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Table des matières
Statut des travailleurs des plateformes numériques
M. Pascal Savoldelli, auteur de la proposition de loi
Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure de la commission des affaires sociales
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail
Mise au point au sujet d'un vote
Efficacité des aides personnelles au logement
Mme Cécile Cukierman, auteure de la proposition de loi
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur de la commission des affaires économiques
M. Julien Denormandie, ministre
Création de points d'accueil pour soins immédiats
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure de la commission des affaires sociales
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure
Démarchage téléphonique et lutte contre les appels frauduleux (Deuxième lecture)
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances
M. André Reichardt, rapporteur de la commission des lois
ARTICLE PREMIER A (Suppression maintenue)
Discussion des articles (Suite)
Ordre du jour du mardi 9 juin 2020
SÉANCE
du jeudi 4 juin 2020
89e séance de la session ordinaire 2019-2020
présidence de M. Jean-Marc Gabouty, vice-président
Secrétaires : Mme Jacky Deromedi, M. Joël Guerriau.
La séance est ouverte à 9 heures.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Statut des travailleurs des plateformes numériques
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi relative au statut des travailleurs des plateformes numériques, à la demande du groupe CRCE.
Discussion générale
M. Pascal Savoldelli, auteur de la proposition de loi . - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE) J'ai à coeur de vous parler de cette proposition de loi cosignée par l'ensemble du groupe CRCE, fruit de deux ans de travail sur le terrain, de rencontres, d'échanges. Elle renforce le statut des travailleurs des plateformes numériques, ces tâcherons du clic soumis au management algorithmique. Ils ont été en première ligne lors de la crise du Covid, ne cessant pas d'exercer leurs missions en plein confinement.
L'enjeu est d'actualité. Je remercie la commission des affaires économiques pour son rapport sur le sujet, réalisé par Michel Forissier, Catherine Fournier et Frédérique Puissat.
Nous avons élaboré cette proposition de loi de manière collective avec les acteurs de terrain - le Collectif des livreurs autonomes de Paris (CLAP), Coursiers bordelais, ou encore le collectif Pédale et tais-toi que nous avons parrainé et qui s'est réuni régulièrement depuis 2017.
Ce travail singulier et concerté correspond à des volontés exprimées par les travailleurs des plateformes numériques eux-mêmes. Nous avons organisé à Bordeaux par exemple une rencontre avec des coursiers très engagés, qui nous ont parlé de leurs difficultés, à s'organiser notamment. Ils ont mentionné des initiatives alternatives, locales, éthiques, telles Coopcycle.
À Nantes, des commerçants et restaurateurs nous ont rapporté combien les coursiers étaient fatigués et exploités, sous l'emprise économique de ces plateformes.
La stratégie est de casser le marché pour le conquérir, puis aboutir à un monopole grâce aux pratiques de dumping social.
Cette proposition de loi réintègre les plateformes dans le droit du travail en inscrivant leurs travailleurs dans la septième partie du code du travail, en les dotant d'un contrat de travail protecteur, assimilé au salariat mais ménageant une autonomie d'organisation du travail. Leur accès à la protection sociale implique que les plateformes acquittent des cotisations sociales ; nous demandons également plus de transparence sur les algorithmes ; enfin, nous réclamons que le salaire horaire ne puisse pas être inférieur au Smic.
Nous ne parlons pas des plateformes d'intermédiation, qui se bornent à une mise en relation entre fournisseur et client, mais bien des plateformes de travail, qui font appel à des travailleurs dits indépendants mais qui leur sont subordonnés, et précarisés.
Je citerai Xavier Bertrand (On s'en étonne à droite.) qui a évoqué les « nouveaux canuts des plateformes numériques ». Fabien Roussel quant à lui (On se rassure sur les mêmes travées.) parle de « ces jeunes pour qui ce capitalisme fait mine de se réinventer en leur imposant un statut de tâcheron comme il y a deux siècles ».
Ces travailleurs sont dépendants des plateformes. Dans un arrêt du 4 mars 2020, la Cour de cassation a reconnu qu'il n'y avait aucun doute sur leur statut de travailleur indépendant fictif, qui recouvre un salariat déguisé.
Nous voulons éviter que les travailleurs des plateformes numériques aient seulement le choix entre renoncer à se défendre, ou se lancer dans des procédures très longues pour obtenir la requalification de leur contrat. Nous refusons également de créer un troisième statut comme le proposait la majorité à l'Assemblée nationale, solution censurée par le Conseil constitutionnel.
Le directeur de cabinet de la ministre Muriel Pénicaud, Antoine Foucher, dit lui-même qu'« il faut inventer un nouvel encadrement ». Chiche ! Cette proposition de loi y pourvoit.
Les plateformes doivent, comme les entreprises traditionnelles, respecter les règles du jeu. Il n'y a pas à choisir entre salariat et travail indépendant ; et la position « ni salariat, ni travail indépendant » n'est pas respectueuse.
Cette proposition de loi pose un jalon important car le numérique affectera des pans entiers de l'économie. Nous voulons que chaque personne puisse s'épanouir. Le progrès numérique doit servir les êtres humains et non les asservir. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure de la commission des affaires sociales . - Cette proposition de loi crée un statut protecteur pour les travailleurs des plateformes numériques, oubliés de la protection sociale et du droit du travail. Ils se voient nier la qualification de salarié au motif que les plateformes ne sont que des donneurs d'ordre servant d'intermédiaires vers la clientèle. Or les plateformes ne sont pas seulement des intermédiaires ; elles organisent la production. Ces travailleurs doivent être intégrés dans le droit du travail.
Le salarié est placé dans une situation de subordination vis-à-vis de son employeur dont il dépend pour ses moyens de subsistance. C'est pourquoi le droit du travail le protège par un socle de garanties sur les rémunérations, le temps de travail et le droit au repos. La commission des affaires sociales, je le regrette, n'a pas adopté notre proposition de loi, mais a reconnu la nécessité d'améliorer la protection de ces travailleurs.
Le préambule de la Constitution de 1946 garantit aux salariés des droits sociaux et la défense des intérêts collectifs. Les salariés bénéficient aussi d'un système de protection sociale contre les accidents du travail et les maladies professionnelles. Depuis 2016, ils ont droit à une couverture santé complémentaire. Ils sont affiliés de droit à l'assurance chômage. Ces protections sont principalement financées par les employeurs.
Mais la tentation de transformer les relations de travail en prestations de service rendues par des travailleurs indépendants est aussi ancienne que le droit du travail !
La jurisprudence confirme que la réalité de la relation entre le travailleur et l'entreprise est d'ordre public et ne dépend pas de la nature du contrat signé entre les deux. Le juge se fonde sur un faisceau d'indices pour requalifier des contrats de prestations de service en contrats de travail.
Les plateformes interviennent dans un nombre croissant de secteurs. Certaines font par exemple du placement de travailleurs temporaires, mais elles contournent les règles de l'intérim. Dans le secteur de la mobilité, les tarifs ne sont pas fixés par le travailleur mais par des algorithmes dont il n'a pas les paramètres. Il n'est pas juridiquement subordonné à son client, la plateforme, mais s'il n'en respecte pas les règles, il se voit victime d'une déconnexion, c'est-à-dire, soyons clairs, d'un licenciement arbitraire. C'est le salariat, avec les inconvénients mais sans les avantages.
Dans cette classe précaire, on compte entre 100 000 et 200 000 travailleurs des plateformes numériques mais leur nombre croît à mesure que s'ubérise la société.
Les livreurs à vélo ont des revenus dérisoires. En outre, ils sont nombreux à ne bénéficier ni d'assurance contre les accidents du travail ni de complémentaire santé. Ce qui prime, c'est la recherche de flexibilité et l'externalisation des tâches non rentables.
Le faux salariat pourrait ainsi s'étendre à de nombreux secteurs, notamment bancaire. On assiste toutefois à des mobilisations comme celle des livreurs Deliveroo en juillet 2019. Le CLAP, créé il y a plusieurs années, a obtenu une reconnaissance des plateformes. Mais les tentatives d'organisation syndicale se heurtent à l'absence dans la loi de règles de dialogue social les concernant. Les instances de concertation mises en place par les plateformes ne doivent pas faire illusion : toutes ne sont pas des coopératives, fonctionnant sur le partage équitable des résultats et une gouvernance partagée.
Le législateur a réagi timidement. La loi Travail du 8 août 2016 garantit des cotisations d'assurance volontaire contre les risques du travail par les entreprises, des cotisations finançant la formation professionnelle ainsi que la reconnaissance des acquis de l'expérience. Elle comprend même un embryon de droit syndical et de droit de grève.
La loi d'orientation des mobilités (LOM) du 24 décembre 2019 donne en outre aux plateformes la possibilité d'élaborer des chartes sur l'exercice de leur responsabilité sociale. Ces avancées, hélas, restent tributaires du bon vouloir des entreprises. La loi consacre le recours aux travailleurs indépendants pour des tâches qui pourraient être accomplies par des salariés.
L'article premier de la proposition concerne les plateformes qui ne font pas de la mise à disposition mais organisent les modalités de réalisation du service, dans le secteur du transport par exemple. Il prévoit une intégration des travailleurs des plateformes numériques dans le code du travail avec un contrat définissant les modalités de gestion du planning et la rémunération.
L'article 2 donne à ces travailleurs une protection sociale en les affiliant au régime de sécurité sociale.
L'article 4 élargit la possibilité d'assurance des travailleurs contre les accidents du travail et les maladies professionnelles à la charge de la plateforme. Elle leur laisse le choix d'adhérer au contrat collectif proposé par la plateforme.
À titre personnel, je vous invite à adopter cette proposition de loi même si la commission des affaires sociales l'a rejetée. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail . - Je remercie le groupe CRCE pour cette proposition de loi, fruit d'un travail très important et de l'engagement que nous lui connaissons.
Nous partageons tous le constat. L'essor des plateformes est l'une des évolutions les plus conséquentes du marché du travail de ces dix dernières années.
La protection sociale et économique des travailleurs des plateformes numériques doit être renforcée. Mais nous divergeons sur les voies et moyens. Nous faisons face à une grande variété de structures et une grande multiplicité des acteurs, aux aspirations très diverses, comme l'a montré le rapport d'information rédigé par Catherine Fournier, Michel Forissier et Frédérique Puissat.
Dans tous les pays, on a cherché un équilibre entre garanties sociales et intérêt économique des travailleurs indépendants. Tel est le sens des décisions de la Cour de cassation.
La proposition de loi vise à assimiler les travailleurs indépendants des plateformes numériques à des salariés : ils ne le souhaitent pas tous ! Ils sont attachés à leur liberté. Mais il faut trouver un modèle économique qui allie soutenabilité financière du statut, innovation sociale, responsabilité et absence de trappe à précarité ou de dumping social.
Depuis quelques années, la loi a évolué. C'est notamment le cas de la LOM qui a créé un socle d'obligations, dont le droit à la déconnexion et la transparence du prix des courses.
M. Olivier Jacquin. - Dispositions censurées !
Mme Muriel Pénicaud, ministre. - Il est clair qu'une meilleure représentation des travailleurs est nécessaire. Le dialogue social doit être équilibré et durable. C'est l'objet de l'article 48 de la LOM. Une mission a été confiée à Jean-Yves Frouin, ancien président de la chambre sociale de la Cour de cassation, sur ce point.
Nous sommes conscients que le cadre législatif actuel ne répond pas pleinement à l'ensemble des enjeux.
Cette proposition de loi est étayée, mais je ne peux être favorable à sa conclusion, qui est d'assimiler ces travailleurs des plateformes numériques à des salariés. M. Frouin émettra des propositions dans plusieurs mois. Il s'appuiera sur nos débats et il vous consultera.
Nous voulons mieux protéger les travailleurs des plateformes numériques mais pas remettre en cause la souplesse du travail indépendant.
Cette problématique dépasse le cadre national et il faut la porter au niveau européen : sous l'impulsion de la France, la Commission européenne a inscrit une initiative sur les travailleurs des plateformes numériques dans son programme de travail « Repair and prepare for the next generation ». Elle mènera des consultations avec les partenaires sociaux durant le deuxième semestre.
L'adoption d'un nouveau cadre européen garantissant des conditions de travail décentes aux travailleurs des plateformes numériques est également en préparation.
Le Gouvernement vous invite donc à rejeter cette proposition de loi.
M. Jérôme Bignon . - En renforçant les droits des travailleurs des plateformes numériques, ce texte vise à combler un vide juridique réel. De nouvelles formes de travail se sont développées ces dernières années, liées aux nouvelles technologies. Les plateformes numériques mettant en relation usagers et prestataires en temps réel, servent d'intermédiaires avec les clients, ouvrent le champ de l'économie collaborative à l'échelle mondiale.
Ces quelques 200 000 travailleurs qui ne représentent qu'1 % des actifs, oeuvrent dans un nombre croissant de secteurs, du transport à la banque. Les jeunes sont particulièrement concernés. Les problèmes se posent dès lors que ces travailleurs sont économiquement dépendants, lorsqu'au-delà de leur rôle d'interface, les plateformes numériques organisent le travail et perçoivent des revenus importants.
