Projet de loi de finances pour 2021 (Seconde partie - Suite)
CULTURE (Suite)
M. Bernard Fialaire . - La culture est l'un des secteurs les plus touchés par la crise sanitaire. Un baisser de rideau s'est abattu sur elle : 4,2 milliards d'euros de pertes de chiffre d'affaires pour les entreprises du spectacle vivant, 3 milliards pour les arts visuels, 640 millions d'euros pour le patrimoine hors architecture.
Aussi attendons-nous beaucoup de ce budget, après les LFR. Je salue, madame la ministre, votre énergie et votre passion à défendre le secteur. Ce séisme sans précédent appelle des moyens exceptionnels pour sauver « cet héritage de la noblesse du monde », selon la formule de Malraux. Des milliers d'emplois directs et indirects sont en jeu.
Aux 4,65 % de hausse des moyens s'ajoute le milliard d'euros du plan de relance - un effort sans précédent, avec deux axes : préserver notre rayonnement culturel et enclencher une dynamique territoriale.
Le tourisme est un levier fort de l'économie culturelle : en 2019, 81 % des visiteurs de Versailles étaient étrangers. Il faut soutenir nos grands opérateurs affaiblis car la culture est indissociable de l'identité de la France. Il serait impensable de laisser nos grands musées fermer et licencier, comme aux États-Unis.
Ce soutien ne nous dispense pas de repenser le modèle de certains opérateurs comme l'Opéra de Paris, qui n'est pas financé par les collectivités territoriales d'Ile-de-France alors que son public est parisien et francilien aux deux tiers.
Deuxième remarque : il faudra veiller à une répartition équitable des moyens. La culture irrigue tout un écosystème qui touche de nombreux métiers, du commerce à l'artisanat. À cet égard, l'augmentation de 10 millions pour les musées territoriaux, de 3 millions pour les archives territoriales, l'élargissement de l'avantage fiscal associé au label de la Fondation du patrimoine en faveur des centres-villes et centres-bourgs sont bienvenus. J'espère que la promesse d'une opération par département sera tenue. Le patrimoine bénéficiera de plus d'1 milliard d'euros.
Les 10 millions d'euros du fonds de soutien aux festivals ont été consommés, le plan de relance rajoute 5 millions d'euros, mais les festivaliers veulent surtout reprendre leur activité : que leur répondez-vous ?
Le groupe du RDSE votera les crédits de ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)
M. Pierre Ouzoulias . - Ce budget comporte d'indéniables mesures pour la culture ; le Gouvernement a débloqué des moyens pour les opérateurs, les entreprises et les artistes ; en particulier les intermittents, ce qui fait de nous une exception par rapport à nos voisins où les compagnies sont dissoutes et les musiciens invités à changer de métier.
M. Julien Bargeton. - Bravo !
M. Pierre Ouzoulias. - Reste que le monde de la culture doit justifier en permanence de son utilité ; c'est sa fragilité et sa force. La commission de la culture salue cet engagement militant mais mesure la difficulté du sacerdoce. Nous pressentons que l'aide engagée sera insuffisante si l'activité culturelle ne reprend pas pleinement. Se pose déjà la question de la possibilité d'organiser les festivals, alors que l'année blanche des intermittents s'achèvera cet été.
La filière du patrimoine et de l'architecture aura perdu un tiers de son chiffre d'affaires en 2020. Je reconnais l'effort budgétaire sans précédent pour les monuments historiques mais, avec Philippe Nachbar, je déplore la place prépondérante des grands monuments, qui sont propriété d'État, dans la liste des restaurations projetées. Les moyens du loto du patrimoine ne suffiront pas à la préservation du petit patrimoine rural, moins visible.
Or l'action de l'État en tant que maître d'ouvrage en région est cruciale ; il serait dommage que l'effort budgétaire soit compromis par le manque de moyens humains des Directions régionales de l'action culturelle (DRAC).
Le projet de Cité internationale de la langue française au château de Villers-Cotterêts suscite des interrogations, tant les délais semblent irréalistes. Je partage l'idée d'une action résolue en faveur de la défense et illustration de la langue française, mais elle ne peut être portée par le seul ministère de la culture.
L'exécution budgétaire sera suivie avec attention : le ministère de la culture a-t-il encore les moyens humains de ses ambitions ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur plusieurs travées du groupe UC)
Mme Sonia de La Provôté . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Impossible d'aborder ce budget sans évoquer la crise. Priorité a été donnée à la protection sanitaire, l'essentiel n'a pas été culturel : la madeleine l'a emporté sur Proust. Si la culture n'a pas totalement disparu des écrans, la dimension humaine, de partage, en sort très amoindrie. S'ajoute un risque de perte de diversité culturelle, pourtant fondement de notre exception culturelle.
Mon propos se concentrera sur le programme 131 « Création », en forte augmentation avec 37 millions d'euros de mesures nouvelles, auxquelles s'ajoute le plan de relance. La crise est pour tous : je salue le renforcement du Fonds pour l'emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps), le soutien aux intermittents, aux monuments publics, au Centre national de la musique (CNM), à la présence artistique dans les territoires, la prolongation du crédit d'impôt ouvert par le Sénat à toutes les esthétiques du spectacle vivant. Les arts visuels, toutefois, ne sont pas les plus accompagnés alors qu'ils sont essentiels à l'accès à la culture pour tous.
Nous sommes en attente de solutions concrètes pour les festivals, en espérant éviter l'annulation d'une deuxième saison. Concernant le spectacle vivant, il ne faut perdre aucun lieu ni structure, ce qui suppose d'étendre l'activité partielle.
Une véritable gouvernance territoriale de la culture entre le ministère et les collectivités territoriales est nécessaire : loin des grands-messes, privilégions l'agilité et la confiance.
Le programme 361 acte une hausse des crédits de la démocratisation culturelle et du Pass Culture.
Il y a une certaine amertume à le voir s'envoler, se généraliser sans garantie de réussite au détriment de l'éducation artistique et culturelle, alors que des acteurs associatifs sont menacés de disparition. Nous tenons à l'objectif 100 % éducation artistique et culturelle, pour 100 % d'enfants.
L'augmentation des bourses est bienvenue pour lutter contre la précarisation des étudiants, mais la situation des écoles d'architecture interpelle, avec seulement 75 postes d'enseignants-chercheurs créés sur 150 prévus. La question du statut des enseignants reste entière pour les écoles d'art.
Les politiques locales sont peu présentes dans ce budget. Pourtant, il est plus vital que jamais de co-construire la culture dans les territoires.
Le patrimoine, second secteur le plus touché, bénéficie d'un effort budgétaire marqué, surtout pour les grands opérateurs de l'État, très touchés - baisse de fréquentation, du mécénat... Le renforcement des contraintes sur le mécénat culturel des grandes entreprises tombe mal.
Dans les territoires, l'arrêt des chantiers et le retard dans la mise en place des nouvelles municipalités risquent de mettre en péril certains patrimoines.
Villers-Cotterêts, plan Cathédrale, Centre des monuments nationaux : les moyens vont surtout au grand patrimoine national, aux dépens du maillage territorial qui fait notre pays.
