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Table des matières
Rôle du Parlement dans l'action gouvernementale
M. Jean Castex, Premier ministre
M. Jean Castex, Premier ministre
Devenir de la réforme des retraites
M. Jean Castex, Premier ministre
M. Jean Castex, Premier ministre
Situation de la justice en France
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice
Politique du Gouvernement en matière de justice
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice
M. Jean Castex, Premier ministre
Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion
Mme Jacqueline Eustache-Brinio
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères
Modification de l'ordre du jour
Mise au point au sujet d'un vote
Démarchage téléphonique et lutte contre les appels frauduleux (Conclusions de la CMP)
M. André Reichardt, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire
Règlement du budget et approbation des comptes de 2019 (Procédure accélérée)
Nominations à une éventuelle CMP
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances
Adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière (Procédure accélérée)
M. Jean Bizet, rapporteur de la commission des finances
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques
Mise au point au sujet d'un vote
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture
Ordre du jour du mercredi 15 juillet 2020
Modification de l'ordre du jour
Nominations à une éventuelle CMP
SÉANCE
du mercredi 8 juillet 2020
3e séance de la session extraordinaire 2019-2020
présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires : M. Éric Bocquet, M. Michel Raison.
La séance est ouverte à 15 heures.
Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.
Propos de bienvenue
M. le président. - Monsieur le Premier ministre, au nom du Sénat, je vous félicite pour votre nomination et vous souhaite la bienvenue au Sénat. (Applaudissements sur toutes les travées, à l'exception de celles du groupe CRCE)
Je souhaite aussi la bienvenue aux membres du Gouvernement, avec une attention particulière pour Marc Fesneau, ministre des Relations avec le Parlement, avec lequel nous allons poursuivre notre travail. (Applaudissements sur toutes les travées, à l'exception de celles du groupe CRCE)
Vous trouverez le Sénat à vos côtés pour poursuivre la lutte contre le covid-19, soutenir les mesures de relance économique et d'atténuation de la crise sociale.
Le Sénat est le reflet de nos territoires, il incarne la Nation avec ses différences mais aussi ses valeurs et son unité. Il compte des élus expérimentés, au service de nos territoires et de nos concitoyens. Je forme le voeu que le Sénat soit écouté au cours des deux années à venir
Le bicamérisme est une chance pour la démocratie et l'équilibre de nos institutions ; dans un contexte de crise et de tensions, la démocratie représentative est le visage de la démocratie vivante. (Applaudissements sur toutes les travées, à l'exception de celles du groupe CRCE)
Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Pour le respect des règles sanitaires, il vous est demandé de laisser un siège vide entre deux sièges occupés ou de porter un masque si ce n'est pas le cas.
Je rappelle que l'hémicycle fait l'objet d'un nettoyage et d'une désinfection avant et après chaque séance.
Chacun respectera son temps - deux minutes pour l'auteur de la question, deux minutes pour les membres du Gouvernement, à l'exception du Premier ministre.
Rôle du Parlement dans l'action gouvernementale
M. Hervé Marseille . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains) Avant tout, permettez-moi de m'associer aux voeux de bienvenue formulés par le président Larcher et d'y ajouter mes voeux républicains de réussite.
Nos concitoyens attendent des décisions rapides et fortes sur l'emploi, la sécurité, la dette abyssale, etc.
Le Sénat est accueillant et a le souci du dialogue, pour peu qu'on veuille bien s'y prêter car il faut être deux pour cela. Ces dernières années, l'association du Parlement n'a pas été intensive, comme l'ont montré la multiplication des ordonnances, la réforme des retraites, le Grand débat après la crise des gilets jaunes ou encore la Convention citoyenne sur le climat. Ces sujets ont été beaucoup discutés ailleurs, mais pas au Parlement.
Le Président de la République s'exprimera le 14 juillet. Quelles sont vos priorités ? Comment associerez-vous le Sénat à la conduite de votre politique ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
M. Jean Castex, Premier ministre . - Permettez-moi de vous faire part de ma vive émotion en m'exprimant pour la première fois devant vous dans le cadre de ma fonction. Je pense notamment à mon grand-père qui siégea ici, pendant neuf ans, pour représenter le beau département du Gers. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains) Il n'est pas étranger à mon goût pour le service de la République, qui n'a jamais cessé de m'animer. Vous m'avez posé deux questions, l'une sur les priorités du Gouvernement et l'autre sur les relations de ce dernier avec le Parlement.
Mes priorités sont fixées par le Président de la République et seront déclinées devant vous dans le cadre de mon discours de politique générale. Elles sont également éclairées par un contexte nouveau et inquiétant marqué par une crise sanitaire d'ampleur exceptionnelle et une crise économique et sociale qui a déjà commencé.
Le Gouvernement de la République sera tout entier mobilisé et déterminé pour faire face à cette crise qui devra aussi nous servir à moderniser notre pays, dans la continuité des réformes structurelles engagées.
Nous ne pourrons relever le défi qu'avec une France la plus unie possible. Il revient à notre Gouvernement de rechercher les conditions de cette unité et de cette mobilisation.
Je suis un homme de dialogue.
M. Fabien Gay. - On va voir !
M. Jean Castex, Premier ministre. - J'ai la conviction que la mise en oeuvre des politiques publiques passera par les territoires. Je suis ici dans la chambre des territoires et je suis moi-même un élu local.
Ces considérations ne peuvent que conduire à respecter la représentation parlementaire et de surcroît à établir avec le Sénat des relations courtoises, républicaines et approfondies afin de servir nos concitoyens de façon plus efficace. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Ségur de la santé
M. Martin Lévrier . - (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM) Madame la ministre chargée de l'autonomie, félicitations pour votre nomination (Marques d'ironie à gauche) ainsi qu'à tous les membres du Gouvernement.
Le Premier ministre, à qui j'adresse mes salutations républicaines et gersoises de coeur, a mené la mission du déconfinement avec efficacité ; mais le virus circule encore en Guyane.
Premier grand défi : conclure dès cette semaine, le Ségur de la santé voulu par le Président de la République, lancé le 25 mai par Édouard Philippe et Olivier Véran, pour renouveler les fondations d'un système de santé plus innovant, plus souple et au service des patients. Il devra s'appuyer sur les territoires et sur un management renouvelé.
Madame la ministre, dès hier, le Premier ministre a augmenté de plus d'un milliard d'euros l'enveloppe pour la rémunération du personnel hospitalier. Comment assurer une distribution équitable entre les territoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
M. Jean Castex, Premier ministre . - Je me permets de vous répondre eu égard à l'importance du sujet.
Nul besoin de souligner l'enjeu de la santé et le dévouement remarquable qu'ont démontré et démontrent encore tous les professionnels.
Mon prédécesseur, que je salue tout particulièrement, a décidé d'engager la grande concertation qu'est le Ségur de la santé. Parallèlement à la concertation, une négociation a été lancée avec les partenaires sociaux du secteur sur les volets salariaux et indemnitaires. Je souhaite que nous parvenions à un accord majoritaire. Le pays en a besoin. La santé en a besoin. Cet accord est à portée de main.
J'ai souhaité que l'effort déjà très significatif engagé par la Nation en guise de reconnaissance soit augmenté, non pour acheter un accord majoritaire ou pour marquer mon entrée en fonction, mais pour y inclure le volet de l'emploi dans les établissements de santé. Vous avez tous constaté les manques dans ce domaine.
Mieux payés, ils viendront plus nombreux. (M. Bruno Sido approuve.)
Dans le cadre de ces négociations, nous réfléchissons à améliorer l'efficience du système, ce qui passe par un renforcement du rôle des élus, notamment les maires, dans la gouvernance et le pilotage du système de santé. (Marques d'approbation et « Très bien ! » sur les travées à droite ; applaudissements sur les travées des groupes LaREM, UC et sur diverses travées du groupe Les Républicains)
Industrie aéronautique
Mme Françoise Laborde . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Au nom du RDSE, je salue la venue du Premier ministre et de son Gouvernement.
Mon propos s'adresse au ministre de l'Économie, des finances et de la relance, mais je serai bien sûr ravie que la ministre déléguée chargée de l'industrie me réponde. (Sourires) C'est un séisme économique auquel nous assistons, écho de la crise sanitaire que le monde peine à endiguer. Je salue les plans de sauvegarde de nos filières industrielles que votre ministère a enclenchés rapidement, effort national inédit pour les entreprises : 8 milliards d'euros pour l'automobile, 15 milliards d'euros pour l'aéronautique, dont 7 milliards pour Air France.
Mon département de la Haute-Garonne est frappé de plein fouet, avec le siège mondial d'Airbus, et les plateformes régionales des compagnies aériennes. Mon département risque de payer cher le coût social de cette crise : plus de 5 000 suppressions d'emplois pour Airbus, combien de plus pour la supply chain ? L'onde de choc touchera les PME sous-traitantes ; jusqu'à 30 000 emplois seraient menacés. Air France annonce 7 500 postes supprimés d'ici à 2022. S'y ajoutent les 4 600 suppressions d'emplois annoncées par Renault.
Si tous les décideurs disent vouloir éviter les licenciements secs, comment l'État va-t-il veiller à ce que les fonds publics destinés à la relance de l'industrie soient utilisés pour protéger les emplois et les compétences en France ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie . - Tout d'abord, permettez-moi de vous souhaiter un bon anniversaire. (Applaudissements)
Je partage votre préoccupation légitime pour l'emploi. Nous sommes confrontés à une crise mondiale qui touche toutes les chaînes de production. Boeing prévoit ainsi de supprimer 16 000 emplois. Il faut nous armer.
L'État a pris ses responsabilités avec des plans de soutien rapides et continuera à le faire avec un plan de relance pour préserver la croissance sur le long terme, poursuivre la transition énergétique et écologique et préserver notre capital humain.
Derrière les plans sectoriels que nous avons pris, il y a une attention particulière à l'emploi. Lorsque nous prévoyons de multiplier par quatre les dépenses de recherche et développement (R&D) du Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac), nous sauvegardons les emplois des ingénieurs et des techniciens aéronautiques. Lorsque la ministre des Armées passe des commandes, elle préserve la chaîne de production française.
Lorsque nous garantissons l'activité partielle, nous sauvegardons l'emploi. Sur les plans de restructuration, nous avons engagé un dialogue suivi et nous attendons des entreprises qu'elles soient parfaitement responsables. Ainsi Daher, qui avait annoncé 1 300 suppressions d'emplois, n'en prévoit plus que 500 grâce aux mesures d'accompagnement du Gouvernement. Nous poursuivons dans cette voie. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Devenir de la réforme des retraites
Mme Éliane Assassi . - J'adresse au Premier ministre la bienvenue au nom de mon groupe. Votre feuille de route fait apparaître le retour de la réforme des retraites, qui ne sera pas abandonnée a dit le Président de la République, alors qu'il cherchait la concorde nationale face à la pandémie.
Les appels à l'unité nationale se fracassent sur la reprise de ce projet repoussé par une large majorité de nos concitoyens. Vous soufflez sur les braises de la division. Vous vous appuyez sur un dogme libéral : travailler plus serait la seule voie pour l'équilibre financier.
Mais les richesses sont là, comme le prouvent les sommes considérables débloquées pour les entreprises.
« La Nation garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, (...) se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ». Le gaullisme social, dont vous vous revendiquez, monsieur le Premier ministre, se fonde sur cet alinéa 11 du préambule de la Constitution de 1946.
Allez-vous renoncer à cette réforme des retraites dont les partenaires sociaux ne veulent plus entendre parler ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SOCR)
M. Jean Castex, Premier ministre . - Qui ne veut plus entendre parler de la réforme des retraites ? Refuser d'en parler, alors que l'équilibre des comptes - et donc la sauvegarde du système actuel - est compromis, ce serait irresponsable. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et Les Indépendants ; M. Bruno Sido applaudit également ; protestations sur les travées du groupe CRCE)
Comme vous, je suis très attaché au préambule de la Constitution de 1946 et à notre politique sociale, ferment du pacte républicain. Qui peut dire que notre système de retraite est juste ? Il ne l'est pas. (Protestations à gauche)
M. David Assouline. - Ne le rendez pas plus injuste !
M. Jean Castex, Premier ministre. - Je vais rouvrir le dialogue. Toutes les organisations syndicales viendront discuter avec moi. Nous ne serons peut-être pas toujours d'accord mais nous définirons ensemble la méthode et le calendrier.
J'aborderai cette réforme dans un contexte global prenant en compte l'assurance chômage et la dépendance, sans perdre de vue l'indispensable relance économique.
Je proposerai aux partenaires sociaux de distinguer la réforme systémique, visant à plus de justice et d'égalité (Protestations) de la question de l'équilibre du système actuel : je demanderai aux partenaires sociaux de me faire des propositions.
Les systèmes Agirc et Arrco sont aussi menacés de déséquilibre et la négociation devra s'engager. Nous n'avons pas d'autre choix que de sauvegarder notre système de protection sociale. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et Les Indépendants et sur quelques travées du groupe UC)
Mme Éliane Assassi. - Cette réforme est irresponsable et injuste. Même le Medef est contre. (Rires) Vous êtes sur un très mauvais chemin. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
Politique générale
M. Patrick Kanner . - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Au début du quinquennat, j'avais adressé mes voeux de réussite républicaine à votre prédécesseur et j'aurais tendance à avoir le même message pour vous, mais entre-temps, un fossé s'est creusé entre le Président de la République et les Français.
Ce dernier veut tracer un nouveau chemin ; les Français aussi, et ils l'ont montré en choisissant leurs maires et en sanctionnant lourdement la majorité présidentielle aux municipales.
Ce nouveau chemin est indispensable pour affronter la crise économique et sociale qui va s'amplifier. La jeunesse a besoin d'un plan d'urgence sociale. Malheureusement, la composition de votre Gouvernement et vos déclarations vous font apparaître comme l'homme du passif plutôt que comme l'incarnation du renouveau.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Sympathique !
M. Patrick Kanner. - Ce passif est lourd : réforme des retraites, tentative de privatisation d'ADP, suppression de l'ISF, immigration, crise des gilets jaunes : un bilan qui fragmente notre pays, dans un climat anxiogène. Les Français, notamment les plus faibles, doivent être protégés de la crise, amortie provisoirement par le ruissèlement de la dette publique, mais que vous faites payer par tous.
Allez-vous changer radicalement de la politique menée depuis trois ans ? Allez-vous choisir entre les jours heureux de l'État-providence ou les jours désastreux de l'État-pénitence ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR, tandis qu'on ironise sur celles du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Sido. - Ancien monde !
M. Jean Castex, Premier ministre . - J'apprécie le caractère poétique de vos propos, mais ils sont un peu déconnectés de la réalité. (Rires à droite)
Le chemin annoncé par le Président de la République s'inscrit dans un nouveau contexte. (M. Bernard Fournier s'exclame.)
Nous faisons face à une crise exceptionnelle, mais faut-il pour autant renoncer aux réformes entreprises ? Non, rien ne serait pire que de revenir à une forme d'immobilisme.
Je dirige un gouvernement de combat, dans un contexte particulièrement dégradé.
Monsieur le président, vous avez évoqué les comptes publics, J'entends votre vif attachement à cette notion ! (Quelques rires à droite)
M. David Assouline. - Un peu de respect ! Pas si vite !
M. Jean Castex, Premier ministre. - La dégradation des comptes sociaux et publics ne devra pas être suivie dans quelques années du matraquage fiscal auquel d'autres majorités se sont livrées. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM ; M. Claude Malhuret applaudit également ; brouhaha général.)
Il faut répondre à cette crise internationale dans un cadre encore plus européen que par le passé, pour que les mesures réparatrices ne reposent pas sur les seuls contribuables. Il faut que l'Europe s'engage !
Il faudra aussi gérer dans la durée la dette covid, que cette crise va immanquablement créer.
Je suis à la tête d'un gouvernement renouvelé...
M. Jean-François Husson. - Très peu !
M. Jean Castex, Premier ministre. - Peut-être, mais ils sont beaux ! (On s'amuse sur diverses travées, tandis que M. Éric Dupond-Moretti, ministre de la justice, s'interroge.)
Nous allons protéger les Français tout en continuant à moderniser notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
M. Patrick Kanner. - Vous vous dites gaulliste social...
M. Jean Castex, Premier ministre. - C'est le cas !
M. Patrick Kanner. - J'aurais aimé par conséquent vous entendre prononcer les mots de service public, de redistribution, de pouvoir d'achat, de planification. Vous ne l'avez pas fait, ce qui ne me rassure pas sur votre capacité à gérer les urgences sociales, sanitaires et économiques de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)
Situation de la justice en France
M. Alain Fouché . - Je salue le nouveau Gouvernement. (On s'exclame sur les travées du groupe Les Républicains.) Monsieur le garde des Sceaux, vous voulez réformer la justice, garder le meilleur et changer le pire. Vaste chantier !
Nos concitoyens - près de la moitié selon un sondage récent - ont perdu confiance dans cette institution, cultivant même de la défiance envers elle. Qu'il est long et difficile d'obtenir justice dans notre pays ! À cause des procédures complexes et coûteuses, du manque criant de moyens humains et matériels, nos concitoyens sont trop nombreux à renoncer à faire valoir leurs droits. Ils ont le sentiment d'une justice forte avec les faibles et faible avec les forts. L'arbitraire est la plus grande menace qui pèse sur la justice.
Le meilleur rempart contre cela réside dans le respect des formes et des procédures. La loi doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. La justice ne se rend ni dans la rue ni sur les réseaux sociaux. Institution indispensable au bon fonctionnement de notre démocratie, elle doit être dotée de moyens à la hauteur de sa mission. Les Français ont besoin d'une justice efficace, rapide et accessible.
Il faudrait revoir l'institution judiciaire de A à Z avez-vous déclaré. Quelles mesures comptez-vous prendre en priorité ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants et sur quelques travées des groupes LaREM et Les Républicains)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice . - Je suis fier et ému de la confiance du Président de la République et du Premier ministre. Je mesure l'humilité de la tâche qui est la mienne. Ma connaissance de la justice est empirique, charnelle.
M. Jean-Louis Tourenne. - Ce n'est pas la question !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Laissez-moi apprendre mon administration.
À droite. - Vous n'avez pas le temps !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - J'aurai besoin de tous les parlementaires, de la majorité et de l'opposition. Je ne suis pas un politique.
À droite. - Mais si !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Il est possible de faire évoluer la procédure pénale. La commission d'enquête parlementaire Outreau a réussi à transcender les clivages, en proposant 82 modifications du code de procédure pénale.
La justice ne se résume pas à des moyens budgétaires ; elle est aussi l'affaire des hommes.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Et des femmes !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Des femmes et des hommes, oui !
Il faut remettre la présomption d'innocence au coeur de la justice, éviter des enquêtes préliminaires qui s'éternisent sans aucun contradictoire... (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
À gauche. - Et Darmanin ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Les victimes ne sont parfois même pas reçues par le juge d'instruction...
Il faut une justice plus proche, plus humaine. Je suis allé hier en détention. (Protestations à gauche)
M. le président. - Monsieur le garde des Sceaux, vous êtes pris par le temps, mais c'est votre première intervention... (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et Les Républicains)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Pardonnez mon inexpérience...
M. Alain Fouché. - Le ministre a donné des éléments intéressants. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants ; marques d'ironie sur les travées du groupe SOCR)
Politique du Gouvernement en matière de justice
M. Philippe Bas . - (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Au nom du groupe Les Républicains, je souhaite la bienvenue au nouveau Gouvernement.
Je ne suis pas satisfait de la réponse que vous venez de faire à M. Fouché. En donnant une image incontestablement forte de la justice, vous créez une énorme attente.
Hier, vous faisiez un constat sévère mais lucide qui rejoignait celui que nous avions formulé dans notre rapport de 2017 : justiciables piétinant aux portes des tribunaux, magistrats et greffiers privés de moyens, avocats en situation de précarité, administration pénitentiaire à bout de souffle, détenus qui rejoignent le contingent des récidivistes faute de préparation à la réinsertion...
Le redressement de la justice est un défi essentiel pour notre République. Qu'entendez-vous faire pour le relever ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, Les Indépendants, LaREM et SOCR ; Mme Laurence Cohen applaudit également.)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice . - Vous me demandez ce que le Premier ministre m'a dit... La loi de programmation de la justice sera revue. Quant à vos travaux, ils sont d'ores et déjà sur mon bureau et je prendrai le temps de les lire intégralement.
Je recevrai prochainement tous les présidents de groupe. J'ai besoin de vous, de vos conseils, de votre contradictoire. C'est ainsi que nous ferons évoluer ensemble la justice de notre pays.
La France occupe tristement le douzième rang sur 47 pays pour le nombre de condamnations pour procès non équitable. Ce n'est pas une question de budget... (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et Les Indépendants)
M. Philippe Bas. - Vous allez nous recevoir, certes, mais nous allons vous auditionner... Nous sommes pressés de vous voir ! Vous avez mis la barre très haut. C'est la bonne altitude ; à vous de la franchir ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe SOCR)
Épidémie de covid-19
M. Alain Milon . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le Premier ministre, le covid-19 n'est pas un virus saisonnier que stoppe la hausse des températures. Les actions de prévention ne doivent pas être relâchées : Italie, Espagne, Portugal, Allemagne ont procédé à des reconfinements locaux. Quelque 2,5 millions de personnes ont ainsi été reconfinées. Nous devons nous préparer à une éventuelle deuxième vague.
Quelles actions allez-vous mettre en place pour éviter une nouvelle flambée épidémique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Jean Castex, Premier ministre . - J'ai déclaré ce matin que nous devions anticiper une deuxième vague. C'est déjà ce que j'avais déclaré devant la commission des lois lorsque le Premier ministre Édouard Philippe m'avait chargé de préparer le déconfinement. L'attention s'était étonnamment focalisée sur cette déclaration : sitôt déconfinés, il faudrait reconfiner ? C'est pourtant le devoir de l'État d'anticiper l'évolution de l'épidémie, et de tirer les enseignements des phases antérieures.
Dans notre pays, la circulation virale est pour le moment contenue, mais rien ne dit que cela ne changera pas. Les élus ultra-marins le savent bien : certaines zones sont très touchées, comme la Guyane où je me rendrai dès dimanche. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM ; M. Jérôme Bignon applaudit également.)
Nous menons des actions ciblées de prévention avant même que des signes cliniques nous obligent à pratiquer des tests. Dans les clusters, nous avons acquis un savoir-faire qui nous permet d'éviter une diffusion trop large.
Enfin, nous allons tout faire, en cas de deuxième vague, pour éviter un reconfinement généralisé (M. Bruno Sido approuve.) car notre vie économique et sociale serait trop affectée.
Je suivrai très attentivement le sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM ; MM. Jean-Claude Requier et Bruno Sido applaudissent également.)
M. Alain Milon. - Voilà une réponse très générale. Nos concitoyens qui partent à l'étranger sont testés, mais les personnes qui en arrivent ne le sont pas. (MM. Bruno Sido et Roger Karoutchi s'en indignent.)
À Mazan, en Provence, des ouvriers espagnols ont été récemment testés positifs ; ils n'avaient pas été testés à leur entrée sur le territoire. Il faut renforcer les mesures dans les aéroports. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et Les Indépendants, ainsi que sur quelques travées du RDSE)
Politique sociale
M. Claude Raynal . - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Notre pays est dans une situation d'urgence sanitaire, économique et sociale. La dégradation des chiffres de la croissance et de l'emploi est rapide et brutale.
Dans ce contexte, le Président de la République place la relance de la réforme des retraites au premier rang des urgences. Or notre pays a besoin de se rassembler, pas de se fracturer. Le chiffon rouge de l'âge pivot, les cicatrices du 49-3 montrent combien cette réforme est clivante. Votre volonté de rouvrir le débat rencontre une forte opposition des syndicats ouvriers comme patronaux.
Vous prêchez le dialogue et le compromis. Comment pouvez-vous annoncer la reprise des travaux sans concertation préalable ni agenda social ? Vous remobilisez à contretemps les forces vives de notre pays contre un projet incompris. Mieux vaudrait les mobiliser pour la relance et la lutte contre la pandémie.
Il en est de même pour l'assurance chômage aux effets dévastateurs pour les plus précaires. Le contexte a changé du tout au tout. Abrogez ce texte !
La crise de 2008 comme celle d'aujourd'hui montrent la pertinence de notre modèle social. Pourquoi l'affaiblir au lieu de le renforcer ? (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE)
Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion . - La crise sanitaire que nous traversons et la crise économique et sociale qui nous menace sont inédites. Elles nous incitent à rouvrir le dialogue sur de nombreux sujets comme le plan de relance, la dépendance, la réforme de l'assurance chômage ou la réforme des retraites.
Nous voulons faire vivre la démocratie sociale grâce au dialogue avec tous les acteurs.
Cette crise nous confronte à de nouveaux défis sans effacer les difficultés antérieures que sont la justice de notre système de retraite ou l'efficacité de l'indemnisation du chômage.
Nous devons bâtir ensemble un nouveau modèle de protection sociale à la hauteur des enjeux du XXIe siècle. Tel est le sens des négociations que s'apprête à engager le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Risque de séparatisme
Mme Jacqueline Eustache-Brinio . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Les élections municipales ont montré ce que nous redoutions tous, à savoir une poussée de l'entrisme communautariste. (Protestations sur les travées du groupe SOCR)
À Garges-lès-Gonesse, le fondateur du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) a failli l'emporter. À Strasbourg, le hidjab, réalisation de l'enfermement et de la négation du corps de la femme, a fait son entrée au conseil municipal.
L'islam politique trace son chemin face à un manque cruel de courage pour y faire obstacle en préservant notre unité et les valeurs de la République.
Il y a quelques mois, le Président de la République avait indiqué vouloir combattre le séparatisme islamiste. Or, à ce jour, nous n'avons toujours ni ligne directrice ni cap clair pour lutter efficacement contre les dérives qui mènent à la fracture de notre pays.
Monsieur le Premier ministre, sur ce sujet, il convient de ne pas être spectateur. Il y a quelques années, vous aviez parlé de « laïcité punitive » - alors que la laïcité ne doit pas être qualifiée. Vous aviez parlé d'un concordat avec l'islam.
Servir la France, c'est accepter de se faire détester par une minorité gesticulante pour protéger une majorité qui veut vivre en paix dans une France intégratrice.
Quelles seront vos réponses à l'islam politique qui veut assigner à résidence et exclure de la République une partie de nos concitoyens au profit d'une norme religieuse ?
Mme Éliane Assassi. - C'est scandaleux !
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur . - Le Président de la République et le Premier ministre nous ont fait confiance, à Marlène Schiappa et à moi, pour assurer la sécurité des Français par l'intermédiaire du corps préfectoral et de nos forces de l'ordre, et pour lutter contre le séparatisme.
Oui, l'islam politique est un ennemi mortel de la République. Oui, il faut combattre tout communautarisme. Mais la laïcité ne signifie pas la négation de la liberté de culte. Vos propos sont caricaturaux.
Mon grand-père priait Allah et portait l'uniforme de la République. Les tirailleurs algériens ont défendu les valeurs de la République tout en priant selon leur religion.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. - Ce n'est pas le sujet.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Discutons de ce qui fait Nation - la Marseillaise, notre drapeau, notre langue et notre culture, tout ce qui nous rassemble - et évitons les caricatures.
Mon premier prénom est Gérald, mon deuxième prénom est Moussa et je suis fier d'être ministre de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Détenus radicalisés
Mme Nathalie Goulet . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Monsieur le garde des Sceaux, le Sénat a toujours été attentif au sort des prisonniers détenus pour terrorisme et radicalisés. Ils seront plus de cent cinquante à sortir en 2022. Nombre d'entre eux ont fait allégeance à l'État islamique, qui recommande le taqiya, c'est-à-dire la dissimulation et la fausse repentance.
Mme Belloubet se voulait rassurante, mais les moyens manquent. Qu'allez-vous faire pour assurer le suivi des détenus radicalisés en prison et dehors ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; MM. André Reichardt et Franck Menonville applaudissent également.)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice . - Dans quelques jours, je reviendrai devant vous pour l'examen de la proposition de loi relative aux mesures de sûreté pour les détenus et sortants radicalisés.
Mon ministère est celui des libertés, mais je suis tout aussi préoccupé de la sécurité des Français. L'équilibre entre liberté et sûreté est souvent précaire et difficile à trouver. L'application de la règle de droit distingue la civilisation de la barbarie.
Il y a 508 détenus prévenus ou condamnés pour terrorisme, 550 radicalisés, et l'on a compté 74 libérations anticipées pour des détenus auxquels il restait deux mois de prison à accomplir.
Les mesures post-pénales sont au coeur de mes préoccupations. J'aurai besoin de vous. (On ironise à gauche.)
Mme Nathalie Goulet. - Merci de votre réponse. Cette proposition de loi a justement été déposée parce qu'il y avait des trous dans le suivi socio-judiciaire : pas d'application de la rétention de sûreté, ni de la surveillance de sécurité, presque pas de suivi...
Je vous invite, monsieur le ministre, à visiter la prison de Condé-sur-Sarthe. La personne chargée des détenus les plus dangereux sera heureuse de vous entendre.