Pour autant, les travailleurs ne sont pas sans statut, bénéficiant du régime de protection sociale propre aux indépendants. Je partage la position de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) qui préfère la création d'un statut ad hoc. La protection sociale est loin d'être aussi complète pour les indépendants que pour les salariés - ancien avocat, je peux en témoigner. Je ne crois pas pertinent d'ajouter un nouveau niveau de complexité administrative.
En revanche, les garanties doivent être étendues en matière de couverture complémentaire de santé. Il faut aussi organiser un dialogue entre plateformes et travailleurs indépendants autour des algorithmes, en particulier lorsqu'ils ont des conséquences sur le niveau des rémunérations.
La convergence des droits entre salariés professionnels et travailleurs des plateformes numériques reste une question ouverte.
Le développement des plateformes numériques sera exponentiel selon un article du New York Times, selon lequel, dans l'avenir, nous ne dirons plus où nous travaillons, mais sur quoi nous travaillons.
Prenons le temps de mener une réflexion collective sur les frontières entre professionnels et non professionnels, entre salariés et travailleurs indépendants.
Mme Catherine Fournier . - Les centres urbains voient émerger de nouvelles catégories de travailleurs pour les services en ville, transport et livraison en particulier, à des prix très compétitifs.
Dans quelles conditions sont rémunérés et dirigés ces travailleurs indépendants, économiquement dépendants ? Nous avons produit un rapport sur le sujet avec Frédérique Puissat et Michel Forissier.
La frontière entre salariat et travail indépendant connaît une acuité nouvelle. Qualifier de salariés des travailleurs qui ne sont pas soumis au pouvoir de direction de la plateforme pose des problèmes juridiques. Nous touchons là au modèle d'une société décloisonnée réclamée par les jeunes. Pour y faire face, nous devons universaliser un modèle de droits sociaux.
On peut distinguer les plateformes de services organisés comme Uber ou Deliveroo ; les plateformes de placement qui mettent à disposition des travailleurs des entreprises pour des missions ponctuelles, en fixant le prix sans organiser les modalités ; des plateformes de mise en relation qui ne fixent pas les prix, comme Malt ; et pour finir, les plateformes de microtravail comme Amazon Mechanical Turk.
Ce nouveau modèle d'entreprise contrôle ses échanges grâce à l'algorithme, bras armé qui génère une croissance d'activité avec un minimum de moyens humains. Nous ne pouvons agir sur ces entreprises, mais nous pouvons renforcer les droits sociaux des travailleurs des plateformes numériques.
Ce nouveau type de travail touche moins de 1 % de la population active et les coursiers constituent une part infime de ces 1 %. Pour l'instant, le législateur a laissé l'initiative au juge. Il lui appartient désormais de créer un cadre juridique plus protecteur.
La proposition de loi du CRCE est trop restrictive, dans son titre même. Certes, l'hypothèse sur les plateformes de services évite de prendre en compte la diversité des plateformes numériques.
Cette proposition de loi représente une alerte et ouvre un débat essentiel. Dans notre rapport, nous avons élargi la problématique à la protection des travailleurs indépendants sans pour autant requalifier la relation. Parmi nos préconisations, l'interdiction de discrimination à l'embauche, une caisse de congés, un contrat collectif complémentaire santé, une assurance contre le risque d'accident du travail, une formation obligatoire pour les moins qualifiés ou encore un régime d'autorisation préalable d'exercer dans certains cas. Nous souhaitons encadrer les conditions de rupture et renforcer le dialogue social.
Je salue l'initiative du groupe CRCE. Nous avons des éléments de convergence mais aussi des divergences avec ce texte, tout comme avec la proposition de loi socialiste. Le groupe UC ne le votera pas.
Madame la ministre, vous avez annoncé le 5 mars dernier une mission sur ce sujet. Je souhaite que nos travaux nourrissent la réflexion.
M. Michel Forissier . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La commission des affaires sociales n'a pas adopté cette proposition de loi mais a souhaité poursuivre en séance ce débat qui est à la fois social et économique.
La protection de ces travailleurs doit accompagner les mutations socioéconomiques pour éviter le piège de la précarité.
La diversité des situations des travailleurs indépendants des plateformes numériques implique que le législateur ne se contente pas d'une simple requalification en contrat de travail.
Les statistiques manquent, mais on parle de 100 000 à 200 000 travailleurs concernés ; pour certains, comme les étudiants à vélo, c'est un revenu d'appoint ; d'autres sont des travailleurs permanents, par exemple les VTC ; d'autres encore, des free-lance qui tarifent des prestations qualifiées très profitables. D'après l'Insee, 4 % des travailleurs indépendants sont économiquement dépendants d'un intermédiaire qui n'est pas forcément une plateforme. Les plateformes elles-mêmes sont hétérogènes, des petites plateformes spécialisées aux multinationales.
Un statut à mi-chemin entre celui de régime indépendant et le salariat n'est pas souhaitable et ne répondrait pas aux aspirations de tous ces travailleurs. Les travailleurs indépendants ont en commun le déficit de protection sociale. Ceux des plateformes numériques bénéficient de la même couverture sociale que les ressortissants du régime général mais ne relèvent pas du droit du travail et ne bénéficient pas du salaire minimum, des congés payés ou de l'encadrement de la rupture du contrat de travail. Ils cotisent moins pour la retraite et sont souvent désarmés face aux accidents et à la rupture de la relation de travail. La crise sanitaire rend plus que jamais visible le besoin de protection.
Nous ne voterons pas ce texte, tout en remerciant nos collègues d'avoir posé le problème, même si les solutions proposées ne sont pas adaptées. Je vous renvoie à notre rapport d'information qui formule des solutions sans modifier la nature du contrat de travail ni rogner notre modèle social.
Attention enfin au risque constitutionnel qu'il y a à déléguer à la négociation des pouvoirs qui relèvent du législateur, même si nous restons très attachés au dialogue social.
Mme Monique Lubin . - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) La question du statut des travailleurs des plateformes numériques est symptomatique d'une capitulation à tous les niveaux. Le modèle social et économique qui se déploie est très « ancien monde » : il obéit à des logiques d'asservissement par la misère et l'exploitation. Le sort fait aux travailleurs des plateformes numériques manifeste un glissement qui menace de virer en dégringolade. Nous renouons avec le tâcheronnage et les systèmes destructeurs anciens, que les luttes sociales avaient permis de dépasser, refleurissent.
Avec Nathalie Grelet-Certenay et Olivier Jacquin, nous avions déposé une proposition de loi rappelant les vertus indépassées du salariat, réhabilitant le contrat de travail et soutenant le recours aux coopératives d'activité et d'emploi dans le cadre de l'économie sociale et solidaire.
Le recours à l'existant est une solution alternative valide. Le présent texte propose un statut de travailleur en pointillé, une sorte de page blanche où les travailleurs et plateformes demeurent dans une confrontation déséquilibrée. Le renvoi au dialogue social ne suffit pas en tant que tel ; il lui faut un cadre protecteur, d'autant que les travailleurs des plateformes connaissent un très fort turnover.
Ce texte affaiblit la puissance encadrante de la loi. Il ne va pas suffisamment à la reconquête des droits perdus par les travailleurs. Rappelons que la Cour de Cassation a requalifié en contrat de travail la relation entre Uber et un chauffeur en mars dernier, arrêt historique !
Alors que des pays ont le courage de réintégrer ces travailleurs au salariat traditionnel, cette proposition de loi reste au milieu du gué. Le droit du travail n'a pas à se soumettre aux logiques économiques, il doit au contraire les façonner. Ces plateformes ne sont pas viables économiquement ; elles ont bâti leur modèle sur leur capacité à contourner le droit du travail.
Nous devons repenser la place de la valeur travail dans notre société. Le travail doit permettre l'émancipation de tous - nous en sommes loin ! Nous devons proposer une réelle évolution pour les travailleurs des plateformes numériques. Ils ne peuvent plus attendre. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)
Mme Guylène Pantel . - Je remercie le groupe CRCE pour ce texte qui interroge les conséquences des nouveaux modèles économiques.
Ubérisation est devenu synonyme de précarisation. Les technologies avancent plus vite que la loi, qui peine à trouver la bonne formule.
Les plateformes sont partout. Celles qui font débat sont celles qui mettent en relation des travailleurs et leurs clients, organisent la rencontre de l'offre et de la demande, dans les secteurs du transport, de la livraison de repas ou des services à la personne notamment.
Elles restent soumises au droit comme le montrent les récentes décisions de la Cour de Cassation. Celle du 4 mars 2020 a même qualifié de « fictif » le statut d'indépendant du plaignant, avec pour conséquence le lancement d'une mission d'information par le Gouvernement sur le sujet.
De par leur statut d'auto-entrepreneur, les travailleurs des plateformes numériques ne bénéficient pas de protection digne en cas d'accident du travail. Les assurances proposées par les plateformes sont insuffisantes, voire inopérantes, n'assurant par exemple pas le torse ou les viscères des livreurs à vélo !
Nous devons parfaire la protection de ces travailleurs. Il faut sans doute combler le vide juridique entre le statut de salarié et celui d'indépendant. En créant un statut pour ces travailleurs, ce texte poursuit un objectif louable. Cependant, ils constituent un public disparate ; certains privilégient la flexibilité qu'offre la qualité d'indépendant quand d'autres, plus précaires, souhaiteraient davantage de protections. Un statut unique ne fait pas consensus.
Un filet de sécurité commun aux plus précaires et aux indépendants est nécessaire. Je salue le rapport de Catherine Fournier, Michel Forissier et Frédérique Puissat sur le droit applicable aux travailleurs indépendants économiquement dépendants. Sans aller jusqu'à la création d'un statut, il émet des recommandations pour améliorer la protection de ces travailleurs et leurs relations avec les plateformes.
Il faut agir vite car le futur s'écrit déjà. Que deviendront ces chauffeurs, ces livreurs, quand la voiture autonome sera une réalité ? Quelles garanties de formation, de reclassement ? Comment les accompagner pour les sortir de ces trappes à précarité ?
Cette proposition de loi pose les bonnes questions mais n'apporte pas les bonnes réponses. Les sénateurs du groupe RDSE s'abstiendront. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)
M. Martin Lévrier . - La crise sanitaire n'a fait que renforcer la nécessité de se pencher à nouveau sur ces travailleurs indépendants, économiquement dépendants.
Les quatorze propositions de Michel Forissier, Catherine Fournier et Frédérique Puissat, qui ont rendu leur rapport le 20 mai dernier, prennent en compte la diversité des situations. Globalement, ils préconisent d'étendre aux travailleurs des plateformes numériques le bénéfice des garanties du code du travail, comme la LOM a commencé à le faire.
Ces travailleurs, qui sont entre 100 000 et 200 000, représentent 0,8 % de la population active : se distinguent les travailleurs occasionnels qui complètent ainsi leurs revenus, ceux dont les plateformes représentent l'activité exclusive - selon l'Insee, 4 % des indépendants sont en réalité économiquement dépendants - et les free-lance, hautement qualifiés, qui recherchent avant tout la flexibilité.
La responsabilité sociale des plateformes a été établie par la loi, ainsi que des droits sociaux et collectifs, comme la faculté de constituer une organisation syndicale. Ce n'est qu'un début. La régulation des relations est renforcée, mais nous devons concilier l'indépendance des travailleurs, le modèle économique des plateformes et la protection des droits sociaux.
Ce texte propose un statut intermédiaire, à mi-chemin entre le salariat et le régime indépendant, qui n'est pas souhaitable. Pour autant, elle pose de bonnes questions sur les algorithmes, qui devraient être rendus le moins opaques possibles.
C'est pourquoi le Premier ministre a confié à Jean-Yves Frouin une mission devant préparer l'ordonnance prévue à l'article 48 de la LOM sur ce sujet. Son périmètre sera élargi aux algorithmes notamment dans l'objectif inchangé de renforcer les droits de ces 200 000 travailleurs.
Il est indispensable d'attendre les résultats de cette mission. Le groupe LaREM votera contre ce texte.
M. Fabien Gay . - Merci à Pascal Savoldelli pour sa pugnacité dans ce combat aux côtés des travailleuses et travailleurs des plateformes numériques, à la rapporteure Cathy Apourceau-Poly et à nos collègues Fournier, Forissier et Puissat, pour la qualité de leur travail.
Ce modèle s'étend à tous les secteurs, souvent au détriment des plus précaires mais aussi des entreprises vertueuses.
Avec Pascal Savoldelli, nous avons été bousculés par nos rencontres avec certains jeunes séduits au départ par la liberté vantée par les plateformes car dégoûtés par l'expérience du salariat et d'un management avilissant.