Il est certes plus simple de prioriser les chantiers d'État, mais celui-ci a aussi un rôle d'assistance comme maîtrise d'ouvrage dans les territoires. Le groupe UC proposera une ligne budgétaire exclusivement dédiée au patrimoine non classé.
L'essentiel sera de préserver la diversité des acteurs culturels, ce qui nécessite une structuration des relations entre État, collectivités territoriales et acteurs. La culture pour tous, c'est la culture par tous.
Le groupe UC votera les crédits de ce budget. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et SER ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
M. Jean-Pierre Decool . - La France ne fait pas exception : nous avons été contraints à des choix cornéliens au terme desquels la culture a été jugée non vitale. Déjà fragile, elle a été davantage affaiblie par les restrictions. Le Gouvernement a mis en place des mesures de soutien dont certaines sont appelées à durer.
Il convient que l'activité partielle et l'année blanche soient prolongées et le dispositif d'aide actualisé. Je me félicite notamment des fonds dédiés au Fonpeps et des crédits du plan de relance.
La culture n'est pas un luxe urbain ! Notre patrimoine culturel est parmi les plus riches au monde.
Les grands opérateurs ont été invités à développer des ressources propres. Le mécénat est permis par une politique fiscale avantageuse. Si l'on prend en compte les dépenses fiscales, le soutien de l'État à la culture est d'environ 15 milliards d'euros. Mais avec la crise, le mécénat des grandes entreprises risque de se réduire drastiquement.
Une fois la crise passée, il conviendra de réfléchir à la bonne stratégie en matière de ressources propres des opérateurs.
L'augmentation des crédits du plan Cathédrale doit être saluée. Toutes ne sont pas aussi médiatisées que la première d'entre elles, mais elles sont importantes pour l'attractivité de nos territoires. Madame la ministre, vous y avez donné l'impulsion.
En investissant dans la culture, nous pouvons lui donner un nouvel élan et participer à la relance de notre économie. Le groupe INDEP votera ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC)
M. Julien Bargeton . - « Je ne cherche pas, je trouve » disait Pablo Picasso. Pas besoin de chercher longtemps dans ce budget, madame la ministre, pour trouver l'effort massif en faveur de la culture (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains) : plus 8 % sur l'ensemble de la mission. Au total, dépenses fiscales comprises, le soutien à la culture dépasse 15 milliards d'euros.
M. Vincent Éblé. - Ce n'est pas le même périmètre !
M. Julien Bargeton. - La culture, c'est le lien entre passé, présent et avenir. Le passé, c'est le patrimoine, avec une hausse de 4,6 % et 345 millions d'euros dans le plan de relance. Le grand patrimoine, bien sûr, mais aussi le patrimoine de proximité, qui fait l'âme et l'identité de la France, et qui doit être davantage valorisé et entretenu.
Après le passé, le présent : la création, qui ne se passe pas d'artistes. Ici, la hausse est de 4,5 %, sans compter 260 millions d'euros du plan de relance. Les circonstances l'exigent.
Le Général de Gaulle avait dit : « La culture domine tout ». Ce n'est pas un supplément d'âme : elle est à la base de tout. Car les créateurs ont été très touchés. Écrivains, plasticiens, musiciens ont été arrêtés dans leur activité.
L'avenir, c'est la jeunesse. Le Pass Culture sera doté de 20 millions d'euros supplémentaires pour atteindre 60 millions, soit une augmentation de 5 %. J'entends des critiques mais c'est un outil adapté à la jeunesse car c'est une application qui fonctionne ; 85 % des bénéficiaires s'en sont servis ; 82 000 d'entre eux ont fait 610 000 réservations, majoritairement sur le livre, puis la musique et l'audiovisuel. C'est important, surtout en considération de la situation des librairies. Le Pass Culture permet de décloisonner les pratiques, de démocratiser l'accès à la culture, de dépasser certains clivages pour aller vers plus de cohésion sociale. Peut-être faudra-t-il l'améliorer, en lien avec les parcours d'éducation artistique et culturelle (EAC), introduire davantage de médiation.
Émile Biasini le disait, lui qui a été l'un des fondateurs du ministère de la culture : « Il faut transformer un privilège en bien commun ». La crise, paradoxalement, le révèle : elle a montré l'attachement profond des Français à leur culture. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)
Mme Claudine Lepage . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le monde de la culture a été durement touché, mais on a vu combien les Français sont attachés à la culture sous toutes ses formes. Le budget 2021 répond au désir de nos concitoyens de préserver notre modèle culturel.
L'élargissement du crédit d'impôt soutiendra la relance de l'activité. Mais il reste l'incertitude de la durée de la crise. D'autres incertitudes demeurent, sur les intermittents et la prolongation de l'année blanche, sur les festivals qui font vivre nos territoires.
La crise sanitaire a mis en avant les difficultés structurelles des arts visuels, insuffisamment prises en compte par le ministère. Si une meilleure structuration s'impose, il faudra aussi que le ministère prenne des mesures. Je regrette qu'aucun moyen ne soit dédié au Conseil national des professions des arts visuels.
Les écoles d'art et d'architecture expriment un certain malaise. Les différences de statut entre écoles d'art posent problème, comme l'absence d'intégration de l'enseignement supérieur Culture à Parcoursup. Les écoles d'architecture risquent d'être affaiblies, aux dépens de notre capacité à penser la ville de demain. Espérons que l'amendement voté ce matin survivra à la navette...
Ce PLF va globalement dans le bon sens mais la crise sanitaire doit nous inciter à repenser le modèle culturel que nous voulons construire, en concertation avec les acteurs.
Le groupe SER votera ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Jean-Raymond Hugonet . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce budget inédit est le reflet de la situation dramatique que traverse le secteur de la culture. En hausse de 4,6 %, il atteint 3,8 milliards d'euros. Madame la ministre, vous avez obtenu 2 milliards d'euros dans le plan de relance : c'est une performance que je salue.
La part belle est pour le patrimoine avec 1 milliard d'euros, auquel s'ajoutent les 345 millions d'euros du plan de relance. Le plan Cathédrale et les musées territoriaux sont dotés de 180 millions d'euros et de 52 millions d'euros respectivement, sur deux ans.
Les monuments historiques seront une priorité. La restauration des monuments historiques des communes et des propriétaires privés sera accompagnée. L'archéologie et les archives bénéficieront d'un soutien sans précédent de 24 millions d'euros.
Les musées ont été désertés du fait de l'absence de touristes étrangers mais la crise a permis aux Français de redécouvrir nos belles régions pendant l'été.
Les 40 millions d'euros sur deux ans pour la restauration des monuments historiques que possèdent les communes et les propriétaires privés ne seront pas suffisants, après les coupes sévères des années 2012 à 2014. Le patrimoine français, avec ses 44 000 bâtiments inscrits ou classés, souffre d'un sous-financement.
