Direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) au profit de la Direction générale des finances publiques (DGFiP).
La perception des différentes taxes par l'administration des douanes rapportait au budget de l'État plus de 34 milliards d'euros en 2019. En 2019, un transfert de la taxe sur les boissons non alcooliques (BNA) avait déjà eu lieu au profit de la DGFiP, avec pour conséquence une perte notable des recettes : environ 20 % des 500 millions d'euros attendus, même si, je le sais, vous contesterez ces chiffres.
Je n'accable pas la DGFiP qui n'a pas bénéficié d'effectifs supplémentaires. Néanmoins, sa méthode de contrôle ne repose pas sur une intervention physique en entreprise ou un contrôle de la circulation comme pour les douanes, mais sur des contrôles documentaires a posteriori.
De plus, à terme, la disparition des bureaux de proximité est en question ; en Occitanie, des petites structures de l'administration douanière ont déjà été fermées qui, pourtant, effectuaient des contrôles dans les sociétés.
Les Douanes ont prouvé leur efficacité, protégeant l'industrie française de distorsions de concurrence et assurant le respect des normes écologiques. S'il n'y a plus de femmes et d'hommes pour veiller sur le terrain à la bonne application des lois, cet hémicycle ne sera plus que le vestige de l'État de droit.
Espérez-vous réellement des économies d'échelle avec cette réforme ?
M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques . - Le transfert de collecte de la DGDDI vers la DGFiP s'inscrit dans une rationalisation de la perception des différentes taxes et droits.
La collecte est assurée par environ 250 acteurs, qui constituent autant de guichets. Il n'y aura plus que deux guichets : l'Acoss et la DGFiP.
Nous engageons en parallèle une refonte de l'offre numérique qui permettra aux contribuables de disposer d'une interface unique ; et aux administrations d'avoir une vision unifiée de la perception.
La date butoir de 2024 pour le transfert de la TICPE est suffisamment lointaine pour que chacun s'y adapte.
Les contrôles de la DGFiP sont robustes et en amélioration continue. Enfin, les recettes des BNA sont stables et non en baisse. On peut s'en féliciter, puisque les industriels modifient la composition de leurs boissons pour réduire leur taxation.
Révision des bases fiscales
M. Jean Bacci . - Depuis plusieurs années, certaines communes sont confrontées à des problématiques budgétaires graves qui entravent leur fonctionnement et détériorent à la fois l'efficacité de leur action et la qualité de vie de leurs habitants. Les bases fiscales établies dans les années 1970 par les services de l'État, fondées sur la valeur locative du bâti de chaque commune, n'ont jamais été révisées depuis.
L'évaluation a été conduite sans cahier des charges ni harmonisation avec les communes avoisinantes. En cinquante ans, certaines communes se sont enrichies, d'autres se sont appauvries et leurs bases fiscales restent inchangées.
Première conséquence : les communes à base fiscale forte financent l'intercommunalité au profit des communes voisines. Seconde conséquence, indirecte, elles sont amenées à baisser leurs taux communaux, ce qui a pour effet une diminution de leur dotation globale de fonctionnement (DGF). In fine, elles n'ont plus de ressources pour investir.
Dans ces conditions, comment les communes pourront-elles investir et participer au plan de relance ? Allez-vous dynamiser les bases fiscales ?
M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques . - Depuis 2010, l'administration fiscale travaille à la modernisation des bases fiscales. Ainsi les locaux professionnels ont fait l'objet d'une révision inscrite en loi de finances rectificative pour 2010. En 2013, une première campagne a été menée sur une base déclarative : il était demandé aux contributeurs de décrire leur bien. La réforme est entrée en vigueur au 1er janvier 2017.
Afin de limiter l'impact de cette réforme, un mécanisme de neutralisation a été mis en place pour maintenir la proportion de ces locaux dans les bases d'imposition de chaque commune.
En revanche, la valeur locative des locaux d'habitation reste fixée à son niveau de 1970. L'article 146 de la loi de finances pour 2020 a fixé les modalités de la révision sur la base d'une expérimentation menée dans cinq départements, en partant d'une phase déclarative suivie d'une prise en compte des évolutions du marché. La réforme devrait être prête en 2025 pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2026.
Notez également que les bases d'imposition sont revues chaque année lors d'une construction de logement, d'une évolution du bâti ou d'un changement d'affectation. La démolition et la construction sont donc bien prises en compte par l'administration fiscale.