Agriculture et écologie
M. Laurent Duplomb . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'écologie est dans tous les discours bien-pensants, mais les décisions prises sur l'autel de la décroissance devraient nous interroger, dans un contexte de « pire crise depuis 1929 », dixit Bruno Le Maire.
Avec la fermeture de deux réacteurs à Fessenheim, la France devra se fournir en énergie auprès de l'Allemagne à un coût plus élevé et pour un bilan carbone désastreux.
La Quassia ou quinine de Cayenne, additif utilisé contre les larves de l'hoplocampe du pommier, est autorisée en Allemagne, en Pologne, en Suisse, en Autriche, mais interdite en France.
Avez-vous conscience des conséquences néfastes de cette écologie punitive ? Comment y remédier ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique . - Je remercie le Président de la République et le Premier ministre de me faire confiance pour ces gros enjeux de l'écologie.
Mme Laurence Rossignol. - Que de confiance aujourd'hui !
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. - L'écologie n'est pas punitive ; elle nous donne l'espoir de vivre demain dans un monde meilleur pour nos enfants, notre économie, nos emplois. L'écologie, c'est prendre un temps d'avance sur les difficultés à venir. La crise que nous vivons a des origines environnementales, liée notamment à une perte de la biodiversité.
On peut continuer à fermer les yeux, mais pas un agriculteur n'est heureux de diffuser des produits phytosanitaires sur ses terres. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) Nos agriculteurs veulent produire de bons produits et vivre décemment de leur travail. Vous êtes les représentants des territoires. Nous avons besoin de vous pour transcrire l'anticipation dans les faits, rééquilibrer notre mix énergétique, relancer la rénovation thermique, source d'emplois non délocalisables.
M. Laurent Duplomb. - Comme votre collègue Nicolas Hulot, vous prônez le juste échange et non le libre-échange, mais vous vous êtes abstenue sur le CETA.
Votre écologie est surtout une posture politique. D'ici à ce que vous ne fassiez comme Michael Shellenberger, écologiste de la première heure qui affirme : « au nom des écologistes, je tiens à m'excuser pour avoir répandu la peur climatique », titre de son livre dans lequel il dénonce la déclaration apocalyptique sur le climat comme scientifiquement erronée et politiquement contreproductive, il n'y a qu'un pas ! (Protestations sur les travées du groupe SOCR)
Agri-viticulture
Mme Nathalie Delattre . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Je me fais la porte-parole des territoires viticoles pour vous souhaiter la bienvenue, monsieur le ministre de l'Agriculture, en tant que présidente de l'Association nationale des élus de la vigne et du vin.
En Gironde, la viticulture est le premier employeur du département, avec plus de 500 000 emplois. Mais le changement climatique, la taxe Trump et le confinement ont plongé les exploitations dans une profonde détresse, de sorte qu'il est urgent de les aider.
L'État a débloqué des milliards d'euros pour aider certaines filières et c'était un besoin impérieux. Mais la viticulture ne mérite-t-elle que des miettes ? Allez-vous apporter un soutien à la viticulture à la hauteur de ce qu'elle représente pour la France ? (Applaudissements sur les travées du RDSE)
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Oui, je m'engagerai pleinement pour la viticulture et tous les pans de l'agriculture qui sont des éléments de notre identité.
Les défis sont immenses. Le Gouvernement est à l'oeuvre. Je salue les mesures engagées par Didier Guillaume pour contrer les taxes américaines : aides à l'exportation et doublement des fonds de France Business.
Peut-être faudrait-il augmenter le volume de l'enveloppe destinée à la distillerie ? Je m'engage à ouvrir le dossier. Il n'y a pas de limite du temps de parole ?
M. le président. - C'est comme le titrage du vin, à la sortie de l'alambic ! (Sourires)
M. Julien Denormandie, ministre. - Un accompagnement spécifique est prévu dans le PLFR 3. Enfin, des adaptations ont été adoptées par la Commission européenne sur les mesures de marché, notamment grâce à la France.
Mme Nathalie Delattre. - Les mots ne suffisent pas. Je me permets de vous proposer quelques mesures : un fonds de compensation de 300 millions d'euros pour dédommager les viticulteurs de la taxe Trump, mais aussi une enveloppe plus conséquente destinée à la distillation de crise. Enfin, le PLFR 3 exclut 80 % des exploitations viticoles des plans de soutien. Comment paieront-elles leurs charges sans avoir fait de recettes ? Où est le dispositif spécifique promis par votre prédécesseur ? Ouvrez les vannes pour l'agriculture, sinon vous aurez des friches !
Politique environnementale
M. Gilbert-Luc Devinaz . - Le Haut Conseil pour le climat fait un constat sans appel : manque de suivi des politiques annoncées, manque de fermeté dans le pilotage. La crise illustre notre vulnérabilité au choc sanitaire et climatique.
C'est pourtant le moment de concilier relance de l'activité et lutte contre le changement climatique. Il n'y a pas d'amour, seulement des preuves d'amour, dit-on. Où sont les preuves d'une relance industrielle durable ?
Dans le Rhône, les 128 salariés de l'usine de production du médicament Famar vont être licenciés. Sanofi annonce la construction d'une nouvelle usine mais, une semaine plus tard, supprime 1 000 emplois en France.
Qu'en sera-t-il des belles déclarations pour une relance plus verte ? Je ne vois rien dans le nouveau projet de loi de finances rectificative. La rénovation des logements pourrait pourtant aider les cinq millions de victimes de la précarité énergétique, qui ont froid l'hiver et chaud l'été et qui paient cher leur chauffage.
Madame la ministre, combien allez-vous débloquer pour cette rénovation énergétique ? (Applaudissements sur quelques travées du groupe SOCR)
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement . - Mon prédécesseur avait défini son ministère comme celui de la rénovation tout autant que de la construction. Je m'inscris dans la continuité de cette position.
La rénovation énergétique des bâtiments est la clé pour le climat, pour la planète, pour le pouvoir d'achat et pour notre activité économique. Le Haut Conseil pour le climat a rappelé que le bâtiment était la deuxième cause d'émissions de gaz à effet de serre en France. La rénovation énergétique est donc un gisement énorme d'économies ; elle peut aider des millions de personnes en précarité énergétique.
Le Président de la République a annoncé que 15 milliards d'euros seraient consacrés à la transition énergétique dans le plan de relance, et la rénovation des logements y aura toute sa place. Plus de 3,5 milliards ont déjà été consacrés à la rénovation énergétique, que ce soit pour l'isolation ou le changement de chaudière. Nous avons multiplié par trois le nombre d'initiatives en faveur des économies d'énergie. Nous serons au rendez-vous. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM ; M. Bruno Sido applaudit également.)
Situation au Liban
Mme Christine Lavarde . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il y a dix jours, avec Bruno Retailleau, président du groupe de liaison, de réflexion, de vigilance et de solidarité avec les chrétiens, les minorités au Moyen-Orient et les Kurdes, nous avons attiré votre attention sur les écoles chrétiennes francophones au Liban.
L'ambassadeur de France au Liban a évoqué dans un tweet un plan de soutien pour 53 établissements, qui ne couvre donc pas le nombre total des établissements chrétiens francophones. Près de 20 % des enfants libanais sont scolarisés dans ce type d'établissements, qui s'adressent aussi aux autres confessions et aux classes défavorisées.
À Baalbek, 90 % des enfants scolarisés sont chiites. Comment comptez-vous les aider ? Sur 50 millions d'euros de crédits dans le PLFR 3, combien iront aux écoles chrétiennes du Liban ? Où en est la création d'un fonds spécifique pour les écoles chrétiennes du Moyen-Orient ? Est-il possible d'accorder aux écoles non homologuées un statut associé qui les ferait entrer dans le giron de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Alain Cazabonne, Jean-Pierre Moga et Franck Menonville applaudissent également.)
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères . - Je connais votre intérêt pour le Liban. Dans quelques jours, je rendrai publiques des mesures pour des écoles homologuées et, dans le même mouvement, une initiative pour les écoles chrétiennes non homologuées au Moyen-Orient - l'initiative dite Personnaz.
Vous connaissez la relation historique, passionnelle et amicale qui lie la France au Liban. Je suis très inquiet et triste de la situation dans ce pays. La moitié de la population est sous le seuil de pauvreté, la livre libanaise ne cesse de se déprécier, la dette d'exploser.
Le gouvernement Diab, difficilement installé, n'a pas pu mettre en oeuvre les réformes annoncées en février sur une période de cent jours. Nous savons ce qu'il faut faire, sur la transparence, sur la réforme du système. Mais rien ne bouge...
La France et la communauté internationale ne peuvent rien faire sans un sursaut des autorités libanaises. Elles doivent se ressaisir. C'est le message que je leur adresse : aidez-nous à vous aider ! (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, Les Indépendants et sur quelques travées des groupes UC, Les Républicains et RDSE)
Mme Christine Lavarde. - Merci pour cette réponse. Si, conformément aux annonces du Président de la République devant l'Académie française en février 2018, vous voulez multiplier par deux le nombre d'écoles chrétiennes homologuées au Moyen-Orient, c'est au Liban que vous trouverez les écoles francophones. Les mesures à prendre ne coûtent pas cher.
Un référent à Paris serait une bonne porte d'entrée. On pourrait aussi former gratuitement les professeurs du premier niveau, comme le fait le British Council. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. le président. - En raison d'un agenda chargé, avec la Fête nationale et la déclaration de politique générale, les prochaines questions d'actualité au Gouvernement auront lieu jeudi 16 juillet à 18 heures.
La séance est suspendue à 16 h 30.
présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président
La séance reprend à 16 h 40.
Modification de l'ordre du jour
M. le président. - Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement a demandé que l'ordre du jour des séances à compter du mercredi 15 juillet soit modifié.
Le début de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2020 est reporté au jeudi 16 juillet après-midi et se poursuivra, éventuellement, jusqu'au dimanche 19 juillet. La discussion générale sur ce texte sera jointe au débat d'orientation des finances publiques. Nous pourrions fixer le délai limite pour le dépôt des amendements de séance au jeudi 16 juillet à 11 heures et entamer l'examen des articles sur ce texte vendredi 1er juillet à partir de 11 heures.
Il en est ainsi décidé.
Dans la suite de l'ordre du jour de la session extraordinaire, une séance de questions d'actualité au Gouvernement est fixée au jeudi 16 juillet à 18 heures ainsi qu'une séance de questions orales mardi 21 juillet, matin. Enfin, l'examen du projet de loi organique prorogeant le mandat des membres du Conseil économique, social et environnemental, initialement fixé au mardi 21 juillet, est reporté au jeudi 23 juillet, matin et éventuellement après-midi. Ce même jour seront examinées, sous réserve de leur dépôt, les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine.
Le reste de l'ordre du jour préalablement fixé par la Conférence des présidents lors de sa réunion du 17 juin dernier est sans changement.
Par ailleurs, par lettre en date de ce jour, le ministre chargé des relations avec le Parlement m'a informé que, sous réserve de la modification du décret portant convocation du Parlement en session extraordinaire et de la délibération du Conseil des ministres, lecture pourrait être donnée au Sénat du texte de la déclaration de politique générale prononcée par le Premier ministre devant l'Assemblée nationale, mercredi 15 juillet à 15 heures. D'autre part, le Gouvernement pourrait faire devant le Sénat une déclaration suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution. Cette déclaration et ce débat pourraient avoir lieu jeudi 16 juillet, le matin.
Il en est ainsi décidé.
Mise au point au sujet d'un vote
M. Ronan Dantec. - Lors du scrutin n°130 portant sur l'ensemble du projet de loi organique relatif à la dette sociale et à l'autonomie, Joël Labbé et moi-même souhaitions voter contre et non pour.
M. le président. - Acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.
Démarchage téléphonique et lutte contre les appels frauduleux (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle les conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux.
M. André Reichardt, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire . - Nos concitoyens sont exaspérés par le démarchage téléphonique intempestif. Bloctel, créé en 2014, a eu des résultats trop modestes.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. - Hélas !
M. André Reichardt, rapporteur. - Il fallait donc agir. C'est l'objet de cette proposition de loi, déposée en octobre 2018 par le député Christophe Naegelen. Je me réjouis de l'accord trouvé par la CMP le 1er juillet dernier...
M. Philippe Bas, président de la commission. - De haute lutte ! (Sourires)
M. André Reichardt, rapporteur. - ... qui traduit l'ambition, partagée entre les deux assemblées, de mieux protéger le consommateur tout en permettant à un secteur qui représente 56 000 emplois directs de continuer à fonctionner.
Nous avons maintenu le principe de l'opt-out, ou, pour faire plaisir à Jean-Pierre Sueur, de l'opposition expresse du consommateur.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je ne veux pas être le seul à défendre la langue française !
M. André Reichardt, rapporteur. - Je rends hommage au combat que vous menez.
M. Jean-Pierre Sueur. - Ce doit être le combat de toutes et tous !
M. Pierre Ouzoulias. - Vous avez raison.
M. André Reichardt, rapporteur. - C'est la dernière chance pour l'opt-out de faire ses preuves. Ce texte crée de nouvelles obligations pour les professionnels du démarchage téléphonique et renforce les sanctions en cas de manquement. Citons l'obligation pour le professionnel de faire vérifier régulièrement ses fichiers de prospection, sous peine d'une amende administrative pouvant atteindre 375 000 euros ; la restriction des cas dans lesquels il peut contacter un client avec lequel il a un contrat en cours ; l'obligation de respecter un code de bonnes pratiques ; l'encadrement par décret des jours, heures et fréquences des appels ; la présomption de responsabilité du professionnel.
La proposition de loi interdit aussi le démarchage téléphonique en matière de rénovation énergétique ou de production d'énergies renouvelables pour les particuliers, sauf quand le professionnel a un contrat en cours avec un client.
Je suis défavorable à cette interdiction sectorielle qui me semble contraire aux principes constitutionnels d'égalité et de liberté d'entreprendre. Le Sénat en avait décidé autrement, je ne m'y suis donc pas opposé en CMP, mais le sujet risque de venir devant le Conseil constitutionnel dans le cadre d'une QPC.
M. Philippe Bas, président de la commission. - Très bien.
M. André Reichardt, rapporteur. - Enfin, le texte impose aux opérateurs d'empêcher les appels en provenance de l'international qui usurpent un numéro français et leur permet de résilier le contrat des éditeurs de numéros surtaxés qui ne proposent en réalité aucun service.
Je vous invite à adopter le texte élaboré par la CMP.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie . - (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM) Malgré mon changement de portefeuille, j'ai voulu mener jusqu'au bout ce dossier ; je passerai ensuite le témoin à Alain Griset.
Je me réjouis de la réussite de la CMP. Une solution équilibrée était attendue. Trop de nos concitoyens sont victimes d'abus en matière de démarchage téléphonique et d'usage frauduleux de numéros surtaxés. C'est un trouble à leur tranquillité et un préjudice financier.
Cette proposition de loi vise à remédier à ce fléau. C'est un bel exemple de collaboration fructueuse entre le Gouvernement et le Parlement, tous groupes confondus, une loi du quotidien, au service des Français.
Vous avez renforcé l'information du consommateur et interdit le démarchage téléphonique dans le secteur de la rénovation énergétique, excepté dans le cadre d'un contrat en cours. Cette interdiction sectorielle se justifie par le nombre anormalement élevé de problèmes dans ce secteur, qui par ailleurs bénéficie d'accompagnements financiers qui ne doivent pas alimenter la fraude. La transition environnementale est une priorité et ne doit pas être retardée par la peur des escrocs.
Ce texte renforce aussi les obligations pesant sur les entreprises, assorties de sanctions pouvant aller jusqu'à 375 000 euros. Les professionnels devront élaborer règles déontologiques et codes de bonnes pratiques. Les jours, heures et fréquences des appels seront déterminés par décret après avis du Conseil national de la consommation.
Une présomption de responsabilité pèsera sur les professionnels.
La Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) pourra saisir le juge des référés pour suspendre les numéros surtaxés des opérateurs indélicats. Citons également le renforcement de sanctions en la matière et la responsabilisation des opérateurs dans la lutte contre l'usurpation de numéros - ce qu'on appelle, monsieur le sénateur Sueur, le « spoofing ». (M. Jean-Pierre Sueur s'exclame ; MM. Pierre Ouzoulias et Éric Bocquet s'amusent.)
Sous l'impulsion du Gouvernement, les agents de la DGCCRF seront pleinement mobilisés pour appliquer cette proposition de loi dont le Gouvernement souhaite l'adoption par votre Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et Les Indépendants)
M. Ronan Dantec . - Le démarchage téléphonique, fortement intrusif, est un secteur amené à disparaître avec la numérisation de l'économie. Il cible un public fragile, dépendant du téléphone fixe.
Sous couvert de préserver l'emploi, l'autorisation de ce démarchage nie le consentement des personnes et ne va pas dans le sens du progrès. À notre sens, il aurait fallu envoyer un signal clair, comme le prévoyait la proposition de loi Mézard de 2011, en n'autorisant le démarchage que s'il est sollicité par le consommateur : c'est l'opt-in.
Cette proposition de loi comporte néanmoins des avancées : amélioration de l'information du consommateur, détermination des jours, horaires et fréquence du démarchage, présomption de responsabilité du professionnel, renforcement des sanctions, lutte contre la fraude aux numéros surtaxés, etc.
Je constate au passage que les sanctions administratives seront plus dissuasives que pour les atteintes à l'environnement... Espérons que cela change un jour.
Quelle sera la capacité de suivi par l'État des pratiques abusives ? La DGCCRF en aura-t-elle les moyens ?
L'interdiction du démarchage dans le secteur de la rénovation énergétique a été heureusement conservée en CMP, grâce notamment au soutien de Mme Wargon. Ce secteur, essentiel pour lutter contre le dérèglement climatique - et le rapport du Haut Conseil pour le climat montre que nous sommes loin de nos objectifs - souffre en effet de cette fraude qui sape la confiance des ménages et donne une mauvaise image de la filière.
Certes, cette loi ne réglera pas tous les abus et notamment les arnaques de la rénovation à un euro. Là encore, la DGCCRF aura-t-elle les moyens du contrôle a posteriori des travaux ?
Je saisis cette occasion pour vous alerter sur les offres commerciales de gaz et d'électricité ; le médiateur de l'énergie a souligné une explosion des pratiques frauduleuses depuis la fin des tarifs réglementés.
Les associations de consommateurs ne sont pas satisfaites, car elles espéraient le passage à un régime d'inscription préalable, qui existe dans une dizaine de pays européens. Un compromis n'a pu être trouvé.
M. Jean-Pierre Sueur. - Hélas.
M. Ronan Dantec. - C'est un système plus respectueux des consommateurs, notamment des plus vulnérables qui en viennent à débrancher leur téléphone, mais aussi des salariés des plateformes, qui pourraient être mieux accueillis.
Je regrette que n'ait pas été retenu l'amendement de Jean-Pierre Sueur imposant un préfixe permettant d'identifier une démarche commerciale. Tout reposera sur les moyens de contrôle alloués à la DGCCRF. Les sanctions prononcées contre certains énergéticiens nous permettront d'en évaluer rapidement l'efficacité.
Cette proposition de loi ne va pas assez loin, mais l'interdiction du démarchage en matière de rénovation énergétique est une avancée majeure qui justifie que nous la votions. (Applaudissements sur les travées du RDSE)
M. André Reichardt, rapporteur. - Très bien.
M. Martin Lévrier . - Ce texte vise à mieux protéger le consommateur tout en préservant l'activité d'un secteur qui emploie près de 60 000 personnes.
Bravo aux rapporteurs du Sénat et de l'Assemblée nationale pour le compromis obtenu en CMP. Ce texte témoigne de la vigueur du bicamérisme, une chance pour faire face aux défis de notre temps.
Le chantier a été long depuis l'adoption en première lecture par l'Assemblée nationale en décembre 2018. En deuxième lecture, sept articles avaient été votés conformes et la CMP a permis de trouver un équilibre sur les points qui restaient en discussion.
Merci au rapporteur d'avoir consenti à l'interdiction du démarchage dans le secteur de la rénovation énergétique, malgré ses réserves. Le texte apporte des précisions bienvenues sur les sanctions, sur le filtrage des appels provenant de l'étranger avec un identifiant français. Il renforce les obligations des professionnels et sanctionne des appels surtaxés frauduleux.
Je salue la création, à l'initiative du Sénat, d'un régime de données ouvertes qui renforcera la transparence et le contrôle de Bloctel.
Nous aurions pu pousser plus loin en retenant le principe du consentement préalable. Mais nombre de pays qui ont fait ce choix font marche arrière. Cela aurait fait disparaître un secteur économique qui regroupe des acteurs aux pratiques mesurées et légales. Luttons plutôt contre les pratiques frauduleuses qui leur nuisent également.
Ce texte témoigne de la capacité du Parlement à trouver des solutions équilibrées à des questions prosaïques mais complexes. Le groupe LaREM le votera.
M. Pierre Ouzoulias . - Cette proposition de loi a débuté son parcours législatif à l'automne 2018 ; cinq rapports, deux lectures et une CMP plus tard, nous nous demandons toujours si elle peut réellement protéger contre l'intrusion dans nos foyers de sollicitations mercantiles invasives.
L'instauration d'un préfixe unique pour les appels de démarchage aurait permis la juste information des abonnés.
Il est à craindre que l'habileté avec laquelle les démarcheurs s'étaient joués des règles actuelles soit de nouveau mobilisée pour qu'ils s'accommodassent des nouvelles. Ce scepticisme aurait pu conduire notre groupe à l'abstention, n'était une disposition bienvenue.
Pendant tout le confinement, mon téléphone fixe s'est tu. Il a retenti, au bout d'un mois, pour me faire entendre une voix qui m'expliquait, dans le détail, que je pouvais réaliser l'isolation thermique des combles de ma maison pour un euro - alors que je vis dans un appartement. (Sourires)
Perturbé psychologiquement par l'isolement que nous imposaient les circonstances, j'ai écouté avec un soulagement presque existentiel cette voix qui me prouvait la résistance de notre nation et finalement de la valeur supérieure de notre civilisation. Les transports étaient suspendus, il me fallait attendre une heure pour entrer dans un magasin d'alimentation transformé en bloc opératoire - mais pas un instant pour isoler les combles d'une maison que je ne possède pas !
La période oblige à revoir l'ordre de nos priorités. La pandémie passée, il restera le défi de la transition énergétique. L'isolation thermique y concourt, à condition d'être réalisée par des entreprises compétentes et responsables, aujourd'hui déstabilisées par ces offres à un euro poussées par un démarchage agressif.
L'interdiction de ce type de démarchage est pour nous une raison suffisante de voter cette proposition de loi en dépit de ses faiblesses. (Applaudissements sur plusieurs travées)
Mme Marie Mercier. - Très bien.
M. Alain Fouché . - Les abus en matière de démarchage téléphonique sont une nuisance dont nous avons tous fait l'expérience. Quand je reçois de tels appels, je réponds invariablement : « M. Fouche - car c'est ainsi qu'on prononce mon nom - est mort ». L'interlocuteur s'excuse et raccroche. Je vous le conseille. (Rires)
Cette proposition de loi, considérablement enrichie depuis la première lecture en décembre 2018, vise à protéger au mieux les consommateurs tout en préservant l'activité des professionnels.
Les opérateurs seront responsabilisés et un cadre légal sera posé contre les appels surtaxés frauduleux.
Je me réjouis que le préfixe unique ait été abandonné. Il aurait été complexe à mettre en oeuvre pour les PME et n'aurait pas empêché les fraudeurs.
Je suis satisfait que l'interdiction sectorielle ne s'applique pas aux sollicitations intervenant dans le cadre d'un contrat en cours.
Le délai laissé aux opérateurs pour mettre en place le dispositif d'authentification, porté de deux ans à trois ans, nous semble suffisant.
Le filtrage ne s'appliquera qu'aux appels émis hors de l'Union européenne mais affichant un identifiant français. Cela pourrait inciter certaines entreprises à rapatrier leurs centres d'appels en France - ils sont nombreux dans la Vienne, autour du Futuroscope, et c'est très bien.
Bravo à André Reichardt pour son engagement et son dynamisme. Ce texte atteint un bon équilibre entre la protection du consommateur et la volonté de ne pas mettre à mal un secteur qui représente 60 000 emplois. Le groupe Les Indépendants le votera. (Applaudissements sur plusieurs travées)
M. Jean-François Longeot . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le groupe UC se félicite de l'accord trouvé en CMP ; c'est un texte pragmatique qui complète utilement le dispositif de 2014. Bien sûr, nous pourrions regretter l'absence de changement de philosophie sur le principe même du démarchage. Mais cette proposition de loi se veut résolument opérationnelle. Elle sanctionne plus sévèrement les abus sans gêner ceux qui développent une activité respectueuse des droits des concitoyens.
L'interdiction du démarchage pour la rénovation énergétique est une bonne chose : le secteur comptait pour 30 % des amendes administratives infligées après un contrôle de la DGCCRF. Même chose sur le spoofing, qui induit volontairement en erreur le concitoyen-consommateur. Nous regrettons toutefois que l'instauration d'un identifiant d'appel obligatoire n'ait pas été retenue par la CMP, car le concitoyen-consommateur mérite une information claire.
Nos concitoyens exigent de plus en plus de responsabilité des entreprises. Notre groupe, en inscrivant ce texte dans sa niche parlementaire, a voulu régler une situation concrète. Il votera ce texte en remerciant Christophe Naegelen pour son travail de qualité et André Reichardt pour ses apports constructifs. Espérons que ce texte apportera un peu de tranquillité à nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Indépendants et Les Républicains)
M. Jean-Pierre Sueur . - Ce texte comprend quelques avancées, notamment concernant la fiabilité des informations délivrées au consommateur. Il comprend une mesure controversée sur le secteur de la rénovation énergétique, que nous avons finalement adoptée, ce qui devrait faire disparaître un certain nombre de nuisances. J'espère que le PLFR 3 aura quelques attentions pour les artisans et PME fiables et professionnelles du secteur. Une TVA à 5,5 % jusqu'à la fin de l'année leur donnerait une bouffée d'oxygène.
Nous pensons cependant qu'il faut changer de perspective. L'avenir, c'est de mettre en oeuvre le consentement clair et explicite des usagers. Onze pays d'Europe le font - c'est donc possible ! En dépit des avancées de ce texte, dès lors qu'il ne fait pas ce choix majeur, nous nous retrouverons demain devant les mêmes difficultés.
Le Sénat avait adopté notre amendement créant un préfixe reconnaissable pour les appels commerciaux. Las, la CMP l'a supprimé.
A contrario, les députés voulaient faire pièce à la pratique fallacieuse qui consiste, pour un centre d'appels étranger, à se dissimuler derrière un numéro franco-français. C'est une véritable tromperie. Mais cet ajout a été victime de la dure loi de l'entonnoir. Espérons que cela sera repris dans un futur texte.
Rappelons-nous ce que nous racontait notre collègue. Dans un village du sud, dans la montagne, des personnes âgées ont renoncé à décrocher parce qu'elles étaient importunées dix fois par jour par des appels commerciaux. Le maire ne parvenait plus à les appeler en cas de risque d'inondation par exemple, non plus que l'infirmière.
Le texte ne va pas assez loin dans la lutte contre cette pollution mercantile qui a des effets humains très sérieux. Comme en première lecture, en deuxième lecture et en CMP, le groupe socialiste et républicain s'abstiendra. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE)
Mme Laure Darcos . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous devons veiller à ne pas entraver la liberté d'entreprendre tout en luttant implacablement contre les abus.
Ne pas entraver la liberté d'entreprendre, c'est laisser les entreprises vertueuses démarcher de nouveaux clients et conclure les contrats indispensables à leur activité. La plupart sont des PME, et nombre d'appels sont émis depuis des centres d'appels situés en France. Quelque 270 000 emplois sont en jeu.
Pour autant, la lutte contre les abus doit être implacable. La fraude aux numéros surtaxés représente 11 milliards d'euros par an à l'échelle européenne. Elle vise tout particulièrement les plus vulnérables, notamment les personnes âgées et les adolescents.
Ce texte, sans passer le pas du consentement express de l'opt-in réglemente le démarchage. En deuxième lecture, le Sénat avait prévu un identifiant d'appel sous forme de préfixe - obligation supprimée par la CMP. Il avait également interdit toute prospection commerciale dans le secteur de la rénovation énergétique, sauf dans le cadre de relations contractuelles existantes. La commission des lois, comme le groupe Les Républicains, s'est opposée à cette interdiction générale au nom de la libre concurrence. L'opposition entre prospects et clients n'a aucun sens : on peut très bien importuner un client, et satisfaire un prospect avec un appel respectueux du consommateur.
Je regrette que la CMP ait maintenu cette position trop restrictive. Mais je me félicite qu'elle ait conservé un amendement autorisant les appels sur sollicitation expresse du client.
Ne compliquons pas à outrance les relations commerciales, surtout dans ce contexte de crise.
Le groupe Les Républicains votera le texte issu de la CMP. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Alain Fouché applaudit également.)
M. François Bonhomme . - (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) L'examen de ce texte a été l'occasion de pointer du doigt les nuisances insupportables induites par les appels abusifs et la fraude aux numéros surtaxés. Entré en vigueur en juin 2016, Bloctel est un naufrage. Deux ans plus tard, certaines personnes en viennent à renoncer à décrocher leur téléphone.