Le château de Villers-Cotterêts, qui fut un Ehpad géré par la Ville de Paris jusqu'en 2014 et qui est désormais dans un état de délabrement avancé, bénéficie de 110 millions d'euros auxquels on ajoute 100 millions d'euros du plan de relance : c'est disproportionné, d'autant que 75 millions compensent l'absence d'investisseurs privés - n'est pas Notre-Dame de Paris qui veut !
Heureusement, le projet pharaonique du Grand Palais a été revu à la baisse - vous êtes passée par là, madame la ministre, heureusement ; mais le budget reste de 466 millions d'euros. Chaque année, des crédits manquent. Où ont été pris les crédits de 2020 ? Où seront-ils pris en 2021 ?
Le secteur de la création paye un lourd tribut, avec une perte de chiffre d'affaires estimée à 7 milliards d'euros. Dans le spectacle vivant, elle serait de 72 %. Le programme « Création » voit ses crédits augmenter de 4,46 % pour atteindre 862 millions d'euros, auxquels s'ajoutent les 168 millions d'euros du plan de relance. Prolongation des droits des intermittents, création d'un fonds pour les festivals, d'un fonds d'urgence pour le théâtre privé et le CNM, exonération de cotisations foncières : ces mesures d'urgence seront-elles prolongées ?
Le spectacle vivant est plus directement touché par le confinement, les mesures de distanciation et le couvre-feu, mais les artistes plasticiens subissent eux aussi l'annulation des expositions et ne bénéficient pas d'un régime d'assurance chômage.
Sur l'Opéra de Paris, nous sommes en attente du rapport Hirsch-Tardieu. Le mécénat s'est réduit d'un tiers et l'établissement a perdu 55,4 millions d'euros de recettes de billetterie entre mars et décembre, tous les spectacles ayant été annulés. La subvention de l'État a été réduite de 15 millions d'euros en dix ans. Il faut donc saluer les 81 millions d'euros du plan de relance, mais la réforme du fonctionnement de l'établissement exigée par l'État ne sera pas sans répercussions sur la création.
Un mot, pour conclure, sur le Pass Culture, l'arbuste qui cache la forêt et sur lequel ruisselle abondamment l'argent public.
M. Pierre Ouzoulias. - Très bien !
M. Jean-Raymond Hugonet. - Le cahier des charges change tous les quatre matins : 18 ans, 20 ans, 500 euros, 300 euros... Nous sommes informés de ces évolutions à la fumée des cierges. C'est le fait du prince : le Pass Culture sera l'oeuvre culturelle du quinquennat. Fermez le ban ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et CRCE)
Mme Marie-Pierre Monier . - Comme l'ensemble du monde de la culture, le patrimoine souffre des conséquences de la crise sanitaire. Les pertes étaient estimées à 36 % de son chiffre d'affaires, avant même le second confinement. Toutes les activités sont touchées.
Dans ce contexte, les crédits du programme 175 connaissent une augmentation remarquable et dépassent 1 milliard d'euros. Mais cela sera-t-il suffisant, en dépit du PLFR3 et du plan de relance ? Derrière, il y a des territoires, des entreprises qu'il faut aider à passer le cap.
Il faut veiller à la répartition des crédits sur le territoire. Nos demandes récurrentes de moyens pour la restauration des monuments historiques dans les territoires ont, cette année, été entendues.
En complément au fonds patrimonial et incitatif, une assistance à la maîtrise d'ouvrage permettrait de donner un coup de pouce à des petits projets qui pâtissent du manque d'ingénierie.
Je salue la hausse des crédits pour les petits musées, qui participent au développement touristique de nos territoires.
Les besoins de rénovation des bâtiments d'archives sont réels : la réévaluation des crédits est positive, mais on aurait pu aller plus loin.
Les crédits pour l'architecture et les espaces protégés stagnent, or le dispositif Site patrimonial remarquable est un outil très intéressant, notamment en lien avec « Petites villes de demain » et « Action coeur de ville ».
L'archéologie préventive doit être soutenue, notamment l'Inrap dont certaines charges doivent être prises en compte : ainsi du coût des restitutions des fouilles réalisées et de la mise en valeur au niveau local. Nous défendrons un amendement sur le sujet.
L'effort financier en faveur du programme « Patrimoines » est notable : c'est pourquoi le groupe SER y sera favorable, tout en restant vigilant.
Un dernier mot pour saluer Hervé Le Tellier, lauréat du Prix Goncourt qui réside à Montjoux, petit village de la Drôme. (Applaudissements)
Mme Brigitte Lherbier . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La culture fait battre le coeur des Français. Je prendrai mon département du Nord comme exemple. Le Nord a toujours été une terre d'accueil pour les artistes de par sa situation géographique privilégiée. Les Nordistes sont attachés à leur histoire, à leurs traditions, à leur culture populaire, festive et familiale.
Notre patrimoine architectural est diversifié : 10 000 objets protégés ; musées, médiathèques et bibliothèques. J'ai une pensée pour les acteurs culturels qui ont repris leurs activités après le premier confinement, notamment dans le cadre de l'été apprenant. Les salles se sont montrées exemplaires dans l'application des protocoles sanitaires, ont adapté leur jauge. Mais le reconfinement a mis fin à ces efforts.
Intermittents, musiciens indépendants sont très fragilisés, de nombreuses structures sont menacées. Ces acteurs ont pourtant continué à investir pour préparer les prochains spectacles, pour garder un lien avec le public via le numérique.
Le spectacle vivant public, qui dépend grandement du financement des collectivités, est dans une situation préoccupante.
Le ministère de la Culture disposera de 164 millions d'euros supplémentaires. C'est exceptionnel mais justifié car le secteur a besoin d'être soutenu. La répartition doit être équitable : la culture parisienne ne doit pas prédominer. Il faut une concertation avec les territoires pour soutenir la déconcentration culturelle.
Le plan de relance aurait peut-être été suffisant s'il y avait eu reprise de l'activité... Mais si le virus, comme l'a dit le Président, sera présent jusqu'à l'été 2021, cette reprise et repoussée et se poseront les questions des loyers et du remboursement du prêt garanti par l'État.
Le fonds de compensation pour perte de billetterie doit être prolongé au-delà du premier trimestre 2021 et renforcé par un accompagnement à l'investissement.
Il ne s'agit plus seulement de démocratiser la culture, mais de la faire vivre après la crise, dans toute sa diversité.
Le groupe Les Républicains votera ces crédits. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture . - L'examen du budget 2021 intervient dans un contexte particulier pour le monde de la culture. L'augmentation exceptionnelle de 4,8 %, soit 167 millions d'euros supplémentaires, manifeste une volonté forte du Gouvernement de conforter dans la durée le rôle de la culture dans la vie démocratique, sociale et économique.
L'État a été totalement mobilisé dès le début de la crise sanitaire pour soutenir les acteurs culturels. Depuis mars, le secteur a bénéficié de 5 milliards d'euros de mesures d'urgence, dont 3,3 millions d'euros de mesures transversales et 949 millions d'euros pour l'année blanche de l'intermittence. S'y ajoutent 2 milliards d'euros du plan de relance.