Situation de la filière conchylicole normande
M. Patrice Joly, en remplacement de M. Didier Marie . - Comme beaucoup de secteurs, la filière de la conchyliculture est mise en difficulté par la crise sanitaire liée au Covid-19. Elle a déjà été particulièrement affectée par la fermeture de certaines zones de production entre décembre 2019 et février 2020 à cause du norovirus. Depuis la fermeture des brasseries-restaurants où sont traditionnellement commercialisés les coquillages, les possibilités de commercialisation sont restreintes, faute de ventes directes.
Le Gouvernement envisage-t-il des mesures spécifiques, notamment par un abondement supplémentaire de la mesure 55 du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (Feamp), ou en dégrevant les redevances domaniales ? Il conviendrait également d'exonérer de charges sociales le secteur conchylicole, puisque même en l'absence de recettes, le travail de production et de maintien de cheptel d'animaux vivants se poursuit.
M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques . - Nous avons pleinement conscience de ces difficultés. La filière conchylicole avait déjà été touchée par le norovirus ; comme celle de la pêche, elle fera l'objet d'un soutien.
La ministre de la Mer Brigitte Girardin a ainsi demandé un abondement des subventions prévues par l'article 55 du Feamp, avec une compensation de la baisse de chiffre d'affaires entre le 1er février et le 31 décembre. Elle a également augmenté le plafond des aides publiques de 250 000 à 300 000 euros, et demandé au ministre Dussopt d'examiner la possibilité d'exonérations de charges accordées par les directions départementales des finances publiques.
Enfin, le plan de relance consacrera 55 millions d'euros à la pêche et à l'aquaculture.
La ministre de la mer fera prochainement un point sur ces questions avec les professionnels. Elle demeure à l'écoute du secteur.
Situation en Palestine
Mme Raymonde Poncet Monge . - Alors que la pandémie occupe les esprits, la situation des Palestiniens empire de jour en jour : expropriations, démolitions... Ils sont privés de droits, sans compter la loi du 8 mars 2018 qui permet de bannir les Palestiniens de Jérusalem sous le motif de « défaut d'allégeance ».
Un village bédouin a récemment été détruit, privant de toit 74 personnes dont 41 enfants. Depuis le début de l'année 2020, Israël a détruit plus de 670 structures palestiniennes et privé de toit 869 Palestiniens.
La destruction de propriétés dans des territoires occupés constitue une violation du droit international humanitaire, et le déplacement forcé de populations est un crime de guerre. Nous ne protégeons pas notre compatriote Salah Hamouri et sa famille des persécutions israéliennes.
Enfin, la colonisation en Cisjordanie progresse : plus de 413 000 colons y résident, et cela continue. Une annexion de fait est en cours.
Que compte faire la France ? Va-t-elle se contenter, une nouvelle fois, de condamnations et de regrets ? Ou se décidera-t-elle à stopper la politique du fait accompli ?
M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques . - Il n'y a pas d'alternative à la solution à deux États. La France considère comme crucial le maintien de la présence palestinienne à Jérusalem-Est. La poursuite de la colonisation fragilise la confiance entre les parties.
Au-delà des prises de position, la France se coordonne avec ses partenaires européens pour réagir conjointement face à la construction de nouveaux logements - le projet de Givat Hamatos est particulièrement préoccupant, en ce qu'il compromet la solution à deux États.
Nous veillons également à l'inclusion de clauses dans tout accord bilatéral pour marquer la distinction juridique entre le territoire d'Israël et les territoires occupés.
Nous soutenons enfin l'étiquetage différencié entre les produits venant d'Israël et ceux qui viennent des colonies.
Le ministre des Affaires étrangères a souligné devant vous, au mois de juin, qu'une annexion ne saurait être sans conséquences. La normalisation des relations entre Israël et les pays arabes représente une opportunité pour la reprise du dialogue entre Israéliens et Palestiniens. C'est le sens des efforts entrepris lors de la rencontre entre la France, l'Allemagne, l'Égypte et la Jordanie à Amman en septembre, qui sera suivie d'une autre au Caire.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Les réponses n'ont pas changé depuis le mois de juin. Vous nous dites : si cela continue, nous agirons. Or la situation empire de jour en jour, de nouvelles évictions sont planifiées. Mais la parole de la France n'est pas respectée !
Le temps des sanctions est venu. Une majorité de parlementaires vous demande d'agir.