Mais où est la liberté, quand on travaille sept jours sur sept, dix heures par jour, pour moins que le Smic horaire ? Les grandes plateformes ne proposent d'autre horizon que celle d'exploiter. Le maître de forges a été remplacé par l'IPhone pour ces nouveaux forçats du travail. Assurément, si Victor Hugo devait réécrire Les Misérables, Cosette livrerait des repas à vélo, les Thénardier seraient l'une de ces grandes plateformes multinationales ; qui tiendrait le rôle de Javert, madame la ministre ? (Sourires)
D'après une étude du Collectif des livreurs autonomes de Paris, 70 % des livreuses et livreurs sont favorables à nos propositions : le droit social, ni plus ni moins, avec des adaptations pour mobiliser les droits dans un contexte qui a évolué tout en assurant une réelle autonomie.
Cette proposition de loi ne crée pas de troisième statut, elle répond à une situation où des plateformes de travail exercent un pouvoir de contrôle et de sanction sur les travailleurs, tout en refusant que leur responsabilité, notamment sanitaire, soit engagée. Aux travailleurs de payer masques et gel ! Or les plateformes organisent et encadrent l'activité : les prescriptions des contremaîtres ont simplement été remplacées par les algorithmes, traduction informatique des directives patronales.
Les véritables indépendants qui recourent à de véritables plateformes de mise en relation ne nous posent aucun problème, au contraire. Qu'un ébéniste ou un sculpteur élargisse sa clientèle grâce à une plateforme, très bien ! En revanche, nous voulons lutter contre les faux indépendants, dont l'activité est totalement encadrée et maîtrisée par une plateforme.
Ce texte a vocation à permettre l'application effective du droit social et sa mobilisation par les travailleurs, mais aussi à lutter contre la dégradation du salariat en garantissant une réelle écoute, une véritable émancipation collective. Nous voulons une application effective du droit du travail, et lutter contre la dégradation du salariat. Nous ne voulons pas que les plateformes fassent de la concurrence déloyale aux entreprises vertueuses. Ne laissons pas ces plateformes galvauder, paupériser l'entrepreneuriat.
Des entrepreneurs ont témoigné d'une hausse de leur activité mais aussi d'une dépendance aux plateformes ; certains ont préféré passer par des organismes respectueux.
La livraison est un service mais surtout un vrai travail, elle se fait à la sueur du travailleur. Comme l'a dit un restaurateur, il faut payer le prix de la flemme.
En attendant l'avènement d'une société égalitaire où chaque individu pourra s'épanouir dans son travail, nous proposons de poser une première pierre à l'édifice en accordant un statut et des droits à celles et ceux qui n'ont rien.
Je vous demande de voter cette proposition de loi d'intérêt général. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
Mme Frédérique Puissat . - Cette proposition de loi fait suite à divers travaux sur les plateformes, comme un chapitre de la loi de 2016, la LOM de 2019, la proposition de loi de Mme Lubin et le travail que nous avons conduit avec mes collègues Forissier et Fournier.
Nous attendons avec impatience les conclusions de Jean-Yves Frouin - et nous nous tenons à sa disposition.
Cette proposition de loi est une initiative intéressante ; elle nous rassemble dans l'intérêt sinon dans le vote, et même si elle ne concerne que quelques centaines de milliers de travailleurs, nous devons en tenir compte.
L'article premier introduit un nouveau livre dans le code du travail consacré aux travailleurs des plateformes et leur propose un changement de statut. Or la Fédération nationale des autoentrepreneurs (FNAE) a indiqué que seuls 20 % des travailleurs indépendants voulaient ce changement. En outre, cet article renvoie à la négociation collective pour les contrats d'horaires et de rémunération, ce qui serait contraire à l'article 34 de la Constitution.
L'article 2 établit un droit à l'assurance chômage - sans apporter aucune clarté. (Mme Éliane Assassi s'exclame.)
Le débat sur les algorithmes à l'article 3 est important : une mathématicienne américaine de renom parle d'eux comme d'une bombe à retardement. Sur ce sujet, la proposition de loi est bienvenue, mais elle serait difficile à mettre en oeuvre. Divulguer un algorithme pourrait aussi relever du secret des affaires ; sommes-nous seulement sûrs qu'il y ait assez d'experts pour les expliquer ?
C'est une proposition de loi d'appel, comme l'a dit notre rapporteure. Nous voulons sortir du principe de requalification et de la question du statut, au profit d'une universalisation des droits sociaux. Nous ne pouvons y répondre, mais il faut continuer à lutter contre la précarité sans limiter la reprise de l'activité économique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Olivier Jacquin . - Merci à nos collègues pour ce débat d'importance.
En janvier, dans une proposition de loi d'appel, nous proposions d'instaurer le statut de la Coopérative d'activité et d'emploi (CAE), inventé en 2014 pour contrer les excès de l'auto-entreprenariat et pour offrir de l'autonomie aux salariés. La Fondation Jean-Jaurès a travaillé sur ce point. Pour la CAE, on reste dans le code du travail existant. Nos collègues de la majorité sénatoriale ont été convaincus, puisque le recours aux CAE fait partie des recommandations de leur récent rapport sur le sujet.
Il faudrait appliquer le devoir de vigilance introduit par la loi de 2017 de M. Dominique Potier. Nous avons restreint ce droit aux plateformes numériques, même si on pourrait l'élargir à tout secteur de l'économie où les donneurs d'ordre peuvent se déresponsabiliser en ayant recours au sous statut d'autoentrepreneur.
Lundi, le quotidien Libération a rapporté une situation incroyable : un migrant travaillait depuis deux mois sans être payé, croyant travailler pour Frichti, alors qu'il travaillait pour un sous-traitant que Frichti affirme ne pas connaître !
Il faut lutter contre le cyber-précariat et la dictature de l'algorithme. Merci aux collègues du CRCE de participer à la lutte contre le cancer qu'est l'ubérisation du travail.
Le confinement a mis en évidence la détresse des travailleurs surexploités. Les indépendants ont droit à une protection comme les salariés. L'arrêt du 4 mars de la Cour de cassation a d'ailleurs jugé que le statut d'indépendant était fictif.
Par deux fois le Conseil constitutionnel a censuré les tentatives gouvernementales de créer un tiers statut, qui protège plus les plateformes que les travailleurs. Et vous souhaitez poursuivre dans cette voie, madame la ministre. Luttons contre la politique du fait accompli et ce cheval de Troie dans le droit social.
Nous ne voulons pas de charte. Non au bricolage gouvernemental. Non à l'ubérisation du travail !
Le fondateur de la CAE québécoise Eva disait : « l'économie collaborative qui existe doit être socialisée et solidarisée ». (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)
M. Cyril Pellevat . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le numérique a des effets importants sur le monde du travail, d'où des problèmes de protection des droits des travailleurs au sein de ces nouveaux modèles.
Derrière le terme d'ubérisation se cache une forme nouvelle de travail qui ne représente que 1 % des emplois. Ces travailleurs évoluent dans un cadre légal inapproprié : le code du travail ne reconnait en effet que les salariés et les travailleurs indépendants.
Les travailleurs des plateformes numériques sont exposés à la précarité, mais ne sont pas en mesure de renégocier leurs conditions de travail. Cette prétendue exploitation digne du siècle dernier est-elle néanmoins vraie partout et toujours ?
La révolution numérique ne doit pas être étouffée. Si les grandes plateformes internationales ont les ressources pour absorber de nouvelles règles, ce n'est pas le cas des jeunes entreprises innovantes françaises, souvent plus vertueuses.
En outre, les plateformes numériques sont une porte d'entrée sur le marché du travail pour les travailleurs peu qualifiés. Des restrictions auraient des conséquences négatives sur les emplois créés. Je ne suis donc pas favorable à cette proposition de loi.
Il est nécessaire de protéger les travailleurs des plateformes numériques contre des ruptures de contrat abusives et leur apporter plus de protection sociale, par exemple en créant une assurance contre la cessation d'activité comme celles auxquelles souscrivent les autres indépendants. La règlementation doit être plus souple et s'adapter à la réalité et à la diversité des plateformes.
La création d'instances de dialogue social serait une meilleure solution. Je voterai contre cette proposition de loi, bien que, comme mes collègues, je souhaite améliorer les conditions des personnes qui travaillent dans les plateformes du numérique.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Olivier Jacquin . - Madame la ministre, je vous ai écrit il y a quelque temps sur la question des livreurs - qui n'ont pas de licence de transport et sont limités aux deux-roues non motorisés. Quels sont les contrôles pour ceux qui sont motorisés ? Je n'ai pas eu de réponse.
Selon Laetitia Dablanc, près de 37 % de livreurs sont en deux-roues motorisés sans autorisation. Que faites-vous en matière de contrôle ? Certes, des étudiants occupent de tels postes pour avoir un petit complément de revenu, mais il s'agit surtout de travailleurs précaires et maintenant irréguliers. Selon cette chercheuse, 37 % des livreurs partagent des comptes : il s'agit de sous-traitants de sous-traitants...
Vous croyez enfin que ces travailleurs ne veulent pas être salariés ? Interrogez ceux qui ont été victimes de la crise du Covid !
M. Pascal Savoldelli . - Il ne s'agirait que de 200 000 personnes, soit 0,8 % de la population active ? Qui oserait ramener les 216 000 médecins de notre pays à un pourcentage - 1 % en l'occurrence ? Personne ! Notre société est déjà assez violente.
Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure. - Il a raison !
M. Pascal Savoldelli. - Plutôt que de nous jeter les chiffres à la figure, allez voir les travailleurs des plateformes ! Ne croyez pas les sondages réalisés par les plateformes.
Les travailleurs des plateformes numériques ne pouvaient pas accéder aux aides aux autoentrepreneurs pendant la crise du Covid-19 faute de pouvoir justifier de leur baisse d'activité. Éjectables en un clic en temps normal, ils sont privés d'aides en temps de crise. Et pourtant, ils ont des loyers à payer.
Faites attention à ce qui se profile avec ces plateformes numériques.
Mme Catherine Fournier . - Quand on parle de 200 000 travailleurs en disant que c'est peu de personnes, cela ne signifie nullement que nous les dénigrons ou que nous ne nous occupons pas d'eux. Nous ne disons pas qu'il ne faut pas régler le problème. Au contraire ! Dans notre rapport avec Frédérique Puissat et Michel Forissier, nous nous sommes attachés aux conditions de travail des travailleurs des plateformes numériques.
M. le président. - Amendement n°1, présenté par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Alinéa 24, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et ne peut être inférieure au taux horaire du salaire minimum interprofessionnel de croissance
M. Fabien Gay. - Nous clarifions notre terme de « salaire décent » en précisant que la rémunération des travailleurs des plateformes ne peut être inférieure à celle du Smic.
Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure. - Avis défavorable de la commission des affaires sociales. À titre personnel évidemment, je considère que cet amendement apporte une précision fondamentale. L'article premier renvoie à la négociation collective sans référence à un socle législatif, d'où cette nécessaire précision.
À titre personnel, je vous invite donc à voter cet amendement.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. - Cet amendement étant de cohérence, la réponse est également de cohérence : avis défavorable. La mission Frouin travaille sur la représentation des travailleurs des plateformes numériques. Ils pourront notamment discuter du tarif des courses. La référence au Smic n'est pertinente que pour les salariés.
Enfin, les critères du Fonds de soutien aux indépendants ont été modifiés pour qu'ils s'adaptent aux micro-entrepreneurs.
M. Pascal Savoldelli. - Quand vous désignez quelqu'un pour piloter une mission, la moindre des choses est qu'il consulte les parlementaires qui travaillent sur le sujet depuis des mois, des années. Madame la ministre, dites à M. Frouin de nous solliciter. En outre, a-t-il auditionné les collectifs des travailleurs des plateformes numériques et les organisations syndicales ? Je ne le crois pas.
Un travailleur de plateforme numérique qui a travaillé trois mois et 35 heures doit pouvoir voter et bénéficier d'une représentation syndicale.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. - Je vous ai moi-même proposé d'être associés à la mission Frouin. Vos travaux ont bien cerné et documenté les enjeux, même si nous ne sommes pas tous d'accord sur les réponses à apporter. Les auditions de la mission ont été retardées à cause du confinement. Elle se conclura donc en octobre et non en juin.
L'amendement n°1 est adopté.
Mme Éliane Assassi. - Bravo !
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. - L'ensemble des débats a été particulièrement intéressant. Je trouve que votre recherche épidémiologique, votre analyse des symptômes et votre diagnostic sont bons. En revanche, j'en suis moins sûr pour le traitement. (Sourires)
Mme Éliane Assassi. - Comme pour le Covid ! (On s'amuse.)
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. - Je demande à chacun d'avoir un vote cohérent.
L'article premier, modifié, n'est pas adopté.
L'article 2 n'est pas adopté.
ARTICLE 3
M. Pascal Savoldelli . - Mme Puissat a évoqué la confidentialité des algorithmes dans l'entreprise. Il va falloir statuer très vite car il s'agit d'un processus aliénant et opaque.
Le secret s'impose bien sûr quand il s'agit de labéliser ou de breveter pour protéger l'innovation mais les algorithmes relèvent d'une autre logique. Les algorithmes dont nous parlons ici fonctionnent comme une suite d'opérations et d'instructions simples pour organiser le travail et fixer la rémunération, avec des éléments de flexibilité.