Depuis la rentrée, 220 millions d'euros ont bénéficié aux salles de cinéma et de spectacle ; je me réjouis de la réouverture prévue le 15 décembre, dans des conditions qui resteront particulières. Je continuerai à échanger avec les professionnels afin d'adapter nos dispositifs à la diversité des situations.
C'est dans ce contexte exceptionnel qu'a été élaboré ce budget qui atteint plus de 3,2 milliards d'euros, auxquels s'ajoutent plus de 733 millions d'euros du plan de relance, soit près de 4 milliards d'euros pour l'année 2021.
Ces moyens historiques nous permettront d'engager une ambitieuse refondation notre modèle culturel. La crise sanitaire n'est pas une parenthèse, je suis d'accord avec Thomas Dossus sur ce point. Elle met en évidence des fragilités structurelles. Il faut donc agir sans attendre, en tenant compte des profondes mutations en cours, mises en évidence par l'étude sur les pratiques culturelles des Français, dont je me suis emparée dès mon arrivée rue de Valois, pour réconcilier cultures patrimoniale et numérique, cultures savante et populaire. Je suis d'accord avec Brigitte Lherbier : il y a trop de cloisonnements. Nos moyens budgétaires nous permettront d'oeuvrer en ce sens.
Le patrimoine bénéficie de 1,015 milliard d'euros, en hausse de 4,4 %, auxquels s'ajoutent 345 milliards d'euros du plan de relance ; cela contribuera au développement économique, à l'attractivité et à la cohésion territoriale. Cela financera un plan de rénovation des musées territoriaux, chers à beaucoup d'entre vous - avec 52 millions d'euros sur deux ans, dont 6 millions du plan de relance -, un soutien aux archives et à l'archéologie.
Le financement du plan Cathédrale sera de 50 millions d'euros par an, auxquels s'ajoutent 40 millions d'euros par an du plan de relance, soit 180 millions d'euros sur deux ans, pour les travaux de restauration, de mise en sécurité et sûreté de 80 cathédrales, ces édifices emblématiques qui réconcilient ceux qui croient au ciel et eux qui n'y croient pas. Les 40 millions d'euros pour les propriétaires privés et les communes seront complétés par les 5 millions d'euros destinés à la montée en charge du fonds incitatif et participatif pour les collectivités à faibles ressources.
Nos opérateurs nationaux sont soutenus par le plan de relance et par des crédits qui financeront la poursuite des grands projets déjà engagés comme le relogement du Centre national des arts plastiques à Pantin ou l'équipement des deux scènes de l'Opéra de Paris.
J'y reviendrai dans la discussion des amendements mais je réponds déjà à Jean-Raymond Hugonet que j'ai voulu réorienter le projet du Grand Palais vers une plus grande sobriété, tout en préservant cet édifice aujourd'hui considérablement dégradé ; l'accueil sera amélioré, grâce au réaménagement des espaces intérieurs.
Le programme « Création » connaît lui aussi une forte augmentation de 4,5 % - soit 37 millions d'euros de mesures nouvelles - et recevra 320 millions d'euros au titre du plan de relance. L'une des priorités, l'accompagnement des lieux de création et des compagnies et des labels en régions, bénéficiera de 15 millions d'euros. Trois millions d'euros sont prévus pour les arts visuels. Le plan de relance complétera ces moyens, en finançant les chantiers de rénovation et en soutenant la programmation des établissements de création dans nos territoires.
Les moyens du CNM sont renforcés, avec 200 millions d'euros en provenance du plan de relance, dans le cadre de sa montée en puissance triennale, au service de l'ensemble de la filière musicale.
L'activité des salles de spectacle sera soutenue par la prolongation du crédit d'impôt spectacle vivant et la création d'un crédit d'impôt théâtre.
Nous renforcerons le soutien aux artistes et créateurs, en particulier ceux qui n'entrent pas dans le champ des dispositifs transversaux, comme le souhaite Jean-Pierre Decool. Le grand plan de commandes artistiques est doté de 30 millions d'euros dans le plan de relance ; le Fonpeps perçoit 5 millions d'euros supplémentaires ; 2 millions d'euros sont débloqués pour les premières mesures en faveur des artistes-auteurs.
Le programme 361 bénéficie, à périmètre constant, d'une augmentation de 8,5 %, soit 46 millions d'euros. La nouvelle délégation générale pilotera de manière transversale notre action d'accès à la culture dans les territoires.
Pour aller vers l'objectif 100 % éducation artistique et culturelle cher à Sonia de La Provôté, les crédits du Pass Culture sont augmentés de 20 millions d'euros. Nous l'orientons vers la diversification des pratiques culturelles des jeunes. EAC et Pass Culture se complètent sans s'opposer.
En 2021 sera désignée la première capitale française de la culture, nouveau label qui distinguera tous les deux ans l'innovation artistique et l'attractivité d'une ville ou d'un groupement de collectivités.
L'enseignement supérieur culturel, madame Lepage, bénéficiera d'un accroissement notable de 3,3 %, après des années de stagnation, auquel s'ajouteront 70 millions d'euros du plan de relance. Nous améliorerons ainsi les conditions d'études et de vie des étudiants de nos écoles, culturelles et artistiques, et renforcerons les mesures d'accompagnement à la vie étudiante et à l'insertion. Dans ce contexte difficile, ceux qui seront les acteurs de la vie culturelle de demain méritent toute notre attention.
Les nouveaux moyens alloués à cette mission témoignent de notre confiance en l'avenir, de notre détermination à soutenir la vie culturelle de notre pays, la culture étant l'un des fondements de notre République. Je vous remercie pour le soutien unanime que vous accordez à ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur plusieurs travées des groupes SER, UC, Les Républicains)
Examen des crédits
Article 33
M. le président. - Amendement n°II-897, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
I. - Créer le programme :
Éducation artistique et culturelle
II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-897 transfère 222 556 652 euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » vers le programme « Éducation artistique et culturelle ».]
M. Pierre Ouzoulias. - M. Hugonet a fait une analyse acérée et très juste du Pass Culture. Il a proposé de fermer le ban. Avec cet amendement, je propose un De profundis clamavi (Sourires) : il faut passer à autre chose après trois années infructueuses.
Seul regret, le Pass Culture était un bon moyen de gager les amendements de crédits !
M. le président. - Amendement n°II-898, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-898 transfère 59 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture »vers le programme « Patrimoines ».]
M. Pierre Ouzoulias. - L'échelon déconcentré est déterminant pour accompagner les collectivités territoriales, grâce à l'aide à la maîtrise d'ouvrage notamment. Si les DRAC ont un peu plus de personnel, elles pourront utiliser à cette fin les crédits considérables du plan de relance.
Lorsqu'elles ont la capacité d'aider les collectivités territoriales, la consommation des crédits est satisfaisante, comme en Bretagne.
M. le président. - Amendement n°II-36 rectifié ter, présenté par Mme Dumas, MM. E. Blanc, J.B. Blanc, Bouchet, Brisson, Cambon, Courtial, B. Fournier, D. Laurent, Lefèvre, Menonville et Panunzi et Mmes Vérien, Joseph et Garriaud-Maylam.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-36 rectifié ter transfère 20 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » vers le programme « Patrimoines ».]