M. Jean-Pierre Sueur. - Absolument !
M. François Bonhomme. - Même après inscription sur Bloctel, le démarchage continue.
La CMP a rejeté le consentement préalable ou opt-in. Pourtant, ce régime a fait ses preuves : en Allemagne, il a divisé par quatorze ce type d'appels. On aurait pu aligner le régime de ce type de prospection sur celui du SMS. Il y a eu 1,3 million de plaintes entre 2016 et 2018 au titre du démarchage abusif en France, 150 000 en Allemagne. Le nombre de réclamations a également chuté au Portugal et au Royaume-Uni après le passage à l'opt-in.
Cette proposition de loi privilégie le régime d'opt-out au nom de la protection d'un secteur économique. Cela reste à démontrer.
Je regrette aussi que la CMP n'ait pas retenu le préfixe renseignant le consommateur sur la nature commerciale de l'appel. Je crains que dans quelques mois nous ne constations l'inefficacité de ce dispositif. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
La discussion générale est close.
La proposition de loi est adoptée.
Règlement du budget et approbation des comptes de 2019 (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2019, en procédure accélérée.
Nominations à une éventuelle CMP
M. le président. - J'informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de ce projet de loi ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.
Discussion générale
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises . - (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM) C'est pour moi une grande émotion que d'intervenir devant vous pour la première fois.
Le projet de loi de règlement du budget 2019 dont nous débattons est éloigné de la situation actuelle de la France.
M. Philippe Dallier. - Un peu.
M. Alain Griset, ministre délégué. - C'est pourtant un moment important de notre vie démocratique. La sincérisation du budget est confortée, la transparence financière réaffirmée.
Ce texte s'inscrit pleinement dans la trajectoire engagée dès 2017. Notre dépense publique a diminué d'un point de PIB entre 2017 et 2018, passant de 55 % à 54,1 % du PIB, soit 20 milliards d'euros d'économies.
Conformément à l'engagement pris, un milliard d'euros d'économies ont été réalisées par rapport à l'objectif de dépenses fixé dans le projet de loi de finances initial.
Cet effort a été réalisé malgré les mesures d'urgence économiques et sociales décidées après le grand débat.
C'est, chaque année, une étape importante dans le contrôle de l'action gouvernementale. À nouveau, le projet de loi est marqué par la sincérité de la budgétisation du Gouvernement. Je remercie les directions du budget et des finances publiques ainsi que les directeurs de programme pour le respect des autorisations parlementaires.
Le respect de la sincérité des comptes tient à la qualité des budgétisations initiales, notamment sur les dépenses obligatoires. Les prévisions sur la masse salariale ont été globalement respectées. C'est le cas pour la mission Sécurité, qui représente 154 millions d'euros, à la suite du protocole d'accord avec les syndicats de la police nationale pour rétribuer les forces de l'ordre de leur engagement lors de la crise des gilets jaunes et payer des heures supplémentaires accumulées.
La sincérité budgétaire aboutit à la diminution de mise en réserve, de 8 % en 2017 à 3 %. Cela résulte d'une meilleure gestion. La grande majorité des annulations en loi de finances rectificative a porté sur les crédits mis en réserve.
Les effets vertueux de la sincérité budgétaire ont été maintes fois rappelés par la Cour des comptes. Le Gouvernement, pour la deuxième fois en plus de trente ans, a renoncé aux décrets d'avance, contraires à l'autorisation parlementaire.
S'agissant du calendrier budgétaire, l'anticipation de la loi de finances rectificative de fin d'année a donné une plus grande visibilité à l'ensemble des gestionnaires de l'État, tout en ne contenant aucune mesure fiscale nouvelle, car nous avons fait le choix de préserver les ménages et les entreprises
Ce texte donne la priorité aux dépenses d'investissement, qui ont augmenté de 5 % entre 2018 et 2019. La prime d'activité a été augmentée pour soutenir le pouvoir d'achat et inciter au travail.
L'accent a aussi été mis sur le régalien, avec une loi de programmation militaire appliquée conformément aux orientations. La transition écologique a bénéficié d'une forte hausse de 1,7 milliard d'euros d'aide pour le financement de l'Ademe, agence de la transition écologique, ainsi que l'enseignement supérieur et la recherche, qui ont bénéficié d'un milliard d'euros d'augmentation, inédite depuis une vingtaine d'années. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) J'ai plaisir à vous retrouver ici monsieur le ministre : nous nous sommes côtoyés à Chartres à de nombreuses reprises dans le cadre de vos précédentes fonctions. Bienvenue au Sénat !
Le projet de loi de finances 2019 semble appartenir à l'ancien monde. Il a mal commencé, sur un tweet malheureux, qui avait suspendu nos travaux. Malheureusement, l'exécution n'est guère meilleure : 100 milliards d'euros de déficit, près de100 % de dette.
Or les conditions économiques, au début, étaient au beau fixe : croissance dite de rattrapage de 1,6 %, qui a facilité l'atteinte des objectifs budgétaires. La France a moins souffert du ralentissement mondial, mais ce n'est pas glorieux ; simplement, son économie est moins sensible aux exportations.
Malheureusement, le Gouvernement n'en a pas profité pour redresser les comptes publics.
M. François Bonhomme. - Une fois de plus.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - Pour la première fois depuis la crise financière de 2009, le déficit se dégrade. Le Gouvernement prétend que c'est à cause de la transformation du crédit d'impôt sur la compétitivité et l'emploi (CICE) en allègement des charges.
Mais le Gouvernement a aussi bénéficié d'une croissance forte, d'un dynamisme anormalement élevé des prélèvements obligatoires, et de taux d'intérêt très bas.
L'effort structurel de maîtrise de la dépense est donc négatif. La politique gouvernementale a dégradé le solde structurel de 0,5 point de PIB. Les dépenses publiques ont augmenté de 1,8 % soit trois fois plus que l'objectif de 0,6 %, dans un contexte marqué par la montée en charge des mesures prises en réponse à la crise des gilets jaunes.
Les prélèvements obligatoires s'élèvent toujours à 44,8 % du PIB. Le désendettement est différé à hauteur de 98,1 % du PIB, alors que la France a bénéficié pendant trois ans de circonstances historiquement favorables pour réduire sa dette.
Le Gouvernement en 2019 a aussi dépassé la déviation maximale autorisée pour chacune des trois règles du pacte de stabilité. La phase haute du cycle économique n'a pas été mise à profit pour dégager les marges de manoeuvre pour gérer la crise, contrairement à l'Allemagne, avec laquelle le différentiel d'endettement est de près de 40 points de PIB.
Conséquence : le plan de relance allemand est sur les rails, avec 50 milliards d'euros dont 9 milliards pour l'hydrogène. Lors du retour à la normale, il conviendra d'infléchir l'endettement de la France. Nous y reviendrons lors de la discussion du collectif budgétaire dans quelques jours.
L'examen du budget de l'État, au coeur de ce projet de loi de règlement, confirme les analyses microéconomiques.
D'abord, le déficit se dégrade de 16,7 milliards d'euros entre 2018 et 2019. Ensuite, la plupart des recettes fiscales ont été sous-estimées en loi de finances initiale, notamment de 2,2 milliards d'euros pour l'IR.
Un mot sur la TVA, dont le produit est de plus en plus préempté par d'autres acteurs que l'État, à hauteur de 26 % pour les parts destinées à la sécurité sociale et aux régions notamment.
Les dépenses de remboursements et dégrèvements sont elles aussi en augmentation.
Un point de satisfaction pour finir : les crédits consommés dans le budget général, hors charge de la dette et hors remboursements et dégrèvements, ne sont supérieurs que de 1,5 milliard aux montants initiaux ; les crédits d'avance n'ont pas été utilisés mais nous en sommes au troisième PLFR. La réserve de précaution, évidemment utile, voire indispensable, a été contenue à 3 %.
Par conséquent, je partage votre constat de budgétisation sincère. En revanche, on ne peut soutenir que les efforts de maîtrise des dépenses aient été au rendez-vous, en particulier pour les aides publiques au logement où l'on ne sait plus où l'on en est (M. Philippe Dallier le confirme.) ; ainsi, les crédits de la mission Action et transformation publiques sont sous-consommés.
L'État a vu sa charge de dettes diminuer...
M. le président. - Veuillez conclure.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - En conclusion, le problème réside moins dans le respect de l'autorisation parlementaire que dans le manque d'ambition de la loi de finances initiale 2019.
La dette s'est accumulée, à la veille de la crise sanitaire, laissant à l'État des marges de manoeuvre moindres que nos voisins européens.
La commission des finances propose donc le rejet du texte dans son ensemble.
M. Didier Rambaud . - (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM) Tous mes voeux de réussite dans vos nouvelles fonctions, monsieur le ministre.
Le contexte actuel est particulier.
Pour le vote de la loi de règlement, le Parlement doit reconnaître la conformité entre la loi de finances initiale et le réalisé à la fin de l'exercice.
En trois ans, 20,6 milliards d'euros de prélèvements obligatoires en moins ont bénéficié au portefeuille des Français. Leur pouvoir d'achat a aussi été conforté par l'exonération de charges sociales sur les heures supplémentaires à hauteur de 5 000 euros annuels, ainsi que leur défiscalisation, la revalorisation de la prime d'activité et de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), le soutien aux entreprises, la transformation du CICE en cotisations sociales, l'investissement pour le changement climatique, l'augmentation des crédits accordés à la justice ou à la défense et le doublement de la prime à la conversion ont été d'importantes mesures en 2019.
En 2019, la dette publique est stable, le déficit est maîtrisé, ainsi que les dépenses publiques. Le taux de prélèvements obligatoires diminue de 0,7 point et s'établit à 44 % du PIB. Le déficit budgétaire est moindre de 15 milliards d'euros par rapport aux prévisions. (M. Philippe Dallier s'exclame.)
Les mesures de lutte contre la fraude, comme les conventions judiciaires ou le data mining ont montré leur efficacité.
Nous devons accélérer la lutte contre la fraude à la TVA - 15 milliards d'euros par an en France selon la Cour des comptes. L'article 153 de la loi de finances pour 2020 rend obligatoires les transactions électroniques d'ici à 2025. Nous devons aller vers une obligation de la déclaration et de la facturation électronique pour ces transactions.
Il faut aussi sortir de la règle de l'unanimité pour la fiscalité, réduire les niches fiscales, et aboutir à une interprétation des règles en matière d'assiette commune à l'échelle européenne.
Les indicateurs de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) sont peu lisibles et peu renseignés. Une révision s'impose.
Cette loi de règlement est une photo de mode avant la crise. Le soutien aux entreprises a été important ; l'enjeu est le plan de reconstruction qui ciblera les PME et les travailleurs indépendants, la transition écologique. Des ministères leur sont dédiés.
Nous débattrons des réformes utiles au pays, et sur la façon d'agir sur la dépense publique. Certains pays ont des services publics plus efficaces avec des dépenses moindres...
M. Philippe Dallier. - Il est temps de s'en apercevoir.
M. Didier Rambaud. - Il faudra supprimer les doublons dans les collectivités territoriales.
M. Philippe Dallier. - Chiche !
M. Didier Rambaud. - La loi de règlement doit être votée sur son contenu. Le groupe LaREM votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
M. Éric Bocquet . - Salut nordiste au ministre... Ce débat est un peu surréaliste, avec un budget construit sur des normes surréalistes, explosées par la pandémie cette année où toutes les règles budgétaires « inviolables » ont été transgressées.
L'action du Gouvernement s'est limitée à pressurer la dépense publique, avec 3 601 fonctionnaires en moins - au-delà des 1 571 suppressions d'emplois prévues - des privatisations injustifiées, des baisses de moyens dans la santé et l'éducation, l'effet des investissements refusés hier se paye très cher aujourd'hui, notamment dans les hôpitaux.
Le pays a pâti de la réduction des services publics qui ont prouvé, dans cette crise, toute leur efficacité et leur nécessité.
En 2019, le budget s'est privé de plusieurs milliards d'euros de recettes fiscales avec la suppression de l'ISF et l'instauration de la flat tax. Nous aurions aimé que cette loi de règlement soit la dernière du genre, mais nous examinerons bientôt le troisième projet de loi de finances rectificative.
L'État se limite à des transferts financiers sur la sécurité sociale alors que l'assurance maladie a été mobilisée pendant la crise. Les exonérations de charges des entreprises ont remplacé les hausses de salaire. Rationalisation, souplesse, attractivité, tels sont les maîtres mots de ce Gouvernement qui favorise les plus riches par les baisses d'impôts.
Vous refusez de chercher les ressources là où elles se trouvent. La planète se meurt mais l'État dépense 30 milliards d'euros par an dans des niches fiscales polluantes.
Il faut un ISF modernisé plus efficace, une taxation des dividendes et la suppression des niches fiscales. Leur absence prive l'État de milliards d'euros.
L'IFI a rapporté en 2019 2,9 milliards d'euros de moins que l'ISF en 2017. La flat tax prive l'État d'1,5 milliard d'euros chaque année.
La population manifeste sa colère et son refus d'un système où l'argent étouffe la société. D'ici la fin du quinquennat, vos soutiens se tariront. Un ras-le-bol général gronde.
Ce budget, anachronique, pressure les finances publiques et oublie la solidarité, l'écologie et la redistribution, alors que la crise a montré l'efficacité et le caractère indispensable de l'action de l'État.
Le PLFR 3 semble malheureusement confirmer ce cap.
Le groupe CRCE n'avait pas voté le projet de loi de finances 2019, il ne votera pas son exécution.
présidence de M. Philippe Dallier, vice-président
M. Franck Menonville . - Je félicite le ministre pour ses nouvelles fonctions. Le projet de loi de règlement donne un aperçu de la France avant la crise, avant un troisième projet de loi de finances rectificative. C'est un exercice quelque peu surréaliste.
En ce temps-là, le Sénat ne se félicitait pas d'indicateurs économiques qui nous semblaient modestes : croissance économique solide, quoique modeste, de 1,5 %, déficit de moins de 3 % et dette inférieure à 100 % du PIB...
Ce n'est pas parce qu'en 2020 la situation s'est aggravée que nous ne devons pas avoir un regard critique. Le poids des dépenses publiques et des prélèvements obligatoires alourdissait notre économie.
Les mesures du Gouvernement allaient dans le bon sens, mais pas suffisamment vite.
L'essentiel du déficit provient des administrations de l'État, dites APUC en comptabilité nationale : leur part dans le déficit a augmenté de 17 milliards d'euros entre 2018 et 2019, alors que les collectivités territoriales ont réalisé des efforts.
Il faudra baisser les dépenses publiques de l'administration centrale. L'État est plus fort lorsqu'il se concentre sur ses missions régaliennes. Je me félicite que les effectifs de l'Intérieur, de la Justice et des Armées aient augmenté.
Au regard de 2020, la situation de 2019 peut sembler réjouissante, elle est pourtant préoccupante. Depuis 2017, aucun gouvernement n'a été capable d'inverser la tendance. La comparaison avec l'Allemagne pose problème. Certes, la dynamique positive des recettes a joué en notre faveur.
Le sérieux de l'exécution budgétaire ne relève pas de l'anecdote : c'est un prérequis indispensable pour les prochaines échéances budgétaires qui seront autrement difficiles. Pour la deuxième fois depuis trente ans, il n'y a pas eu de décret d'avance. Espérons que cette bonne pratique devienne une habitude et perdure.
Le groupe Les Indépendants votera ce texte, mais il faut redéfinir au plus vite le périmètre de l'action de l'État, pour redresser les comptes publics.
M. Vincent Delahaye . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Merci de m'avoir remplacé pour me permettre d'intervenir, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je serai sévère, mais je ne suis pas méchant, donc je commence par les gentillesses (Sourires) : c'est un acquis de ce Gouvernement que d'être sincère dans ses prévisions.
Il y a trois ans, le Gouvernement annonçait un retour à l'équilibre des finances publiques en cinq ans. La même promesse nous avait été faite lors du quinquennat précédent... Même scenario, même résultat. Franchement, je n'y croyais pas davantage. Cette prévision semblait bien optimiste : en effet, cinq ans, c'est court...
Et le report « courageux » des efforts les plus importants en fin de mandat me laissait dubitatif, voire sceptique. Cela n'était pas crédible.
Fin 2019, il y avait 100 milliards d'euros de déficit public et la dette publique atteignait l'équivalent de la richesse nationale. Pour atteindre l'équilibre, il faudrait augmenter de 30 % les prélèvements obligatoires.
Or, aujourd'hui, nous sommes face à une crise inédite. Gérald Darmanin assurait que la situation était sous contrôle. L'endettement devrait passer en 2019 de 98 % du PIB à 120 % fin 2020, et que dire du déficit et des prélèvements obligatoires ? Les recettes fiscales devraient baisser de 65 milliards d'euros.
Le contexte était pourtant favorable depuis 2017. Les pays en situation plus favorable avant la crise s'en sortent mieux. L'Autriche a baissé son endettement de quatre points entre 2018 et 2019, l'Allemagne et l'Espagne de deux points.
Fin 2019, notre situation financière était loin d'être idéale, mais l'argent tombe du ciel. La seule limite au bon vouloir du Président de la République, « quoi qu'il en coûte », semble être le bon vouloir des marchés ; c'est open bar, autant dire irresponsable !
Même la Cour des comptes est présidée par un ancien ministre des finances qui n'a jamais fait preuve d'efficacité particulière en la matière dans ces fonctions... Il a déclaré vouloir mettre fin à une « logique austéritaire ». Quand s'est déroulée cette période, depuis quarante ans ? Pas lorsqu'il était ministre, en tout cas !
La responsabilité politique, consiste à assumer ce que l'on décide, notamment financièrement. Reporter sur les générations futures les dépenses de fonctionnement de l'État n'est pas une solution. C'est irresponsable et injuste. Je ne parle pas, contrairement à vous, monsieur le ministre, d'investissements car ils ne représentent que 12 milliards d'euros sur 400 milliards d'euros de dépenses.
L'endettement est un impôt non consenti pour une dépense future. Où est l'orthodoxie budgétaire ? Nous connaissons son nom, souvent brandi par la gauche à des fins électoralistes, mais nous n'avons jamais vu son visage pendant que, réponse du vice à la vertu, l'on montre du doigt les pays responsables en les qualifiant avec mépris de « frugaux ». Pour moi, ils sont sérieux : leur responsabilité de fourmi est préférable à notre irresponsabilité de cigales.
Le groupe centriste s'abstiendra dans sa grande majorité sur ce texte, tout en regrettant le manque de temps pour son examen, car la sincérité et la transparence sont positives. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président
M. Thierry Carcenac . - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Bienvenue au Sénat, monsieur le ministre.
La loi de règlement vérifie le respect de l'exécution des choix budgétaires faits dans le projet de loi de finances. Elle doit s'inscrire dans le cadre de la programmation des finances publiques 2018-2022 : l'équilibre des comptes publics était prévu pour la fin du quinquennat.
La loi de règlement permet aussi de tirer des leçons pour l'avenir. Le respect de l'exécution des choix budgétaires a été caractérisé par le respect des dépenses et l'absence de décrets d'avance.
Le groupe socialiste et républicain n'avait pas adopté le projet de loi de finances pour 2019 en raison des choix politiques et fiscaux du Gouvernement, notamment la hausse de 4 % des revenus disponibles pour le premier centile des contribuables les plus aisés et l'absence de baisse pour les 20 % les plus modestes. Le ruissellement tant vanté n'a pas eu les effets escomptés.
La diminution des recettes conduit à la réduction des dépenses selon la théorie économique libérale.
Les moyens pour la santé et l'hôpital étaient insuffisants, de même que les moyens pour la politique environnementale et territoriale.
M. Darmanin se félicitait de la mise en oeuvre du prélèvement à la source. Cette possibilité de modulation en fonction des revenus est une opportunité. Elle avait été proposée par Christian Eckert. Reste à vérifier l'effectivité des versements des entreprises.
Que n'avez-vous écouté le Sénat sur la fiscalité exorbitante de l'énergie et la baisse des APL, qui a bloqué l'activité des commerces, avec les manifestations des gilets jaunes pendant un an !
Je ne reviens pas sur la diminution des personnels des services de l'Éducation nationale et de la direction générale des finances publiques, pourtant essentiels. Heureusement que le groupe socialiste et républicain a insisté sur la nécessité de faire sauter le verrou de Bercy pour améliorer la lutte contre la fraude fiscale.
Le fonds prévu pour la privatisation d'ADP n'a rapporté aucun revenu, comme l'a fait remarquer la Cour des comptes.
L'exonération des charges sociales dégrade les comptes de la sécurité sociale.
Nous sommes loin des objectifs assignés par la loi de programmation des finances publiques alors que la conjoncture était, en son temps, favorable. Les vents contraires, tels que les gilets jaunes et la crise sanitaire, certes imprévisibles, n'ont pas été anticipés par le Gouvernement. Il se trouve ainsi fort dépourvu l'hiver venu. (M. Jean-Claude Requier sourit.)
Le monde d'après ne peut tabler sur aucune situation comparable. Notre groupe défend un juste équilibre entre la taxation du travail et du capital.
Nous réitérons notre proposition d'une fiscalité rénovée du capital qui reviendra en boomerang à la rentrée, avec la crise économique et sociale, alors que 800 000 jeunes arriveront sur le marché du travail.
La relance du logement, tant en rénovation qu'en construction s'impose. La transition énergétique est un formidable levier pour créer des emplois.
L'Éducation nationale doit être renforcée tout comme l'enseignement supérieur. La culture et le sport contribuent au renforcement de la cohésion sociale.
En ma qualité de rapporteur spécial, j'insiste sur la politique immobilière de l'État. Mme de Montchalin va avoir du pain sur la planche. L'État n'est pas un honnête gestionnaire de son parc immobilier.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste et républicain ne votera pas la loi de règlement de 2019. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)
M. Jean-Claude Requier . - Je vous souhaite la bienvenue de la part du groupe RDSE, le plus ancien du Sénat...
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - ... instigateur de l'impôt sur le revenu ! (Sourires)
M. Philippe Dallier. - Avec Joseph Caillaux !
M. Jean-Claude Requier. - Eh oui ! Je vous souhaite pleine réussite. (M. le ministre remercie le président Requier.)
Les propos prudents de 2019 sur le redressement des finances publiques ne sont hélas plus de mise. Les derniers chiffres publiés par l'Insee font apparaître la baisse d'activité de 17 % au second semestre 2020 au lieu des 20 % prévus ; la récession ne serait que de quelque 9 % au lieu de 11 %. Mais cela ne fait que tempérer des prévisions pessimistes.
Bonne nouvelle, le déficit public pour 2019 est finalement contenu à 3 % du PIB. La dette se stabiliserait autour de 98 % du PIB et les prélèvements obligatoires diminueraient.
Bonne affaire pour la puissance publique : le niveau bas des taux d'intérêt, grâce à la politique d'assouplissement quantitatif de la Banque centrale européenne, permet d'alléger la charge de la dette. En tant que co-rapporteur spécial de l'aide publique au développement, je salue les crédits supplémentaires prévus, conformément à l'engagement du Président de la République, pour favoriser les dons plutôt que les prêts. Cela ramènera la France au niveau du Royaume-Uni et de l'Allemagne. Il y va du rayonnement de la France à l'étranger.
Le déficit public est de 15 milliards d'euros de plus que la loi de finance initiale. Seuls 50 % à 60 % des objectifs seraient atteints selon les indicateurs de performance. Quelle est la pertinence de ces indices ?
Les collectivités territoriales ont maîtrisé leurs dépenses et joué un rôle essentiel dans la crise sanitaire - grâce à l'acquisition et à la distribution de masques, de gels, etc. Le fossé entre la France des métropoles et celle des campagnes se creuse.
2019 est une année d'amélioration de la gestion des finances publiques. La majorité des membres du RDSE est favorable à son adoption. (Applaudissements sur quelques travées des groupes RDSE et Les Indépendants ; M. Michel Canevet applaudit également.)
M. Philippe Dallier . - À mon tour, je vous souhaite la bienvenue au Sénat !
Il est surréaliste d'examiner ce projet de loi de règlement alors que la crise a rendu de facto caducs tous les chiffres sur lesquels nous nous prononçons ce soir. Une période de dix ans se clôt aujourd'hui, depuis la crise de 2008. Qu'avons-nous fait de ces dix ans ?
Le Gouvernement fait valoir le recul du chômage, le différentiel positif de croissance au crédit de la politique macroéconomique de la France, une croissance nominale supérieure à la croissance potentielle. Mais ces quelque 1,5 % de croissance sont inférieurs à 2017 et 2018.
N'oublions pas non plus que cette croissance ralentissait dès le dernier trimestre 2019, avec un acquis de croissance de 0,1 %, soit le pire chiffre depuis 2012.
Gérald Darmanin et Bruno Le Maire nous expliquaient que la France était sur la voie d'un rétablissement exceptionnel : ce discours ne tient pas !
L'économie mondiale ralentissait mais la France a connu l'effet retard habituel, dû à la faiblesse de ses exportations, qui réduit son exposition à la conjoncture internationale. C'est ce qui s'était d'ailleurs produit en 2009 et 2010. Nous plongeons moins vite mais plus profondément que les autres et avec une remontée bien plus lente que chez nos principaux partenaires ou concurrents. C'est ce qui était en train de se passer en 2019.
En 2020, la structure de notre économie a un effet multiplicateur sur les effets de la crise sanitaire, d'où la récession bien plus grande que nous allons connaître que chez certains de nos grands voisins.
Revenons aux chiffres de 2019 : le déficit public a été de 3 % du PIB, contre 2,3 % un an avant. Le déficit budgétaire s'élevait l'an passé à 92,7 milliards d'euros contre 76 milliards en 2018, difficile d'y voir une amélioration, même en intégrant le CICE et la baisse de charges, car ce serait oublier que vous avez bénéficié d'une meilleure conjoncture que prévu, d'une forte élasticité des recettes à la croissance, de taux d'intérêt très bas. Ces trois facteurs auraient dû vous permettre de compenser presque en totalité le CICE et la baisse des charges. Il n'y a eu aucune réduction du déficit structurel en 2019 - de 2,2 % comme en 2018 - ainsi que l'a sévèrement indiqué la Cour des comptes.
Cette absence d'amélioration s'explique par l'augmentation des dépenses publiques de 1,8 % à la suite notamment de la crise des gilets jaunes.
Le Gouvernement a renoncé à tout effort sur la masse salariale. Dans ces conditions, comment diminuer la dépense publique ? Je ne m'explique pas ce mystère... La dette publique frôle les 100 % du PIB. Encore heureux que les taux d'intérêt soient restés historiquement bas !
Ce projet de loi de règlement souligne les bons résultats des collectivités territoriales. Elles ont maîtrisé la croissance de leurs dépenses de fonctionnement dans le cadre des contrats de Cahors - qui avaient été vécus comme une injustice par de nombreux élus locaux, l'État demandant aux autres de faire ce qu'il était incapable de faire. (M. Jean-Raymond Hugonet le confirme.)
L'année 2019 rompt avec le recul de l'investissement des collectivités que nous avions observé les années passées, avec la baisse des dotations et la hausse non financée de transferts de compétences. Entre 2013 et 2018, l'investissement des collectivités avait reculé de 18 %. L'an passé, il a augmenté de 13 %.
Reconnaissons-le : les élus locaux savent faire les efforts qu'on leur demande !
Ce ne sont pas seulement les chiffres de 2019 qu'il nous faut considérer alors que nous entrons dans la plus grave crise économique que nous ayons connue depuis 1929. Qu'avons-nous fait ces dix dernières années ? Rien ou si peu de ce qu'il fallait faire. Nous n'avons pas su réduire nos dépenses publiques ni notre dette alors que d'autres, comme l'Allemagne, mais pas seulement, y sont parvenus.
Pour faire face à la crise, le Gouvernement a ouvert les vannes de la dépense publique ; c'est probablement nécessaire, mais jusqu'où pourra-t-on aller ?
Remercions ici Mme Merkel qui a accepté de mettre en place un plan de relance et de mutualiser en partie nos dettes.
M. André Gattolin. - Son économie dépend à 25 % des exportations vers les autres pays européens !
M. Philippe Dallier. - Mais ce n'était pas évident ! N'attendons pas d'outre-Rhin la solution à tous nos problèmes. Nous avons perdu dix ans.
Le groupe Les Républicains ne votera pas ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Jean Bizet. - Très bien !
La discussion générale est close.
Discussion des articles
L'article liminaire n'est pas adopté, non plus que les articles premier, 2, 3, 4, 5 et 6.
M. le président. - Nous en arrivons à l'article 7. Si cet article n'était pas adopté, il n'y aurait plus lieu de voter sur l'ensemble du projet de loi puisque tous les articles qui le composent auraient été supprimés.
En application de l'article 59 du Règlement, le scrutin public est de droit sur l'ensemble du projet de loi de règlement. L'article 7 va donc être mis aux voix par scrutin public.
Voici le résultat du scrutin n°133 :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 283 |
Pour l'adoption | 57 |
Contre | 226 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière (procédure accélérée).
Discussion générale
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises . - Je suis très heureux d'être devant vous pour défendre ce projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière, autrement appelé « Ddadue ». Déposé le 12 février sur le bureau du Sénat, il aurait dû être examiné à partir du 24 mars.