Nouvelle réorganisation des services académiques
M. Patrice Joly . - Avec la réorganisation des services académiques entrée en vigueur au 1er janvier 2020, les recteurs de région deviendront garants de la cohérence des politiques publiques et fixeront les orientations régionales ; ils auront le gros de l'enveloppe budgétaire, reléguant les recteurs d'académie au rôle d'exécutants chargés de la gestion des crédits courants.
Ainsi se créeront de nouvelles hiérarchies au détriment des territoires ruraux, puisque le pouvoir de décision ira aux grandes métropoles et à des super-recteurs.
La réforme relève d'une philosophie de massification et de concentration, alors que rien ne dit qu'elle répondra mieux aux besoins. Au contraire, la crise sanitaire a révélé combien cette organisation était un facteur de fragilisation.
Comment éviter que les territoires ruraux ne soient lésés ? Des moyens nouveaux seront-ils donnés aux recteurs d'académie ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - Le ministère de l'Éducation nationale prend en compte chaque territoire avec ses particularités, ses forces et ses faiblesses.
Trois décrets ont été pris en 2019 pour réorganiser les services académiques, confiant des compétences budgétaires exclusives au recteur de région, qui gère notamment le schéma prévisionnel des formations, la formation professionnelle, l'apprentissage, l'orientation, la lutte contre le décrochage scolaire. Il se voit également attribuer la gestion des fonds européens, les contrats de plan État-région (CPER), la politique d'achats immobiliers, les relations internationales et la coopération.
Mais ces nouvelles compétences s'exercent sous réserve de celles des préfets de région et n'enlèvent rien à celles des recteurs. La gestion des ressources humaines, des établissements privés, de la vie scolaire notamment seront maintenues au niveau académique.
Des travaux sont en cours au sein du ministère pour casser le plafond de verre qui frappe trop souvent les élèves des territoires ruraux.
Prestation de compensation du handicap parentalité
M. Philippe Mouiller . - Lors de la dernière conférence nationale du handicap, le Président de la République a fait une annonce très attendue par les milliers de parents d'enfants en situation de handicap et leurs associations représentatives, avec la prestation de compensation du handicap (PCH) parentalité.
Mais la mise en oeuvre de cette PCH parentalité suscite beaucoup d'inquiétudes. En effet, les dispositions réglementaires prévoient une aide humaine forfaitaire en fonction de l'âge de l'enfant et non de ses besoins.
À l'argument que les forfaits permettraient aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) de répondre plus vite aux sollicitations car elles ne connaissent pas les besoins en parentalité, les parents en situation de handicap répondent qu'elles appliquent déjà la PCH dans son principe, avec une approche individualisée. Elles connaissent déjà les familles, car la mesure est ouverte aux personnes éligibles à la PCH. Au contraire, la mesure forfaitaire nie leur rôle d'instruction, d'évaluation et attribution des droits. De plus, les arguments avancés pour la forfaitisation de la PCH parentalité, annoncée comme limitée à 2021, sont potentiellement reconductibles en 2022.
Enfin, l'enveloppe budgétaire annoncée par le Président de la République ne sera disponible qu'en 2022. Pour 2021, elle sera attribuée sur les budgets départementaux. Quelle réponse apportez-vous aux parents inquiets ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - Cette mesure répond à une attente historique ; elle a fait l'objet d'un avis favorable du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) le 20 novembre. L'objectif est de déployer les droits des 17 000 familles concernées dès le 1er janvier 2021. L'aide humaine est attribuée sur la base d'un coût de 30 euros par heure.
Nous avons choisi une forfaitisation pour plus de simplicité. Les parents toucheront 900 euros par mois pendant les trois premières années de l'enfant. Ce sera ensuite 450 euros par mois jusqu'à sept ans. Un forfait de 1 200 euros au titre de l'aide technique sera attribué à la naissance, à trois ans et à six ans.
Les délais d'instruction ont été réduits. Il est important d'en assurer la fluidité, alors que les MDPH ont été très affectées par la crise sanitaire.
La CNCPH remettra un rapport d'évaluation en janvier 2022 ; nous serons ainsi en mesure d'affiner les aides, notamment pour les enfants souffrant de plusieurs handicaps.
M. Philippe Mouiller. - Je vous remercie pour votre réponse précise et technique. Étant moi-même membre du CNCPH, je la connaissais ; mais vous n'avez pas répondu à mes deux inquiétudes, sur la forfaitisation et le mode de financement. Qui va payer ?