Mme Catherine Dumas. - Les amendements nosII-36 rectifié ter et II-37 rectifié ter tiennent compte de la sous-consommation des crédits du Pass Culture. Madame la ministre, vous avez-vous-même reconnu que 300 euros seraient un montant plus approprié que 500 euros. Le dispositif serait réorienté vers les 16-18 ans, ce que nous approuvons.
Avant de généraliser le Pass Culture, il convient que le Gouvernement présente un rapport précis et détaillé sur l'usage fait par les jeunes de l'argent du Pass Culture, de la consommation des crédits et de l'utilité d'en revoir le périmètre.
L'augmentation de 20 millions d'euros paraît dans ce contexte peu justifiée, alors que le patrimoine français souffre de sous-financements.
M. le président. - Amendement n°II-823, présenté par Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-823 transfère 5 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » vers le programme « Patrimoines ».]
Mme Marie-Pierre Monier. - Cet amendement prévoit un soutien supplémentaire à l'Inrap au titre de la compensation des charges de service public spécifiques qui lui incombent en tant qu'opérateur national d'archéologie préventive dans le champ concurrentiel.
Outre le traitement, l'exploitation et la valorisation scientifique des données de fouilles dont le volume s'accroît grâce à la politique d'archéologie préventive, l'Inrap doit s'occuper de la restitution des fouilles et de leur mise en valeur locale.
Ces actions contribuent grandement à l'acceptation locale des contraintes qu'impose l'archéologie préventive.
M. le président. - Amendement identique n°II-928, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Pierre Ouzoulias. - Madame la ministre, c'est la première fois que je défends l'archéologie en séance : votre présence m'a désinhibé ! (Sourires)
Les missions de recherche et de valorisation de l'Inrap sont essentielles à l'acceptation sociale des chantiers. N'abandonnons pas ce volet de son activité : pour le mener à bien, il faudrait le double des 5 millions d'euros prévus.
De plus, il n'est pas normal que le ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche, qui exerce la cotutelle sur l'Inrap, ne prenne pas sa part à son financement.
Lorsque je travaillais à la Culture, il y avait également un projet de coordination avec le ministère des Affaires étrangères : ce serait bienvenu.
M. le président. - Amendement n°II-37 rectifié ter, présenté par Mme Dumas, MM. E. Blanc, J.B. Blanc, Bouchet, Brisson, Cambon, Courtial, B. Fournier, D. Laurent, Lefèvre, Menonville et Panunzi et Mmes Vérien, Joseph et Garriaud-Maylam.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-37 rectifié ter transfère 3 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » vers le programme « Patrimoines ».]
Mme Catherine Dumas. - À la suite de l'amendement n°II-36 rectifié ter, cet amendement prévoit un transfert des crédits plus modeste.
M. le président. - Amendement n°II-824, présenté par Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-824 transfère 2 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » vers le programme « Patrimoines ».]
Mme Marie-Pierre Monier. - Cet amendement attribue des moyens supplémentaires au développement des Centres de conservation et d'études (CCE).
L'accroissement considérable des collections archéologiques à conserver et la nécessité de restituer au public les résultats des fouilles justifient la création de nouveaux centres.
Or les crédits qui leur sont consacrés sont stables et ils sont des oubliés du plan de relance.
M. le président. - Amendement n°II-821, présenté par Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-821 transfère 1 million d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » vers le programme « Patrimoines ».]
Mme Marie-Pierre Monier. - Cet amendement finance une assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) à titre gracieux au bénéfice des collectivités. Il existe dans de nombreuses collectivités un besoin d'accompagnement technique des porteurs de projets publics dont la non-satisfaction contribue à entretenir la sous-consommation des crédits consacrés aux monuments historiques.
Le dispositif mis en place depuis plus d'une dizaine d'années par la DRAC de Bretagne mérite d'être étendu.
M. le président. - Amendement n°II-822, présenté par Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-822 transfère 1 million d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » vers le programme « Patrimoines ».]
Mme Marie-Pierre Monier. - Cet amendement augmente le soutien à la revitalisation des centres anciens.
Le budget de l'action n°2, qui finance les sites patrimoniaux remarquables (SPR), les abords des monuments historiques et des sites inscrits au patrimoine mondial, n'a pas évolué depuis 2018.
Les centres anciens doivent prendre toute leur place au sein des dispositifs de revitalisation dans tous les territoires.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Il y a 85 % d'utilisateurs chez les jeunes qui expérimentent actuellement le Pass Culture : le dispositif mérite d'être étendu. Retrait de l'amendement n°II-897.
L'amendement n°II-898 cible lui aussi le Pass Culture : retrait. C'est le cas également de l'amendement n°II-36 rectifié ter : même avis, comme pour les amendements identiques nosII-823 et II-928. Deux millions d'euros supplémentaires sont dédiés aux contrats « territoire culture » et la dotation aux pratiques artistiques et culturelles en temps scolaire progresse de 1 million d'euros.
Une majoration des crédits dédiés au chantier du Grand Palais serait peu pertinente au vu de la réorientation décidée : retrait de l'amendement n°37 rectifié ter?
Retrait également des amendements nosII-824, II-821 et II-822 qui ciblent le Pass Culture.
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Ces amendements procèdent de la même démarche : appauvrir ou supprimer le Pass Culture. Mon avis défavorable ne vous étonnera pas.
Ils ouvrent cependant des questions qui méritent clarification. Voici les derniers chiffres en ma possession : au 20 novembre 2020, dans les 14 départements d'expérimentation du Pass Culture, le taux d'inscription est de 88 % et le taux d'utilisation est de 82 % ; 119 000 comptes ont été ouverts sur 135 000 éligibles ; 44 000 lieux culturels sont inscrits avec 3 millions d'offres ; 640 000 réservations ont été effectuées depuis février 2019, à 56 % pour les livres, 14 % pour la musique, 10 % pour l'audiovisuel et 4 % pour le cinéma. Ce sont à 65 % des biens physiques qui ont été réservés, à 26 % des biens numériques et à 9 % des événements.
Ce bilan me semble très positif, même si l'événementiel est moins sollicité que nous l'aurions souhaité, en raison du contexte.
De plus, la communication sur ce dispositif ne pourra être lancée qu'après le déploiement de celui-ci sur tout le territoire. On ne peut pas prétendre que ces crédits seraient perdus pour la culture ! La nouvelle délégation transversale que j'ai créée au ministère, et que certains d'entre vous ont saluée, chargée de la transmission, des territoires et de la démocratie culturelle, fera dialoguer les dispositifs d'éducation artistique et culturelle et le Pass Culture au service d'une même ambition : renforcer l'accès et la participation à la vie culturelle de tous les habitants, tout au long de leur vie, et sur l'ensemble du territoire.