Tout le monde sait que quand il y a match de football ou bien s'il pleut, la demande est plus élevée et donc le prix aussi. Toute civilisation a été construite sur des algorithmes. Les travailleurs doivent pouvoir y avoir accès pour négocier.
Mon grand-père d'origine italienne travaillait à la tâche. Il avait une relation en face à face avec son commissionnaire. Il pouvait discuter de la valeur de son travail. Ce n'est pas le cas des travailleurs des plateformes numériques.
L'article 3 n'est pas adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. le président. - Amendement n°2 rectifié, présenté par M. Jacquin.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le chapitre III du sous-titre II du titre III du livre III du code civil, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre ...
« Devoir de vigilance
« Art. 1253. - Toute plateforme de mise en relation par voie électronique, au sens de l'article 242 bis du code général des impôts, ayant recours à des travailleurs indépendants pour l'exécution d'une opération, quelle qu'en soit la nature, est tenue d'une obligation de vigilance consistant à identifier les risques, à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l'environnement, consécutifs à l'exécution de cette opération, et à garantir une rémunération décente et juste au regard du temps pendant lequel le travailleur est à la disposition de la plateforme.
« Le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage qui, à titre de professionnel, contracte avec une plateforme ayant recours à des travailleurs indépendants dans les conditions posées à l'alinéa précédent, veille à ce que la plateforme respecte les obligations mentionnées à l'alinéa précédent. S'il est informé par écrit, par le travailleur, par un agent de contrôle mentionné à l'article L. 8271-1-2 du code du travail ou par une organisation syndicale, du fait que la plateforme ne respecte pas les obligations visées à l'alinéa premier, le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage lui enjoint aussitôt, par écrit, de faire cesser sans délai cette situation. À défaut de régularisation de la situation signalée ou de rupture sans délai du contrat conclu avec la plateforme, le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre est solidairement responsable du dommage mentionné à l'article 1254 du présent code.
« La plateforme publie chaque année sur son site internet un rapport précisant les modalités selon lesquelles est assuré, directement et le cas échéant par l'intermédiaire des algorithmes mis en oeuvre, le respect des obligations mentionnées au premier alinéa, selon les modalités précisées par décret en Conseil d'État.
« Les mesures mises en oeuvre au titre des alinéas précédents sont proportionnées aux moyens dont dispose l'entreprise mentionnée au premier alinéa, ou, le cas échéant, l'unité économique et sociale ou le groupe auquel elle appartient.
« Art. 1254. - Le manquement aux obligations définies à l'article 1253 oblige la plateforme à réparer le dommage que l'exécution de ces obligations aurait permis d'éviter.
« La juridiction peut ordonner la publication, la diffusion ou l'affichage de sa décision ou d'un extrait de celle-ci, selon les modalités qu'elle précise. Les frais sont supportés par la personne condamnée.
« La juridiction peut ordonner l'exécution de sa décision sous astreinte.
« L'action est introduite devant la juridiction compétente par toute personne justifiant d'un intérêt à agir à cette fin. »
II. - Le troisième alinéa du I de l'article L. 225-102-4 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Sans préjudice des articles 1253 et 1254 du code civil, le plan détaille les mesures relatives aux opérations effectuées par les travailleurs indépendants. »
M. Olivier Jacquin. - Cet amendement responsabilise les plateformes numériques en renforçant le devoir de vigilance. Ce dispositif aurait vocation à être élargi à tous les secteurs de l'économie car les chaînes de sous-traitance ont parfois abouti à des désastres.
Les plateformes de travail ne sont pas de simples interfaces de mise en relation. Le devoir de vigilance n'est pas une incantation mais est juridiquement opposable. La condition est que le donneur d'ordre doit être informé par écrit si sa chaîne de sous-traitance n'est pas vertueuse.
Je salue le fait que le rapport Fournier-Forissier-Puissat ait rappelé ces situations inacceptables.
Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure. - Cet amendement modifie le code civil pour imposer aux plateformes un devoir de vigilance afin de mieux protéger leurs travailleurs.
Mais, à mon sens, cet amendement maintient les travailleurs des plateformes numériques dans un statut d'indépendant, ce qu'à titre personnel je ne puis accepter. La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable pour d'autres raisons. (On s'amuse.)
Mme Muriel Pénicaud, ministre. - Avis défavorable. Je comprends l'esprit de cet amendement qui s'inspire de la loi du 27 mars 2017 sur le devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre.
Nous oeuvrons en faveur du devoir de vigilance à l'échelle européenne. En l'espèce, vous ne proposez aucun seuil, les contraintes que vous créez ne seraient pas vérifiables et ces dispositions seraient difficilement applicables.
Intégrons vos réflexions à celles de M. Frouin.
Les plateformes peuvent-elles être des tremplins ? Beaucoup de jeunes sont intéressés par ces plateformes parce qu'ils ont une aspiration professionnelle alors qu'il y a trop de discriminations à l'embauche pour leur permettre de se réaliser. Il s'agit donc souvent de la meilleure et première voie d'accès à l'emploi.
Nous voulons une émancipation par le travail. Les travailleurs des plateformes numériques doivent pouvoir évoluer. C'est pourquoi dans la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et la LOM nous avons prévu que les plateformes numériques participent à la formation professionnelle.
Nous avons mené des opérations de lutte contre le travail illégal. Nous y sommes attentifs aussi dans ce secteur.
M. Pascal Savoldelli. - Olivier Jacquin a posé la question des relations entre les sociétés mères et leurs filiales. Les avis sont divergents sur ce sujet et le texte que nous présentons en ressort dénaturé : une plateforme n'est pas une société mère, et un travailleur de plateforme numérique n'est pas un sous-traitant.
Mieux vaut retirer cet amendement. Nous resterons attentifs à la sécurité des travailleurs. Amazon et Renault viennent d'être condamnés pour manquement aux obligations de sécurité grâce au statut de protection des salariés que nous avons réussi à obtenir, pas grâce au devoir de vigilance.
M. Olivier Jacquin. - Je ne maîtrise pas tous les arcanes juridiques de l'article 45 et je considère comme un miracle que mon amendement - que je retire - soit parvenu jusque-là ! (Sourires) Cela ressemble à de la loterie. Je poursuivrai cependant une réflexion sur la responsabilité des donneurs d'ordre.
Madame la ministre, le professeur de droit Stéphane Vernac, qui a travaillé sur le devoir de vigilance, m'avait prévenu que la réponse du Gouvernement serait : « c'est compliqué », comme vous dites. Pourtant, nous ne renoncerons pas à faire avancer cette idée.
La mission Frouin est un élément constructif. Je vous propose, madame la ministre, qu'elle auditionne le migrant qui travaillait pour Frichti - j'en ai parlé tout à l'heure. Je me souviens avoir accompagné un jeune qui croyait aux plateformes collaboratives il y a quelques années que vous m'aviez fait le plaisir de recevoir et d'entendre.
Carrefour vient d'annoncer un partenariat avec Uber Eats, la SNCF, avec un système de réservation de VTC, sans parler du Sénat avec LeCab. J'interrogerai d'ailleurs les questeurs à ce sujet.
M. le président. - Donc, vous retirez votre amendement... (Sourires)
L'amendement n°2 rectifié est retiré.
L'article 4 n'est pas adopté.
La proposition de loi n'est pas adoptée.
Mise au point au sujet d'un vote
Mme Guylène Pantel. - Lors du scrutin n°108, ma collègue Mireille Jouve souhaitait voter pour.
M. le président. - Acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.
Efficacité des aides personnelles au logement
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à garantir l'efficacité des aides personnelles au logement.
Discussion générale
Mme Cécile Cukierman, auteure de la proposition de loi . - Nous avons inscrit ce texte dans la niche parlementaire de notre groupe du fait de son actualité prégnante, alors que la crise place nos concitoyens face à des difficultés accrues.
Il nous a semblé utile d'assurer un soutien solide aux ménages concernant un poste de dépense très lourd dans leur budget : les charges de loyer.
Malgré le chômage partiel, de nombreux allocataires des aides au logement souffrent d'une baisse, voire d'une suppression de leurs revenus. Plus de 2,5 millions de ménages de locataires ou d'accédants à la propriété, soit un tiers des actifs, ont été touchés.
Report de la trêve hivernale et augmentation des aides personnelles au logement (APL) de 100 euros par enfant : les mesures prises par le Gouvernement restent insuffisantes à long terme et il faut un fonds spécifique pour aider les locataires. Nous souhaitons aussi revenir sur les décisions qui ont conduit à raboter les aides au logement.
L'adoption de cette proposition de loi dès le stade de la commission envoie un signe clair du Sénat, transpartisan et constructif en faveur d'une priorité donnée à la préservation de ces aides, outil majeur d'égalité et de solidarité pour nos concitoyens.
La question du logement est fondatrice et structurante, mais le Gouvernement a fait le choix depuis le début du quinquennat de la considérer comme un produit marchand et a asséché les aides à la pierre. Le choix est très ancien monde. Le droit au logement est consubstantiel à la notion même de dignité humaine et reconnu comme un droit à valeur constitutionnelle, garanti par les textes fondamentaux de la République et reconnu comme tel par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
De la qualité du logement, de sa configuration dans l'environnement dépendra la façon dont les habitants vivront. Nous ne pouvons donc accepter la politique du rabot de ces aides qui bénéficient à 6,5 millions de personnes.
Le Président de la République avait donné le ton dès le début du quinquennat avec une baisse systématique de 5 euros des APL, geste déconnecté des réalités de provocation sociale qui a nourri la colère au moment même où la suppression de l'ISF redonnait 3,2 milliards d'euros à ceux qui possèdent déjà tout.
Les employés et les ouvriers représentent 62 % des bénéficiaires des APL. Il faut les épauler pour garantir le maintien du droit à se loger.
Le collectif « Vive l'APL » et le collectif des associations unies demande à renoncer à toutes les économies réalisées sur les aides au logement depuis 2017.
Et pourtant le Président de la République s'entête, méprisant comme de coutume l'importance de ces 5 euros par mois pour ces ménages précaires, ces « qui pensent que (...) le summum de la lutte, c'est les 50 euros d'APL » et qui ont tant besoin « du pognon de dingue des aides sociales ».
Les aides au logement sont l'un des principaux instruments anti-pauvreté dans notre pays. Depuis le début du quinquennat, 7 milliards d'euros d'économies ont été faites dans ce domaine, depuis la baisse des aides à la pierre jusqu'à la limitation à 0,3 % de la revalorisation des APL en deçà de l'inflation.
Le mode de calcul des APL doit faire l'objet d'une réforme liée à la contemporanéité des versements. Quelque 600 000 allocataires perdraient leurs aides purement et simplement avec cette réforme. La crise sanitaire a heureusement conduit à reporter encore une fois cette réforme. Supprimez-la et remettez au coeur de votre politique l'intérêt des allocataires !
Tel est l'objectif de notre proposition de loi, qui change ainsi le curseur.
L'article premier supprime le délai de carence d'un mois pour le versement des allocations logement. Évitons d'ajouter des difficultés aux difficultés et d'enclencher la spirale vers les expulsions.
L'article 2 demande la suppression de l'application d'un seuil de non-versement, aujourd'hui fixé à 10 euros. Nous avons conscience des réserves sur cet article, nous y reviendrons dans le débat.
L'article 3 créait une présomption de bonne foi en période de crise. Il était redondant ; nous en prenons acte.
L'article 4 revient sur la désindexation des APL sur l'inflation, qui représente une économie estimée à 200 millions d'euros.
L'article 5 constitue le gage financier.
Nous remercions la commission de nous avoir soutenus. Souhaitons que le texte soit adopté en séance après un beau débat sur les conditions d'exercice de ce droit fondamental : permettre à chacun de nos concitoyens d'avoir un toit. Un plan de relance devra aussi être lancé avec un contrôle des loyers privés, meilleur moyen de limiter les charges des aides.
La lutte contre le mal-logement vaut mieux que les économies de bouts de chandelles faites sur le dos des plus précaires. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SOCR ; M. Henri Cabanel applaudit également.)
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur de la commission des affaires économiques . - À une très large majorité, la commission des affaires économiques a décidé d'apporter son soutien à ce texte qui prévoit la suppression du mois de carence et la réindexation des APL.
Nous sommes en désaccord avec une politique qui est au détriment des plus modestes et affaiblit le mouvement HLM. Nous nous inscrivons contre la politique du Gouvernement qui consiste à réaliser de manière brutale des économies sur les aides au logement pour rétablir les comptes publics et permettre à la France de sortir de la procédure de déficit excessif.
Entre 2017 et 2020, près de 6 milliards d'euros seront économisés. L'État dépensera 3 milliards d'euros de moins pour les APL. La Cour des comptes souligne, dans son rapport public annuel, combien cette politique suscite des interrogations en termes d'équité. Elle relève aussi qu'elle a mis à mal les relations entre le Gouvernement et les organismes HLM.