Avenir du service de neurochirurgie de la clinique des Franciscaines de Nîmes
Mme Vivette Lopez . - Depuis 1988, l'établissement des Franciscaines, dans le Gard, est un pôle d'excellence, régulièrement cité dans les classements de la presse nationale. Il fédère un ensemble de services dont la neurochirurgie intracrânienne qui traite 2 000 malades par an et pratique 250 chirurgies crâniennes quand le seuil annuel requis n'est que de 100 par an.
Or une décision de l'ARS menace son agrément : l'offre de soins pourrait disparaître à cause d'une disposition administrative qui impose une réunion de l'activité de neurochirurgie au sein du CHU de Nîmes.
Cette orientation nie l'équilibre inhérent au fondement de la carte sanitaire du territoire et priverait les Gardois d'une prise en charge de qualité. Un seul plateau technique ne sera pas suffisant pour répondre au volume des demandes et à l'évolution des techniques médicales. En outre, elle met à mal une coopération public-privé qui fonctionne parfaitement depuis douze ans.
Alors que la communauté médicale de neurochirurgie et le conseil de l'ordre soutiennent le maintien de deux sites, la clinique des Franciscaines semble faire les frais d'un certain dogmatisme administratif dont la crise du Covid a pourtant révélé les failles.
Quelles mesures comptez-vous prendre pour sauvegarder cette activité ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie . - Un groupement de coopération sanitaire (GCS) a été constitué dans le Gard ; il réunit l'hôpital des Franciscaines et le CHU de Nîmes. Le dossier d'autorisation d'exercice prévoyait le regroupement, au 1er juillet, de l'ensemble de la neurochirurgie sur un site unique au CHU - pour cela, un bâtiment a été construit pour un coût de 18 millions d'euros, et livré en 2018.
La mutualisation de l'activité garantit une offre optimale. Or début 2020, l'ARS a été informée que le regroupement n'avait pas eu lieu.
Un délai supplémentaire a alors été concédé par l'ARS. Le 2 septembre, le GCS formulait une nouvelle demande, cette fois motivée par une remise en cause de l'opportunité du regroupement dans le bâtiment pourtant spécialement construit pour cela. Au 1er octobre, l'ARS constatait l'absence de mise en conformité et diligentait une inspection.
Cependant, dans l'intérêt de la sécurité juridique et de l'apaisement, l'ARS a prolongé la dérogation jusqu'à la fin de la procédure. Le ministre des Solidarités et de la santé veut s'assurer que l'activité commencera dans le nouveau bâtiment dans des conditions sereines.
Mme Vivette Lopez. - Merci pour votre réponse. Nous souhaiterions votre soutien pour préserver cette clinique au top de la technologie, qui attire des chirurgiens de toute la France, et même d'Allemagne. Elle correspond au désir de proximité des Français.
Prestation d'accueil et de restauration scolaire en Guyane
Mme Marie-Laure Phinera-Horth . - Ma question porte sur l'expérimentation de la prestation d'accueil et de restauration scolaire (PARS) lancée en Guyane et pilotée par la caisse d'allocations familiales (CAF) de ce département.
La pauvreté touche une personne sur deux en Guyane, mais en 2019, seuls 19 % des enfants ont bénéficié de la PARS du fait de la faible offre de cantine, et du peu de moyens des familles. Certains élèves parcourent de longs trajets, souvent en pirogue, et restent sans déjeuner, ce qui nuit à leur réussite.
Une expérimentation menée avec la CAF, la préfecture, le rectorat et la collectivité territoriale de Guyane sur deux collèges de Saint-Laurent-du-Maroni, avec des paniers repas pour 2 000 élèves, sans contribution des parents, devait être lancée. La pandémie l'a stoppée. Les résultats étaient pourtant positifs, tant sur la scolarité que sur l'apaisement des tensions au sein des collèges.
Envisagez-vous de la prolonger avec des fonds PARS, pour trois ou six mois, afin de permettre un cofinancement par les fonds européens, puis de la généraliser à tous les établissements sans cantine ?
L'égalité des chances est l'honneur de la République.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie . - La CAF de Guyane a pris en charge à 100 %, sur son budget d'action sociale, les paniers repas distribués aux collégiens de Saint-Laurent-du-Maroni. Cela a permis de ne pas retarder le lancement de l'expérimentation, malgré la crise sanitaire.
La décision interministérielle prévoyait un financement partenarial associant la PARS, le programme de l'Union européenne Lait et fruits à l'école, et la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, avec une participation financière des collectivités territoriales.