Depuis, deux lettres rectificatives l'ont modifié. Son contenu couvre tout le spectre de notre activité économique et financière : protection des consommateurs, conformité des produits, relations entre entreprises, douanes, lutte contre le blanchiment, gestion du Feader, autorité de la concurrence. Cette diversité témoigne de la forte activité législative du Conseil de l'Union européenne et du Parlement européen, amenant les États membres à adapter leur droit économique et financier à l'horizon des années 2020 et 2021.
Le Sénat a été attentif aux prérogatives respectives du Gouvernement et du Parlement, notamment au regard des ordonnances. Il a notamment réduit les délais de plusieurs habilitations. Les modifications ne posent pas de problème sauf aux articles 7, 15 et 18, pour lesquels le Gouvernement souhaiterait davantage de temps.
Je vous remercie pour le travail effectué en commission sur ce texte ardu. Sur les 39 amendements que vous avez adoptés, une grande majorité recueille notre assentiment.
Le texte renforce la protection des consommateurs en prenant en compte l'expansion du numérique qui « crée une nouvelle donne », porteuse d'opportunités mais nécessite aussi des protections renforcées.
Le projet de loi précise les nouvelles obligations des places de marché en ligne et les conditions de commercialisation des contenus et services numériques. Il renforce les pouvoirs de l'autorité de contrôle nationale et les sanctions applicables pour mieux lutter contre les pratiques frauduleuses dans le cadre d'une augmentation croissante de ventes via des interfaces en ligne. Il modernise les règles en matière de pratiques commerciales déloyales. De plus, il complète notre droit de la consommation pour créer, au titre du règlement dit « géoblocage », qui interdit les restrictions des sites en ligne fondées sur la nationalité, le lieu de résidence ou le lieu de connexion, un régime de sanctions administratives, ainsi que des habilitations pour les agents de la DGCCRF à en contrôler l'application dans les échanges transfrontières, en particulier en outre-mer.
Ce texte comprend des mesures de régulation financière contre le blanchiment. Il tire les conséquences de l'entrée en vigueur du règlement relatif aux contrôles de l'argent liquide entrant ou sortant de l'Union, dit cash control, sur l'argent expédié via le fret, y compris La Poste notamment.
Ce projet de loi transpose plusieurs directives européennes contribuant à une meilleure supervision des activités financières au sein de l'Union européenne portant sur l'encadrement des obligations garanties, des entreprises d'investissement, de la commercialisation transfrontalière des organismes de placement collectif en valeurs mobilières et des fonds d'investissement alternatifs dans l'Union européenne.
Sur la transparence dans les relations interentreprises, le projet de loi permet de recourir à une habilitation pour intégrer dans le code de commerce des obligations supplémentaires relatives aux pratiques commerciales déloyales interentreprises au sein de la chaîne agricole et alimentaire. Il s'agit là de rétablir la loyauté des transactions lorsque les relations commerciales sont trop déséquilibrées, dans un secteur particulièrement important pour notre pays, comme l'a rappelé le confinement.
En ce qui concerne la concurrence, l'article 25 met le droit français en conformité avec la directive ECN+ visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en oeuvre plus efficacement les règles de concurrence.
Sur un sujet cher au Sénat, vous avez introduit des articles nouveaux sur la publicité en faveur des vaccins vétérinaires et la lutte contre les déserts vétérinaires qui recueillent l'avis favorable du Gouvernement.
Malgré sa complexité, c'est un seul et même esprit qui sous-tend ce texte : une Union européenne plus protectrice, plus proche des citoyens et qui porte un approfondissement de la coopération entre les États membres. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Indépendants, ainsi que sur le banc de la commission)
M. Jean Bizet, rapporteur de la commission des finances . - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) Bienvenue dans cet hémicycle, monsieur le ministre. La cohérence de ce texte ne tient guère qu'à la transcription dans notre droit de dispositions nouvelles de l'Union européenne. En dresser un panorama global est une gageure, d'autant que deux lettres rectificatives en ont renforcé l'hétérogénéité ; j'aborderai quelques points et vous renverrai pour le reste au rapport de M. Duplomb et au mien.
Ce texte comporte 25 articles dont 13 examinés par la commission des finances sur la règlementation douanière et le droit bancaire et financier. Son article 24, inséré par le Gouvernement, porte sur le Feader, corrigeant une incohérence de la loi Maptam qui confiait la gestion des crédits aux régions jusqu'en 2020, alors que leur exécution court jusqu'en 2023. Mais sa version initiale prévoyait aussi une habilitation sur la gestion future. La commission a supprimé ces dispositions qui auguraient d'une recentralisation de la gestion des crédits contradictoire avec les récentes déclarations du Premier ministre. Nous devrons avoir ce débat. Si l'ancien ministre de l'Agriculture avait fourni les clarifications nécessaires en temps voulu, nous n'en serions pas là.
Le nombre des habilitations est excessif. Cette pratique dépossède le Parlement de ses prérogatives et augmente les risques de surtransposition. C'est pourquoi le président du Sénat a chargé depuis deux ans la commission des affaires européennes de screener tout texte qui passe à notre portée. Les surtranspositions environnementales, notamment, entraînent des distorsions de concurrence inacceptables.
La technicité des sujets ne saurait occulter l'importance des enjeux : les dispositions correspondent à des projets européens essentiels, à l'instar de l'union bancaire ou de l'union des marchés de capitaux. L'Allemagne est d'ailleurs en train de bouger sur le sujet. Mais ne dévitalisons pas les parlements nationaux.
Il importe donc que nous nous saisissions des enjeux européens, par le biais de résolutions européennes comme nous le faisons régulièrement.
La Commission européenne renvoie de nombreux sujets à des actes délégués, au détriment d'actes législatifs ; ce penchant est regrettable. Au-delà de la technicité des sujets, le recours à un texte-balai d'adaptation au droit de l'Union européenne s'est imposé à votre Gouvernement compte tenu du retard pris dans les transpositions. Certains textes concernés par ce Ddadue ont ainsi plus de trois ans.
Ce texte comporte également des dispositions préparatoires à l'après-Brexit, qui ne s'annonce pas sous les meilleurs auspices. J'ai demandé à la commission d'approuver les habilitations sur ce sujet. Je forme toutefois le voeu qu'une autre méthode s'impose à l'avenir : il y va de la crédibilité et de la réussite du projet européen. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et LaREM)
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques . - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) Dans le domaine économique, notamment numérique, la Commission européenne a proposé, ces dernières années, des évolutions importantes afin de renforcer l'harmonisation des règles et d'accroître les protections exigées par les consommateurs et les acteurs économiques de certains secteurs.
Ces textes comportent des dispositions majeures qui toucheront la vie quotidienne de nos concitoyens et qu'il nous faut transposer.
La commission des affaires économiques a procédé à un triple contrôle sur 12 des 25 articles du projet de loi. Premier contrôle, la conformité de ces articles au droit européen. Nous avons réduit ou supprimé des habilitations telles que celle qui porte sur le règlement Platform to business, c'est-à-dire un texte qui entre en vigueur dans quelques jours : je vous remercie d'avoir entendu notre appel.
Je regrette la pratique consistant à déposer au stade de la séance publique des amendements comportant des habilitations pour transposer des pans entiers du droit, sans laisser la possibilité au Parlement d'exercer son contrôle, alors que le calendrier de ces transpositions est connu à l'avance.
Le second niveau vise à contrôler que l'adaptation du droit français aux nouvelles règles européennes ne pose pas de difficultés supplémentaires.
La commission a constaté, par exemple, que la directive sur les pratiques commerciales déloyales ne s'appliquait qu'aux relations asymétriques entre un fournisseur alimentaire et un distributeur, et uniquement quand le distributeur a un chiffre d'affaires supérieur à celui du fournisseur. Or cela exclurait certaines pratiques, comme celles des centrales de référencement qui, n'étant pas des centrales d'achat, ont un très faible chiffre d'affaires alors qu'elles contractent avec les fournisseurs. Il convenait de combler ce trou dans la raquette sans fragiliser les protections apportées à nos PME alimentaires en intégrant des conditions de chiffre d'affaires qui n'existent pas aujourd'hui.
S'agissant des stocks stratégiques pétroliers, l'abrogation de la référence à une convention, approuvée par l'État, définissant les prestations réalisées par la Société anonyme de gestion des stocks de sécurité (Sagess) pour le compte du Comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers (CPSSP), était de nature à déstabiliser le cadre juridique et fiscal applicable à ces stocks. La commission a proposé de la maintenir, tout en permettant les évolutions de la législation nationale requises par le droit européen.
Enfin, le troisième niveau de contrôle a permis de procéder à une vérification plus générale, à savoir que le droit français respecte les principes dictés par le droit européen. Les textes donnent des orientations que les États membres doivent respecter, si besoin en adaptant leur droit de façon volontariste. C'est le cas par exemple en matière de maillage territorial de nos vétérinaires. Les déserts vétérinaires se multiplient dans certaines régions. (M. Jean Bizet, rapporteur, le confirme.) Quarante départements seraient concernés et il y aurait 15 % de vétérinaires en moins en cinq ans pour les animaux d'élevage. Or la désertification vétérinaire est le dernier signe avant la désertification agricole. La commission propose donc un dispositif inédit à la main des collectivités territoriales dans les zones tendues pour favoriser l'installation des vétérinaires. Nous avons réuni tous les acteurs, et le Gouvernement a entendu notre appel.
Au regard de ces éléments, la commission est favorable à l'adoption de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)
M. Jean Bizet, rapporteur. - Très bien !
présidence de M. Philippe Dallier, vice-président
M. Patrice Joly . - Sur la forme, nous devons comme souvent nous pencher sur un texte touffu, technique, en urgence.
Bien sûr, il faut nous mettre à jour de nos obligations de transposition et préparer l'après-Brexit. Mais le champ des habilitations est plus large que nécessaire et le texte aurait pu être examiné dès l'automne 2018. De plus, il a été complété par deux lettres rectificatives.
Ce projet de loi transpose pas moins de onze directives. Il donne davantage de moyens aux autorités françaises pour lutter contre la fraude fiscale, le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, avec notamment la mise en oeuvre de nouvelles règles relatives aux mouvements d'argent liquide en provenance ou à destination des pays tiers. Il renforce les sanctions contre les violations de la réglementation douanière. Néanmoins, pourquoi voter dès ce soir alors que certaines mesures ne s'appliqueront qu'en juin 2021 ?
Cette problématique de la temporalité est d'autant plus prégnante lorsque l'on examine certains articles qui mériteraient que l'on s'y attarde tant ils présentent des enjeux politiques, éthiques, économiques, sociaux et sociétaux importants. L'article 18, ainsi, harmonise les règles relatives à la génétique animale. Cette question est pourtant cruciale pour la France. Ce secteur de la génétique animale génère 8 200 équivalents temps plein, ces emplois étant très majoritairement liés à l'élevage laitier. Or 50 % des gains de productivité de l'élevage sont liés aux progrès génétiques.
Le règlement d'inspiration très libérale laisse peu de marges dans son application. Une part importante des activités sous la responsabilité de l'État passeront au secteur privé, comme le mentionne l'étude d'impact. Comment s'assurer de la prudence des laboratoires dans ces conditions ? Les races locales ne risquent-elles pas de disparaître, faute de rentabilité ? Nous devrons être vigilants lors de la ratification pour défendre la richesse génétique de nos élevages.
Les dispositions sur les droits d'auteur et droits voisins devaient être examinées dans un texte spécifique, ce qui n'a pu être fait du fait du covid. On ne peut que se réjouir que les géants du numérique devront participer dès janvier 2021 au financement de la création française. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR, ainsi que sur le banc de la commission)
Mme Josiane Costes . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Je félicite le ministre pour sa nomination et lui adresse mes voeux de pleine réussite.
Il est utile de rappeler, comme l'ont fait mes prédécesseurs, les évolutions de la procédure parlementaire. Les modalités d'examen de ce texte, certes technique et hétérogène, ne permettent pas d'en mesurer tous les enjeux. La crise sanitaire a certes bouleversé le calendrier parlementaire et le travail des commissions. Nous devions examiner ce projet de loi il y a déjà plusieurs mois. Le temps désormais imparti est insuffisant pour en apprécier les subtilités, d'autant plus que le Brexit imposera de trouver des compromis complexes.
Le travail parlementaire a son utilité : il permet de préciser les textes.
On ne peut que déplorer le recours habituel, voire excessif, aux ordonnances. L'état d'urgence sanitaire montre que le recours à celles-ci doit rester l'exception.
La commission a heureusement supprimé des habilitations et réduit les durées de certaines d'entre elles, notamment au sujet du paquet bancaire de l'article 15.
Sur le fond, il est évidemment illusoire d'appréhender ce texte avec exhaustivité. Je m'en tiendrai donc à quelques points saillants.
Pour une puissance agricole comme la France, la PAC, et donc le Feader, a une importance cruciale. Ces questions ont une conséquence directe sur le développement des territoires ruraux. (M. Jean-Claude Requier le confirme.)
Au demeurant, plusieurs harmonisations à l'échelle de l'Union européenne sont bienvenues. Il en va ainsi de l'utilisation d'informations financières pour prévenir des infractions pénales, notamment en matière de terrorisme et de blanchiment d'argent.
Il faut encore souligner, s'agissant de la protection des consommateurs, spécialement de plateformes en ligne, que ce projet de loi apporte des améliorations en transposant des règles relatives au délai de rétractation, à l'information et à la protection des utilisateurs de services numériques gratuits.
Les dispositions intéressant le code des douanes posent la question d'une douane européenne - ce qui serait une amélioration inédite.
Certaines dispositions entraînent des interrogations. Attention au nivellement par le bas des normes vétérinaires ; attention aussi à une possible extension des dérogations au secret professionnel.
Malgré ces quelques critiques, le groupe RDSE, dans sa grande majorité, votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. André Gattolin applaudit également.)
M. André Gattolin . - (M. Jean Bizet, rapporteur, applaudit.) Monsieur le ministre, bienvenue.
Après une salve d'habilitations à légiférer par ordonnances, nous voyons arriver un objet législatif bien particulier appelé étrangement Ddadue - diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne. Il est étonnant que notre glorieuse et cacochyme Académie française ne se soit pas penchée sur le sexe de ce terme comme elle l'a fait, de manière très malheureuse, pour « la » covid-19.
On dira donc indifféremment la Ddadue ou le Ddadue. Notons cependant qu'il est particulièrement dodu, et qu'il fait penser aux festins imaginés par Raymond Roussel.
Il y avait plusieurs enjeux : la crise sanitaire, la préparation de l'après-Brexit, la prolongation de gestion du Feader, la nécessaire transposition de certaines directives ayant trait à la communication et aux droits d'auteur compte tenu du report du projet de loi Audiovisuel.
Malgré son aspect de loi omnibus ce projet de Ddadue ne s'apparente toutefois en rien à une quelconque autorisation à légiférer par ordonnance. Nous avons déjà débattu de beaucoup de ces sujets au sein de nos commissions.
L'article sur la directive Services de médias audiovisuels (SMA) est le fruit de riches discussions de notre commission de la culture avec le ministre Franck Riester, dont je salue l'écoute à l'égard du Parlement.
Ce texte prévoit aussi une série de mesures nécessaires pour l'harmonisation européenne et la consolidation du marché intérieur en matière de protection des consommateurs, de relations inter-entreprises, de réglementation douanière, de transposition de directives et d'adaptation du droit interne en matière financière, de prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, d'harmonisation des règles de vente des médicaments vétérinaires
L'objectif premier de ce texte est de mettre notre droit en conformité avec le droit européen. En 2018, 86 % des directives étaient transposées dans les six mois précédant la date butoir. Nous avons progressé, notamment grâce à Bernard Cazeneuve, ministre des Affaires européennes en 2012 et 2013.
En revanche selon le rapport annuel de la commission, la France a encore du chemin à faire en matière de conformité des transpositions, et nous sommes encore régulièrement accusés de sur ou de sous-transposer certains textes européens.
Depuis trois ans, le Gouvernement s'attaque à la manie très française de mal-transposition des textes, et en particulier de surtransposition. Ces errements empêchent citoyens et entreprises de profiter de législations utiles et protectrices. Ainsi de la directive sur la fourniture de contrats et services numériques, qui acte le fait que le prix monétaire n'est pas la forme unique de rémunération dans le monde numérique.
Les articles 3 et 4 concernent les blocages géographiques injustifiés ; 63 % des sites étudiés pratiquaient ces différences entre pays européens.
Autre point important du texte, la coopération douanière des pays membres contre la fraude.
Une interface de coopération virtuelle a été créée au niveau européen par l'Office européen antifraude.
Enfin, ce projet de loi nous aide à présenter un bilan exemplaire en matière de transposition dans la perspective de la présidence française du Conseil européen au premier semestre 2022.
Le groupe LaREM votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur le banc de la commission)
M. Pierre Ouzoulias . - La loi portant diverses dispositions sur l'état d'urgence sanitaire a été qualifiée par la rapporteure, Muriel Jourda, de « texte le plus hétérogène depuis 2010 », le record est sans doute battu avec ce projet de loi...
Il était encore possible de comprendre que les circonstances exceptionnelles de la lutte contre la pandémie vous obligeassent à procéder dans l'urgence par ordonnances. Mais le recours systématique à celles-ci dans ce texte pallie des retards de transposition et vous permet de gagner du temps : il y a là de la facilité et de la procrastination.
Je salue le travail de Laurent Duplomb et de Jean Bizet, mais l'entreprise de sauvetage était désespérée.
Monsieur le ministre, je déplore que vos collègues vous aient donné comme premier texte ce projet de loi peu respectueux des prérogatives du Parlement.
La profusion des habilitations prive nos concitoyens de débats pourtant indispensables pour éclairer leurs jugements.
Ainsi notre rapporteur déplore le contournement du Parlement sur la protection des consommateurs, alors que le délai de transposition courrait jusqu'en juillet 2021. Cela aurait mérité un texte à part pour faire comprendre à nos compatriotes l'intérêt de ces dispositions et du travail du Parlement européen.
Même critique pour la directive Omnibus, que vous transposez partiellement et en la paraphrasant, alors qu'elle devait être transposée avant novembre 2020.
J'aimerais évoquer, avec le même esprit, plusieurs dispositions européennes relatives aux services numériques gratuits comme les réseaux sociaux. Ce sujet aurait mérité un débat approfondi qui aurait permis au Gouvernement d'expliciter sa doctrine sur le sujet. C'est une nécessité politique absolue. Plutôt que de nous demander de voter un texte que le Conseil constitutionnel a censuré dans sa quasi-totalité, la proposition de loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet, il aurait été préférable qu'il organisât un débat sur la transposition de cette directive pour nous exposer sa doctrine sur le statut et les obligations des opérateurs de plateformes numériques gratuites.
Le pernicieux rétablissement de la nullité des clauses interdisant les cessions de créance aboutissait à créer des instruments financiers toxiques qui participent à la spéculation financière.
L'ancien Premier ministre, Édouard Philippe, nous avait déclaré ici qu'il avait besoin du Parlement ; ce texte montre tout le contraire et la méthode choisie est détestable. C'est un danger pour la démocratie et le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera contre.
Mme Colette Mélot . - Nous mesurons, avec la crise sanitaire, l'importance qu'a pris le numérique dans nos vies. La dépendance de la France et de l'Europe aux Gafam nous préoccupe.
Ce texte apporte des protections supplémentaires aux internautes, sujet cher à la présidente Sophie Primas. Le numérique ne doit pas être une zone de non-droit. L'extension de la garantie de conformité au numérique est donc bienvenue.
Le commerce en ligne bénéficie d'une image de liberté, parfois en décalage avec la réalité. La lutte contre le blocage géographique injustifié constitue une avancée. Les discriminations infondées ne doivent pas être tolérées. Les différences d'accès peuvent être justifiées, par exemple par le droit d'auteur, mais le consommateur doit être informé. À cet égard, la proposition de la commission est pertinente. Notre groupe croit aux vertus d'une concurrence loyale et se réjouit de l'accroissement des prérogatives de la DGCCRF et de l'Autorité de la concurrence.
L'Europe est essentiellement un marché, la concurrence doit y être équitable. Nous saluons l'harmonisation des règles en matière de contribution à la production entre les chaînes de télévision et les services de médias audiovisuels à la demande établis à l'étranger mais ciblant notre territoire.
Nous regrettons l'abandon du projet de loi Audiovisuel mais voterons les amendements du Gouvernement transposant les directives SMA et droit d'auteur - il y a urgence !
Le marché intérieur est l'une des principales forces de l'Union européenne. Les Européens sauront faire face aux défis à venir s'ils restent unis et fidèles à leurs principes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants ; M. André Gattolin applaudit également.)
M. Pierre Louault . - La crise sanitaire et certaines mauvaises habitudes du Gouvernement nous contraignent à un examen trop rapide de ce texte.
Je salue le travail constructif des deux rapporteurs et de votre ministère. Sur les vingt-cinq articles que compte le projet de loi, treize sont des demandes d'habilitation ; il n'y aura donc peu ou pas de débat. La commission s'est attachée à contrôler strictement le champ d'application des ordonnances et à inscrire certaines dispositions en dur, tout en se gardant de toute surtransposition.
Certaines dispositions sont votées depuis trois ans ; nous avions le temps de faire mieux !
Le texte prévoit des harmonisations en matière de numérique qui vont dans le bon sens. Il transpose la directive Omnibus qui protège davantage les consommateurs - mais insuffisamment les producteurs.
Le texte étend à de nouveaux services numériques la protection des consommateurs sur les plateformes en matière de services en ligne, pour un développement de l'économie numérique dans des conditions de concurrence satisfaisantes.
Il renforce les pouvoirs de la DGCCRF en matière de contrôle de conformité des produits.
Le volet agricole et sanitaire harmonise les réglementations en matière de génétique animale. Notre pays a le plus grand potentiel génétique animal. La classification des maladies ne reconnaît pas suffisamment le danger sanitaire - dans ce domaine, la réglementation française est plus contraignante. Il est vrai que la peste porcine a pu être contenue grâce à l'efficacité de nos services.
Se pose aussi le problème de la désertification vétérinaire. Le travail de la commission vise à protéger les territoires les plus en difficulté en facilitant l'installation de vétérinaires.
Les dispositions de lutte contre la fraude et le blanchiment étaient attendues depuis longtemps.
Les mesures contre la tromperie sur la matière vendue devraient être appliquées plus strictement en matière agricole, pour mieux reconnaître la qualité alimentaire.
Il n'est pas raisonnable de régler l'utilisation des fonds du Feader par ordonnance. En Allemagne, tout est délégué aux Länder : inspirons-nous-en. La France doit apprendre à gérer la décentralisation de ces fonds, en concertation avec les régions.
Enfin, le Gouvernement a introduit par amendement des articles additionnels transposant par ordonnance la directive SMA et deux directives relatives aux droits d'auteur. En raison du retard pris par le projet de loi Audiovisuel, le Gouvernement a dû recourir à une habilitation. Ces dispositions, attendues par la filière culturelle, méritaient une plus grande concertation.
Le groupe centriste votera ce texte utilement modifié par la commission, notamment en sous-amendant les amendements tardifs du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. Jean-François Rapin . - Monsieur le ministre, qui venez, vous aussi, des Hauts-de-France, je vous souhaite la bienvenue, avec fraternité.
Ce texte technique aborde beaucoup de sujets : protection des consommateurs, adaptation de notre droit bancaire, génétique, médecine vétérinaire...
Je déplore le choix de recourir massivement aux ordonnances : 13 des 25 articles comportent des mesures d'habilitation. Peut-on se passer d'un débat de fond sur des sujets comme l'union bancaire ou l'union des marchés de capitaux ? Que dire de la grande réforme de l'audiovisuel, qui revient par la petite porte ? Les délais de transposition nous imposent de travailler dans l'urgence. Le Parlement paie le prix de cette mauvaise gestion calendaire ; ce n'est pas acceptable.
Ce texte est une voiture-balai législative, sachant que la Commission européenne a mis en demeure la France pour non-respect des délais. Or la procédure des ordonnances est souvent plus longue que le débat parlementaire régulier. Nous devons être prêts pour la présidence française, au premier semestre 2022. Je regrette qu'il faille des menaces de sanction pour respecter nos obligations européennes.
Sur le fond, plusieurs dispositions bienvenues visent à renforcer la solidité du marché intérieur contre les pratiques anticoncurrentielles.
Il améliore la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d'intermédiation en ligne PtoB. Seront réputées déloyales certaines clauses entre un fournisseur et un acheteur de plus grande taille.
Le renforcement des sanctions contre les manquements déclaratifs sur le statut des conteneurs est bienvenu. Il y a un vrai sujet avec les pratiques chinoises. L'Office européen de lutte antifraude estime le préjudice à 135 millions d'euros.
Il fallait renforcer l'Autorité de la concurrence, grâce à la transposition de la directive ECN+ ; elle décidera de l'opportunité des poursuites et pourra cibler ses enquêtes sur les contentieux les plus importants.
Le projet de loi renforce l'obligation déclarative des transports de fonds et améliore la prévention du blanchiment de capitaux.
Il renforce aussi la surveillance des maladies animales ; la crise pandémique doit nous conduire à muscler nos politiques sanitaires.
Notre collègue Leleux, rapporteur pour avis des crédits dédiés à l'audiovisuel public, défendra un sous-amendement sur la directive SMA pour garantir l'équité entre plateformes et acteurs de l'audiovisuel.
Sur le volet économique, la commission a introduit des mesures de soutien à l'installation des vétérinaires en zone rurale, à la main des collectivités.
La commission a aussi supprimé plusieurs habilitations, notamment celle qui porte sur la gestion du Feader. Une telle réforme ne peut se faire hors de tout contrôle parlementaire. Nous craignons que la gestion ne se fasse au détriment des collectivités territoriales.
Nous avons enfin tenu à réduire plusieurs délais d'habilitation.
Le groupe Les Républicains votera ce texte technique, mais j'appelle à un plus grand respect du Parlement et à un plus grand respect des délais dans la transposition des directives. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, LaREM et RDSE, ainsi que sur le banc de la commission)
La séance est suspendue à 20 h 5.
présidence de M. Jean-Marc Gabouty, vice-président
La séance reprend à 21 h 35.
Mise au point au sujet d'un vote
Mme Christine Lavarde. - Lors du scrutin n°133, Mme Catherine André souhaitait voter contre.
M. le président. - Acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.
Échec en CMP
M. le président. - J'informe le Sénat que les commissions mixtes paritaires chargées d'élaborer des textes sur les dispositions restant en discussion des projets de loi organique et ordinaire relatifs à la dette sociale et à l'autonomie ne sont pas parvenues à l'adoption de textes communs.
Adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière (Procédure accélérée - Suite)
Discussion générale (Suite)
Mme Viviane Artigalas . - La transposition de directives européennes dans notre droit ne peut être prise à la légère, malgré sa technicité, et réclame une attention particulière du Parlement.
Je rappelle à mon tour que les conditions de travail sur ce texte, déjà urgent en février dernier lorsqu'il fut présenté en conseil des ministres, ne sont pas satisfaisantes. Il devenait urgent pour la France de n'afficher aucun déficit de transposition, à la veille de la présidence française du Conseil européen à compter du 1er janvier 2022.
Or ces sujets complexes, nécessitant l'avis du Parlement, auraient pu être débattus dès octobre 2018. L'ajout de quatre articles par lettres rectificatives illustre, une fois de plus, un manque de considération du Gouvernement à l'égard du Parlement.
Ce texte, cependant, transpose des dispositions très attendues, comme la protection des consommateurs contre les mauvaises pratiques en ligne, ou l'obligation faite aux plateformes numériques de respecter certaines exigences de transparence et de loyauté.
Les dispositions relatives à la lutte contre le blocage géographique injustifié étaient souhaitables. Il était anormal que subsistent certaines pratiques discriminatoires envers les consommateurs en fonction de leur lieu de résidence ou de connexion.
Pour autant, les États membres ne peuvent faire l'économie d'un véritable plan de régulation du numérique, pour limiter le pouvoir des Gafam et de leurs équivalents chinois. Tel était le sens du rapport de la commission d'enquête du Sénat sur la souveraineté numérique.
Les dispositions sur la zootechnie et la santé animale appellent peu de commentaires, car la marge de manoeuvre est faible et les sujets techniques.
Je salue l'adoption d'un amendement commun de la commission des finances et du groupe socialiste qui supprime l'article 23 sur le Brexit et la moitié de l'article 24 sur la gestion du Feader.
Il est totalement anormal que le Gouvernement entende traiter des compétences des régions par voie d'ordonnances, sans aucune concertation préalable avec ces collectivités. Les régions Occitanie et Nouvelle Aquitaine refusent que l'État récupère les mesures surfaciques à l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) ou les mesures agroenvironnementales et de soutien à l'agriculture biologique. Nous espérons un vrai débat parlementaire sur ce sujet.
En dépit de cela, le groupe socialiste et républicain votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR et sur le banc de la commission)
M. Franck Menonville . - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Indépendants, LaREM et RDSE) L'Union européenne se construit et se consolide souvent en période de crise. L'Union européenne agit aussi au quotidien pour améliorer la vie de nos concitoyens, même si ce n'est pas toujours perceptible.