Les APL ont représenté 17 milliards d'euros en 2018 et 2019. Quelque 20 % des foyers touchent ces aides qui représentent un tiers de l'effort de la Nation pour les ménages du premier décile - lesquels représentent 75 % des bénéficiaires.
Baisser les APL, c'est frapper le pouvoir d'achat des plus fragiles. C'est aussi une politique d'affaiblissement du logement social. La réduction de loyer de solidarité représente une ponction de 1,3 milliard d'euros en 2020. La capacité des bailleurs sociaux à construire de nouveaux logements est amputée. Près de 100 000 constructions ne seront pas réalisées cette année en raison de l'arrêt des chantiers pendant le confinement.
Les mesures du Gouvernement ne feront qu'aggraver la situation. Les bailleurs sociaux pourront-ils continuer d'acheter des programmes en VEFA ?
Monsieur le ministre, nous vous avions écrit, Sophie Primas, Annie Guillemot et moi, pour soutenir la proposition de la Fondation Abbé-Pierre de créer un « fonds d'aide à la quittance », doté de 200 millions d'euros. C'est deux fois moins que les économies réalisées chaque année par la diminution de 5 euros des APL, c'est moins que le produit de leur gel à 1 % et de leur non-revalorisation en 2019 et 2020. Le ferez-vous ?
Il faut redonner de l'air aux bailleurs sociaux. La question d'un moratoire de la réduction du loyer de solidarité (RLS) ou d'une mesure équivalente doit être envisagée. La revalorisation de l'APL accession est nécessaire pour relancer une politique ambitieuse du logement. Quelles sont les intentions du Gouvernement à ce propos ?
La commission propose de supprimer le mois de carence du versement des APL, car il s'agit d'une mesure qui fait déjà l'objet de nombreuses exceptions. Elle ne s'applique pas par exemple à ceux qui habitent un logement insalubre. Le coût de cette mesure serait de 250 millions d'euros en année pleine nous dites-vous ; et 1,2 million de demandes nouvelles sont enregistrées chaque année. La mesure apportera plus de lisibilité : la Mutuelle sociale agricole (MSA) demande cette suppression depuis 2002.
La commission propose aussi d'approuver le retour de l'indexation des APL sur l'indice de référence des loyers (IRL). Après les avoir réduites de 5 euros en 2017, le Gouvernement a plus discrètement décidé leur gel puis leur sous-revalorisation. Nous l'avions dénoncé en loi de finances. La demande de réindexation est portée par les organismes HLM.
La suppression du seuil de non-versement à 10 euros par mois n'est en revanche pas justifiée, car il s'agit d'une mesure de bonne gestion. Ce seuil touche 17 000 ménages pour un montant total d'un million d'euros et des APL moyennes de 60 euros par an alors que le coût de gestion et d'instruction d'une demande serait de l'ordre de 80 à 90 euros.
En 2017 et 2018, ce seuil avait déjà été abaissé. Il est complètement supprimé lorsque la RLS a un effet aggravé. D'où notre amendement de suppression de l'article 2.
Une politique du logement juste et ambitieuse, tel est notre objectif, tenant compte des difficultés des locataires et des bailleurs dans le cadre de la crise sanitaire et économique que nous traversons.
C'est pourquoi, elle vous propose de supprimer le mois de carence et de revenir à une meilleure revalorisation des APL. (Applaudissements sur la plupart des travées, à l'exception de celles du groupe LaREM)
M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement . - L'examen de cette proposition de loi est d'autant plus important dans la période que nous traversons, qui montre combien l'habitat est crucial, et une question de dignité pour nombre de nos concitoyens. Notre rôle à tous est d'aider ceux qui souffrent dans leur logement.
Nous avons une vision commune sur la politique du logement à mener ; ce qui change, c'est le chemin qui y mène.
Notre premier défi est la réhabilitation et la rénovation de logements ainsi que la lutte contre l'habitat insalubre. C'est ce que nous avons fait avec la loi ELAN et les efforts menés après le drame de la ville de Marseille. Mais ce n'est pas l'objet du débat d'aujourd'hui.
Notre deuxième défi, c'est de produire certes plus de logements, mais surtout plus de logements abordables. Il arrive en effet de plus en plus souvent que le taux d'effort de nos concitoyens atteigne 50 %, c'est-à-dire que la moitié des revenus sont consacrés au paiement du loyer.
Le logement social est un trésor du modèle social français. Ce modèle, nous y sommes très attachés et nous voulons le sauvegarder. On ne peut pas dire que ce Gouvernement, que le ministre que je suis, aient eu l'intention de financiariser les bailleurs sociaux. Je me suis assez battu à l'Assemblée nationale, mais contre des parlementaires de sensibilités présentes ici, qui souhaitaient ouvrir le capital de ces derniers pour qu'on n'en doute pas.
Les regroupements des organismes HLM, lancés par Jacques Mézard, fonctionnent bien. Les titres participatifs, ce sont 900 millions d'euros. Un représentant des organismes HLM me le disait : nous n'aurions pas fait autre chose si nous avions imaginé un instrument contre la crise financière. Je l'ai reconnu avec humilité, nous sommes allés trop loin sur la RLS.
En 2019, nous avions décidé de lancer 110 000 constructions. Nous avons atteint 109 000. La dynamique du logement - avec 10 % d'autorisations d'urbanisme en plus en 2018 - s'est confirmée en 2019.
Les offices HLM solidaires - nous en avions découvert un à Espelette - ont été requis par la mairie de Paris. Hier soir, 180 000 personnes ont été accueillies dans des dispositifs d'hébergement. Pendant le confinement, elles étaient 34 000 de plus.
L'APL n'est pas un minimum social. Cette aide n'a pas l'effet inflationniste que certains prédisent, sauf peut-être sur les petites surfaces. Mais elles ne doivent pas nous faire oublier l'objectif de produire du logement abordable.
Le public éligible aux APL doit être particulièrement soutenu, c'est pourquoi nous avons décidé de verser une aide exceptionnelle à 4 millions de familles.
La baisse de 5 euros des APL était une mauvaise décision. Pour comprendre le tableau de calcul, il faut un doctorat en Excel ! (Sourires et marques d'approbation) De plus, les APL calculent une aide en fonction de la situation du bénéficiaire il y a deux ans.
La réforme des APL, d'autant plus importante aujourd'hui, est prête. Elle a été reportée car le 1er avril, les employés des caisses d'allocations familiales (CAF) qui devaient la lancer étaient extrêmement sollicités à cette période.
Mon objectif est de lancer cette réforme politique et non budgétaire avant la fin de l'année. S'il y avait un retournement de cycle, cette réforme deviendra coûteuse.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Vous ne l'appliquerez pas ! C'est étrange...
M. Julien Denormandie, ministre. - Je n'ose même pas vous répondre ! Vous me connaissez suffisamment pour savoir que ce n'est pas vrai ! Cette réforme sera appliquée avant la fin de l'année.
Je suis en désaccord avec l'article premier sur les délais de carence : des exceptions existent déjà. Même avis que la commission sur l'article 2, ainsi que sur l'article 3.
L'article 4 renvoie à des mesures devant être vues en loi de finances.
M. Franck Menonville . - La pandémie et les mesures prises pour l'endiguer vont déclencher une récession historique : contraction du PIB de 11 %, déficit public d'au moins 9 %, dette publique atteignant 115 %. Elle aura des conséquences sur les ménages. Or le logement est le premier poste de dépenses des Français. La politique du logement est aussi un moyen de relance économique, via le soutien au secteur du bâtiment. Certains bailleurs sociaux sont déjà vulnérables - il faut soutenir leurs capacités d'investissement et de rénovation.
Les aides au logement sont un pilier de la politique sociale française depuis 1948. En 2018, 17 milliards d'euros étaient versés à 6,6 millions de bénéficiaires. Il ne faut pas faire d'économies de bouts de chandelle.
Je rejoins la commission sur la suppression du seuil de non-versement à 10 euros, pour des raisons de bonne gestion. Je souscris également à la suppression du maintien de l'APL en cas de loyer impayé, qui vidait de sa substance le principe même de l'aide au logement.
La commission a approuvé, à raison, la fin du délai de carence - si l'aide est due, elle doit être versée, c'est une question d'équité. Je suis favorable à la réindexation sur l'indice de référence des loyers, qui, pour garder toute pertinence, doit être réactualisé régulièrement.
Nous avons fait face ensemble contre la crise sanitaire. Pour tenir face à la crise économique, il faut soutenir les entreprises, mais aussi les ménages qui sont l'un des moteurs de la consommation et de la croissance.
Je regrette la disparition de l'APL accession qui était utile aux ménages modestes.
Cette proposition de loi contribuera à mieux soutenir les Français les plus fragiles. Nous voterons le texte amendé par la commission.
Mme Valérie Létard . - Je remercie le groupe CRCE d'avoir souhaité ce débat. Le logement des plus modestes doit être une priorité de chaque instant pour les responsables politiques, tant au niveau local que national.
Le confinement a démontré une fois de plus combien le logement était source d'inégalités, mais aussi un élément fondamental du bien vivre et du bien travailler. Sans logement, on ne peut construire sa vie, sa famille, son travail, sa santé. C'est le nid, comme le dit Jean-Louis Borloo.
Hélas, les mesures budgétaires, ainsi que certaines dispositions de la loi ELAN, empêchent les offices HLM de construire et de rénover leur parc. En trois ans, la contribution de l'État a chuté de 3 milliards d'euros, ce qui a remis en cause le modèle économique des bailleurs sociaux et fragilisé les ménages. La vente d'appartements n'est pas au rendez-vous comme vous l'aviez imaginé - et pourquoi vendre des logements locatifs sociaux pour en construire d'autres, sachant que ce sont très rarement ceux qui les habitent qui les achètent.
Nous devons protéger et aider ceux qui souffriront le plus de la crise sociale, or le logement est un frein au retour à l'emploi. Il faut construire dans le cadre d'une politique de la ville transversale, anticiper les ruptures. Dans bien des territoires, on s'inquiète de l'échéance du 31 décembre 2024, qui risque de ne pas pouvoir être respectée.
Attention à ne pas couper les capacités d'investissement des collectivités comme cela a été fait pour les bailleurs sociaux. Établissez plutôt des relations claires et franches avec elles.
Monsieur le ministre, vos réformes étaient conçues pour le beau temps. Alors que la tempête gronde, il faut engager le moratoire de la RLS, tant attendu par les bailleurs sociaux.
Merci au groupe CRCE pour sa proposition de loi, merci à Cécile Cukierman et à Dominique Estrosi Sassone pour leur travail respectif au service d'un texte qui apportera de l'oxygène aux ménages les plus modestes. En leur versant 150 euros pendant le confinement, plus 100 euros par enfant, le Gouvernement a reconnu que les minimas sociaux ne suffisent pas.
La suppression du mois de carence est une mesure de justice. Alors que le prélèvement de l'impôt à la source permet la contemporanéité, il n'est pas logique de priver les bénéficiaires d'un mois d'APL.
Nous sommes également favorables à la réindexation des APL sur l'indice de référence des loyers, pour suivre la réalité de l'économie du pays à l'instant T.
Nous soutenons la suppression de l'article 2. Je me réjouis de nos positions communes. Nous suivrons la position de la rapporteure. Le groupe UC votera en faveur de ce texte tel qu'il sortira de nos débats. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mmes Sophie Primas, présidente de la commission et Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. - Très bien !
Mme Annie Guillemot . - La situation sociale n'a pas été suffisamment prise en compte par le Gouvernement dans le plan de déconfinement. La crise qui s'annonce exige des mesures fortes pour éviter que les plus fragiles ne basculent dans la précarité. Les APL représentent 40 % de l'effort public pour le logement. Leur maintien ne suffira pas ; il faut prévoir de nouvelles aides et faire jouer la solidarité nationale, comme le demandent de nombreuses associations.
La crise sanitaire se double d'une crise économique et sociale. Selon l'Institut de recherches économiques et sociales (IRES), un tiers des actifs ont vu leurs revenus baisser en avril, or 4 millions de ménages font face à de lourdes dépenses pour se loger et le logement représente les deux tiers de la consommation pré-engagée des ménages pauvres.
Il faut aller plus loin pour faire face à l'urgence sociale, relayée par les acteurs de la solidarité, les bailleurs sociaux et les élus. Le Fonds de solidarité pour le logement (FSL) est particulièrement mobilisé, mais il n'est pas universel. Certains locataires n'y sont pas éligibles.
Les bailleurs sociaux ont signé une charte de soutien en faveur de leurs locataires fragilisés par la crise, mais quid du secteur privé ?
Nous avons déposé une proposition de loi qui abonde de 250 millions d'euros le FSL pour l'aide d'urgence à la quittance au bénéfice des locataires du parc locatif social et privé et des copropriétaires occupants, maintient les aides au logement pendant la crise sanitaire et interdit aux banques de suspendre le paiement des annuités d'un emprunt immobilier pendant un an, afin d'éviter les expulsions. Nous demandons également une aide de 50 millions d'euros aux associations de lutte contre la pauvreté.