Pérennisation, extension ou généralisation ne peuvent s'envisager sans cofinancement. La branche famille n'a pas vocation à se substituer à la collectivité territoriale, responsable de la restauration scolaire. Le cofinancement conditionne aussi le versement de la PARS, qui ne peut financer la totalité du coût des repas et collations.
Dès lors, soit la CAF de Guyane poursuit son soutien, soit d'autres fonds sont mobilisés dans le cadre du programme Lait et fruits à l'école pour assurer le cofinancement de l'initiative.
Infirmières libérales en zone rurale
Mme Anne-Catherine Loisier . - Les cabinets infirmiers demeurent parmi les rares professionnels de santé encore présents dans certaines zones rurales.
Malgré des conditions d'exercices difficiles, ils tentent de pallier le déficit croissant de médecins. Ils font parfois plus de 300 kilomètres par jour, travaillent sept jours sur sept afin de se rendre au chevet de malades âgés et isolés.
Ils sont souvent les derniers professionnels de santé à se déplacer et éprouvent des difficultés à trouver des remplaçants.
Cette situation s'aggrave du fait du vieillissement de la population et de la politique de maintien à domicile. Dans le Morvan, la commune de Saulieu est classée en partie en zone « montagne ». Or les professionnels voient leurs kilomètres facturés au tarif « plaine », dès lors que le cabinet n'est pas situé dans la partie classée « montagne ». Cette aberration administrative accroît encore les difficultés de ces zones déjà défavorisées.
Une adaptation du règlement qui ne s'appuierait pas sur la localisation du cabinet mais prendrait en compte les zones effectives d'intervention s'impose. Il faudrait aussi faire évoluer l'avenant 6 concernant la facturation au-delà de 300 kilomètres journaliers pour les professionnels exerçant en zone « montagne ».
De telles dispositions sont vitales pour rendre plus attractif l'exercice en zone rurale très isolée, et pallier de nouveaux départs.
Comment allez-vous soutenir les infirmières en milieu rural ? Allez-vous réactiver l'avenant 6 ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie . - Je salue comme vous l'engagement de ces professionnels.
L'article 17-4 de l'avenant 6 à la convention nationale des infirmiers libéraux concerne la prise en charge des indemnités kilométriques : un abattement de tarif au regard de la distance journalière, défini par cumul des kilomètres facturables après déduction... C'est assez technique. Les nouvelles dispositions limitent les indus et permettent à de nombreux infirmiers libéraux de facturer « en étoile ». Elles résultent des négociations conventionnelles avec les organisations syndicales.
L'avenant 6 a été conclu le 29 mars 2020 avec deux syndicats représentatifs, la Fédération nationale des infirmiers et le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux. Il vise à améliorer l'accès aux soins, notamment par la coordination pluri-professionnelle, l'investissement, la prévention. Pour favoriser l'exercice dans les zones sous-denses, nous apportons une aide forfaitaire à l'installation de 27 500 euros et une aide au maintien de 3 000 euros par an.
Hôpital de Saint-Jean-de-Maurienne
Mme Martine Berthet . - L'hôpital de Saint-Jean-de-Maurienne apporte une offre de soins de proximité à 40 000 habitants, dans une vallée de 100 kilomètres bordée de nombreux villages. Il prend en charge les vacanciers victimes d'accidents, particulièrement dans la pratique des sports d'hiver. Quatre Ehpad lui sont rattachés.
Depuis trois ans, la direction de l'établissement et les élus de la vallée demandent que ce centre hospitalier soit classé, selon les critères de l'arrêté du 4 mars 2015, comme activité de soins isolée réalisée par un établissement situé dans une zone de faible densité. Cependant, parce qu'il est situé à 44 minutes de l'hôpital d'Albertville, il ne peut bénéficier de ce classement, le seuil étant fixé à 45 minutes ! Pourtant, en zone de montagne, le temps de trajet varie en fonction des conditions climatiques et de la fréquentation touristique.
L'hôpital a besoin de nouveaux investissements. Ce classement, auquel est favorable l'ARS, lui permettrait de bénéficier d'un financement complémentaire pour les activités de soins. Cela répondrait aux besoins sociétaux.
Territoires d'industrie, tunnel Lyon-Turin : l'État s'investit beaucoup dans cette vallée, qui compte plusieurs sites Seveso. Laisser l'hôpital à ses difficultés irait à l'encontre de cet effort.