Ce projet de loi comprend quatorze demandes d'habilitation sur vingt-quatre articles. La commission des finances en a réduit le nombre. Utilisons les ordonnances avec mesure !
Les relations commerciales entre producteurs agricoles, distributeurs et consommateurs restent trop déséquilibrées. Nous avons besoin de règles communes afin d'assurer des relations commerciales saines et équilibrées.
Nous avons besoin d'un cadre juridique sécurisé pour les éleveurs, qui font face à une réglementation sanitaire des plus exigeantes, pour le plus grand bénéfice des consommateurs. Mais harmonisons ! Nous devons aussi garder le dispositif de santé animale, gage de qualité pour nos éleveurs. Les déserts vétérinaires posent problème pour nos territoires ruraux. La crise sanitaire nous a rappelé l'importance de la veille sanitaire.
Le groupe Les Indépendants votera ce texte enrichi des apports des commissions et du débat parlementaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants et sur le banc de la commission)
M. Jean-Pierre Leleux . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La protection de la création audiovisuelle française et de ses auteurs a été introduite dans ce texte, via la transposition de la directive « services de médias audiovisuels » (SMA) du 14 novembre 2018 - qui doit intervenir avant le 19 septembre 2020.
Elle oblige les plateformes à contribuer financièrement à la production audiovisuelle française lorsqu'elle vise le public français.
La directive rompt avec l'asymétrie d'informations entre anciens et nouveaux acteurs de l'audiovisuel, en autorisant le placement de produits par exemple, et renforce le contrôle du CSA sur les plateformes de vidéos à la demande.
Après deux années de vifs débats, l'Union européenne a validé une meilleure rémunération des artistes et éditeurs de presse par les plateformes. C'est techniquement compliqué, dans la mesure où les oeuvres sont téléversées par les utilisateurs des services de partage, et non par les services eux-mêmes, mais la directive européenne, dite « droits d'auteur » du 17 avril 2019, rend les plateformes responsables des contenus publiés et les oblige à rémunérer les ayants droit. Internet doit profiter à tout le monde, et avant tout aux créateurs.
La directive dite « câble-satellite » (CabSat) du 26 mars 2019 franchit une étape supplémentaire en faveur de la modernisation du droit d'auteur en Europe, en facilitant la cession de droits pour les services de radiodiffusion par satellite et de retransmission par câble sur le marché unique de l'Union européenne.
La transposition des ordonnances devrait être assurée par le projet de loi pour une réforme de l'audiovisuel, mais l'examen de celui-ci à l'Assemblée nationale a été brutalement interrompu par la crise du covid-19.
Le groupe Les Républicains n'apprécie pas la multiplication du recours aux ordonnances, d'autant que le Gouvernement est responsable du report continuel de la réforme de l'audiovisuel.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Très bien !
M. Jean-Pierre Leleux. - Il n'était pas facile de trouver un véhicule législatif d'ici la fin du délai de transposition de la directive SMA, le 19 septembre, dans un calendrier déjà très chargé. Cette transposition aidera les auteurs de l'audiovisuel et de la création, qui ont d'autant plus besoin de ce soutien, en raison de la chute de leurs recettes publicitaires notamment, alors que les plateformes ont vu augmenter leur chiffre d'affaires.
La France serait le premier pays européen à transposer ; elle pourrait servir de modèle. Attention à une réforme trop rapide qui ne respecterait pas les équilibres recherchés par le projet de loi Audiovisuel entre les plateformes et les acteurs nationaux !
Lors des auditions du groupe de travail « médias et audiovisuel » de notre commission de la culture, les chaînes françaises ont été déçues par la méthode du Gouvernement.
Les acteurs historiques devaient bénéficier d'assouplissements, reportés à une date ultérieure par votre prédécesseur, madame la ministre. Or les nouvelles productions locales financées par les plateformes renforceront leur attractivité, avec des productions premium sur lesquelles elles auront des droits élargis.
Si la directive SMA est une bonne nouvelle pour les producteurs, elle risque d'augmenter l'écart entre nouveaux et anciens acteurs. Il faut garantir une équité ; je déposerai donc un sous-amendement à l'amendement du Gouvernement relatif à la directive SMA, pour introduire ce principe d'équité. Je salue les échanges constructifs que nous avons eus avec les services du ministère de la Culture sur ce sujet.
Les règles s'appliquant aux acteurs historiques avaient été définies il y a plus de trente ans, dans un univers fermé, sans concurrence internationale. Ce principe d'équité aura également une portée juridique puisqu'il s'imposera au pouvoir réglementaire et devra donc s'appliquer dans les mois à venir.
La position du groupe Les Républicains sera conditionnée à l'adoption de ce sous-amendement. Ce n'est pas seulement l'avenir du secteur, mais aussi celui de l'exception culturelle française, qu'il s'agit de préserver. (Applaudissements sur la plupart des travées, du groupe Les Républicains jusqu'à celles du groupe SOCR, ainsi que sur le banc de la commission)
Mme Catherine Morin-Desailly. - Très bien !
Discussion des articles
L'article premier est adopté.
ARTICLE 2
M. le président. - Amendement n°8, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Supprimer cet article.
M. Pierre Ouzoulias. - J'ai évoqué la directive Omnibus. Les délais de transposition - novembre 2021 - nous auraient permis un plus ample débat...
Cette directive concerne notamment les actions de groupe, qui ne connaissent pas un très fort succès en France.
Pourquoi nous demander de ratifier cette ordonnance dès maintenant ? Ce n'est pas faire justice à la démocratie européenne que de ratifier une telle directive de la sorte, par ordonnance, en catimini. Un débat plein et entier dans l'hémicycle eût été de mise.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Nous avons besoin de transposer cette directive. Mieux vaut le faire maintenant. Ne pas le faire ne protégerait pas correctement le consommateur français. Avis défavorable.
M. Alain Griset, ministre délégué. - Même avis défavorable.
M. Pierre Ouzoulias. - Ma proposition n'est pas de refuser la transposition, mais consacrons-lui un débat parlementaire entier ! Le Gouvernement aurait pu déposer un projet de loi à cette fin...
L'amendement n°8 n'est pas adopté.
L'article 2 est adopté.
L'article 3 est adopté, de même que l'article 4.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. le président. - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mmes Primas et Noël, M. Montaugé, Mme Artigalas, MM. Babary, Buis, Cabanel et Calvet, Mme Chain-Larché, M. Chatillon, Mmes Chauvin, Conconne et Constant, MM. Courteau, Daunis, Decool et Duran, Mme Férat, M. Gremillet, Mme Guillemot, M. Labbé, Mme Lamure, M. D. Laurent, Mmes Létard et Loisier, M. Menonville, Mme Morhet-Richaud, MM. Pierre et Raison, Mmes Rauscent, Saint-Pé, Schillinger et Schoeller, MM. Tissot, Bas, Bascher et Bazin, Mmes Berthet et Billon, M. Bizet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bouchet et Brisson, Mmes Bruguière et Canayer, MM. Canevet, Chaize, Charon et Danesi, Mmes L. Darcos, de la Provôté, Deroche et Deromedi, MM. Détraigne et B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam et Gruny, MM. Husson et Iacovelli, Mme Imbert, MM. P. Joly, Kennel, Kern, Laménie et Laugier, Mme Lavarde, MM. Le Gleut, Longeot, A. Marc, P. Martin et Maurey, Mme Micouleau, M. Milon, Mme Morin-Desailly, MM. Mouiller, Paul et Pellevat, Mmes Puissat, Raimond-Pavero et Ramond, M. Rapin, Mme Richer et MM. Savary, Savin, Schmitz, Vall et Vaspart.
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Le code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Après le 9° de l'article L. 32, il est inséré un 9°... ainsi rédigé :
« 9°... Interopérabilité.
« L'interopérabilité est la capacité que possède un produit ou un système, dont les interfaces sont intégralement connues, à fonctionner avec d'autres produits ou systèmes existants ou futurs et ce, sans restriction d'accès ou de mise en oeuvre. » ;
2° Le titre Ier du livre III est ainsi modifié :
a) Au début, il est ajouté un chapitre Ier intitulé : « Recommandé, identification et coffre-fort électroniques » qui comprend les articles L. 100 à L. 103 ;
b) Sont ajoutés des chapitres II et III ainsi rédigés :
« Chapitre II
« Protection du libre choix de l'utilisateur de terminaux
« Art. L. 104. - Dans le cadre de leurs attributions respectives, le ministre chargé du numérique et l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse prennent, dans des conditions objectives et transparentes, des mesures raisonnables et proportionnées en vue d'atteindre l'objectif de protection de la liberté de choix des utilisateurs d'équipements terminaux, dans les conditions prévues au présent chapitre.
« Art. L. 105. - I. - Est qualifiée de fournisseur de système d'exploitation toute personne qui, à titre professionnel, édite ou adapte le système d'exploitation d'équipements terminaux permettant l'accès à des services de communication au public en ligne ou qui édite ou adapte tout autre logiciel contrôlant l'accès aux fonctionnalités desdits équipements.
« II. - Le fournisseur de système d'exploitation s'assure que les systèmes d'exploitation et les logiciels mentionnés au I du présent article, dont les magasins d'application, proposés à des utilisateurs non professionnels situés sur le territoire français, ne limitent pas de façon injustifiée l'exercice, par les utilisateurs non professionnels de tout équipement terminal au sens du 10° de l'article L. 32, du droit, sur internet, d'accéder aux informations et aux contenus de leur choix et de les diffuser, ainsi que d'utiliser et de fournir des applications et des services.
« Ne sont pas considérées comme limitant de manière injustifiée l'exercice, par les utilisateurs non professionnels, du droit mentionné au premier alinéa du présent II les pratiques qui sont strictement nécessaires à la mise en oeuvre d'obligations législatives ou réglementaires, à la sécurité de l'équipement terminal et des contenus et données gérés par celui-ci, ou au bon fonctionnement de l'équipement terminal et des services disponibles au bénéfice des utilisateurs non professionnels et auxquelles des pratiques moins limitatives du droit énoncé au même premier alinéa ne peuvent se substituer.
« Après consultation des acteurs concernés et du public, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse établit et publie des lignes directrices, recommandations ou référentiels portant sur l'application du présent article.
« Art. L. 106. - Le ministre chargé du numérique et l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peuvent, de manière proportionnée aux besoins liés à l'accomplissement de leurs missions et sur la base d'une décision motivée, recueillir auprès des fournisseurs de système d'exploitation mentionnés au I de l'article L. 105 les informations ou documents nécessaires pour s'assurer du respect, par ces personnes, de l'obligation prévue au II du même article L. 105.
« Art. L. 107. - I. - L'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse encourage la mise à disposition, dans le respect des secrets protégés par la loi, des informations susceptibles de favoriser la liberté de choix des utilisateurs non professionnels d'équipements terminaux. Elle met en place ou accompagne la mise en place par des tiers, dans les conditions prévues au II du présent article, des outils d'évaluation et de comparaison des pratiques mises en oeuvre par les fournisseurs de système d'exploitation mentionnés au I de l'article L. 105.
« II. - Dans le respect des dispositions du présent code et de ses règlements d'application, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse précise les règles concernant les contenus, conditions et modalités de transmission ou de mise à disposition, y compris à des organismes tiers recensés par l'autorité, d'informations fiables relatives aux équipements terminaux et à leurs systèmes d'exploitation, dans la mesure où cela s'avère justifié pour la réalisation de l'objectif mentionné à l'article L. 104.
« Art. L. 108. - I. - En cas de différend entre un utilisateur professionnel et un fournisseur de système d'exploitation sur la mise en oeuvre des obligations prévues à l'article L. 105, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut être saisie par l'une des parties.
« L'autorité se prononce, dans le délai fixé par le décret en Conseil d'État mentionné au deuxième alinéa du I de l'article L. 36-8, après avoir mis les parties à même de présenter leurs observations et, le cas échéant, procédé à des consultations techniques, économiques ou juridiques, ou expertises respectant le secret de l'instruction du litige dans les conditions prévues par le présent code. Les frais engendrés par ces consultations et expertises peuvent être mis à la charge de la partie perdante, sauf si les circonstances particulières du différend justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. Sa décision est motivée et précise les conditions équitables et non discriminatoires, d'ordre technique et financier, dans lesquelles l'exercice du droit mentionné au II de l'article L. 105 par les utilisateurs non professionnels de tout équipement terminal doit être assuré. L'autorité peut, à la demande de la partie qui la saisit, décider que sa décision produira effet à une date antérieure à sa saisine, sans toutefois que cette date puisse être antérieure à la date à laquelle la contestation a été formellement élevée par l'une des parties pour la première fois et, en tout état de cause, sans que cette date soit antérieure de plus de deux ans à sa saisine. Lorsque les faits à l'origine du litige sont susceptibles de restreindre de façon notable l'offre de services de communication audiovisuelle, l'autorité recueille l'avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel qui se prononce dans un délai fixé par le décret en Conseil d'État mentionné au deuxième alinéa du I de l'article L. 36-8.
« L'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut refuser la communication de pièces mettant en jeu le secret des affaires. Ces pièces sont alors retirées du dossier.
« En cas d'atteinte grave et immédiate au droit mentionné au II de l'article L. 105, l'autorité peut, après avoir entendu les parties en cause, ordonner des mesures conservatoires. Ces mesures doivent rester strictement limitées à ce qui est nécessaire pour faire face à l'urgence.
« L'autorité rend publiques ses décisions, sous réserve des secrets protégés par la loi. Elle les notifie aux parties.
« II. - Les décisions prises par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en application du I peuvent faire l'objet d'un recours en annulation ou en réformation dans le délai d'un mois à compter de leur notification.
« Le recours n'est pas suspensif. Toutefois, le sursis à exécution de la décision peut être ordonné, si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou s'il est survenu, postérieurement à sa notification, des faits nouveaux d'une exceptionnelle gravité.
« Les mesures conservatoires prises par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peuvent, au maximum dix jours après leur notification, faire l'objet d'un recours en annulation ou en réformation. Ce recours est jugé dans le délai d'un mois.
« III. - Les recours contre les décisions et mesures conservatoires prises par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en application du présent article sont de la compétence de la cour d'appel de Paris.
« Le président de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut présenter des observations devant la Cour de cassation à l'occasion d'un pourvoi en cassation formé contre un arrêt par lequel la cour d'appel de Paris a statué sur une décision de l'autorité.
« Le pourvoi en cassation formé, le cas échéant, contre l'arrêt de la cour d'appel est exercé dans le délai d'un mois suivant la notification de cet arrêt.
« Art. L. 109. - L'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut, soit d'office, soit à la demande du ministre chargé du numérique, d'une association agréée d'utilisateurs ou d'une personne physique ou morale concernée, sanctionner les manquements qu'elle constate de la part des fournisseurs de système d'exploitation mentionnés au I de l'article L. 105. Ce pouvoir de sanction est exercé dans les conditions prévues au présent article.
« I. - En cas de manquement par un fournisseur de système d'exploitation mentionné au I de l'article L. 105 aux dispositions du présent chapitre au respect desquelles l'autorité a pour mission de veiller ou aux textes et décisions pris en application de ces dispositions, le fournisseur est mis en demeure par l'autorité de s'y conformer dans un délai qu'elle détermine.
« La mise en demeure peut être assortie d'obligations de se conformer à des étapes intermédiaires dans le même délai. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé. L'autorité peut rendre publique cette mise en demeure.
« Lorsque l'autorité estime qu'il existe un risque caractérisé qu'un fournisseur de système d'exploitation mentionné au I de l'article L. 105 ne respecte pas à l'échéance prévue initialement ses obligations résultant des dispositions et prescriptions mentionnées au présent I, elle peut mettre en demeure l'exploitant ou le fournisseur de s'y conformer à cette échéance.
« II. - Lorsqu'un fournisseur de système d'exploitation mentionné au I de l'article L. 105 ne se conforme pas dans les délais fixés à la mise en demeure prévue au I du présent article ou aux obligations intermédiaires dont elle est assortie, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut, après instruction conduite par ses services, notifier les griefs à la personne en cause. Elle transmet alors le dossier d'instruction et la notification des griefs à la formation restreinte.
« III. - Après que la personne en cause a reçu la notification des griefs et a été mise à même de consulter le dossier et de présenter ses observations écrites, et avant de prononcer une sanction, la formation restreinte procède, selon une procédure contradictoire, à l'audition du représentant de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse chargé de l'instruction et de la personne en cause.
« La formation restreinte peut, en outre, entendre toute personne dont l'audition lui paraît utile.
« La formation restreinte peut prononcer à l'encontre du fournisseur de système d'exploitation en cause une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 2 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé par l'entreprise en cause au cours de l'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en oeuvre, taux qui est porté à 4 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante. À défaut d'activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 150 000 €. Ce montant est porté à 375 000 € en cas de nouvelle violation de la même obligation.
« Lorsque le manquement est constitutif d'une infraction pénale, le montant total des sanctions prononcées ne peut excéder le montant de la sanction encourue le plus élevé.
« Lorsque la formation restreinte a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes faits ou des faits connexes, ce dernier peut ordonner que la sanction pécuniaire s'impute sur l'amende qu'il prononce.
« Les conditions d'application du présent III sont déterminées par le décret mentionné à l'article L. 36-11.
« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine.
« IV. - En cas d'atteinte grave et immédiate aux règles mentionnées au premier alinéa du I du présent article, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut ordonner, sans mise en demeure préalable, des mesures conservatoires dont la validité est de trois mois au maximum. Ces mesures peuvent être prorogées pour une nouvelle durée de trois mois au maximum si la mise en oeuvre des procédures d'exécution n'est pas terminée, après avoir donné à la personne concernée la possibilité d'exprimer son point de vue et de proposer des solutions.
« V. - L'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et la formation restreinte ne peuvent être saisies de faits remontant à plus de trois ans, s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction.
« VI. - Les décisions de la formation restreinte sont motivées et notifiées à l'intéressé. Elles peuvent être rendues publiques dans les publications, journaux ou services de communication au public par voie électronique choisis par la formation restreinte, dans un format et pour une durée proportionnés à la sanction infligée. Elles peuvent faire l'objet d'un recours de pleine juridiction et d'une demande de suspension présentée conformément à l'article L. 521-1 du code de justice administrative, devant le Conseil d'État.
« VII. - Lorsqu'un manquement constaté dans le cadre des dispositions du présent article est susceptible d'entraîner un préjudice grave pour une entreprise ou pour l'ensemble du marché, le président de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut demander au président de la section du contentieux du Conseil d'État statuant en référé qu'il soit ordonné à la personne responsable de se conformer aux règles et décisions applicables et de supprimer les effets du manquement ; le juge peut prendre, même d'office, toute mesure conservatoire et prononcer une astreinte pour l'exécution de son ordonnance.
« Chapitre III
« Interopérabilité des plateformes en ligne
« Art. L. 110. - Dans le cadre de leurs attributions respectives, le ministre chargé du numérique et l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse prennent, dans des conditions objectives et transparentes, des mesures raisonnables et proportionnées en vue d'atteindre l'objectif d'interopérabilité des services proposés par les opérateurs de plateformes en ligne au sens de l'article L. 111-7 du code de la consommation, dans les conditions prévues au présent chapitre.
« Art. L. 111. - Lorsque la capacité des utilisateurs non professionnels à accéder à des services proposés par des opérateurs de plateformes en ligne au sens de l'article L. 111-7 du code de la consommation et à communiquer par leur intermédiaire est compromise en raison d'un manque d'interopérabilité des données et des protocoles pour des motifs autres que ceux visant à assurer le respect d'obligations législatives ou réglementaires, la sécurité, l'intégrité ou le bon fonctionnement de tels services, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut imposer, après consultation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, des obligations aux fournisseurs de ces services afin de les rendre interopérables.
« Les obligations mentionnées au premier alinéa du présent article ne peuvent s'appliquer qu'aux opérateurs de plateforme en ligne dont l'activité dépasse un seuil de nombre de connexions défini par décret.
« Elles sont raisonnables et proportionnées. Elles peuvent consister en :
« 1° La publication des informations pertinentes ;
« 2° L'autorisation de l'utilisation, de la modification et de la retransmission de ces informations par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse ou d'autres opérateurs de plateformes en ligne ;
« 3° La mise en oeuvre des standards techniques d'interopérabilité identifiés par l'autorité.
« Les décisions de l'autorité prises en application du présent article font l'objet de la consultation prévue au V de l'article L. 32-1.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État.
« Art. L. 112. - Le ministre chargé du numérique et l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peuvent, de manière proportionnée aux besoins liés à l'accomplissement de leurs missions et sur la base d'une décision motivée, recueillir auprès des opérateurs de plateformes en ligne les informations ou documents nécessaires pour s'assurer du respect, par ces personnes, des obligations édictées en vue d'assurer l'interopérabilité de ces services en application de l'article L. 111.
« Art. L. 113. - L'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut, soit d'office, soit à la demande du ministre chargé du numérique, d'une association agréée d'utilisateurs ou d'une personne physique ou morale concernée, sanctionner les manquements qu'elle constate de la part des opérateurs de plateforme en ligne mentionnés à l'article L. 111. Ce pouvoir de sanction est exercé dans les conditions prévues au présent article.
« I. - En cas de manquement par un opérateur de plateforme en ligne mentionné à l'article L. 111 aux dispositions du présent chapitre au respect desquelles l'autorité a pour mission de veiller ou aux textes et décisions pris en application de ces dispositions, le fournisseur est mis en demeure par l'autorité de s'y conformer dans un délai qu'elle détermine.
« La mise en demeure peut être assortie d'obligations de se conformer à des étapes intermédiaires dans le même délai. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé. L'autorité peut rendre publique cette mise en demeure.
« Lorsque l'autorité estime qu'il existe un risque caractérisé qu'un opérateur de plateforme en ligne mentionné au même article L. 111 ne respecte pas à l'échéance prévue initialement ses obligations résultant des dispositions et prescriptions mentionnées au présent I, elle peut mettre en demeure l'exploitant ou le fournisseur de s'y conformer à cette échéance.
« II. - Lorsqu'un opérateur de plateforme en ligne mentionné à l'article L. 111 ne se conforme pas dans les délais fixés à la mise en demeure prévue au I du présent article ou aux obligations intermédiaires dont elle est assortie, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut, après instruction conduite par ses services, notifier les griefs à la personne en cause. Elle transmet alors le dossier d'instruction et la notification des griefs à la formation restreinte.
« III. - Après que la personne en cause a reçu la notification des griefs, a été mise à même de consulter le dossier et de présenter ses observations écrites, et avant de prononcer une sanction, la formation restreinte procède, selon une procédure contradictoire, à l'audition du représentant de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse chargé de l'instruction et de la personne en cause.
« La formation restreinte peut, en outre, entendre toute personne dont l'audition lui paraît utile.
« La formation restreinte peut prononcer, à l'encontre de l'opérateur de plateforme en ligne en cause pour non-respect des obligations édictées en application de l'article L. 111, une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 2 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé par l'entreprise en cause au cours de l'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en oeuvre, taux qui est porté à 4 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante. À défaut d'activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 150 000 €, porté à 375 000 € en cas de nouvelle violation de la même obligation.
« Lorsque le manquement est constitutif d'une infraction pénale, le montant total des sanctions prononcées ne peut excéder le montant de la sanction encourue le plus élevé.
« Lorsque la formation restreinte a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes faits ou des faits connexes, ce dernier peut ordonner que la sanction pécuniaire s'impute sur l'amende qu'il prononce.
« Les conditions d'application du présent III sont déterminées par le décret mentionné à l'article L. 36-11.
« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine.
« IV. - En cas d'atteinte grave et immédiate aux règles mentionnées au premier alinéa du I du présent article, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut ordonner, sans mise en demeure préalable, des mesures conservatoires dont la validité est de trois mois au maximum. Ces mesures peuvent être prorogées pour une nouvelle durée de trois mois au maximum si la mise en oeuvre des procédures d'exécution n'est pas terminée, après avoir donné à la personne concernée la possibilité d'exprimer son point de vue et de proposer des solutions.
« V. - L'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et la formation restreinte ne peuvent être saisies de faits remontant à plus de trois ans, s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction.
« VI. - Les décisions de la formation restreinte sont motivées et notifiées à l'intéressé. Elles peuvent être rendues publiques dans les publications, journaux ou services de communication au public par voie électronique choisis par la formation restreinte, dans un format et pour une durée proportionnés à la sanction infligée. Elles peuvent faire l'objet d'un recours de pleine juridiction et d'une demande de suspension présentée conformément à l'article L. 521-1 du code de justice administrative, devant le Conseil d'État.
« VII. - Lorsqu'un manquement constaté dans le cadre des dispositions du présent article est susceptible d'entraîner un préjudice grave pour une entreprise ou pour l'ensemble du marché, le président de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut demander au président de la section du contentieux du Conseil d'État statuant en référé qu'il soit ordonné à la personne responsable de se conformer aux règles et décisions applicables et de supprimer les effets du manquement ; le juge peut prendre, même d'office, toute mesure conservatoire et prononcer une astreinte pour l'exécution de son ordonnance. » ;
c) L'article L. 130 est ainsi modifié :
- à la première phrase du cinquième alinéa, la référence : « et L. 36-11 » est remplacée par les références : « , L. 36-11, L. 109 et L. 113 » ;
- le sixième alinéa est ainsi modifié :
i après la référence : « L. 36-8 », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « , des I et II de l'article L. 36-11, de l'article L. 108, et des I et II des articles L. 109 et L. 113. » ;
ii à la dernière phrase, les mots : « de l'article L. 36-11 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 36-11, L. 109 et L. 113 » ;
- le septième alinéa est ainsi modifié :
i à la première phrase, les références : « et des I et II de l'article L. 36-11 » sont remplacées par les références : « , des I et II de l'article L. 36-11, de l'article L. 108 et des I et II des articles L. 109 et L. 113 » ;
ii à la dernière phrase, les mots : « de l'article L. 36-11 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 36-11, L. 109 et L. 113 ».
II. - Le code de commerce est ainsi modifié :
1° Après l'article L. 430-2, il est inséré un article L. 430-2-... ainsi rédigé :
« Art. L. 430-2-.... - I. - L'Autorité de la concurrence fixe une liste des entreprises structurantes.
« Pour déterminer si une entreprise est structurante, l'autorité prend en compte, aux niveaux français et européen ou mondial, plusieurs des indices suivants : sa position dominante sur un ou plusieurs marchés, notamment multifaces, le nombre d'utilisateurs uniques des produits ou services qu'elle propose, son intégration verticale et ses activités sur d'autres marchés connexes, le bénéfice qu'elle retire de l'exploitation d'importants effets de réseaux, sa valorisation financière, son accès à des données essentielles pour l'accès à un marché ou le développement d'une activité, l'importance de ses activités pour l'accès de tiers aux marchés et l'influence qu'elle exerce en conséquence sur les activités des tiers.
« II. - Les entreprises structurantes mentionnées au I du présent article informent l'Autorité de la concurrence de toute opération de concentration au sens de l'article L. 430-1 susceptible d'affecter le marché français dans un délai d'un mois avant sa réalisation.
« III. - Le président de l'Autorité de la concurrence ou un vice-président désigné par lui peut enjoindre à une entreprise systémique mentionnée au I du présent article partie à une opération de concentration de soumettre celle-ci, avant sa réalisation, à la procédure prévue aux articles L. 430-3 à L. 430-10.
« IV. - Lorsque l'Autorité de la concurrence engage un examen approfondi d'une opération notifiée en application du présent article, l'entreprise structurante doit apporter la preuve que l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence. » ;
2° Le dernier alinéa de l'article L. 450-3 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils ont également accès aux principes et méthodes de conception des algorithmes ainsi qu'aux données utilisées par ces algorithmes. »
III. - Le code de la consommation est ainsi modifié :
1° Après l'article L. 111-7-2, il est inséré un article L. 111-7-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 111-7-3. - Les opérateurs de plateforme en ligne s'abstiennent de concevoir, de modifier ou de manipuler une interface utilisateur ayant pour objet ou pour effet de subvertir ou d'altérer l'autonomie du consommateur dans sa prise de décision ou d'obtenir son consentement. » ;
2° Le premier alinéa de l'article L. 131-4 est ainsi modifié :
a) Les mots : « d'information » sont supprimés ;
b) Les mots : « à l'article L. 111-7 et à l'article L. 111-7-2 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 111-7, L. 111-7-2 et L. 111-7-3 » ;
3° L'article L. 512-11 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils ont également accès aux principes et méthodes de conception des algorithmes ainsi qu'aux données utilisées par ces algorithmes. »
IV. - Le présent article entre en vigueur le premier jour du troisième mois suivant sa publication de la présente loi au Journal officiel.
Mme Sophie Primas. - Nous avons déjà longuement débattu de ce point en février dernier lors de l'examen de la proposition de loi visant à garantir le libre choix du consommateur dans le cyberespace.
Il s'agit d'éviter la domination excessive de certaines plateformes. Il y a urgence à trouver un accord au niveau européen. La Commission européenne avance, ayant ouvert au début du mois dernier une consultation, mais ce processus européen sera très long, en raison des divergences entre États membres, bien connues du Gouvernement, et n'entraînera pas l'adoption d'un texte définitif avant 2022 au minimum. Les mesures que nous avons adoptées - régulation des terminaux, interopérabilité des plateformes, lutte contre les interfaces numériques trompeuses notamment - ont été votées à l'unanimité par le Sénat...