Recentrage du PTZ, baisse des APL, éloignement de la gouvernance : le Gouvernement a économisé 6 milliards d'euros en trois ans sur le logement social et installé une crise durable de la construction de logements abordables, de la réhabilitation et de la rénovation urbaine.
Comment résorber l'habitat indigne sans relogement des familles ? Comment demander aux maires de mettre en place des politiques publiques pour le logement quand ils n'en ont plus les moyens ? Comment redonner confiance à la jeunesse quand elle n'a pas accès au logement ?
Les décisions gouvernementales ne sont pas allées dans le bon sens : baisse de 5 euros des APL, gel du barème en 2018, sous-indexation à 0,3 % en 2019-2020 - la maintiendrez-vous ? - suppression de l'APL accession, malgré vos promesses, mise en place de la RLS. Sans parler de la situation d'Action logement... Avec la contemporanéisation du versement des APL, de nombreux jeunes qui quittent le domicile parental n'y auront plus droit. Il n'y a pas d'étude d'impact alors que 1,2 million de nos concitoyens verront leur APL baisser et 600 000 n'y auront plus droit.
Un rapport de la Cour des comptes dénonce le manque d'anticipation dans l'exécution de la mission « Cohésion des territoires », du fait des reports de la mise en oeuvre de la réforme, entraînant un trop grand écart entre les mesures votées et réalisées.
Monsieur le ministre, vous m'aviez reproché de souligner que le personnel de la CAF ne pourrait pas faire face à la réforme des APL - et maintenant vous reprenez l'argument !
Le logement rapporte à l'État plus qu'il ne lui coûte : en 2018, il a versé 40 milliards d'euros d'aides au logement pour 78 milliards d'euros de rentrées fiscales. Le logement doit cesser d'être une variable d'ajustement budgétaire.
En Île-de-France, 700 000 ménages sont demandeurs d'un logement social dont 71 % sont sous le plafond de ressources.
Nous voterons cette proposition de loi, en rappelant qu'aux termes de l'article premier de la loi Besson, « garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l'ensemble de la nation ». Il est extrêmement important d'aider tant à l'accession qu'au maintien dans le logement.
La situation dans les banlieues nous inquiète. C'est une question politique, au coeur du pacte républicain, une question d'emploi, de logement, de respect, de lutte contre les discriminations, d'espoir. Je renouvelle ma demande de création de 20 000 à 30 000 emplois aidés. Il faut raccrocher les décrocheurs, alors que seul un enfant sur dix est scolarisé aujourd'hui dans certains quartiers.
L'aisance de vos propos ne me rassure pas, monsieur le ministre. Maire de Bron pendant dix-sept ans, je sais combien les mesures prennent du temps à se mettre en place.
La politique, ce n'est pas que des paroles, mais des actes, en responsabilité. Monsieur le ministre, vous avez de grandes responsabilités, vous devez agir vite ! (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE)
M. Henri Cabanel . - Cette crise sanitaire, avec ses répercussions sociales, est inédite. Ce ne sera pas une affaire de semaines ni de mois, mais d'années.
La dépense publique ne pourra sauver toutes les entreprises. À défaut de revenu universel, les aides sociales amortissent le choc de la baisse ou de la perte des revenus. Il faut des moyens supplémentaires pour assurer le maintien dans le logement actuel et éviter l'engrenage de la précarité. La vague d'impayés doit être anticipée pour éviter les expulsions en cascade.
Au XXIe siècle, personne ne devrait être expulsé de son logement dès lors qu'il est de bonne foi. Comment ne pas être choqués de voir des sans-abri aux portes mêmes du Sénat, sous le porche du théâtre de l'Odéon ?
Je regrette l'absence d'initiative de l'État pour les locataires. Contrairement à ses voisins, la France n'a pas gelé les loyers ou abondé de fonds d'urgence. L'encadrement des loyers n'est pas respecté, notamment à Paris. Les APL n'ont pourtant pas vocation à financer une sur-tarification !
Sans tout résoudre, cette proposition de loi aménage les versements et les montants des APL. La suppression du mois de carence aura un impact positif pour les ménages, alors que la crise laisse envisager une augmentation du nombre de demandeurs. La réindexation des APL sur l'IRL est bienvenue.
En revanche, nous sommes plus partagés sur le seuil minimum de non-versement des APL. Une aide de moins de 10 euros n'a pas de sens. Ne faudrait-il pas revoir les modalités de calcul ?
Le débat sur l'effet inflationniste des aides au logement est ancien. Mais l'objectif des APL est avant tout social. La pénurie de logements est structurelle dans les zones tendues et le choc d'offre n'a pas encore eu lieu. Dans les zones tendues, les salariés aux revenus moyens, souvent indispensables au fonctionnement du pays, peinent à payer leur loyer.
La donne a changé, il faut se réinventer. Le télétravail apportera peut-être un rééquilibrage du territoire, en offrant des conditions de vie plus sereines que dans les grands centres urbains.
En attendant un impact positif sur l'accès au logement, cela ne nous exonère pas de donner un coup de pouce immédiat aux locataires.
Le groupe RDSE votera cette proposition de loi.
M. Julien Bargeton . - Ce texte part d'un bon sentiment. Dans cette crise, nous avons tous une pulsion de générosité. Pour autant, fait-on de la bonne littérature avec de bons sentiments ? s'interrogeait Gide.
Mme Cécile Cukierman. - Je ne fais pas la charité.
M. Julien Bargeton. - La question vaut aussi pour ce texte : le débat est intéressant, mais les réponses sont-elles efficaces ?
On dit souvent qu'il ne faut pas voter une loi sous le coup de l'émotion. (Marques d'indignation sur les travées des groupes SOCR, RDSE et CRCE)
Mme Éliane Assassi. - Et les 5 euros ? Une décision sous le coup de l'émotion ?
M. Julien Bargeton. - L'enjeu est d'importance, car les APL représentent 18 milliards d'euros, un tiers des sommes de la redistribution sociale, dont 75 % sont versés aux 10 % des ménages les plus défavorisés.
Chacun peut faire sa propre interprétation du rapport de la Cour des comptes. Mais vous vous souvenez sans doute que la Cour dénonce une gestion complexe et coûteuse des allocations logement, avec des critères de versement peu clairs et un nombre de paramètres de calcul qui accroît le risque d'oublis ou d'erreurs ? Et qu'elle plaide pour une simplification, en raison des risques de non-recours, d'indus et de fraudes ? Les coûts de gestion...
Mme Éliane Assassi. - Nous parlons de vies humaines, de personnes !
M. Julien Bargeton. - ... sont considérables. Il faut simplifier, renforcer le système des APL pour le rendre...
M. Fabien Gay. - Plus « efficient » ?
M. Julien Bargeton. - Plus efficace. Les recommandations de la Cour des comptes ne sont pas prises en compte dans cette proposition de loi.
Mme Cécile Cukierman. - Je cherche à répondre aux besoins de la population, non à ceux de la Cour des comptes !
M. Julien Bargeton. - Je salue la suppression, par la commission, de l'article relatif aux seuils, ainsi que de l'article 3, qui aurait rendu l'application du droit encore plus complexe.
Le délai de carence est un sujet important : sa suppression entraînerait beaucoup de rappels, qui seraient sans doute mal vécus...
M. Fabien Gay. - Vous êtes presque touchant...
M. Julien Bargeton. - ... et qui représenteraient une grosse charge de travail supplémentaire.
M. Fabien Gay. - Ah ! Je comprends mieux...
M. Julien Bargeton. - Le Gouvernement a prolongé la trêve hivernale, il a créé un plan alimentaire d'urgence, ainsi qu'un plan pour les moins de 25 ans. Des actions ciblées ne sont-elles pas plus pertinentes qu'une réindexation générale ?
Mme Cécile Cukierman. - La loi est faite pour le long terme, pas pour le court terme.
M. Julien Bargeton. - Quand 4 millions de personnes sont mal-logées, l'essentiel est d'ajouter une offre accessible.
La contemporanéisation des aides est la mère des réformes. Elle a simplement été décalée à cause de la crise. (Mme Marie-Noëlle Lienemann s'agace.) La réaction est la même que pour le prélèvement à la source : on commence par critiquer la mesure puis on en constate les avantages, et l'on se réjouit des améliorations.
Mme Cécile Cukierman. - Personne ne dit qu'il ne faut pas améliorer le système !
M. Julien Bargeton. - Nous avons besoin de cette réforme de la contemporanéisation. Ce sera une réelle avancée et elle fiabilisera les montants pris en référence. La Cour des comptes la réclame.
Mme Cécile Cukierman. - Plus besoin de faire la loi, il y a la Cour des comptes !
M. Julien Bargeton. - Nous ne voterons pas cette proposition de loi. Nous devons nous interroger sur ce qui est le plus utile pour les Français.
Mme Annie Guillemot. - Pourquoi n'avez-vous rien dit contre la baisse des APL, dont les Français ont besoin ?
Mme Éliane Assassi. - Rien dit non plus contre les 5 euros !
Mme Marie-Noëlle Lienemann . - Non, cette proposition de loi n'est pas conjoncturelle, elle a été préparée avant la crise du Covid. (M. Julien Bargeton esquisse une moue dubitative.) Car il y avait un énorme problème de pouvoir d'achat des plus modestes, et une précarisation de leurs conditions de logement.
Nous ciblons un élément très concret dont l'impact est massif : les APL. La Cour des comptes reconnaît leur rôle central dans le soutien aux plus modestes. Les APL représentent 30 % de l'effort de redistribution sociale pour les ménages du premier décile.
M. Julien Bargeton. - C'est ce que j'ai dit !
M. Julien Denormandie, ministre. - Oui ! C'est ce qu'il a dit !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Les familles les plus modestes consacrent dans le privé jusqu'à 45 % de leurs revenus au logement. (Mme Annie Guillemot renchérit.)
Vous arguez de la complexité des APL ? Mais Bercy délivre à n'en plus finir des avantages fiscaux autrement plus complexes.
Oui, les choses doivent être simples pour que le peuple comprenne ses droits. Mais pour le groupe LaREM, quand c'est complexe, la solution est de réduire la prestation ! (M. le ministre et M. Julien Bargeton se récrient.)
Depuis des années, Bercy a les APL dans le collimateur. La preuve, elles ne font que baisser : le rapport Estrosi Sassone est d'une grande précision sur ce point.
Votre but, c'est la régulation budgétaire sur le dos du premier décile.
M. Julien Bargeton. - Facile... et faux.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Monsieur le ministre, vous reconnaissez avoir commis une erreur sur les 5 euros de baisse de l'APL. Mais faute avouée n'est pas pardonnée ! C'est faute réparée qui l'est. Faites-le ! (Rires et applaudissements)
Les sommes en jeu dans cette proposition de loi restent modestes mais sont efficaces.
Mme Valérie Létard. - Oui.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - La proposition de loi est ciblée et juste, elle s'inscrit dans la durée. Nous sommes tous prêts à simplifier le système, à condition qu'il demeure juste. (Applaudissements sur toutes les travées, à l'exception de celles du groupe LaREM)
Mme Laure Darcos . - Nos collègues communistes considèrent que la politique du Gouvernement a affaibli les ménages les plus modestes. C'est pourquoi ils émettent quatre propositions.
La commission des affaires économiques s'est prononcée en faveur de deux d'entre elles. Au-delà, la pertinence des politiques du logement, singulièrement depuis l'élection d'Emmanuel Macron, est en question. Cette régulation budgétaire féroce sape le pouvoir d'achat des plus modestes. Elle ne peut tenir lieu de politique.
Quelque 6,6 millions de ménages bénéficient des APL, qui correspondent à 49 % en moyenne du loyer dans le parc social, 36% dans le privé. En 2015 et 2017, ces aides représentaient 18 milliards d'euros par an, en 2018 et 2019, 17 milliards, et 15,3 en 2020.
La diminution des APL de 5 euros par mois et la réduction du loyer de solidarité n'ont eu d'autres objectifs que de réduire le déficit public. Ces deux mesures ont soulevé une vague de contestation dans l'opinion publique. Elles succédaient aux mesures de régulation mises en place sous François Hollande comme le gel de la sous-indexation, la prise en compte du patrimoine des bénéficiaires, etc. Nous craignons la poursuite de la politique récessive du logement, et la poursuite du recul des montants versés, dans le cadre du RUA en particulier.
Votre politique est sans affect, sans vision, technocratique : tout le monde est perdant. Il est temps de refonder l'action en faveur du logement, de remettre l'équité du système au coeur des préoccupations. Il faut une meilleure information des personnes éligibles, qui sont 2 % à ne pas y avoir recours.
La Cour des comptes regrette qu'il ne soit pas mis fin à la complexité des APL, source de non-recours, d'erreurs et de fraudes.
La crise économique s'annonce violente avec un risque de paupérisation important. Les besoins en logements sociaux et très sociaux augmenteront. Or les objectifs de construction ne seront pas atteints, car les chantiers ont été mis à l'arrêt.