Envisagez-vous d'adapter les critères permettant de bénéficier du statut d'hôpital isolé, notamment en zone de montagne ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie . - Le forfait Activités isolées a été créé en 2015, pour remédier aux limites du financement au cas par cas des établissements concernés. Il s'agit d'objectiver la notion d'isolement géographique pour assurer un traitement homogène.
Le centre hospitalier de Saint-Jean-de-Maurienne ne remplit pas les conditions d'éligibilité, étant proche du centre hospitalier d'Albertville et du médipôle de Savoie.
Le Gouvernement a pris des engagements forts pour sortir du tout T2A. Les besoins de la population, en matière d'urgences notamment, seront davantage pris en compte par les nouveaux modèles de facturation.
Par ailleurs, le forfait Activités isolées est un correctif trop systématique qui ne répond pas aux problèmes d'attractivité de ces établissements.
Une réflexion est en cours sur une évolution du financement de l'activité obstétrique afin d'intégrer les maternités à faible niveau d'activité. Les patientes dont le domicile est situé à plus de 45 minutes pourront bénéficier des prestations d'hébergement et de transport dans le cadre de la mesure Engagement maternité.
Soyez assurée que le Gouvernement ne laissera pas les habitants, à l'année ou de passage, sans solution.
Prise en charge de l'endométriose
Mme Véronique Guillotin . - Je souhaite interroger le Gouvernement sur le plan d'action pour renforcer la prise en charge de l'endométriose, annoncé le 8 mars 2019. Cette maladie qui touche 10 à 20 % des femmes en âge de procréer reste méconnue et la banalisation de la souffrance pendant les règles provoque un retard de diagnostic moyen de sept ans.
Malgré ses lourdes conséquences sur la vie quotidienne, l'endométriose ne figure pas sur la liste des affections de longue durée (ALD) ouvrant l'exonération du ticket modérateur. J'ai signé, avec Élisabeth Doineau, une lettre appelant à une reconnaissance institutionnelle de la maladie.
La recherche ne permet pas encore de déterminer les origines de la maladie, ce qui limite les traitements. En outre, 30 à 40 % des femmes touchées par l'endométriose rencontrent des problèmes de fertilité, or la conservation des ovocytes reste une pratique marginale. Je souhaite savoir où en sont les recherches et si une information spéciale a été réalisée auprès du personnel médical.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie . - Le Gouvernement est conscient de l'importance du sujet, d'où le plan lancé par Agnès Buzyn en mars 2019 visant une détection précoce, une meilleure prise en charge et une information sur cette pathologie longtemps tabou.
La détection précoce pourrait être effectuée lors des consultations obligatoires des adolescentes ; il convient en outre de mieux former les professionnels et de mieux accompagner les femmes, notamment sur la question sensible de la fertilité.
En 2019, la CNAM et la Haute Autorité de santé ont lancé un chantier sur la qualité et la pertinence des soins. Sur la base de leurs conclusions, une ALD pourra être envisagée pour les cas sévères.
Le sujet de la préservation de la fertilité sera pris en compte. Enfin, une formation spécifique est prévue depuis la rentrée 2020 en deuxième cycle de médecine et en formation continue, et nous envisageons une formation opérationnelle en troisième cycle. Nous renforçons également la formation des sages-femmes et infirmiers.
L'Inserm a réalisé une cartographie de la recherche française sur le sujet, des publications sont prévues et des colloques organisés.
Nous sommes sur tous les fronts pour améliorer la prise en charge des femmes touchées par cette maladie.
Mme Véronique Guillotin. - Je vous remercie pour votre réponse très complète.
Prochaine séance demain, mercredi 16 décembre 2020, à 15 heures.
La séance est levée à 20 h 55.
Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Annexes
Ordre du jour du mercredi 16 décembre 2020
Séance publique
À 15 heures, à 16 h 30 et, éventuellement, le soir
Présidence : M. Gérard Larcher, président Mme Laurence Rossignol, vice-présidente M. Pierre Laurent, vice-président
Secrétaires : MM. Loïc Hervé et Jacques Grosperrin
1. Questions d'actualité au Gouvernement
2. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée (n°231, 2020-2021)
3. Sous réserve de sa transmission, nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2021 (A.N., n°3642)
4. Convention internationale examinée selon la procédure d'examen simplifié :
=> Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation mondiale de la santé relatif à l'octroi du statut diplomatique aux fonctionnaires de l'Organisation mondiale de la santé de grade P5 et supérieur du bureau de l'OMS (texte de la commission, n°213, 2020-2021)