M. Pierre Ouzoulias. - Tout à fait !
Mme Sophie Primas. - Forts de l'expérience de l'application StopCovid, le Gouvernement ayant tendance à trop tarder à transposer, ne remettons pas à demain ce que nous pouvons faire dès aujourd'hui : anticipons !
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Avis favorable. Quand le droit français peut inspirer le droit européen, allons-y !
M. Alain Griset, ministre délégué. - Le Gouvernement partage le constat de la nécessité d'une régulation renforcée du numérique. Mais il considère que ce constat appelle une autre réponse. La Commission européenne a pris des initiatives fortes, telles que le Digital Service Act, sous l'impulsion de Thierry Breton et le nouvel outil de concurrence, piloté par Margrethe Vestager.
La France a beaucoup plaidé et agi pour que l'Union européenne se dote de nouveaux leviers à la hauteur des enjeux et des défis de l'économie numérique. Elle continue à travailler très étroitement avec ses partenaires afin que cet objectif soit atteint aussi rapidement que possible. Nous avons besoin d'une Europe plus forte pour protéger les consommateurs. Les nouvelles régulations doivent être définies au niveau européen et non pas au niveau national, en ordre dispersé. Cet amendement interfère avec les initiatives européennes actuelles. Il serait inefficace, car il permettrait aux grands acteurs du numérique de jouer les États les uns contre les autres. Avis défavorable.
Mme Viviane Artigalas. - Cet amendement résulte d'une proposition de loi cosignée par de nombreux sénateurs socialistes, adoptée à l'unanimité en février au Sénat. Ces propositions ont vocation à constituer un dispositif pilote. On ne peut pas attendre indéfiniment que l'Europe se positionne. Il faut agir vite et montrer notre détermination.
Vos arguments sont les mêmes qu'en février. Il faut aller vite.
M. Pierre Ouzoulias. - Cet amendement risquerait de permettre aux opérateurs de mettre en concurrence les États les uns contre les autres, dites-vous, monsieur le ministre. C'est exactement ce qui s'est passé avec StopCovid !
Mme Sophie Primas. - Absolument !
M. Pierre Ouzoulias. - Nous vous proposons une arme contre les Gafam. Dans le cadre de la proposition de loi AVIA - et je salue la décision courageuse du Conseil constitutionnel de ne pas censurer le titre, qui est tout ce qu'il en reste - nous avons déjà eu ce débat.
Même si tactiquement ce n'est pas le lieu d'évoquer des négociations qui se déroulent à l'échelle européenne, dites-nous au moins une fois, monsieur le ministre, au nom du Gouvernement, que vous êtes favorable à l'interopérabilité.
M. Jean Bizet, rapporteur. - En règle générale, l'Europe légifère à son rythme : elle donne souvent les bonnes réponses, mais le temps de l'Europe est le temps long. Si la France peut faire des propositions, elle est dans son droit d'initiative. Il y a un certain parallélisme avec ce qui s'est passé sur la taxation des Gafam, après les « recommandations » de l'OCDE : on y est allé à quelques États...
M. Pierre Ouzoulias. - Tout à fait !
M. Jean Bizet, rapporteur. - Je suis favorable à cet amendement.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Je vous félicite pour votre nomination, monsieur le ministre.
Cosignataire de cet amendement, je souhaite vous convaincre. Nous avons beaucoup travaillé, de longue date, sur la souveraineté numérique et les pouvoirs incommensurables de ces plateformes, constituées en oligopole, qui menacent à terme tout développement de notre économie : rapports de la commission des affaires européennes, proposition de résolution européenne, proposition de loi de David Assouline sur les droits voisins notamment.
Si nous n'anticipons pas, en force de proposition, cela ne bougera pas. Les entreprises auront le temps de vivre et de mourir ! Les règles actuelles de concurrence ne sont pas loyales. Il faut aiguillonner les députés européens. Thierry Breton a pris des initiatives, mais on est encore très loin du compte.
M. Marc Laménie. - Sans être particulièrement spécialiste du sujet, je tiens à souligner que la lecture des neuf pages de cet amendement prouve combien il est important.
Protéger les consommateurs dans un système complexe qui évolue constamment est fondamental. Nombreux sont nos collègues qui ont travaillé, et bien, cette exigence. Cet amendement va dans le bon sens. Je le voterai, bien sûr.
Mme Sophie Primas. - Ne procrastinons pas sur la régulation des plateformes. Le ministre de l'Économie l'a fait d'un point de vue fiscal. On peut le faire maintenant !
Une transposition du règlement Platform to business est prévue à l'article 7 mais elle sera hors délai, le texte sera promulgué après le 12 juillet. On est toujours en retard !
Avec StopCovid, on a commis des erreurs : face aux deux géants, un certain nombre de petites entreprises très innovantes en France avaient des solutions à proposer, que l'on n'a pas réussi à imposer.
La France n'est pas seule : l'Allemagne est actuellement en train de légiférer dans le même sens. Montrons la voie.
M. Alain Griset, ministre délégué. - J'entends bien les différents intervenants. Le Gouvernement souhaite trouver une solution européenne mais il ne faut pas traîner. Et si le temps est trop long, la France prendra, en effet, une décision nationale.
L'amendement n°7 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
ARTICLE 5 (Supprimé)
M. le président. - Amendement n°10, présenté par le Gouvernement.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le livre V du code de la consommation est ainsi modifié :
1° Après l'article L. 521-3, il est inséré un article L. 521-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 521-3-1. - Lorsque les agents habilités constatent, avec les pouvoirs du présent livre, une infraction ou un manquement à partir d'une interface en ligne et que l'auteur de la pratique ne peut être identifié ou qu'il n'a pas déféré à une injonction, prise en application des articles L. 521-1 et L. 521-2, l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut :
« 1° Ordonner aux opérateurs de plateformes en ligne au sens du I de l'article L. 111-7 ou aux personnes dont l'activité est d'offrir un accès à une interface en ligne l'affichage d'un message avertissant les consommateurs du risque de préjudice encouru lorsqu'ils accèdent au contenu manifestement illicite ;
« 2° Lorsque l'infraction constatée est passible d'une peine d'emprisonnement d'au moins deux ans et est de nature à porter une atteinte grave à la loyauté des transactions ou à l'intérêt des consommateurs :
« a) Notifier aux personnes relevant du I de l'article L. 111-7 les adresses électroniques des interfaces en ligne dont les contenus sont manifestement illicites pour qu'elles prennent toute mesure utile destinée à faire cesser leur référencement ;
« b) Notifier aux opérateurs et personnes mentionnés au 1° les adresses électroniques des interfaces en ligne dont les contenus sont manifestement illicites afin qu'ils prennent toute mesure utile destinée à en limiter l'accès ;
« c) Ordonner aux opérateurs de registre ou aux bureaux d'enregistrement de domaines de prendre une mesure de blocage d'un nom de domaine, d'une durée maximale de trois mois renouvelable.
« Ces mesures sont mises en oeuvre dans le délai, fixé par l'autorité administrative, qui ne peut être inférieur à 48 heures.
« Une interface en ligne s'entend de tout logiciel, y compris un site internet, une partie de site internet ou une application, exploité par un professionnel ou pour son compte et permettant aux utilisateurs finals d'accéder aux biens ou aux services qu'il propose. » ;
2° Au dernier alinéa de l'article L. 522-9-1, après les mots : « En l'absence d'accord », sont insérés les mots : « ou en cas de non-respect de celui-ci » ;
3° La section unique du chapitre II du titre III est complétée par une sous-section 3 ainsi rédigée :
« Sous-section 3
« Mesures spécifiques applicables aux contenus illicites en ligne
« Art. L. 532-5. - Le non-respect des mesures ordonnées en application de l'article L. 521-3-1 est puni des peines prévues au 1 du VI de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. »
M. Alain Griset, ministre délégué. - L'article 42 de la loi du 17 juin 2020 comporte pour partie les dispositions contenues dans l'article 5.
Mais cet article ne reprend pas les mesures permettant à l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation, de lutter efficacement contre les contenus illicites en ligne.
Il s'agit ici autant de lutter contre les petits sites internet d'arnaque qui empoisonnent la vie de nos concitoyens, notamment ceux qui se font passer pour des sites d'administrations ou d'entreprises connues, que contre les places de marché qui laissent en ligne des produits présentant des dangers pour la santé ou la sécurité, alimentaire ou non, des consommateurs.
Cet amendement confère à l'autorité administrative le pouvoir d'ordonner aux opérateurs de plateforme en ligne l'affichage d'un message d'avertissement pour alerter les consommateurs. Pour les infractions les plus graves, le déréférencement des sites et le blocage des noms de domaine pourront être ordonnés.
Ces mesures sont proportionnées et graduées. Elles ne seront mises en oeuvre que si aucun autre moyen n'est disponible pour faire cesser le manquement ou l'infraction et que si la pratique constatée est manifestement illicite.
Enfin, dans le cadre d'une procédure de transaction administrative, cet amendement a pour objet de permettre à l'administration de décider d'une sanction administrative à l'encontre d'un professionnel ayant accepté l'amende transactionnelle, mais ne s'acquitte pas de son paiement.
M. le président. - Sous-amendement n°36 à l'amendement n°10 du Gouvernement, présenté par M. Duplomb.
Amendement n° 10
I. - Alinéa 4
Après les mots :
ou un manquement
insérer les mots :
aux dispositions mentionnées aux articles L. 511-5, L. 511-6 et L. 511-7 ainsi qu'aux règles relatives à la conformité et à la sécurité des produits
II. - Alinéa 5
Remplacer les mots :
ou aux personnes dont l'activité est d'offrir un accès à
par les mots :
, aux personnes mentionnées au 1 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique ou à celles exploitant des logiciels permettant d'accéder à
III. - Alinéa 8
Après les mots :
mentionnés au 1°
insérer les mots :
du présent article ou au 2 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique
IV. - Alinéa 12
Remplacer les mots :
non-respect de celui-ci
par les mots :
non-versement au Trésor du montant prévu au deuxième alinéa du présent article
V. - Alinéa 16
Après le mot :
ordonnées
insérer les mots :
ou devant être appliquées aux adresses électroniques notifiées
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Dans la version initiale, le Gouvernement octroyait à la DGCCRF des droits substantiels mais sans garantie. Ce dispositif courait un risque majeur d'inconstitutionnalité. Cet amendement n°10 a tenu compte des remarques du Sénat : les nouveaux pouvoirs de la DGCCRF seront gradués.
Toutefois, la rédaction de cet amendement doit encore être clarifiée. C'est l'objet de mon sous-amendement n°36 qui prévoit que les manquements et infractions visés concernent les règles relatives à la conformité et à la sécurité des produits ainsi que ceux qui portent atteinte aux intérêts économiques des consommateurs.
Les professionnels à qui la DGCCRF pourra ordonner l'affichage d'un message d'avertissement seront les opérateurs de plateforme en ligne, les fournisseurs d'accès internet et les navigateurs. Ceux à qui elle pourra notifier des adresses électroniques afin qu'ils en limitent l'accès seront les fournisseurs d'accès internet, les navigateurs, les opérateurs de plateforme en ligne ainsi que les hébergeurs.
Ce sous-amendement précise que la DGCCRF ne pourra reprendre la procédure de sanction classique que dans le cas où aucun accord n'aurait été conclu ou que l'accord ne prévoyait qu'un versement de somme qui n'a pas eu lieu. Pour les autres cas de figure, les litiges devront être tranchés par le juge administratif.
Avis favorable à l'amendement du Gouvernement ainsi sous-amendé.
M. Alain Griset, ministre délégué. - Avis favorable.
Mme Muriel Jourda. - Je suis surprise de cet amendement gouvernemental. Ce texte a été peu ou prou repris du projet de loi portant diverses dispositions d'urgence. Il avait été rejeté par le Sénat, suivi par l'Assemblée nationale, puisque le rejet avait été maintenu en CMP.
Nous voulons tous une meilleure efficacité de l'administration. Mais il s'agissait de rendre l'administration juge et censeur des contenus sur internet. Or le Conseil constitutionnel a rappelé que le seul censeur est le juge, à l'exception des cas de pédopornographie et de terrorisme. Nous en sommes extrêmement loin !
Je salue la tentative de Laurent Duplomb de sauver cet amendement mais je ne m'explique pas l'insistance du Gouvernement à rétablir ce texte.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Nous ne sommes pas sur la liberté d'expression mais sur la liberté du commerce. C'est très différent ! Avec notre sous-amendement, nous limitons les pouvoirs de la DGCCRF.
Si la pénalité imposée par la DGCCRF n'est pas respectée, rien ne sert de passer devant un juge.
Si l'entreprise n'est in fine pas d'accord avec la DGCCRF, elle peut se retourner vers le juge.
Votons le sous-amendement et l'amendement du Gouvernement.
Le sous-amendement n°36 est adopté.
L'amendement n°10, ainsi sous-amendé, est adopté et l'article 5 est, en conséquence, rétabli.
ARTICLE 6
M. le président. - Amendement n°9, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Alinéa 9
Remplacer les mots :
peuvent être consignées
par les mots :
sont consignées
M. Pierre Ouzoulias. - Défendu.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Avis défavorable.
M. Alain Griset, ministre délégué. - Même avis.
Mme Viviane Artigalas. - Derrière cet amendement, il y a la question des moyens dont la DGCCRF a besoin pour exercer ses missions. Nous voudrions qu'elle puisse conserver des échantillons potentiellement non conformes.
Monsieur le ministre, allez-vous augmenter les moyens de contrôle de la DGCCRF dont les missions sont élargies ?
M. Alain Griset, ministre délégué. - Je suis arrivé depuis 48 heures. J'ai bien entendu votre question, mais je ne peux pas me risquer à vous répondre dans l'instant.
L'amendement n°9 n'est pas adopté.
L'article 6 est adopté.
ARTICLE 7
M. le président. - Amendement n°11, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 1
Remplacer le mot :
sept
par le mot :
neuf
M. Alain Griset, ministre délégué. - Le Gouvernement estime qu'un délai de sept mois est trop court pour transposer cette directive sur les pratiques commerciales abusives dans la chaîne agroalimentaire. Un délai de neuf mois permettrait de respecter l'échéance de transposition prévue, tout en procédant à la large consultation des professionnels à laquelle le Gouvernement s'est engagé.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Avis défavorable. Si nous ne voulons pas être en retard sur la transposition de la directive, nous devons le faire avant mi-octobre, donc sept mois.
L'amendement n°11 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°12, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 2
Supprimer les mots :
, de manière à ce qu'elle soit applicable aux relations entre fournisseurs et acheteurs dans la chaîne d'approvisionnement agricole et alimentaire, sans condition de chiffre d'affaires
M. Alain Griset, ministre délégué. - L'alinéa 2 de cet article habilite le Gouvernement à transposer en droit interne la directive 2019/633 qui constitue une avancée majeure pour l'harmonisation de la loyauté et de la transparence des relations interentreprises en Europe.
De nombreuses pratiques commerciales abusives sont depuis longtemps prohibées en droit français et sont d'ores et déjà applicables à toutes les entreprises, quel que soit leur chiffre d'affaires annuel. Mais certaines d'entre elles ne le sont pas, et doivent donc être transposées.
Cependant, la directive impose une transposition a minima de type « asymétrique » et sectoriel : elle demande de les interdire lorsqu'elles interviennent dans le cadre de la vente de produits agricoles et alimentaires d'un fournisseur avec un acheteur d'une plus grande taille et au chiffre d'affaires plus important.
Votre commission a supprimé la condition de chiffre d'affaires, choisissant ainsi une surtransposition, et un dispositif de type « symétrique ». Cet élargissement devrait pouvoir être différencié en fonction du chiffre d'affaires des opérateurs afin de rendre la réglementation plus pertinente, plus pragmatique et donc plus efficiente.
L'absence de condition de chiffres d'affaires introduit une rigidité dans la transposition qui préempte les conclusions de cette consultation.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Avis défavorable, car sinon nous reviendrions au texte initial. En droit français, le principe de montant de chiffre d'affaires n'existe pas : il n'y a pas de raison de l'ajouter aujourd'hui.
Vous êtes le ministre des PME. Or celles-ci sont malmenées par les centrales de référencement qui permettent d'accéder à une centrale d'achat. Ces centrales de référencement ont un faible chiffre d'affaires et échapperaient aux procédures de concurrence déloyale. Or elles font la pluie et le beau temps !
Sur la loi EGalim, nous voulions des relations commerciales plus équilibrées entre fournisseurs et grande distribution. Contrôlons concrètement les procédures de concurrence déloyale, sans instaurer de critère de chiffre d'affaires. Toutes les entreprises - dont les centrales de référencement - devront ainsi suivre les mêmes règles.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. - J'insiste. Les centrales d'achat permettent de mieux acheter, mais elles permettent aussi de renverser le rapport de force. Il faut bien les cibler. Derrière, il y a des PME. Je ne suis pas opposée à la grande distribution, mais il y a là un déséquilibre dans le rapport des forces.
L'amendement n°12 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°13, présenté par le Gouvernement.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - Le code de commerce est ainsi modifié :
1° L'article L. 442-1 est complété par un III ainsi rédigé :
« III. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne proposant un service d'intermédiation en ligne au sens du règlement (UE) 2019/1150 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 promouvant l'équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d'intermédiation en ligne, de ne pas respecter les obligations expressément prévues par ce règlement.
« Toute clause ou pratique non expressément visée par ce règlement est régie par les autres dispositions du présent titre. » ;
2° L'article L. 470-1 est ainsi modifié :
a) Le I est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans les mêmes conditions, ils peuvent enjoindre à tout professionnel de se conformer aux dispositions du règlement (UE) 2019/1150 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 promouvant l'équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d'intermédiation en ligne, ainsi que lui enjoindre de cesser tout agissement ou de supprimer toute clause contraire à ces dispositions. » ;
b) Il est ajouté un III ainsi rédigé :
« III. - 1° Lorsque l'injonction est notifiée à raison d'un manquement passible d'une amende civile, les agents mentionnés au I peuvent assortir leur mesure d'une astreinte journalière ne pouvant excéder un montant de 0,1 % du chiffre d'affaires inscrit au compte de résultat du dernier exercice clos.
« Dans ce cas, l'injonction précise les modalités d'application de l'astreinte encourue, notamment sa date d'applicabilité, sa durée et son montant. Le montant de l'astreinte est proportionné à la gravité des manquements constatés et tient compte notamment de l'importance du trouble causé.
« L'astreinte journalière court à compter du jour suivant l'expiration du délai imparti au professionnel pour se mettre en conformité avec la mesure d'injonction notifiée.
« En cas d'inexécution, totale ou partielle, ou d'exécution tardive, l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation procède, dans les conditions du IV de l'article L. 470-2, à la liquidation de l'astreinte. Toutefois, le total des sommes demandées au titre de la liquidation de l'astreinte ne peut être supérieur à 1 % du chiffre d'affaires inscrit au compte de résultat du dernier exercice clos.
« La décision prononçant la mesure d'injonction et celle prononçant la liquidation de l'astreinte journalière sont motivées. Elles sont susceptibles d'un recours de pleine juridiction et peuvent faire l'objet d'un référé suspension dans les conditions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative.
« 2° L'injonction mentionnée au premier alinéa du 1° peut faire l'objet, en cas d'inexécution totale, partielle, ou d'exécution tardive, d'une mesure de publicité sur le site internet de l'autorité administrative en charge de la concurrence et de la consommation et, aux frais de la personne sanctionnée, sur un support habilité à recevoir des annonces légales que cette dernière aura choisi dans le département où elle est domiciliée. La décision peut en outre être publiée, à ses frais, sur d'autres supports.
« Dans ce cas, le professionnel est informé, lors de la procédure contradictoire préalable au prononcé de l'injonction, de la nature et des modalités de la mesure de publicité encourue. »
M. Alain Griset, ministre délégué. - Le règlement européen PtoB entre en vigueur le 12 juillet 2020. L'habilitation n'étant plus adaptée, le Gouvernement vous propose donc cet amendement.
M. le président. - Sous-amendement n°34 à l'amendement n°13 du Gouvernement, présenté par M. Duplomb.
Amendement n° 13, alinéas 9 et 12, seconde phrase
Remplacer les mots :
inscrit au compte de résultat du dernier exercice clos
par les mots et une phrase ainsi rédigée :
mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Avis favorable, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n°34. En matière d'astreinte, la pratique est d'appliquer 0,1 % du chiffre d'affaires annuel par jour, dans la limite de 1 % du chiffre d'affaires total. Il convient de prévoir que le 1 % du chiffre d'affaires retenu est celui du groupe auquel appartient l'entreprise. Sinon, en cas de petite filiale, cette mesure serait très peu dissuasive.
M. Alain Griset, ministre délégué. - Avis favorable.
Le sous-amendement n°34 est adopté.
L'amendement n°13, sous-amendé, est adopté.
L'article 7, modifié, est adopté.
L'amendement n°4 n'est pas défendu.
L'article 8 est adopté, de même que les articles 9, 10, 11, 12 et 13.
ARTICLE 14
M. le président. - Amendement n°27, présenté par M. Bizet, au nom de la commission des finances.
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
III. - Au deuxième et au dernier alinéa de l'article L. 532-20-1 du code monétaire et financier, le mot : « sous-section » est remplacé par le mot : « section ».
IV. - Les dispositions prévues au III ont un caractère interprétatif.
M. Jean Bizet, rapporteur. - Cet amendement de clarification corrige une erreur de référence afin d'éviter toute confusion sur les compétences de l'Autorité des marchés financiers (AMF).
M. Alain Griset, ministre délégué. - Avis favorable.
L'amendement n°27 est adopté.
L'article 14, modifié, est adopté.
ARTICLE 15
M. le président. - Amendement n°14, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
1° À la première phrase, les mots : « dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi » sont remplacés par les mots : « d'ici au 28 décembre 2020 » ;
M. Alain Griset, ministre délégué. - La commission des finances du Sénat a amendé l'article 15 en modifiant la durée de l'habilitation. Le Conseil d'État risque de ne pas pouvoir examiner les textes qui viennent de lui être transmis dans les délais.
Le délai de dix-huit mois prenant pour référence la date de la loi Pacte, soit le 22 mai 2019, ferait tomber l'habilitation à légiférer par ordonnance le 22 novembre 2020, soit plus d'un mois avant le délai fixé pour la transposition. Il est donc proposé de fixer le délai d'habilitation au 28 décembre 2020.
M. Jean Bizet, rapporteur. - Avis favorable. La durée est remplacée par une date limite.
L'amendement n°14 est adopté.
L'article 15, modifié, est adopté.
ARTICLE 16
M. le président. - Amendement n°5, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Supprimer cet article.
M. Pierre Ouzoulias. - Par cet amendement, nous refusons le rétablissement de la nullité des clauses interdisant les cessions de créance. Cette interdiction a été supprimée en 2019.
La cession de créance, ou « titrisation », consiste au transfert de créances à des investisseurs, en transformant donc une créance en des titres négociables.
Les cessions de créance ont été l'un des instruments financiers toxiques de la crise des subprimes de 2007-2008. Pourquoi rétablir cette disposition ? Nous avons besoin d'explications.
M. Jean Bizet, rapporteur. - La titrisation n'a pas bonne presse, mais c'est un concept pertinent. En 2008, le substrat n'était pas convenable.
L'amendement priverait certaines entreprises de financement, car 239 milliards d'euros ont été octroyés par les sociétés d'affacturage en 2019. Avis défavorable.
M. Alain Griset, ministre délégué. - Même avis défavorable.
L'amendement n°5 n'est pas adopté.
L'article 16 est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°28, présenté par M. Bizet, au nom de la commission des finances.
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La seconde phrase du second alinéa de l'article L. 451-1-6 du code monétaire et financier est supprimée.
M. Jean Bizet, rapporteur. - Cet amendement de clarification abroge une base légale issue de la précédente loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière qui n'est plus nécessaire.
Pour autant, cette absence de mesure d'application n'empêche pas la Direction de l'information légale et administrative (DILA) d'assurer ces missions. Cet amendement contribue à l'amélioration de la qualité du droit en abrogeant des dispositions inutiles.
M. Alain Griset, ministre délégué. - Avis favorable.
L'amendement n°28 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°29, présenté par M. Bizet, au nom de la commission des finances.
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article L. 211-5-1 du code des assurances, il est inséré un article L. 211-5-... ainsi rédigé :
« Art. L. 211-5-.... - Sont nulles les clauses par lesquelles l'assureur interdit à l'assuré, en cas de dommage garanti par un contrat d'assurance souscrit au titre de l'article L. 211-1, la cession à des tiers des créances d'indemnité d'assurance qu'il détient sur lui. »
II. - Les dispositions prévues au I sont applicables aux contrats en cours.
M. Jean Bizet, rapporteur. - Cet amendement est d'équité.
Dans les contrats d'assurance automobile, la possibilité pour l'assureur d'interdire à l'assuré de céder à des tiers les créances d'indemnité d'assurance est de nature à faire obstacle au libre choix du réparateur, désormais garanti par la loi.
Cette interdiction oblige les assurés à avancer le coût des réparations lorsqu'ils font appel à un réparateur non agréé par l'assureur. Cette avance représente une contrainte importante pour ces derniers et les incite à s'orienter vers les réparateurs agréés par leur assureur, qui bénéficient d'un système de tiers payant.
Cet amendement déclare nulles les clauses interdisant la cession de créances à des tiers. Cela permettrait aux réparateurs non agréés de dispenser les assurés de l'avance des frais, créant ainsi une juste concurrence au bénéfice du consommateur.
M. Alain Griset, ministre délégué. - Avis favorable. Cette disposition est très demandée par les professionnels concernés.
M. Jean Bizet, rapporteur. - Nous l'avons fait pour vous ! (Sourires)
L'amendement n°29 est adopté et devient un article additionnel.
ARTICLE 17
M. Patrice Joly . - J'attire votre attention sur le régime temporaire des aides d'État en Europe depuis la crise du covid-19.
La Commission européenne a adopté un cadre temporaire en matière d'aides d'État, afin de permettre aux États de soutenir l'économie européenne. Cela a permis aux États membres dès la mi-mars de mettre en place des avantages fiscaux à hauteur de 500 000 euros par entreprise, de garantir des prêts bancaires, ou de subventionner les taux d'intérêt de ces emprunts.
Trois mois après, nous en tirons plusieurs enseignements : cet outil réactif et flexible a été très utile. La Commission européenne en a fait un outil politique, doté de 1 900 milliards d'euros. Plus de 158 dossiers ont été déposés par les États membres et validés pour la recherche contre le virus ou des aides aux compagnies aériennes.
La France a d'ailleurs largement bénéficié de ce régime temporaire. D'abord destiné à faire face aux besoins en liquidités des entreprises, le régime temporaire a rapidement évolué pour faire face aux besoins en capital avec l'autorisation de prises de participations temporaires par les États dans des conditions strictes.
Le livre blanc du 17 juin renforçant la réglementation européenne sur les investissements étrangers protègera mieux les entreprises européennes de participations étrangères soutenues par des subventions publiques massives.
Mais attention au risque de distorsion de compétitivité entre les États membres de la zone euro car 51 % des montants ont bénéficié aux entreprises allemandes, 17 % aux entreprises françaises, 15 % aux italiennes... Il faut remédier à ces distorsions, et adopter cet outil pour une politique concurrentielle ne créant pas des préjudices à certains.
L'article 17 est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. le président. - Amendement n°1 rectifié bis, présenté par Mme N. Goulet, MM. Karoutchi, Guerriau, Houpert et Henno, Mme Gatel, M. Menonville, Mmes Billon, de la Provôté, N. Delattre, Sollogoub et Morin-Desailly, MM. Cazabonne, Bonhomme et Vogel et Mmes Kauffmann, Bonfanti-Dossat et Dindar.
Après l'article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 4° du I de l'article 1649 AE du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après les mots : « code pénal », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « notifie à tout autre intermédiaire l'obligation déclarative qui lui incombe. » ;
2° Le deuxième alinéa est supprimé.
M. Franck Menonville. - Défendu.
M. Jean Bizet, rapporteur. - Cet amendement porte sur les obligations de déclarations des dispositifs fiscaux transfrontaliers, introduites par la directive DAC6 et transposée en droit français par l'ordonnance du 21 octobre 2019 et dont l'entrée en vigueur va être décalée par le projet de loi de finance rectificative en cours d'examen.
Les intermédiaires fiscaux doivent déclarer à l'administration d'un État membre les dispositifs transfrontières potentiellement agressifs. La directive permet d'aménager cette obligation pour les intermédiaires couverts par le secret professionnel. En France, l'intermédiaire doit solliciter du contribuable l'autorisation de transmettre les informations à l'administration fiscale. Cet amendement propose de supprimer cette première étape en faisant du contribuable le seul responsable de l'obligation de transmission.
Mais les informations pourraient ne pas être correctement transmises et les risques pour le respect du secret professionnel doivent être nuancés.
Ce dispositif concerne la phase préjudiciaire et respecte suffisamment le secret professionnel des avocats. Il est équilibré.