Le Gouvernement doit prendre un engagement fort à court terme contre le mal-logement et la précarité qui fracturent la société, et pour éviter de laisser trop de monde au bord du chemin. (M. Olivier Henno, Mmes Valérie Létard et Marie-Noëlle Lienemann applaudissent.)
M. Julien Denormandie, ministre . - Je ne suis pas du genre à éluder les questions ou à faire de la basse politique, j'ai toujours un propos constructif. Je ne peux laisser dire que nous pratiquons une politique du logement sans vision.
En deux ans nous avons doublé les crédits de rénovation gérés par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), la ministre Valérie Létard en est témoin. (L'intéressée exprime un doute.) Nous avons engagé 10 milliards d'euros de travaux pilotés par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). Sur l'Action Coeur de ville, chère au RDSE et au ministre Mézard, nous avons déjà engagé 3 milliards d'euros. Quant au fameux crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), il bénéficiait à 50 % aux 20 % des ménages les plus aisés ; nous l'avons transformé en MaPrimeRénov, ce qui n'a pas été sans difficultés : et désormais la prime va à 50 % aux 50 % les plus fragiles.
Les sans-abri ont bénéficié de l'effort commun mené avec les collectivités locales : nous avons mis à l'abri 180 000 personnes, au lieu de 145 000 avant l'hiver, soit 35 000 places supplémentaires depuis le 1er novembre.
Mme Éliane Assassi. - Vous parlez d'hébergement, nous parlons de logements.
M. Julien Denormandie, ministre. - En deux ans, nous avons sorti 150 000 personnes de la rue ou de la précarité pour leur donner un logement pérenne.
Ma main n'a pas tremblé lorsque j'ai décalé par deux fois la fin de la trêve hivernale.
Enfin, madame Lienemann, nous nous connaissons bien. Je sais que vous savez que c'est à la demande du directeur de la CNAF - ce grand serviteur de l'État - que nous avons décalé la réforme de la contemporanéisation. La lancer en pleine crise du Covid, alors qu'elle est très complexe, qu'elle exige des milliers d'heures de travail...
Mme Annie Guillemot. - Embauchez !
M. Julien Denormandie, ministre. - ...et un accompagnement individuel, ce n'était pas possible. Il a fallu nous retrousser les manches pour mettre en forme cette réforme. Dommage, du reste, qu'elle n'ait pas été réalisée en 2012, ou avant.
Mme Éliane Assassi. - Où étiez-vous, en 2012 ?
M. Julien Denormandie, ministre. - Je remercie Mme Cukierman d'avoir inscrit ce débat enflammé... mais si important pour nos concitoyens.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
L'article premier est adopté.
ARTICLE 2
M. Julien Bargeton . - Le seuil d'application existe pour toutes les aides. Le Gouvernement l'a abaissé de 17 euros à 10 euros en 2017. Une grande partie des bénéficiaires ne le voit plus s'appliquer. Le groupe LaREM votera l'amendement de suppression car le dispositif risque de mettre en tension les effectifs des caisses, car les frais de liquidation dépasseraient alors les sommes versées pour 17 000 ménages !
M. le président. - Amendement n°1, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission.
Supprimer cet article.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. - Monsieur Bargeton, c'est aussi ce Gouvernement qui a créé le loyer de solidarité et qui a supprimé le seuil dans le parc social.
Les coûts de traitement des dossiers seraient plus élevés que ce qui reviendrait aux allocataires à travers une APL trop modeste. Après discussion avec les auteurs, j'ai voulu laisser le débat prospérer en séance publique et c'est seulement maintenant que je présente un amendement de suppression.
M. Julien Denormandie, ministre. - Avis favorable.
Mme Annie Guillemot. - Il faut aussi tenir compte de la sous-indexation des APL. Près de 350 000 jeunes risquent d'être privés d'APL, ils cherchent un premier emploi, il faut prêter attention à eux. Revoyons cette réforme.
L'amendement n°1 est adopté et l'article 2 est supprimé.
L'article 3 demeure supprimé.
ARTICLE 4
M. Julien Bargeton . - Citons la prime d'activité, l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), l'allocation aux adultes handicapés (AAH), toutes revalorisées ! Il y a aussi la prolongation de la trêve hivernale, l'aide alimentaire, l'aide aux moins de 25 ans...
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. - La question n'est pas là.
M. Julien Bargeton. - Le contexte doit être envisagé dans sa globalité.
L'article 4 est adopté.
L'article 5 est adopté.
Explications de vote
Mme Viviane Artigalas . - Cette proposition de loi importante a été déposée avant la crise. Elle reste d'une actualité aiguë. Les jeunes en quête d'un premier emploi devront faire face à la question cruciale du logement.
Les APL auront toute leur importance. Leur réforme ne peut être mise en place sans tenir compte de ces difficultés.
Les réformes du Gouvernement ont affaibli notre modèle du logement social. Nous voterons cette proposition de loi, car il est impératif de ne pas faire d'économies dans ce domaine. Voilà trois lois de finances rectificatives que nous vous alertons sur ce sujet. Revoyez votre politique.
Mme Annie Guillemot . - Nous voterons la proposition de loi pour au moins trois raisons : vous ne cessez de fragiliser la situation d'Action Logement, les maires s'en inquiètent ; les CAF auront du mal à mettre en oeuvre la réforme que vous projetez, car il leur sera très difficile de vérifier tous les trois mois les revenus des bénéficiaires ; enfin, concernant la politique de la ville, les commissions d'attribution constatent déjà une paupérisation de certains territoires. C'était vrai dans le monde d'avant ; ce sera pire après. Les rodéos urbains n'en sont qu'une manifestation parmi d'autres. Si on ne développe pas les contrats aidés pour les jeunes des quartiers, la situation risque de dégénérer. Elle est déjà explosive !
Mme Valérie Létard . - Nous votons avec grand plaisir cette proposition. Le débat porte sur l'accès au logement sans provoquer le surendettement ; et sur le financement du logement social dans un contexte tendu.
Une disposition récente adoptée en CMP autorise la centralisation des trésoreries de certains organismes publics sur le budget du Trésor public. Cette opération risque de mettre en grand péril les capacités d'Action Logement dans sa mission de service public, production et rénovation de logements, accompagnement des salariés.
Par ailleurs, nous attendons toujours la sortie du décret et de l'arrêté qui doivent améliorer la gouvernance d'Action Logement et créer un comité des partenaires. Donnez-nous les moyens d'aller plus loin dans l'amélioration du logement au service des plus fragiles !
Merci au Sénat de se mobiliser sur cette question et de converger pour toujours défendre le logement social. (Applaudissements à gauche)
Mme Cécile Cukierman . - Cette proposition de loi a été travaillée avant la crise. Le contexte compliqué n'a malgré tout pas empêché son examen en commission et aujourd'hui en séance.
Merci au ministre de ce débat marqué par la franchise. Nos débats sont enflammés parce que passionnés. La question du logement touche en effet à l'essentiel de la vie humaine digne. L'accès au logement est un droit fondamental.
Monsieur le ministre, il est temps de corriger vos erreurs par des actes. Le système des APL souffre de trous dans la raquette. Mais il ne faudrait pas, au prétexte de réduire les trous de la raquette de tennis, se retrouver avec une raquette de ping-pong, certes sans trous mais beaucoup plus petite. Il ne faut pas pour résoudre les problèmes de certains, exclure d'autres qui ont également des besoins.
Je ne fais pas de politique pour faire la charité. J'espère que cette proposition de loi répondra durablement aux besoins des Français. (Applaudissements sur toutes les travées, à l'exception de celles du groupe LaREM)
La proposition de loi est adoptée.
(Applaudissements)
La séance est suspendue à 12 h 55.
présidence de Mme Hélène Conway-Mouret, vice-présidente
La séance reprend à 14 h 30.
Création de points d'accueil pour soins immédiats
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à répondre à la demande des patients par la création de points d'accueil pour soins immédiats.
Discussion générale
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé . - En abordant cette proposition de loi, nous exprimons notre gratitude, notre reconnaissance vis-à-vis des soignants mobilisés dans la crise depuis des semaines. Il y a les mots, importants, et les actes : ce sera le Ségur de la santé, riche de promesses et d'espoirs.
Nous devons reconnaître les soignants dans ce qu'ils sont et ce qu'ils font. Il est indispensable de soulager leur quotidien et d'adapter notre système de santé. La crise a révélé ses atouts et ses faiblesses, notamment au stade des urgences. Ces images de lits dans les couloirs ne datent pas d'hier et sont le reflet des évolutions de notre société... La figure rassurante du médecin de famille a perdu de son évidence et ne répond plus totalement à la conception des nouvelles générations de médecins.
De nombreux Français peinent à s'orienter dans notre système de santé. Les médecins libéraux se mobilisent aujourd'hui notamment dans le cadre des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) qui se structurent pour garantir l'accès de chacun à son médecin traitant qui est le gage d'un suivi au long cours. Sans lui, l'errance médicale s'accentuera et les urgences, premier et dernier recours, deviennent souvent le seul recours, s'en trouvant engorgés.
La proposition de loi a été enrichie à l'Assemblée nationale en novembre puis au Sénat en commission. Elle propose des solutions concrètes comme la création de points d'accueil pour soins immédiats (PASI). Ces nouvelles structures répondront aux besoins et elles seront labellisées par les ARS pour cinq ans : elles accueilleront des patients dans le cadre de soins non programmés mais qui n'ont pas besoin d'aller aux urgences. Une signalétique spécifique sera élaborée.
Entre la consultation chez le médecin traitant et les urgences, il y a des gradations. Il ne s'agit pas de créer une couche supplémentaire mais de matérialiser un chaînon parfois manquant.
Le Ségur de la santé réfléchit à l'organisation future de notre système de soins. Cette proposition de loi, à laquelle le Gouvernement est favorable, contribue à cet objectif.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure de la commission des affaires sociales . - Je m'associe à l'hommage rendu aux soignants et je veux remercier les collègues qui se sont rendus disponibles, notamment Véronique Guillotin et Bernard Jomier.
La crise a rappelé une évidence simple : la santé est au coeur des priorités des Français. Cette proposition de loi du député Cyrille Isaac-Sibille, n'a pas pour ambition de refonder notre système de soins. Elle répond ponctuellement mais concrètement, de façon pragmatique, aux difficultés de nos concitoyens à accéder aux soins dans certains territoires et à l'engorgement des urgences, mis en lumière par René-Paul Savary et Laurence Cohen dans un rapport de 2017.
Les urgences répondent à une urgence médicale ressentie par les patients alors que, selon la Cour des comptes, dans 10 à 20 % des cas, une consultation simple serait plus appropriée et moins coûteuse pour l'assurance maladie.
Les PASI offriraient une solution de prise en charge intermédiaire, étroitement articulée à des plateaux techniques notamment d'imagerie et de biologie médicale. Ils entreraient dans le champ du tiers payant et seraient rendus visibles par une croix orange, rappelant la croix rouge des urgences et la croix verte des pharmacies.
Les PASI ont vocation à apporter une réponse ambulatoire à la prise en charge des soins non programmés, en complémentarité de Ma Santé 2022, du pacte de refondation des urgences et des mesures progressivement mises en place pour accompagner la structuration des acteurs de la médecine de ville et le déploiement de l'exercice coordonné.
Les PASI offriraient donc une prise en charge complémentaire. Ils seraient articulés avec les CPTS en cours de création.
J'entends certaines réserves.
Un premier écueil ressort d'une approche consumériste des soins. Pour éviter tout appel d'air, il faudra un filtrage médical. Cette régulation médicale devra être coordonnée avec les initiatives des professionnels dans les territoires et avec le projet de numéro unique envisagé par le Gouvernement.
En outre, l'information des patients sur l'offre de soins disponible sera un indispensable corollaire, afin d'éviter tout risque de confusion en cas d'introduction dans le paysage sanitaire d'une croix orange.
Il faudra aussi veiller à la clarté de l'organisation des soins : il ne s'agit pas de créer une structure supplémentaire, une nouvelle tranche du millefeuille, déconnectée des autres acteurs, comme le craignent certains syndicats de médecins. Les médecins généralistes sont les premiers acteurs des soins non programmés et il n'est pas question de leur dérober ce rôle : les PASI ont vocation à venir en appui de ces professionnels dans cette mission.
La commission a souligné la nécessaire complémentarité des PASI avec l'offre médicale présente dans un territoire et leur inscription dans un parcours de soins coordonné. En effet, toute concurrence est délétère alors que la ressource médicale est rare. Nous avons aussi souligné le rôle essentiel joué dans ces structures par les infirmiers, les kinésithérapeutes et les pharmaciens.
Cette proposition de loi n'a pas vocation à modifier l'organisation de notre système de santé mais offre un outil pragmatique et complémentaire aux professionnels. Les PASI pourront s'adapter aux situations locales : c'est essentiel. Le cahier des charges national devra rester simple et souple.
Certains collègues demeurent dubitatifs, alors que s'ouvre le Ségur de la santé, mais ce texte est conforme aux principes que le Sénat défend s'agissant de notre système de santé. Je vous demande donc de l'adopter.