L'amendement n°II-898 orientait les crédits prélevés vers l'entretien des monuments historiques ; 210 millions d'euros sont déjà réservés à ceux qui n'appartiennent pas à l'État - dont 70 % de crédits déconcentrés -, auxquels s'ajoutent 40 millions du plan de relance pour les propriétaires privés et les communes. La diversité du patrimoine - calvaires, pigeonniers, maisons, mais aussi usines - est reflétée dans les soutiens.
Dans l'amendement n°II-36 rectifié ter, Mme Dumas choisit la même distinction, ce qui appelle la même réponse.
L'amendement n°II-37 rectifié ter repose la question du Grand Palais, pour laquelle j'ai promis une réponse à M. Hugonet. J'ai en effet voulu redéfinir le projet du Grand Palais dans un sens plus économique et écologique. Il fallait évidemment sauver ce monument remarquable, qui tient une place éminente dans le paysage de Paris et dont la restauration allait sans doute coûter 100 millions d'euros de plus que les 466 millions initialement prévus, selon une évaluation datée, d'autant que certains éléments patrimoniaux de façade - corniches, statuaires - n'avaient pas été pris en compte. Vous pouvez remarquer que certains d'entre eux sont entourés de filets...
Une réserve de précaution de 30 millions d'euros est prévue pour assurer que l'enveloppe de 466 millions d'euros que j'ai finalement choisi de retenir sera bien respectée et que les travaux seront menés à bonne fin.
Les amendements nosII-823 et II-928 financent la création de nouveaux CCE, dont l'utilité est majeure. Cependant, leur déploiement nécessite du temps. Le plan de relance permettra d'assurer le réaménagement du site de Bibracte et des communs du domaine de Campagne en Nouvelle-Aquitaine.
Les services de l'État apportent une aide à la maîtrise d'ouvrage gratuite si nécessaire aux propriétaires n'ayant pas les moyens de l'assurer, les petites communes notamment. Quand les DRAC n'en ont pas les moyens, une subvention est possible, mais peu connue.
Votre demande me semble donc déjà satisfaite. Mais une offre des collectivités territoriales doit aussi se développer : certaines le font déjà et je les salue.
M. Pierre Ouzoulias. - Je vous remercie, madame la ministre, pour le soin pris à nous répondre. Ce n'est pas toujours le cas de vos collègues. (On le confirme à droite)
Cependant, je reste convaincu par l'analyse de notre collègue Hugonet qui a mené un suivi exemplaire sur trois ans du Pass Culture. Une expérimentation qui s'éternise, cela s'appelle un échec et il faut le sanctionner. Le Sénat doit dire son mécontentement. Je retire les amendements nosII-897 et II-898 au profit de l'amendement n°II-36 rectifié ter qui a plus de chances d'être adopté.
Le groupe CRCE ne vote pas le Pass Culture car nous considérons que l'individu n'est pas maître de son destin culturel et artistique : il faut une intermédiation. Nous restons au modèle peut-être un peu vieillot de la maison de la culture chère à André Malraux, plutôt qu'au smartphone et à ses applications.
Les amendements nosII-897 et II-898 sont retirés.
M. Jean-Raymond Hugonet. - Nous avons un vrai point de désaccord, madame la ministre, sur le Pass Culture. Ce n'est pas une fixette du Sénat, mais le fruit de trois ans de suivi, comme l'a dit mon collègue. Le Président de la République peut vouloir laisser une empreinte avec ce label, je ne lui dénie nullement ce droit, mais trois ans sont passés...
Trois ans, trois ministres successifs, des crédits qui pleuvent... Au moment où les artistes crèvent dans notre pays, que la culture est à l'arrêt, que les bibliothèques et les librairies ferment, on déverse 59 millions d'euros sur le Pass Culture ! Et pour payer des livres ? Qui va gober une chose pareille ?
Ce n'est pas décent de s'obstiner sur cet outil, qui est légitime en soi, mais pas ainsi : de nombreux territoires pratiquent déjà des pass. Ce n'est pas le bon moment, pas la bonne formule ni le bon procédé. Nous voterons l'amendement de Catherine Dumas. (« Très bien ! » et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et CRCE)
M. Jérôme Bascher. - J'irai dans le sens de Jean-Raymond Hugonet. C'est le ministère, et pas le Sénat, qui fait une fixette sur cette mesure. Je reconnais que vous vous êtes battue pour vos crédits.
On met des tonnes d'argent public, qui vont être dispersées, parce que le public n'a pas pu aller dans les lieux culturels. Là-dessus le Sénat vous suit car ce sont des mesures compensatoires justes.
Avec le Pass Culture, Jupiter a oublié de descendre de son Olympe pour constater que cela fonctionne déjà - et beaucoup mieux - dans les territoires.
Mme Catherine Dumas. - Le Pass Culture est sous-consommé. Il souffre de difficultés de conception avec un cahier des charges qui change tous les matins. Même M. Bargeton, pourtant dithyrambique à votre égard (Sourires à droite), reconnaît qu'il faudrait l'adapter, le reconnecter. À l'Assemblée nationale, vous avez vous-même reconnu qu'il fallait en diminuer le montant individuel. Nous ne sommes pas convaincus par vos arguments.
Mme Sonia de La Provôté. - Nous avions au départ une certaine bienveillance à l'égard de ce projet. Mais ses financements semblent excessifs et schizophréniques : on met de l'argent sur le Pass Culture alors qu'il y a des besoins ailleurs et que l'offre culturelle est fragilisée. On pourrait le consolider là où il a été déployé. Pendant ce temps, des chantiers de patrimoine dans les territoires ne se font pas et l'entretien de maints monuments se fait mal... (« Très bien ! » sur les travées du groupe UC)
M. Max Brisson. - C'était une belle soirée... (Sourires) ; sur tous les bancs, votre action était saluée. Mais nous avons là un sujet qui crée de la pression sur ces mêmes bancs, à l'exception de MM. Bargeton et Rambaud. Écoutez le Sénat : ça ne marche pas ! (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Je ne viens pas ici pour vous donner des chiffres faux ! Ceux que je vous ai donnés sont les derniers, que je vous apporte en temps réel : ils sont vérifiés et vérifiables. Je m'en porte garante. Faites-moi au moins confiance sur cela !
La durée de trois ans de cette expérimentation ne me semble pas devoir la délégitimer, bien au contraire : il fallait un temps de conviction, d'utilisation, en particulier avec des publics qui pouvaient ne pas être a priori friands de ce genre de consommation. Il est justement remarquable que la montée en charge ait été continue tout au long de ces trois années, bien que l'année 2020 ait été marquée par les très grandes difficultés de l'offre culturelle.
Jamais les crédits de la culture et du patrimoine n'ont été aussi élevés : il faut relativiser en conséquence ces 59 millions d'euros du Pass Culture qui représentent à peine 1,5 % des 4 milliards d'euros du budget. Difficile de parler d'un détournement de crédits !
J'en viens aux bibliothèques, qui vont rouvrir sous peu, et surtout aux librairies. Les faits sont là : on a pu lire et acheter des livres.