Nous avons eu un débat en commission des finances. Mme Goulet voulait un filtre préalable, or celui du bâtonnier ne nous a pas semblé pertinent.
Quelles sont les raisons du choix de la France ? Avis défavorable cependant.
M. Alain Griset, ministre délégué. - Avis défavorable.
L'amendement n°1 rectifié bis n'est pas adopté.
ARTICLE 18
M. le président. - Amendement n°15, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 1
Remplacer le mot :
trois
par le mot :
cinq
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. - Cet amendement sur le règlement européen d'harmonisation des pratiques génétiques animales négocie le temps nécessaire pour la finalisation de l'habilitation. Nous avions proposé six mois ; la commission trois mois. Par consensus, nous proposons cinq mois. (Sourires)
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Avis favorable. (On s'en réjouit sur diverses travées.) Il est important que les décrets soient pris en même temps que l'ordonnance.
L'amendement n°15 est adopté.
L'article 18, modifié, est adopté.
ARTICLE 19
M. le président. - Amendement n°16, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 2
Remplacer les mots :
visant à lutter contre des maladies d'intérêt national mais non répertoriées ou considérées comme émergentes par le règlement européen,
par les mots :
nationales de prévention, de surveillance et de lutte contre des maladies d'intérêt national répertoriées ou non par le règlement européen
II. - Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° De modifier les règles relatives à la responsabilité des personnes autres que l'État dans la surveillance, la prévention et la lutte contre les maladies animales transmissibles, ainsi que les règles d'organisation de l'enregistrement des exploitations, de l'identification et de la traçabilité des animaux, pour les adapter aux évolutions induites par le règlement et les actes de l'Union européenne mentionnés au 1° ;
M. Julien Denormandie, ministre. - Cet amendement poursuit l'excellent travail de la commission sur l'harmonisation européenne des pratiques sanitaires et sur la transposition du règlement.
Le Gouvernement veut finaliser, par cet amendement, la rédaction, et donne la possibilité de traduire par voie législative avant le 21 avril 2021 les conclusions de la concertation des acteurs en matière d'organisation de la prévention et de la lutte sanitaire. Il faut donner le temps à la négociation de se dérouler.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Avis favorable. Nous sommes d'accord sur une rédaction commune, qui garantit la sécurité sanitaire en précisant le champ d'habilitation. Je remercie vos services de nous avoir permis de trouver un modus vivendi.
L'amendement n°16 est adopté.
L'article 19, modifié, est adopté.
L'article 20 est adopté.
ARTICLE 21
M. le président. - Amendement n°17, présenté par le Gouvernement.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - L'ordonnance n°2020-115 du 12 février 2020 renforçant le dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme du 12 février 2020 est ratifiée.
M. Alain Griset, ministre délégué. - L'ordonnance 2020-115 constitue une des principales mesures nationales prise pour la transposition de la cinquième directive européenne anti-blanchiment. C'est une priorité.
Cette ordonnance a également renforcé notre cadre national pour lutter plus efficacement contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. C'est une priorité absolue du Gouvernement.
La ratification de cette ordonnance permettra de conforter la solidité de notre action.
M. Jean Bizet, rapporteur. - Avis favorable.
L'amendement n°17 est adopté.
L'article 21, modifié, est adopté.
L'article 22 est adopté, ainsi que les articles 22 bis et 22 ter.
ARTICLE 22 QUATER
M. le président. - Amendement n°18, présenté par le Gouvernement.
Au début, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.... - Le chapitre unique du titre I du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un article L. 1511-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 1511-9. - I. - Les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent attribuer des aides aux vétérinaires contribuant à la protection de la santé publique et assurant la continuité et la permanence des soins aux animaux d'élevage dans les zones définies à l'article L. 241-13 du code rural et de la pêche maritime. À cette fin, des conventions, pouvant prévoir une obligation d'installation ou de maintien dans la zone précitée, sont passées entre les collectivités ou les groupements qui attribuent l'aide et les vétérinaires ou leurs sociétés d'exercice intéressés. Les conventions signées sont transmises par les collectivités et groupements concernés au représentant de l'État dans le département et au conseil régional de l'ordre des vétérinaires compétent. La nature, les conditions d'attribution de ces aides et leur montant maximal sont fixés par décret en Conseil d'État.
« II. - Une indemnité d'étude et de projet professionnel vétérinaire peut être attribuée par les collectivités territoriales ou leurs groupements à tout étudiant régulièrement inscrit dans des études conduisant à la délivrance d'un diplôme ou d'un titre de formation vétérinaire mentionné au 1° de l'article L. 241-2 du code rural et de la pêche maritime, s'il s'engage à exercer en tant que vétérinaire dans l'une des zones définies à l'article L. 241-13 du même code en contribuant à la protection de la santé publique et en assurant la continuité et la permanence des soins aux animaux d'élevage pendant au moins cinq années consécutives. Pour bénéficier de cette aide, l'étudiant signe un contrat avec la collectivité qui attribue l'aide. Ce contrat peut prévoir une obligation d'installation dans la zone précitée.
« Les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent également accorder des indemnités de logement et de déplacement aux élèves et aux étudiants mentionnés au 2° de l'article L. 243-3 du code rural et de la pêche maritime lorsqu'ils effectuent leurs stages, comprenant des mises en situation professionnelle de soins aux animaux d'élevage, dans les zones définies à l'article L. 241-13 du même code.
« Les conditions générales d'attribution de ces deux indemnités, leurs montants maximaux ainsi que, le cas échéant, les modalités de leur remboursement total ou partiel et de leur réévaluation sont déterminés par décret. »
M. Julien Denormandie, ministre. - Cet amendement est très important car il permet de lutter contre la désertification vétérinaire qui est un vrai sujet sur nos territoires. Nous devions d'abord évaluer la situation. Il fallait ensuite permettre aux collectivités et leurs groupements qui le souhaitaient d'aider à l'installation des vétérinaires. Cet amendement complète l'amendement n°39 de la commission. Il permet aux collectivités et à leurs groupements de distribuer des aides ainsi que des indemnités d'études et de projet professionnel.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - L'avis de la commission est très favorable. La commission n'a pu en prendre l'initiative car nous étions menacés par l'article 40 de la Constitution.
Je me félicite du travail mené avec vos équipes, avec les vétérinaires et avec les collectivités territoriales. Les déserts vétérinaires se multiplient. L'atlas démographique de l'Ordre des vétérinaires permettra de classer les territoires : 40 départements sont touchés. Si nous ne faisons rien, l'élevage sera pénalisé. À chaque fois que le nombre de vétérinaires diminue, ceux qui restent passent de plus en plus de temps dans leur véhicule et l'équilibre financier de leur cabinet en est menacé.
Il s'agit d'une immense avancée qui règlera plusieurs problèmes : sécurité sanitaire, aménagement du territoire et désertification agricole.
M. Jean Bizet, rapporteur. - Je salue également cet amendement, dans le droit fil des propos de Laurent Duplomb.
Cet amendement est fondamental pour rééquilibrer certains territoires. Des zoonoses peuvent devenir dramatiques, en témoigne la situation actuelle. Le futur Brexit est encore d'une nature incertaine, même M. Barnier ne la connaît pas.
J'étais rapporteur de la mission d'enquête sur l'ESB il y a une vingtaine d'années. Or nous avions découvert, à l'époque, l'état du réseau sanitaire vétérinaire anglais, et celui-ci n'a malheureusement pas progressé... Des agents des collectivités territoriales faisaient office de vétérinaires. Si demain le Brexit se révèle délicat, nous risquons de recevoir des animaux pas suffisamment surveillés.
Enfin, la qualité de l'agroalimentaire français repose sur la qualité sanitaire des produits et donc de nos services vétérinaires. Merci encore, monsieur le ministre.
M. Marc Laménie. - Je salue cet amendement. Il démontre le soutien à l'élevage, au monde agricole et, de façon plus large, à l'économie.
Les collectivités territoriales et leurs groupements pourront intervenir : ce seront probablement les EPCI et les régions puisqu'elles ont la compétence économique. Les conseils départementaux pourront-ils aussi participer ?
M. Julien Denormandie, ministre. - Toute collectivité pourra intervenir : je vous le confirme.
L'amendement n°18 est adopté.
L'article 22 quater, modifié, est adopté.
L'article 23 demeure supprimé.
ARTICLE 24
M. David Assouline . - Ce soir, il y a un paradoxe sur cette question. Pendant des années, les amoureux de la culture - la France en tête - se sont battus au niveau européen pour avoir une directive SMA et une autre pour les droits d'auteur. Nous avions face à nous des lobbies avec la puissance d'États. Nous avons gagné en 2018 pour la directive SMA et en 2019 pour la directive sur les droits d'auteur.
Ce débat est nécessaire, même s'il est frustrant. Il doit être partagé et précisé ; il est attendu. Le monde de la culture et de la création a besoin du soutien de la représentation parlementaire. Pour une fois, je vais accepter avec mon groupe que ces dispositions passent par ordonnance, car certains dans le monde de la création sont au bord du gouffre. La pandémie a frappé le monde de la culture. Seules les plateformes ont fait de gigantesques profits durant le confinement : elles doivent participer à l'effort de redressement et de financement.
Mme Catherine Morin-Desailly . - Nous légiférons de manière exceptionnelle ce soir. Jean-Pierre Leleux s'est très bien exprimé en discussion générale à ce sujet. La commission de la culture n'a pas été saisie au fond comme elle aurait dû l'être, en raison de la crise du covid-19.
Nous envisageons l'hypothèse d'une ordonnance, mais sous certaines conditions. Je tiens à remercier Franck Riester qui nous a transmis le projet de texte de l'ordonnance et ses amendements. Nous serons très vigilants sur la mise en oeuvre de ces dispositions.
Il faudra une très forte volonté européenne de continuer à faire évoluer ces dossiers avec notamment la directive e-commerce qui reste à promouvoir.
M. le président. - Nous allons revenir à l'article 24 qui traite du monde agricole. (Sourires)
Amendement n°19, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 2
Rétablir le II dans la rédaction suivante :
II. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi, les dispositions législatives nécessaires pour modifier, en ce qui concerne le Fonds européen agricole pour le développement rural, les articles 78 et suivants de la loi n°2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles afin :
1° D'assurer, au titre de la programmation suivant celle qui a débuté en 2014, leur conformité avec le droit de l'Union européenne relatif à la politique agricole commune ;
2° De prévoir, au titre de la même programmation, les conditions dans lesquelles, d'une part, l'État est chargé des aides surfaciques et des aides assimilées du Fonds européen agricole pour le développement rural et, d'autre part, les régions ou, dans les régions d'outre-mer, lorsque celles-ci décident d'y renoncer, les départements, peuvent être chargés des aides non-surfaciques, en précisant notamment la répartition des compétences, les transferts de services et de moyens en résultant et les modalités d'instruction des demandes et de paiement des aides ;
3° De prévoir les adaptations justifiées par la situation spécifique de la Corse.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.
M. Julien Denormandie, ministre. - Je ne vais pas répondre sur la culture même si cette dernière et l'agriculture forment deux grands pans de notre identité nationale.
Cet amendement modifie une loi chère au coeur du Sénat, la loi Maptam et notamment son article 78 relatif aux modalités de gestion du Feader : la répartition des compétences entre l'État et les régions pour instruire et gérer ces fonds pose problème. Nous devons clarifier les choses. C'est facile à dire, plus compliqué à faire.
Nous avons travaillé avec les organisations professionnelles et les associations d'élus, et notamment l'Association des régions de France (ARF), sur les aides surfaciques et non surfaciques. Ainsi, les aides à l'installation sont des aides non surfaciques.
Le Gouvernement propose une répartition, rejetée par la commission, mais le Gouvernement vous propose par cohérence de la réintroduire.
M. Jean Bizet, rapporteur. - La commission a supprimé l'habilitation demandée par le Gouvernement. Un débat sur le sujet est indispensable. Cette question ne peut pas être traitée par ordonnance.
Je sais que je vous complique la vie. Ces mesures ne sont pas neutres financièrement, il s'agit de 1 640 millions d'euros dont 70 % sont des mesures surfaciques, donc reviendraient à l'État, alors que le Premier ministre prône le respect des collectivités territoriales.
Il s'agit plus d'un point de forme que de fond. Certaines régions - Normandie, Nouvelle Aquitaine, Bretagne - ne sont pas d'accord avec le portage et le partage. Il faut remettre ce sujet sur le métier et trouver un véhicule législatif. Avis défavorable.
Mme Viviane Artigalas. - Je rejoins ce que dit le rapporteur de la commission des finances. On ne peut pas traiter ainsi ce sujet aussi important, car des régions sont en désaccord.
M. Pierre Ouzoulias. - L'ordonnance n'est pas un outil technique neutre : c'est un acte fort par lequel vous confisquez notre pouvoir législatif pour l'associer au pouvoir exécutif. D'autant plus que la récente décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2020 donne une importance renforcée aux ordonnances en faisant remonter le contentieux au Conseil constitutionnel plutôt qu'au Conseil d'État.
Tous vos arguments nous poussent à vous refuser l'habilitation : vous dites que ces mesures sont compliquées, qu'il vous faut du temps et qu'il n'y a pas de consensus.
Comme la procédure accélérée qui est devenue systématique, les ordonnances ne doivent pas elles aussi le devenir. Après le taux d'abstention record que nous avons connu pour les municipales, c'est un souci démocratique constant des élus que de pouvoir expliquer aux citoyens la loi qu'ils votent.
M. Pierre Louault. - On ne peut pas laisser le Gouvernement décider seul. Si les régions ne participent pas au financement de Natura 2000, c'est l'État qui sera pénalisé. L'État ne peut pas décider seul de ce qui sera délégué, ou non, aux régions. Les élus locaux et la profession agricole ont leur mot à dire.
L'amendement n°19 n'est pas adopté.
L'article 24 est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture . - C'est ma première prise de parole en tant que ministre de la Culture devant votre auguste assemblée.
Franck Riester a porté un projet de loi ambitieux, relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère du numérique. Ce projet de loi a été examiné par les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat, mais le covid a interrompu les travaux. Il n'a pas été retiré de l'ordre du jour de l'Assemblée nationale mais le calendrier de l'examen de ce texte est incertain, alors qu'il comprend des dispositions urgentes comme la directive SMA et les deux directives sur les droits d'auteur et droits voisins.
Il ne s'agit pas seulement de dispositions techniques. Très attendue par les professionnels du secteur, la directive SMA assujettit les plateformes étrangères à l'obligation de financement de la production audiovisuelle et cinématographique. Pendant le confinement, ces plateformes ont constaté une forte croissance de leurs revenus, tandis que les chaînes de télévision subissaient les conséquences de la chute du marché publicitaire.
La directive sur les droits d'auteur protège les droits de propriété intellectuelle des auteurs et artistes sur les plateformes de partage de contenus.
Je sais que la transposition par voie d'ordonnance ne vous plaît pas ; à moi non plus, car les débats sur l'audiovisuel sont toujours nourris et passionnés. (Mme Catherine Morin-Desailly approuve.) Il y a un aspect technique et politique. Nous ne vous demandons pas un chèque en blanc : vous connaissez le texte issu des débats en commission à l'Assemblée nationale, je m'engage à ce que l'ordonnance respecte les équilibres nés de la discussion.
Pour le reste des dispositions du projet de loi initial, les arbitrages ne sont pas encore rendus, j'aurai une discussion avec le Premier ministre.
Cette transposition rapide par ordonnance est nécessaire pour les professionnels et le soutien à la création. Je sais que vous partagez cet avis. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et Les Indépendants ; M. Pierre Louault et Mme Catherine Morin-Desailly applaudissent également.)
M. le président. - Amendement n°23 rectifié, présenté par le Gouvernement.
Après l'article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances toute mesure de nature législative visant à :
a) Modifier les dispositions du code de la propriété intellectuelle en vue de transposer en droit français les dispositions de la directive 2019/790 du Parlement européen et du Conseil sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE autres que celles qui sont mentionnées aux articles 2-6 et 17 à 23 et celles qui ont été transposées par la loi n°2019-775 du 24 juillet 2019 tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse, et en procédant dans ce code aux mesures d'adaptation et aux mises en cohérence et corrections matérielles, légistiques et rédactionnelles rendues nécessaires par la directive ;
b) Modifier les dispositions du code de la propriété intellectuelle en vue de transposer en droit français les articles 2-6 et 17 à 23 de la directive 2019/790 du Parlement européen et du Conseil sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE et en procédant dans ce code aux mesures d'adaptation et aux mises en cohérence et corrections matérielles, légistiques et rédactionnelles rendues nécessaires par la directive ;
c) Modifier les dispositions du code de la propriété intellectuelle en vue de transposer en droit français les dispositions de la directive 2019/789 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 établissant des règles sur l'exercice du droit d'auteur et des droits voisins applicables à certaines transmissions en ligne d'organismes de radiodiffusion et retransmissions de programmes de télévision et de radio, et modifiant la directive 93/83/CEE du Conseil et en procédant dans ce code aux mesures d'adaptation et aux mises en cohérence et corrections matérielles, légistiques et rédactionnelles rendues nécessaires par la directive.
II. - Les ordonnances prévues au a et au c du I sont prises dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la présente loi.
L'ordonnance prévue au b du I est prise dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi.
III. - Pour chaque ordonnance prévue au I, un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de quatre mois à compter de la publication de l'ordonnance.
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - La France s'est beaucoup investie dans la négociation des deux directives de 2019 relatives aux droits d'auteur et aux droits voisins, qui doivent être transposées avant le 7 juin 2021.
La première renforce la capacité des titulaires de droits d'auteur à être rémunérés quand une plateforme de partage de contenu utilise leurs oeuvres. La deuxième affirme que les chaînes de télévision et les distributeurs sont solidairement responsables de la rémunération des auteurs dans le cadre de l'injection directe. Une transposition rapide est primordiale pour les créateurs, dont la rémunération a été impactée par la crise sanitaire.
M. le président. - Sous-amendement n°26 rectifié bis à l'amendement n°23 rectifié du Gouvernement, présenté par Mme L. Darcos, MM. D. Laurent, Calvet, del Picchia, Piednoir, Cambon, Lefèvre et Kennel, Mmes Deromedi et Bruguière, M. Savin, Mme Lassarade, M. Charon, Mme Dumas, M. Savary, Mmes M. Mercier, Lamure et Gruny et M. Bonhomme.
Amendement n°23
I.- Alinéa 4
Remplacer les mots :
aux articles 2-6
par les mots :
aux articles 2 à 7
II.- Alinéa 5
Remplacer les mots :
les articles 2-6
par les mots :
les articles 2 à 7
Mme Laure Darcos. - Je suis doublement émue de voir Mme Bachelot au banc. On y est ! Je me suis battue depuis quelques années à Bruxelles pour défendre l'exception culturelle française et les droits d'auteur. J'aurais préféré une vraie loi mais cette transposition par ordonnance nous permettra de faire enfin entendre notre vision de la culture.
Mon amendement va plus loin, trop loin, en réduisant tous les délais de douze à six mois. Ce serait trop compliqué, notamment pour la direction du livre qui doit rester telle quelle au sein de votre ministère. Je retire ce sous-amendement d'appel et voterai l'amendement.
Le sous-amendement n°26 rectifié bis est retiré.
M. Jean Bizet, rapporteur. - Le Parlement n'aime pas les ordonnances mais il aime la culture ! Compte tenu de la réunion de travail avec Catherine Morin-Desailly et Jean-Pierre Leleux, avis favorable, exceptionnellement !
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Je ne dois pas prendre de mauvaises habitudes !
M. David Assouline. - Félicitations madame la ministre pour votre nomination. Si vous réussissez, ce sera un succès pour la culture et la France. J'espère que votre voix, qui porte, obtiendra autre chose que des mots : des moyens !
Avec votre prédécesseur, que je salue, nous avions transposé la directive sur les droits voisins, grâce à la proposition de loi que je portais. La France était le premier pays à le faire. C'est plus compliqué quand le Parlement est dessaisi. J'avais fait adopter un amendement, lors de la réforme constitutionnelle, qui inscrit dans la Constitution que les règles concernant l'indépendance, la liberté et le pluralisme des médias sont fixées par la loi. (M. André Gattolin s'en amuse.)
Là, nous sommes sur un compromis. Vous vous êtes engagée à ce que la rédaction de l'ordonnance se fasse en concertation avec l'ensemble des forces soutenant cet impératif et votre prédécesseur avait aussi pris des engagements.
Avec cet acte, nous nous posons en responsabilité et nous attendons la même responsabilité de la part du Gouvernement.
L'audiovisuel est en pleine révolution. Certains s'en sortent très bien. Nous devons rétablir une équité, soumettre les grandes plateformes aux mêmes obligations que les autres médias.
M. le président. - Merci de conclure.
M. David Assouline. - Nous soutiendrons l'amendement du Gouvernement.
M. Pierre Ouzoulias. - C'est exceptionnel pour notre groupe : ce canton-ci de l'hémicycle va voter une habilitation à transposer par ordonnance ! (Sourires) Je le fais à regret. Lors du débat sur la transposition de la directive Droits voisins, j'avais signalé à David Assouline qu'il valait mieux une transposition globale, respectant la cohérence de la directive. On m'avait rassuré à l'époque, mais le véhicule législatif annoncé est en panne... Or nous aurions pu débattre d'une rédaction directement transposable dans le code.
Le groupe CRCE votera pour, mais ne le dites pas à mes camarades. (Sourires)
Mme Françoise Laborde. - Bienvenue, madame la ministre. Rapporteure des crédits de la mission « Livre et industries culturelles », je rappelle que la France est, depuis Beaumarchais, à l'avant-garde sur les droits d'auteur, et a fini par entraîner l'Europe dans une vision qui n'est pas celle du copyright anglo-saxon. C'est grâce à la France que ces directives ont abouti.
Nous regrettons amèrement d'être privés d'un débat riche et passionnant sur le projet de loi Audiovisuel, frappé de malédiction depuis trois ans. Mais une transposition rapide est nécessaire, les professionnels la réclament. Elle devra être suivie de longues négociations avec les acteurs concernés. Il convient de faire ce sacrifice pour aider ce secteur durement frappé, en espérant un plan de relance massif.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Que de temps pour que des directives soient transposées ! Je me rappelle nos travaux sur la gouvernance mondiale de l'internet, notre proposition de résolution européenne, dès 2015, qui évoquait déjà le droit d'auteur. Il a fallu cinq ans pour que les textes arrivent ici. On se plaint souvent de la lenteur des processus administratifs, acceptons d'accélérer la transposition pour ne pas laisser les créateurs au bord du chemin...
L'amendement n°23 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°22 rectifié, présenté par le Gouvernement.
Après l'article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi permettant de modifier la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le code du cinéma et de l'image animée et le livre des procédures fiscales afin :
a) de transposer la directive 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels en procédant aux mesures d'adaptation et aux mises en cohérence et corrections matérielles, légistiques et rédactionnelles rendues nécessaires par la directive.
b) de procéder aux mesures d'adaptation et de tirer les conséquences nécessaires de la transposition mentionnée au a) s'agissant de la contribution à la production sur la base de leur activité en France des éditeurs de services de télévision et de médias audiovisuels à la demande visant le territoire français qui relèvent de la compétence d'un autre État membre de l'Union européenne en :
- introduisant une faculté de mutualisation de la contribution à la production cinématographique pour les groupes éditant plusieurs services ;
- prévoyant l'association des organisations professionnelles et organismes de gestion collective représentant les auteurs aux accords conclus entre les éditeurs de services et les organisations représentant les producteurs dont le Conseil supérieur de l'audiovisuel tient compte pour la fixation des modalités de contribution au développement de la production d'oeuvres ;
- prévoyant qu'une oeuvre n'est pas prise en compte au titre de la contribution d'un éditeur à la production lorsque les contrats conclus pour sa production ne sont pas compatibles avec les dispositions des articles L. 121-1 et L. 121-5 du code de la propriété intellectuelle relatives à la protection des droits moraux des auteurs et les principes énoncés aux articles L. 131-4 et L. 132-25 de ce code relatifs à leur rémunération et en subordonnant l'attribution des aides du Centre national du cinéma et de l'image animée à l'inclusion, dans les contrats conclus pour la production d'une oeuvre, de clauses types assurant le respect de ces mêmes articles ;
- introduisant une procédure de conventionnement des services de médias audiovisuels à la demande par le Conseil supérieur de l'audiovisuel au-delà d'un seuil de chiffre d'affaires fixé par décret, et en prévoyant que cette convention précise notamment les conditions d'accès des ayants droit aux données relatives à l'exploitation de leurs oeuvres ;
- soumettant à contribution à la production sur la base de leur activité en France les autres éditeurs de services de télévision et de médias audiovisuels à la demande visant le territoire français qui ne sont pas établis en France et qui ne relèvent pas de la compétence de la France ;
- permettant au Conseil supérieur de l'audiovisuel de recevoir de l'administration des impôts tous les renseignements relatifs au chiffre d'affaires des éditeurs et à cette autorité et au Centre national du cinéma et de l'image animée de se communiquer les informations qu'ils détiennent relatives aux chiffres d'affaires des éditeurs de services et des redevables des impositions mentionnées aux articles L. 115-6 à L. 115-13 du code du cinéma et de l'image animée et à l'article 1609 sexdecies B du code général des impôts.
II. - Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de quatre mois à compter de la publication de l'ordonnance.
II. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre ...
Dispositions relatives à la modernisation des règles de la communication audiovisuelle et au renforcement de la protection de la souveraineté culturelle
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Cet amendement transpose la directive SMA du 14 novembre 2018, dont la renégociation a été une victoire importante pour la France et pour la diversité culturelle.
La France s'illustre par une régulation ambitieuse des médias et un soutien fort à la création. Je sais que vous y êtes attachés. Nous avons obtenu l'extension de la régulation aux plateformes de partage de vidéos, sur lesquelles les jeunes passent tant de temps ; il était important d'édicter des règles communes pour les protéger. Le CSA sera chargé de ce contrôle.
La France a aussi obtenu la possibilité de soumettre les services de médias audiovisuels qui visent le territoire français à son système de soutien, en dérogeant au principe du pays d'origine. La part de marché des plateformes numériques s'est encore accrue avec la crise sanitaire et il était d'autant plus urgent de les faire participer au financement de la création en France.
Nous voulons rétablir l'équilibre entre diffuseurs nationaux et plateformes étrangères, et assurer la pérennité de notre dispositif de soutien à la création.
Les sous-amendements de M. Leleux réaffirment la notion d'équité entre services traditionnels et nouveaux médias. J'y serai favorable.
La transposition nécessite de modifier à la marge la sacro-sainte loi de 1986, pour créer un mécanisme de conventionnement des services à la demande, s'adapter aux spécificités de chaque plateforme, assurer le respect des droits moraux et patrimoniaux des auteurs, et permettre au CSA d'échanger des informations avec le CNC et l'administration fiscale.
M. le président. - Sous-amendement n°31 rectifié bis à l'amendement n°22 rectifié du Gouvernement, présenté par M. Leleux, Mme Morin-Desailly, MM. Assouline et Hugonet, Mme Laborde et M. Gattolin.
Amendement n°22, alinéa 5
Après le mot :
transposition
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
du 18) de l'article 1er de la directive n°2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 précitée en vue notamment d'assurer un traitement équitable entre services de télévision et de médias audiovisuels à la demande en :
M. Jean-Pierre Leleux. - La transposition de la directive SMA est très attendue par les créateurs. Mais l'intégration des plateformes à l'écosystème du financement de la création ne saurait suffire sans un assouplissement du régime des acteurs historiques. Sans quoi ces plateformes continueront de bénéficier de contraintes réduites. Elles pourraient renforcer leur attractivité sur le marché français et rentabiliser leur investissement en France par une audience planétaire. Le sous-amendement, qui émane du groupe de travail sur l'impact du covid-19 sur les médias, introduit un principe d'équité entre acteurs nouveaux et traditionnels. C'est une nécessité politique. On ne peut avoir deux types de réglementation pour deux types d'acteurs en situation de concurrence directe. Cela s'imposera au pouvoir réglementaire. Équité n'est pas égalité. Ce principe permettra d'adapter les obligations aux spécificités des acteurs.
C'est un signal important pour la poursuite de la modernisation, et l'assouplissement, des règles de l'audiovisuel.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Très bien.
M. le président. - Sous-amendement n°37 rectifié à l'amendement n°22 rectifié du Gouvernement, présenté par M. Leleux et Mme Morin-Desailly.
Amendement n° 22, alinéa 7
Après le mot :
prévoyant
insérer les mots :
, pour la partie de ces accords qui affecte directement leurs intérêts,
M. Jean-Pierre Leleux. - Cette précision, qui reprend l'interprétation du Conseil d'État concernant les modalités d'association des auteurs aux accords qui les concernent, avait recueilli un large assentiment en commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale
M. Jean Bizet, rapporteur. - La commission de la culture souhaite une transposition rapide de la directive SMA. Sagesse très favorable sur l'amendement du Gouvernement, d'autant que les sous-amendements, auxquels nous sommes favorables, enrichissent la rédaction.
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Nous continuons dans une atmosphère de consensus...