Pour des raisons sanitaires, les librairies ont été obligées de fermer mais elles ont continué à vendre des livres car les opérations « cliquer et emporter » ont très bien fonctionné. Je connais des libraires qui ont ainsi fait respectivement 60 % et 80 % de leur chiffre d'affaires grâce à ce système. Les paniers moyens ont parfois été multipliés par deux ou trois à l'approche du confinement. (Protestations à droite)
M. Max Brisson. - Donc, tout va bien ! (Exclamations sur les mêmes travées)
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Je ne dis pas que tout va bien ! Au contraire, c'était un crève-coeur que de devoir maintenir fermées les librairies. Mais les libraires ont aussi été aidés par différentes mesures : PGE, aide au salaire, subvention du Centre national du livre. Écoutez les libraires ! Allez-les voir !
M. Jérôme Bascher. - C'est ce que nous faisons tous !
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Je le fais aussi. Sans me tresser je ne sais quels lauriers, je me réjouis que la première journée de réouverture ait été marquée par le retour des consommateurs dans les lieux commerciaux, le retour des lecteurs dans les librairies. Réjouissons-nous ! Soyons un peu optimistes ! Oui, continuons à lire, à aller dans les librairies, y compris les grincheux qui ont morigéné ceux qui n'y entrent jamais. Nous surmonterons cette crise tous ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI ; murmures à droite)
L'amendement n°II-36 rectifié ter est adopté.
Les amendements identiques nosII-823 et II-928 sont adoptés.
L'amendement n°II-37 rectifié ter est retiré.
L'amendement n°II-824 n'est pas adopté.
L'amendement n°II-821 est retiré.
L'amendement n°II-822 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-878, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
I. - Créer le programme :
Fonds de revitalisation pour les initiatives culturelles
II. - En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-878 transfère 100 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Patrimoines » vers le programme « Fonds de revitalisation pour les initiatives culturelles ».]
M. Thomas Dossus. - Cet amendement est le premier d'une série qui vise à un développement culturel plus durable et solidaire dans nos territoires. Il s'agit de créer un plan de revitalisation culturelle. Les petites structures culturelles ont été particulièrement impactées par la crise. Celle-ci a souligné l'extrême interdépendance des acteurs, qui sont dans une logique de coopération et non de compétition ; mais elle s'accompagne d'un risque systémique : avec la suppression des festivals, des milliers de petites structures pourraient faire faillite en cascade, avec des milliers de chômeurs supplémentaires. Or les festivals ne pourront reprendre au printemps.
D'où cet amendement qui crée un fonds transversal doté de 100 millions pour les projets culturels citoyens, ces oubliés de la culture, sur des critères simples d'intérêt général. Son pilotage associera État, collectivités, organisations professionnelles et citoyens.
Il convient d'opérer un rééquilibrage en direction de la culture vivante d'aujourd'hui et de demain.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Cet amendement est satisfait par les crédits de la mission « Plan de relance », utilisés sous l'égide des DRAC, pour la musique, la danse, les arts de la rue notamment. Des crédits sont aussi prévus pour le spectacle vivant en région, et un fonds de transition écologique pour les associations en région. Quelque 50 millions d'euros en autorisations d'engagement et 20 millions d'euros en crédits de paiement financeront les équipements patrimoniaux de monuments n'appartenant pas à l'État. Retrait ?
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Avis défavorable : 100 millions d'euros, ce n'est pas rien, d'autant que les crédits du patrimoine sur lesquels ils sont prélevés ont fait l'objet d'un très large accord sur l'ensemble des bancs de cet hémicycle.
L'amendement II-36 rectifié ter maintient une quatrième année d'expérimentation supplémentaire, car vous n'avez voté que les 20 millions d'euros d'extension du dispositif. Je salue cette volonté.
M. Jérôme Bascher. - Beaucoup d'enseignements artistiques ont été arrêtés, or c'est cela l'avenir. De plus, ce sont souvent les parents les plus modestes qui retirent les premiers leurs enfants des cours.
Il y a là quelque chose à faire, pour tous ces professeurs indépendants dans nos campagnes. Voilà une chance de faire réussir votre expérimentation.
Mme Marie-Pierre Monier. - Le groupe SER est d'accord sur le fond avec cet amendement, mais celui-ci n'est pas cohérent avec nos propres propositions d'abonder davantage les crédits du patrimoine.
L'amendement n°II-878 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-879, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
I. - Créer le programme :
Pacte pour l'emploi artistique et culturel
II. - En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-879 transfère 80 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Patrimoines » vers le programme « Pacte pour l'emploi artistique et culturel ».]
M. Thomas Dossus. - Cet amendement soutient l'écosystème des acteurs culturels, constitué à 95 % de petites structures de moins de dix personnes, profondément interdépendantes. Les 80 millions d'euros débloqués par cet amendement abondent le Fonpeps pour qu'il prenne en charge une part de la masse salariale des structures dans les secteurs les plus fragilisés et finance l'ouverture de 1 000 postes Fonjep supplémentaires pour soutenir l'emploi associatif culturel, avec 7 500 euros par CDI ou CDD. Il s'agit de soutenir les indépendants, de créer un mécanisme de solidarité pour les prestataires du champ culturel, de mieux informer les TPE du secteur et de prolonger l'activité partielle.
La mesure peut être mise en oeuvre dès aujourd'hui. Cela relancerait l'emploi artistique, et plus globalement tout le secteur culturel, par un soutien massif.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Cet amendement est satisfait par la montée en charge du Fonpeps et le plan artistes-auteurs. Retrait ?
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Je reprends cet argument et ajoute ma construction : le Fonpeps ne peut être ouvert aux arts visuels. Cinq millions d'euros supplémentaires sont prévus pour le programme 131. À quoi s'ajoutent des exonérations de charges introduites par un amendement au PLFSS. Franchement, il n'est pas nécessaire de prévoir une compensation sur le budget du ministère de la culture ! Avis défavorable.
L'amendement n°II-879 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-877, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
I. - Créer le programme :
Fonds de soutien pour les musiques actuelles et électroniques
II. - En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-877 transfère 20 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Patrimoines » vers le programme « Fonds de soutien pour les musiques actuelles et électroniques ».]
M. Thomas Dossus. - C'est un amendement d'appel pour briser le silence sur les musiques actuelles et électroniques. Cette vitrine de la création française à l'étranger est à l'agonie ; le secteur se sent ignoré et, pour reprendre les mots de Laurent Garnier, risque de passer du statut de spectacle vivant à celui de spectacle mort. Un fonds de soutien serait nécessaire.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Les actions de soutien du CNM, élargies, concernent aussi les musiques contemporaines. Retrait ?
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Avec ces trois amendements, 300 millions d'euros seraient retirés au patrimoine... Aucune musique n'est écartée du financement par le CNM, qui est doté de 200 millions d'euros. Il n'y a pas d'inégalité de traitement. Les entreprises qui gravitent autour du secteur des musiques électroniques ont bénéficié d'un soutien ad hoc, comme des aides à la production, des mesures de soutien aux festivals ou aux discothèques. Il n'y a pas de hiérarchie entre les musiques. De même, les indépendants peuvent bénéficier du fonds de solidarité.
Mme Marie-Pierre Monier. - Les établissements où l'on joue de la musique électronique sont particulièrement touchés par la crise parce que ce ne sont pas des salles à places assises.
Madame la ministre, si vous refusez la ponction, peut-être pouvez-vous lever le gage...
Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis. - Ces établissements et les Scènes de musiques actuelles (SMAC), fondés sur des jauges debout, ne savent pas s'ils pourront reprendre leur activité, contrairement aux équipements qui rouvrent le 15 décembre. Les festivals sont eux aussi concernés et ils auraient besoin de visibilité dès février pour le printemps et l'été.
Le Sénat a voté le prolongement du crédit d'impôt spectacle vivant et en a assoupli les conditions d'accès. Il a aussi voté, à l'unanimité, l'élargissement du crédit d'impôt pour le théâtre à tous les spectacles non musicaux.
Nous comptons sur vous, madame la ministre, pour que ce périmètre élargi soit conservé.
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Il n'est pas possible d'autoriser les spectacles débout tant que la pandémie est là. À Nice, au début de l'épidémie, on a pu constater que, malgré le grand espace réservé à un spectacle de ce type, les spectateurs s'agglutinaient devant la scène ; pas besoin d'avoir fait des études d'infectiologie pour comprendre que les risques d'aérosolisation sont majeurs.
Le virus ne nous donne pas de visibilité. Nous détenons chacun une parcelle de la réponse lors des fêtes de fin d'année.
Rendez-vous le 20 janvier pour savoir si nous pourrons aller plus loin dans le déconfinement. Nous espérons une vaccination généralisée pour un possible retour « à la normale ». Mais en tant que ministre de la Culture, ancienne ministre de la Santé et ancienne professionnelle de santé, je serais irresponsable de promettre une reprise fin janvier.
L'amendement n°II-877 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-880, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
I. - Créer le programme :
Fonds pour la transition urbaine et rurale
II. - En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-880 transfère 20 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Patrimoines » vers le programme « Fonds pour la transition urbaine et rurale ».]
M. Thomas Dossus. - Voici un amendement de soutien aux initiatives culturelles, à travers un fonds pour la transition urbaine et rurale doté de 20 millions d'euros, avec un mécanisme de partage et de mutualisation des fonds associatifs.
Il est temps de prouver que le Sénat est bien la chambre des territoires. Quand j'ai présenté cet amendement dans la mission « Plan de relance », on m'a répondu que 14 millions d'euros étaient déjà prévus pour l'Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (I'Ificic) et 3 millions d'euros pour les quartiers culturels créatifs. Mais cet amendement va beaucoup plus loin dans la transition culturelle, plus solidaire et durable, pour tous les territoires, notamment ruraux.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Il y a bien une dotation de 14 millions d'euros pour l'Ificic pour financer des projets innovants et 3 millions d'euros d'autorisations d'engagement pour les quartiers culturels et créatifs - 1,5 million d'euros en crédits de paiement. Votre amendement est donc en grande partie satisfait. Retrait ?
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Avis défavorable. Vous êtes en train d'épuiser les crédits du patrimoine ! Le ministère de la Culture est associé à l'appel à projets « Réinventons nos coeurs de ville », qui concerne 112 projets innovants comme la réhabilitation de casernes, friches industrielles, hôpitaux, etc. Une politique d'élaboration concertée avec toutes les collectivités territoriales, notamment les conseils territoriaux de la culture au niveau régional, me paraît fondamentale. J'ai réuni les responsables des grandes collectivités territoriales et les associations d'élus récemment pour bâtir cette politique de coopération.
L'amendement n° II-880 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-771, présenté par Mme de La Provôté et les membres du groupe Union Centriste.
I. - Créer le programme :
Petit patrimoine non-protégé
II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
[L'amendement n°II-771 transfère 20 millions d'euros en autorisations d'engagement, et autant en crédits de paiement, du programme « Patrimoines » vers le programme « Petit patrimoine non protégé ».]
Mme Sonia de La Provôté. - Cet amendement crée un programme dédié au patrimoine non protégé qui est le grand oublié des politiques publiques culturelles de notre pays.
Il concerne les églises, gares, patrimoines industriels non classés, témoignages de ce qui s'est passé dans nos territoires, parfois il y a plusieurs siècles, et qui appartiennent au paysage. Or ce patrimoine est mal identifié, peu répertorié. On réalise après un accident qu'il eût fallu le conforter - je l'ai vécu récemment dans mon département lorsque la foudre a frappé un calvaire. Certes, ce patrimoine n'est ni classé ni inscrit mais il mériterait souvent de l'être et fait partie de notre héritage culturel.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - L'interrogation rejoint les préoccupations de Vincent Éblé dans son rapport. La création d'un nouveau programme limite cependant la fongibilité des crédits. Je rappelle que nous avions prévu 5 millions supplémentaires en faveur du fonds incitatif et partenarial et 10 millions d'euros pour les musées territoriaux. Retrait ?
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Je sais combien le Sénat est soucieux du respect des compétences des collectivités territoriales et de l'État. Or, en 2004, les crédits de l'État pour le patrimoine rural non protégé ont été transférés aux départements.
On s'indigne que l'État ne participe plus mais c'est la loi de 2004. Je suis néanmoins attentive à ces 44 000 monuments qui font la France. La Fondation du patrimoine, créée en 1996, a pour mission de soutenir les projets relatifs à ces monuments. La création du Loto du patrimoine - avec ses 25 millions d'euros - et la mission Patrimoine en péril confiée en 2017 à Stéphane Bern y concourent également. Et 40 % des 119 bâtiments sélectionnés en 2020 sont des monuments non protégés. L'État est donc déjà allé au-delà de ses compétences. Avis défavorable.
M. Jean-Raymond Hugonet. - Je m'associe à l'esprit de l'amendement de ma collègue Sonia de La Provôté. Oui, c'est la responsabilité des départements. Ce sujet reste néanmoins prégnant dans les communes de petite taille et les départements font face à une profusion de demandes.
Mme la ministre a reconnu la sagesse du Sénat : il ne s'agissait pas de supprimer tout crédit du Pass Culture, mais de ne supprimer que les 20 millions d'euros d'augmentation cette année. Le Sénat n'a pas tué dans l'oeuf cette expérimentation mais limité l'augmentation des crédits.
Mme Nadia Sollogoub. - Dans la Nièvre, les petites communes se préoccupent des zones blanches, de l'accès aux soins, de la réparation des églises. C'est le trio de tête des préoccupations. En France, 36 000 communes, 36 000 clochers - moins un, car à Asnan, l'église a dû être détruite, malgré le combat de la maire.
Pour protéger un tel patrimoine, on demande d'abord une subvention au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), de l'ordre de 40 % ; en essaie de se tourner vers la Fondation du patrimoine ; le département est en général débordé par les demandes ; certaines communautés de communes aident mais il faudrait un fonds spécifique pour boucler le financement.
L'amendement n°II-771 est adopté.
(Applaudissements sur plusieurs travées)
L'amendement n°II-899 n'est pas défendu.
Les crédits de la mission « Culture », modifiés, sont adoptés.