M. David Assouline. - Profitez-en !
Mme Roselyne Bachelot, ministre. - Ces sous-amendements sont particulièrement bienvenus. Le Conseil d'État avait souhaité que cette précision fût apportée dans le projet de loi afin que l'équilibre sur lequel reposent ces négociations ne soit pas remis en cause.
Avis favorable, enthousiaste.
Mme Dominique Vérien. - J'interviens au titre de la délégation aux droits des femmes. On parle de diversité dans la directive SMA, mais jamais de parité. Or la crise sanitaire a révélé la fragilité de la présence des femmes dans l'audiovisuel : on n'a plus entendu que des hommes, que ce soient des ministres ou des médecins.
Le Sénat ne cherche pas à surtransposer. Je vous demande néanmoins de porter cette parole au sein de l'Union européenne pour que le sujet soit pris en compte. Il faut défendre la place des femmes dans l'audiovisuel. Nous allons rendre un rapport sur ce sujet. Encore une fois, la crise sanitaire a été symptomatique. Madame la ministre, faites que demain nous n'ayons pas à surtransposer pour défendre les femmes. (M. Pierre Ouzoulias applaudit.)
M. David Assouline. - Je réaffirme notre soutien à ce deuxième amendement du Gouvernement. La France ne peut être que pionnière, elle qui a été à la pointe sur les droits d'auteur depuis le XVIIIe siècle.
Il faut rétablir un équilibre entre les plateformes et les médias traditionnels, dont les difficultés se sont aggravées avec la chute des recettes publicitaire pendant la pandémie.
Je soutiens les sous-amendements de Jean-Pierre Leleux. J'ai cosigné le premier et le deuxième apporte une précision bienvenue. L'Assemblée nationale a eu le temps du débat. Il fallait maintenir cet équilibre.
Il faut un plan de relance pour la culture, madame la ministre. Point de saupoudrage, mais un choc de relance, New Deal ou Plan Marshall. La culture, ce n'est pas un supplément d'âme, c'est notre âme, ce qui fait notre cohésion, ce qui nous fait vivre. Elle exige de grands moyens.
Le sous-amendement n°31 rectifié bis est adopté, de même que le sous-amendement n°37 rectifié.
L'amendement n°22 rectifié, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.
L'article 25 est adopté.
M. le président. - Amendement n°20, présenté par le Gouvernement.
A. - Après l'article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi :
1° Les dispositions de nature législative nécessaires à la transposition de la directive 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen ainsi que les mesures d'adaptation de la législation liées à cette transposition ;
2° Les dispositions de nature législative nécessaires à la mise en oeuvre des dispositions du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis ;
3° Toutes dispositions de nature législative, autres que celles mentionnées aux 1° et 2° du présent I, visant à renforcer les pouvoirs de contrôle et d'enquête des ministres chargés des postes et des communications électroniques et de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse ainsi qu'à améliorer l'efficacité des procédures d'attribution de ressources en numérotation et en fréquences ;
4° Toutes dispositions modifiant la partie législative du code des postes et des communications électroniques afin de remédier aux éventuelles erreurs et de clarifier en tant que de besoin les dispositions du même code.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.
II. - Le quatrième alinéa du I de l'article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques est ainsi rédigé :
« - aux dispositions du règlement (UE) 2015/2120 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 établissant des mesures relatives à l'accès à un internet ouvert et aux prix de détail pour les communications à l'intérieur de l'Union européenne réglementées et modifiant la directive 2002/22/CE et le règlement (UE) n°531/2012 ; ».
B. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre ...
Dispositions relatives aux postes et communications électroniques
M. Alain Griset, ministre délégué. - J'espère avoir le même succès que ma collègue. Cet article habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive établissant le code des communications électroniques européen. Accessoirement, il prévoit un régime de sanctions pour le règlement relatif à la livraison transfrontière de colis, renforce les pouvoirs de contrôle de l'Arcep et améliore les procédures d'attribution de ressources en numérotation et en fréquences.
L'ordonnance est un vecteur adapté à la transposition d'une directive technique, qui adapte des dispositions légales s'appliquant aux télécommunications : spectre radioélectrique, service universel, régulation de l'accès, droits des consommateurs, etc. Elle était déjà prévue dans le projet de loi Audiovisuel. La directive doit être transposée au plus tard le 21 décembre 2020.
M. le président. - Sous-amendement n°35 à l'amendement n°20 du Gouvernement, présenté par M. Duplomb.
Amendement n°20, alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, sans porter atteinte aux pouvoirs d'information et de décision du maire en cas d'implantation d'une nouvelle infrastructure de téléphonie mobile
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Si une transposition par ordonnance se justifie par le caractère technique de la directive, nous aurions préféré qu'elle se fasse via une proposition de loi de la délégation aux entreprises.
Ce sujet mérite un débat parlementaire, d'une part sur le service universel, d'autre part sur le pouvoir d'information et de décision des élus en matière d'implantation d'une infrastructure de téléphonie mobile. Si nous regrettons que le Gouvernement ait mis si longtemps à agir, le principe de l'ordonnance ne nous paraît pas injustifié.
M. le président. - Sous-amendement n°32 à l'amendement n°20 du Gouvernement, présenté par M. Duplomb.
Amendement n° 20
I. - Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
II. - Après l'alinéa 10
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.... - Le livre Ier du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° L'intitulé est ainsi rédigé : « Le service postal et les services de livraison de colis » ;
2° L'intitulé du chapitre II est complété par les mots : « et des services de livraison de colis » ;
3° L'article L. 5-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Est l'autorité compétente pour mettre en oeuvre les articles 4, 5 et 6 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis. À ce titre, les prestataires de services de livraison de colis mentionnés à l'article 4 du même règlement lui communiquent les informations précisées par les articles 4 et 5 de ce règlement et les textes pris pour son application. » ;
4° L'article L. 5-3 est ainsi modifié :
a)Le premier alinéa est ainsi modifié :
- après le mot : « postal », le mot « ou » est remplacé par le signe : « , » ;
- après les deux occurrences de la référence : « L. 3 », sont insérés les mots : « ou d'un prestataire de services de livraison de colis, tel que défini à l'article 2 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis » ;
b) Au premier alinéa du I, après les mots : « ces dispositions, », sont insérés les mots : « ou en cas de manquement d'un prestataire de services de livraison de colis aux dispositions des articles 4, 5 et 6 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis, » ;
c) La première phrase du b et le dixième alinéa du III sont ainsi modifiés :
- après le mot : « universel », le mot : « ou » est remplacé par le signe : « , » ;
- après la référence : « L. 3 », sont insérés les mots : « ou un prestataire de services de livraison de colis, tel que défini à l'article 2 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis » ;
5° Le premier alinéa de l'article L. 5-9 est ainsi modifié :
- après le mot : « universel », le mot : « et » est remplacé par le signe : « , » ;
- après la référence : « L. 3 », sont insérés les mots : « et des prestataires de services de livraison de colis, tels que définis à l'article 2 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis ».
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Nous écrivons en dur que l'Arcep est habilitée à enquêter et sanctionner dans les mêmes conditions que le service universel postal.
M. le président. - Sous-amendement n°33 à l'amendement n°20 du Gouvernement, présenté par M. Duplomb.
Amendement n° 20
I. - Alinéa 6
Remplacer les mots :
renforcer les pouvoirs de contrôle et d'enquête des ministres chargés des postes et des communications électroniques et de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse ainsi qu'à améliorer l'efficacité des procédures d'attribution de ressources en numérotation et en fréquences
par le signe :
:
II. - Après l'alinéa 6
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
a) Permettre la présence d'un officier de police judiciaire dans les visites et saisies effectuées par les agents habilités de l'Autorité de régulation des communications électroniques, de la poste et de la distribution de la presse ;
b) Prévoir le contrôle par un organisme indépendant des engagements pris par les opérateurs dans le cadre de l'article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques ;
c) Confier à l'Autorité de régulation des communications électroniques, de la poste et de la distribution de la presse la mission d'évaluer le coût net de la mission de service public de transport et de distribution de la presse par voie postale dont est chargé le prestataire de service universel du service postal ;
d) Dématérialiser la procédure d'attribution, par l'Autorité de régulation des communications électroniques, de la poste et de la distribution de la presse, de ressources en numérotation ou d'autorisation d'utilisation de fréquences ;
e) Supprimer le critère de la date de la sanction pour déterminer la composition de la formation restreinte de l'Autorité de régulation des communications électroniques, de la poste et de la distribution de la presse, compétente en matière de sanctions ;
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Celui-ci restreint le champ de l'habilitation. Sous réserve de l'adoption de ces trois sous-amendements, avis favorable à l'amendement n°20.
M. Alain Griset, ministre délégué. - Avis favorable aux trois sous-amendements.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission. - Monsieur le ministre, nous ne sommes pas contents. Cette ordonnance vient se substituer au travail que mènent la délégation aux entreprises et le groupe numérique, qui allait aboutir à une proposition de loi. Je regrette ce manque de coopération et le caractère tardif de ces amendements, transmis hier. Vous n'en êtes pas responsable personnellement mais sachez que nous travaillons ainsi depuis trois ans. C'était un petit coup de griffe. (M. Pierre Ouzoulias et Mme Viviane Artigalas applaudissent.)
Les sous-amendements nos35, 32 et 33 sont adoptés.
L'amendement n°20, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°24, présenté par le Gouvernement.
I. - Après l'article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre II du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° L'article L. 35 est ainsi modifié :
a) Au a, les références : « L. 35-1 à L. 35-4 » sont remplacées par les références : « L. 35-1 à L. 35-5 et L. 35-7 » ;
b) Le b est abrogé ;
2° L'article L. 35-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 35-1. Le service universel des communications électroniques permet à tout utilisateur final d'avoir accès, en position déterminée, à un tarif abordable :
« 1° À un service d'accès adéquat à l'internet haut débit ;
« 2° À un service de communications vocales.
« Cet accès comprend le raccordement sous-jacent aux services mentionnés aux 1° et 2° .
« Le service universel fournit des mesures particulières en faveur des utilisateurs finals handicapés afin d'assurer, d'une part, un accès aux services mentionnés aux 1° et au 2° qui soit équivalent à l'accès dont bénéficient les autres utilisateurs finals et, d'autre part, le caractère abordable de ces services.
« Les modalités d'application du présent article et le contenu de chacune des composantes du service universel sont précisés par décret en Conseil d'État. » ;
3° Avant l'article L. 35-2 du même code, est ajoutée une section 1 intitulée : « Fourniture d'un service universel des communications électroniques abordable aux utilisateurs finals à faibles revenus ou ayant des besoins sociaux particuliers » et comprenant l'article L.35-2 ;
4° L'article L. 35-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 35-2. - Au titre des obligations de service universel, le ministre chargé des communications électroniques peut exiger des opérateurs qu'ils offrent des options, formules tarifaires ou une réduction tarifaire qui diffèrent de celles offertes dans des conditions normales d'exploitation commerciale aux utilisateurs finals disposant de faibles revenus ou ayant des besoins sociaux particuliers lorsqu'il constate, notamment sur la base du rapport prévu au 2° de l'article L. 36-7 que, sur tout ou partie du territoire, le fonctionnement du marché ne permet pas à ces derniers d'accéder à un tarif abordable aux composantes du service universel mentionnés à l'article L. 35-1.
« Il peut, à titre exceptionnel, n'exiger ces options, formules ou réductions tarifaires qu'auprès de certains opérateurs désignés par appel à candidatures, en particulier lorsque leur mise en oeuvre par l'ensemble des opérateurs entraînerait une charge administrative ou financière excessive pour eux-mêmes ou pour l'administration.
« L'appel à candidatures porte sur les conditions techniques et financières ainsi que, le cas échéant, le coût net de fourniture des options, formules ou réductions tarifaires concernés.
« Dans le cas où un appel à candidatures s'avère infructueux, le ministre chargé des communications électroniques désigne un ou plusieurs opérateurs en vue de fournir les options, formules ou réductions tarifaires concernés sur tout ou partie du territoire national.
« Par ailleurs, le ministre chargé des communications électroniques peut fixer un seuil annuel de chiffre d'affaires en deçà duquel l'opérateur concerné n'est pas soumis à la fourniture d'options, formules ou réductions tarifaires.
« Les modalités d'application du présent article sont précisées par décret en Conseil d'État. » ;
5° L'article L. 35-2-1 est abrogé ;
6° Avant l'article L. 35-3, est ajoutée une section 2 intitulée : « Disponibilité du service universel des communications électroniques » et comprenant les articles L. 35-3 et L. 35-4 ;
7° Les articles L. 35-3 et L. 35-4 sont ainsi rédigés :
« Art. L. 35-3 - Lorsque le ministre chargé des communications électroniques établit que la fourniture des services mentionnés à l'article L. 35-1 n'est pas assurée, compte tenu, d'une part, des résultats du relevé géographique prévu à l'article 22 de la directive (UE) 2018/1972 du Parlement et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen et, d'autre part, de l'insuffisance des initiatives privées et des mécanismes d'intervention publique, il peut imposer des obligations de service universel afin de répondre aux demandes raisonnables d'accès à ce service des utilisateurs finals.
« À cette fin, le ministre chargé des communications électroniques peut désigner un ou plusieurs opérateurs, sur tout ou partie du territoire national, pour la fourniture de tout ou partie des services mentionnés à l'article L. 35-1 ou de prestations nécessaires pour la fourniture de ces services.
« La désignation intervient à l'issue d'appels à candidatures portant sur les conditions techniques et financières ainsi que, le cas échéant, le coût net de fourniture de ces services ou prestations.
« Dans le cas où un appel à candidatures s'avère infructueux, le ministre chargé des communications électroniques désigne un ou plusieurs opérateurs en vue d'assurer ces services ou prestations sur tout ou partie du territoire national.
« Le cahier des charges du ou des opérateurs désignés, soumis pour avis à la Commission supérieure du numérique et des postes, comprend notamment des obligations de qualité de service que l'opérateur est tenu de fournir, des obligations tarifaires, ainsi que les conditions de leur fourniture. Il peut imposer des obligations de péréquation géographique des tarifs.
« Les modalités d'application du présent article sont précisées par décret en Conseil d'État.
« Art. L. 35-4. - Tout opérateur désigné en application de l'article L. 35-3 qui a l'intention de céder une partie substantielle ou la totalité de ses actifs de réseau d'accès local à une entité juridique distincte, en informe à l'avance et en temps utile le ministre chargé des communications électroniques ainsi que l'Autorité de régulation des communications électroniques des postes et de la distribution de la presse.
« Au vu des effets de la transaction projetée sur la fourniture des services mentionnés à l'article L. 35-1 et après avis de l'autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse , le ministre peut adapter les obligations imposées à l'opérateur, prévoir un nouveau cahier des charges imposé au cessionnaire et, le cas échéant, procéder à un nouvel appel à candidatures.
« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. » ;
8° Avant l'article L. 35-5, est ajoutée une section 3 intitulée : « Financement du service universel des communications électroniques » et comprenant l'article L. 35-5 ;
9° L'article L. 35-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 35-5 - I. - Les coûts nets imputables aux obligations de service universel sont évalués sur la base d'une comptabilité appropriée tenue par les opérateurs pour assurer ces obligations et auditée, à leurs frais, par un organisme indépendant désigné par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse.
« L'évaluation de ces coûts nets prend en compte l'avantage sur le marché que les opérateurs soumis à des obligations de service universel retirent, le cas échéant, de ces obligations. Les coûts nets pris en compte en application du II ne peuvent être supérieurs aux engagements pris, le cas échéant, dans le cadre des appels à candidatures prévus aux articles L. 35-2 et L. 35-3, par les opérateurs pour assurer les obligations du service universel.
« La contribution de chaque opérateur au financement du service universel est calculée au prorata de son chiffre d'affaires réalisé au titre des services de communications électroniques, à l'exclusion de celui réalisé au titre des prestations d'interconnexion et d'accès faisant l'objet des conventions définies au I de l'article L. 34-8 et des autres prestations réalisées ou facturées pour le compte d'opérateurs tiers.
« Toutefois, les opérateurs dont le chiffre d'affaires est inférieur à un montant fixé par décret en Conseil d'État sont exonérés de contribution au financement du service universel.
« II. - Lorsqu'un opérateur soumis à des obligations de service universel formule une demande de compensation auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et que les coûts nets imputables à ses obligations de service universel définis au I représentent une charge excessive, ces coûts nets font l'objet d'une compensation.
« Cette compensation est financée par un fonds de service universel des communications électroniques constitué à cet effet.
« III. - Le montant des contributions nettes dont les opérateurs sont redevables au fonds en application du I et le montant des sommes dues par le fonds aux opérateurs pour assurer les obligations du service universel sont déterminés annuellement par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse.
« La gestion comptable et financière du fonds est assurée par la Caisse des dépôts et consignations dans un compte spécifique. Les frais de gestion exposés par la caisse sont imputés sur le fonds. Les contributions des opérateurs sont recouvrées par la caisse, selon les modalités prévues pour le recouvrement des créances de cet établissement.
« En cas de défaut de versement de sa contribution par un opérateur, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse prononce une des sanctions prévues à l'article L. 36-11. En cas de nouvelle défaillance, elle peut prononcer l'interdiction d'exploiter un réseau ouvert au public ou de fournir au public des services de communications électroniques. Si les sommes dues ne sont pas recouvrées dans un délai d'un an, elles sont imputées sur le fonds lors de l'exercice suivant.
« IV. - Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État, qui précise notamment les conditions d'attribution, les méthodes de l'évaluation qui répondent à des exigences de transparence et de publicité, de la compensation et du partage des coûts nets du service universel, ainsi que des modalités de gestion du fonds de service universel des communications électroniques.
« Il détermine les catégories d'activités pour lesquelles, en raison de leur nature, les opérateurs ne sont pas tenus de participer au financement des coûts imputables aux obligations de service universel. Ces activités comprennent notamment l'acheminement et la diffusion de services de radio et de télévision. » ;
10° Avant l'article L. 35-6, est ajoutée une section 4 intitulée : « Missions d'intérêt général et dispositions diverses » et comprenant les articles L. 35-6 et L. 35-7 ;
11° La première phrase du premier alinéa de l'article L. 35-7 est ainsi modifiée :
a) La référence : « L. 35-2 » est remplacé par la référence : « L. 35-3 » ;
b) Les mots : « la composante du service universel prévue au 1° de » sont remplacés par les mots : « les services ou prestations mentionnés à » ;
c) Les mots : « dans le cadre de la procédure prévue aux deuxième ou troisième alinéas » sont remplacés par les mots : « en application » ;
12° Le 2° de l'article L. 36-7 est ainsi rétabli :
« 2° Surveille le niveau et l'évolution des prix de détail des services mentionnés à l'article L. 35-1 par rapport au niveau des prix nationaux et aux revenus nationaux des consommateurs et transmet tous les trois ans un rapport au ministre chargé des communications électroniques ; ».
II. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre...
Dispositions relatives aux postes et communications électroniques
M. Alain Griset, ministre délégué. - J'ai bien entendu votre remarque, madame la présidente Primas, et vous remercie de votre soutien à l'amendement du Gouvernement.
Celui-ci transpose les dispositions relatives au service universel de la directive du 11 décembre 2018, qui comprend une composante relative à l'internet haut débit. Tous les consommateurs devront disposer d'un service d'accès adéquat à l'internet à haut débit et à un service de communications vocales fixe, à tarif abordable, permettant d'accéder aux services de messagerie électronique, presse en ligne, recherche d'emploi, etc.
Ses caractéristiques en termes de débit et de qualité de service seront fixées par voie réglementaire, en cohérence avec les objectifs du plan France très haut débit. L'Arcep surveillera l'évolution des tarifs et remettra un rapport tous les trois ans. Si le prix n'était pas abordable pour les consommateurs à faible revenu, cet amendement permettra d'y remédier.
Le code européen des communications électroniques permet de formaliser les objectifs poursuivis par le plan France très haut débit et d'imposer de nouvelles obligations aux opérateurs. Une consultation publique a commencé en février.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Il s'agit de transposer en dur les dispositions concernant le service universel. C'est une initiative bienvenue, même si nous regrettons qu'elle arrive au dernier moment. Elle ne présente pas de difficulté : avis favorable.
Je souhaite poser quatre questions. Vous proposez l'internet haut débit, mais est-il de 8 ou de 30 mégabits par seconde ?
La directive permet d'inclure les services mobiles dans le service universel. Pourquoi le Gouvernement ne l'a-t-il pas retenu ?
La rédaction sous-entend qu'un opérateur pourrait être désigné sur tout le territoire. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?
La directive permet de soumettre des acteurs comme WhatsApp ou Skype à des obligations de financement du service universel. Le Gouvernement compte-t-il activer cette option ? Pourquoi se limiter à ces opérateurs et ne pas étendre le dispositif à des plateformes qui se sont développées durant le confinement, comme Zoom ?
M. Alain Griset, ministre délégué. - Dans le cadre du plan France très haut débit, le Gouvernement a fixé comme objectif l'accès à un débit d'au moins 8 mégabits par seconde sur tout le territoire en 2020. D'ici à 2022, l'objectif est de 30 mégabits par seconde.
Ces objectifs ambitieux fixés en 2017 restent d'actualité grâce aux efforts des opérateurs et des collectivités territoriales.
S'agissant des services mobiles, le Gouvernement dispose déjà des leviers nécessaires pour fixer aux opérateurs des objectifs ambitieux. Grâce au système des autorisations d'utilisation de fréquence, le Gouvernement et l'Arcep ont obtenu des opérateurs des engagements forts. Le New Deal mobile a accéléré la couverture 4G grâce à des conventions ciblées. Le marché en France est très concurrentiel, avec des offres bon marché ; l'intervention de l'État ne parait pas nécessaire.
Un opérateur ne pourra être désigné pour fournir des prestations de service universel que s'il y a carence du marché qui ne peut être comblée par des aides d'État. Le texte laisse ouvertes les options : désignation nationale ou régionale.
Le Gouvernement est favorable à ce que tous les opérateurs participent au financement du service universel, y compris les opérateurs over the top. C'est une question d'équité concurrentielle. Le texte de l'ordonnance exploitera toutes les possibilités offertes par la directive. L'Arcep y sera attentive.
M. Jean-Michel Houllegatte. - Le code européen des télécoms garantit l'universalité et le caractère abordable de l'accès à internet. La directive élargit le périmètre du service universel à l'internet haut débit.
Les États membres peuvent étendre le bénéfice du service universel aux microentreprises, PME et associations à but non lucratif. La France va mettre en place un système de désignation du ou des opérateurs responsables de ce service universel. Quelles seront les modalités de fourniture du service ? La France retiendra-t-elle l'extension de ce service universel aux commerçants, artisans et TPE ?
Comment sera définie la notion de service universel abordable ? La réduction sociale tarifaire sera-t-elle garantie ? Quels moyens seront déployés par l'État ? Ces sujets méritaient un débat. Le groupe socialiste et républicain s'abstiendra.
M. Marc Laménie. - Je rejoins les interrogations de notre rapporteur. L'internet à haut débit est attendu sur les territoires, tout particulièrement dans le monde rural. Certains secteurs sont encore très mal couverts alors qu'il s'agit d'un service indispensable pour l'économie, l'éducation, la culture, mais aussi le monde agricole.
Des programmes sont portés par les opérateurs, l'État et les collectivités territoriales. Les délais ne sont pas toujours respectés et nous constatons d'importantes disparités entre territoires, sur l'internet comme la téléphonie mobile. Il reste encore beaucoup à faire.
Je soutiendrai l'avis du rapporteur.
L'amendement n°24 est adopté, et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°21, présenté par le Gouvernement.
A. - Après l'article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019 relative aux marques de produits ou de services est ratifiée.
II. - Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Après la première phrase du premier alinéa de l'article L. 712-9, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le titulaire de la marque est informé par l'Institut national de la propriété industrielle de l'expiration de l'enregistrement, sans que l'Institut puisse être tenu responsable de l'absence de cette information. » ;
2° La dixième ligne constituant le deuxième alinéa du a du 5° de l'article L. 811-1-1 est ainsi rédigée :
«
Article L. 712-9 |
Loi n° du portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière |
».
B. En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre ...
Dispositions relatives aux marques de produits ou de services
M. Alain Griset, ministre délégué. - Monsieur Houllegatte, les artisans commerçants et libéraux seront concernés. Je vous remercie d'avoir été assidus tout au long de cette séance - ma première - sur un projet de loi très technique.
Cette ordonnance procède à une révision du droit des marques, dans une logique d'harmonisation maximale avec le droit de l'Union européenne. Elle vise à moderniser et simplifier le système des marques nationales et fait prévaloir la philosophie d'un système de marque au service des opérateurs économiques actifs.
M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis. - Tant la doctrine que les professionnels que nous avons consultés se satisfont de cette ordonnance. Avis favorable.
L'amendement n°21 est adopté et devient un article additionnel.
L'ensemble du projet de loi, modifié, est adopté.
M. le président. - Prochaine séance, mercredi 15 juillet 2020, à 15 heures, sous réserve de la modification du décret portant convocation du Parlement en session extraordinaire.
La séance est levée à minuit trente.
Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,
Jean-Luc Blouet
Chef de publication
Annexes
Ordre du jour du mercredi 15 juillet 2020
Séance publique
À 15 heures
- Sous réserve de la modification du décret portant convocation du Parlement en session extraordinaire et d'une délibération du Conseil des ministres, lecture d'une déclaration de politique générale
Analyse des scrutins
Scrutin n°133 sur l'ensemble du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2019.
Résultat du scrutin
Nombre de votants : 338
Suffrages exprimés : 283
Pour : 57
Contre : 226
Le Sénat n'a pas adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (143)
Contre : 139
Abstention : 1 - M. Charles Guené
N'ont pas pris part au vote : 3 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, Mmes Catherine André, Colette Giudicelli
Groupe SOCR (71)
Contre : 71
Groupe UC (51)
Pour : 2 - MM. Michel Canevet, Bernard Delcros
Abstentions : 48
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Vincent Delahaye, président de séance
Groupe RDSE (23)
Pour : 18
Abstentions : 5 - MM. Henri Cabanel, Jean-Pierre Corbisez, Ronan Dantec, Joël Labbé, Olivier Léonhardt
Groupe LaREM (23)
Pour : 23
Groupe CRCE (16)
Contre : 16
Groupe Les Indépendants (14)
Pour : 14
Sénateurs non inscrits (7)
Abstention : 1
N'ont pas pris part au vote : 6 - M. Philippe Adnot, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier
Modification de l'ordre du jour
Mercredi 15 juillet 2020
À 15 heures
- Sous réserve de la modification du décret portant convocation du Parlement en session extraordinaire et d'une délibération du Conseil des ministres, lecture d'une déclaration de politique générale
Jeudi 16 juillet 2020
À 10 heures
- Sous réserve de la modification du décret portant convocation du Parlement en session extraordinaire, déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution, sur la politique générale
À 14 h 30
- Débat sur l'orientation des finances publiques et, sous réserve de sa transmission, discussion générale du projet de loi de finances rectificative pour 2020
À 18 heures
- Questions d'actualité au Gouvernement
Vendredi 17 juillet 2020
À 11 heures, 14 h 30 et le soir
- Sous réserve de sa transmission, suite du projet de loi de finances rectificative pour 2020
Samedi 18 juillet 2020
À 9 h 30, 14 h 30 et le soir
- Sous réserve de sa transmission, suite du projet de loi de finances rectificative pour 2020
Éventuellement, dimanche 19 juillet 2020
À 10 heures, 14 h 30 et le soir
- Sous réserve de sa transmission, suite du projet de loi de finances rectificative pour 2020
Mardi 21 juillet 2020
À 9 h 30
- Questions orales
À 14 h 30 et le soir
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à homologuer des peines d'emprisonnement prévues en Nouvelle Calédonie (texte de la commission, n°599, 2019 2020)
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à protéger les victimes de violences conjugales ou nouvelle lecture
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine (n°544, 2019-2020)
Mercredi 22 juillet 2020
À 15 heures
- Questions d'actualité au Gouvernement
À 16 h 30 et le soir
- Trois conventions internationales examinées selon la procédure d'examen simplifié
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2019 (A.N., n°2899) ou nouvelle lecture
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi permettant d'offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l'épidémie de covid-19 (texte de la commission, n°589, 2019-2020)
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi organique relatif à la dette sociale et à l'autonomie et sur le projet de loi relatif à la dette sociale et à l'autonomie ou nouvelle lecture
Jeudi 23 juillet 2020
À 10 h 30 et, éventuellement, à 14 h 30
- Projet de loi organique prorogeant le mandat des membres du Conseil économique, social et environnemental (n°596, 2019-2020)
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine
Mardi 28 juillet 2020
À 9 h 30
- Questions orales
À 14 h 30 et le soir
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2020 ou nouvelle lecture
- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi organique prorogeant le mandat des membres du Conseil économique, social et environnemental
Nominations à une éventuelle CMP
La liste des candidats désignés par la commission des finances pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2019 sont :
Titulaires : MM. Vincent Éblé, Albéric de Montgolfier, Roger Karoutchi, Mme Christine Lavarde, MM. Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac et Didier Rambaud ;
Suppléant : MM. Jérôme Bascher, Sébastien Meurant, Jean-François Rapin, Vincent Delahaye, Rémi Féraud, Jean-Claude Requier et Éric Bocquet.