M. Alain Milon . - J'avais prévu de saluer la foule à l'occasion de ma présentation ; je dois réviser mes prétentions à la baisse... (Sourires)
Cette proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale en novembre 2019, en plein mouvement social à l'hôpital public.
Mme Cohen et M. Savary ont parfaitement analysé les difficultés des services d'urgence. Ils doivent être, en effet, regardés non comme un point d'entrée défaillant dans le système de soins, mais comme un miroir grossissant des dysfonctionnements de l'ensemble de notre système de santé. Leurs difficultés résultent moins de leur organisation propre que de leur positionnement original, au confluent des carences de la médecine de ville et de la permanence des soins ambulatoires en amont, et des rigidités hospitalières en aval.
La gestion de la permanence des soins et l'accueil des soins non programmés sont des problèmes majeurs de notre modèle, de longue date soulignés par le Sénat.
Nous y avons travaillé dans le cadre des CPTS à l'échelle des territoires. Ces communautés ont pour mission de permettre aux patients du territoire concerné d'obtenir un rendez-vous le jour même ou dans les 24 heures dès lors qu'il s'agit d'une urgence non vitale. Depuis la signature en juin dernier de l'accord conventionnel interprofessionnel, ils s'organisent pour créer une offre de soins coordonnée. Il faudrait 1 000 CPTS pour couvrir le territoire selon le plan « Ma Santé 2022 ». Monsieur le ministre, où en est-on ?
Le pacte de refondation des urgences annoncé en octobre prévoyait la création d'un service d'accès aux soins (SAS). Là encore, la coordination entre les centres 15 et les médecins de ville est une question primordiale. Quid de la place des médecins libéraux ? La négociation conventionnelle entre les libéraux et l'assurance maladie est-elle engagée ?
Les territoires sont organisés en matière d'offres de soins, notamment grâce aux maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) et aux maisons médicales de garde. C'est encore insuffisant, mais un nouveau label est-il la solution ? Je ne le crois pas, d'autant que le Gouvernement vient d'installer le Ségur de la santé qui, je l'espère, ne sera pas que le Ségur de l'hôpital. Je forme le voeu que ce Ségur ne soit pas un catalogue de demandes et qu'il apporte des solutions concrètes à tous les professionnels de santé.
Il faut notamment augmenter le temps médical ; tout le monde y gagnerait, patients et soignants.
Pour rendre hommage aux soignants, faisons-leur des propositions concrètes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Bernard Jomier . - Je salue le travail de la rapporteure et la remercie pour ses mots d'introduction.
Depuis vingt ans, les passages aux urgences augmentent de 3,5 % par an. Ils sont passés de 10 millions en 1996 à plus de 20 millions aujourd'hui, soit 30 000 personnes chaque année pour chaque structure, largement dans le public puisque seuls 18 % sont pris en charge par le secteur privé. Pour désengorger les urgences, la proposition de loi prévoit des PASI labellisés par les ARS.
La question de l'engagement des urgences a fait l'objet de multiples rapports. Tout a été dit et évalué, mais la dégradation s'est poursuivie, le personnel s'est fatigué et les patients se sont parfois révoltés.
L'heure des décisions ne peut plus être retardée. Pendant la crise, les urgences n'ont survécu que grâce à l'engagement extraordinaire des soignants et à la quasi-disparition des autres pathologies, ce qui aura des conséquences sanitaires.
Le choix des autorités sanitaires de ne pas, ou peu, faire appel au secteur privé a conduit à la submersion des urgences. On en a oublié les Ehpad...
Oui, il est impératif de revoir l'organisation de notre système de santé. Ce texte adopté par l'Assemblée nationale en novembre représentait un petit pas. En juin 2020, après la crise, nous nous posons la question de la signification de ce nouveau label par les ARS.
Comment pouvons-nous porter une réponse aussi faible au regard des besoins ? L'heure est aux décisions structurantes. Le Ségur de la santé a été convoqué : il est prématuré d'adopter cette proposition de loi très partielle avant ses conclusions, même si les refus déjà exprimés par le Premier ministre comme celui de modifier la gouvernance de nos hôpitaux ne portent pas à l'optimisme sur les résultats.
N'envoyons pas ce message minimaliste. Nous ne voterons pas ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE)
Mme Véronique Guillotin . - Je félicite également notre rapporteure. À peine un an après « Ma Santé 2022 » et en plein Ségur, cette proposition de loi semble anachronique.
Toutefois, compte tenu du vote de l'Assemblée nationale et de l'avis de notre rapporteure, j'ai sondé les professionnels de la santé autour de moi. Si les objectifs sont partagés, le texte ne semble pas apporter de plus-value.
Les professionnels de santé de ville essayent de s'adapter dans un contexte difficile et alors que les réformes se sont enchaînées, créant leurs lots d'acronymes : PTS, PTA, CPTS, MSP, ESP...
Je pense particulièrement aux maisons de santé pluriprofessionnelles et aux communautés professionnelles territoriales de santé, dont l'une des missions première est l'amélioration de l'accès aux soins en ville, et notamment aux soins non programmés. Pourquoi un énième dispositif ? Quid des relations que ces professionnels ont déjà nouées dans les territoires ? Je préfère consolider l'existant et clarifier le rôle de chacun auprès des services de régulation et des patients. Il faut également donner aux structures existantes davantage de moyens et inciter les jeunes médecins à s'installer en zones sous-dotées.
Le plan Ma Santé 2022 est déjà ambitieux. Nous avons voté la loi Santé en juillet 2019 et son taux d'application stagnerait à 30 %. Nous attendons sa mise en application pleine et entière.
Des inquiétudes émergent quant au risque d'accroître le recours aux soins en labellisant des points d'accueil pour soins immédiats. Évitons tout self-service de la santé, et ne créons pas d'échelon supplémentaire. Depuis le confinement, le nombre de passages aux urgences et dans les cabinets médicaux a diminué, ce qui confirme l'analyse de la Cour des comptes qui estime à 3,6 millions le nombre de passages inutiles aux urgences.
Des incertitudes demeurent sur les moyens. La création des PASI pourrait les diluer plutôt que de permettre de baisser les dépenses. Je crains que les services de soins ne s'agglutinent en zone urbaine autour des PASI.
Tout le monde s'accorde sur les objectifs. Je souscris aux amendements de Mme la rapporteure. Je ne suis en revanche pas totalement convaincue que ce nouvel outil soit adapté. Là où les professionnels se coordonnent, tout fonctionne bien. En plein Ségur de la santé, il faudrait plutôt renforcer l'ingénierie de projets sur les territoires atones, là où les élus et professionnels peinent à s'organiser.
La période que nous venons de vivre a consacré la pratique de la télémédecine comme alliée indispensable de notre système de soins. C'est avec ces outils, et non avec des échelons supplémentaires, que nous devons penser la santé de demain.
Le groupe RDSE se répartira entre une large abstention et des votes favorables.
M. Xavier Iacovelli . - Je salue les professionnels de santé. Depuis vingt ans le nombre de passage aux urgences a doublé. En 2016, on comptait 21 millions de passages aux urgences.
Nous devons répondre à l'engorgement et aux personnels à bout de force. Selon la Cour des comptes, 3,6 millions de passages aux urgences sont inutiles. Mais, il faut prendre ce chiffre avec prudence, ces passages étant souvent dus au manque de médecins généralistes sur de nombreux territoires.
Selon la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques du ministère des Solidarités et de la Santé, près de 60 % des patients se rendent aux urgences parce que les soins y sont accessibles et qu'ils peuvent y réaliser rapidement des examens complémentaires.
Avec cette proposition de loi, les PASI assureraient des soins non programmés, offriraient un examen médical et réorienteraient, si nécessaire, les patients vers un service spécialisé. La création des PASI constituerait un début de réponse à l'engorgement des urgences.
En 2017, le rapport d'information de nos collègues Cohen, Génisson et Savary démontrait le changement de mentalité de nos concitoyens qui valorisent l'immédiateté de l'accès aux soins, d'où le recours aux urgences hospitalières.
L'éducation à la santé de la population serait une autre réponse. Les PASI pourraient jouer ce rôle.
La crise sanitaire a démontré la nécessité d'avoir des services d'urgences efficaces, et mis en lumière les difficultés de ceux qui sauvent des vies tous les jours.
Le 25 mars, le Président de la République a souhaité, à Mulhouse, un plan massif pour la santé, avec une organisation plus proche des collectivités et plus collective ente la ville, le médico-social et l'hôpital.
L'adoption de cette proposition de loi ne sera qu'une petite pierre à l'édifice. Cela va néanmoins dans le bon sens.
Le groupe LaREM votera ce texte.
Mme Laurence Cohen . - Merci à Mme Doineau pour son travail. La crise de la pandémie a été le révélateur des difficultés de l'hôpital dénoncées depuis des années. Or cette proposition de loi, qui part d'un bon sentiment, ne prend pas en compte l'ampleur des difficultés et reste floue sur le futur cahier des charges qui sera pris par décret.
En outre, le postulat de ce texte est faux : on dénombre seulement 6 % de recours inappropriés. Ce n'est pas parce qu'il y a trop de patients qu'il y a engorgement, mais en raison des déserts médicaux qui ne cessent de croître, du vieillissement de la population et de l'augmentation des maladies chroniques. C'est toute la chaîne des soins qu'il faut revoir. Il faut travailler sur la complémentarité entre médecine de ville et hôpital et non sur la mise en concurrence entre le public et le privé. Si les établissements privés ont peu pris part à la crise sanitaire, c'est parce qu'ils se concentrent sur les soins les plus rentables à cause de la T2A.
La labellisation serait ouverte aux établissements privés, y compris ceux qui pratiquent des dépassements d'honoraires, à condition de l'annoncer au patient. C'est un risque...
Dans le Val-de-Marne, on compte douze SAMI, qui assurent les urgences médicales durant les soirées et les week-ends. Ce système fonctionne grâce à l'implication du conseil de l'ordre départemental ainsi que d'une équipe de médecins volontaires et grâce à l'engagement de collectivités qui participent à certains frais. Mais aujourd'hui, ces médecins volontaires ont vieilli et ne trouvent pas de relève. Le fait que les SAMI soient labellisés PASI ne changera rien à l'affaire.
À ce propos, il faudrait revenir sur le décret Mattei, qui supprimait les gardes des médecins les soirs et les week-ends.
M. René-Paul Savary. - Ah oui !
Mme Laurence Cohen. - La proposition de loi renforce la coordination entre les professionnels de santé. Pour avoir visité plus de 130 établissements, je puis vous dire que les ARS devraient davantage aider les maires, qui se retrouvent souvent seuls lorsqu'ils veulent ouvrir un centre de santé.
Le Gouvernement, avec ses plans successifs, n'a pas cessé de suivre la logique de restriction budgétaire de la santé.
La solution, c'est l'augmentation globale des budgets hospitaliers.
J'ai participé hier avec plusieurs de mes collègues à une rencontre avec le ministre de la Santé dans le cadre du Ségur. Le Gouvernement va-t-il enfin remettre à plat l'intégralité du système de soins ? Il ne suffit pas de dire dans l'hémicycle que l'on soutient les professionnels de santé. Il faut relayer leurs demandes.
Cette proposition de loi ne peut convenir alors qu'il faut une réponse globale.
On ne peut se contenter d'un sparadrap sur une jambe de bois. Notre groupe votera contre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
M. Daniel Chasseing . - Je rends aussi hommage aux soignants qui ont pris en charge les patients Covid-19. Je salue cette proposition de loi de bon sens et le travail de la rapporteure. Les urgences prennent en charge une part significative de soins qui ne relèvent pas de leurs missions. Le nombre de passages aux urgences a doublé en vingt ans, passant de 10 à 20 millions. Près de 20 % des patients ressortent des urgences avec une simple ordonnance sans examen complémentaire.
Des kits de suture à usage unique sont présents dans les cabinets de ville depuis plus de vingt ans, contrairement à ce que soutient l'exposé des motifs, et il est fréquent d'avoir un résultat d'un laboratoire de biologie dans les deux heures.
Le PASI n'est pas un service d'urgence bis. Je l'aurais plutôt appelé Point d'accueil pour soins non programmés car le terme « immédiat » évoque les urgences. Les CPTS ne disposent pas forcément d'un établissement de santé sur le territoire. Pourtant, elles ont mission de faciliter l'accès aux soins et la prise en charge des soins non programmés. Il est essentiel que le tiers payant s'applique.
Permettez-moi de partager mon expérience ; vendredi et samedi, remplaçant mon successeur à la maison de santé, j'ai vu huit patients sans rendez-vous : fièvre du nourrisson, cystite, traumatisme du pied, rhino-pharyngite avec fièvre - pour laquelle j'ai demandé un test pour suspicion de Covid ; cette fois, pas d'otite, de tiques, de sutures ou de problème cardiaque. Si un élément de gravité avait été constaté, j'aurais adressé le patient aux urgences du CHR ou du CHU, après avis du médecin régulateur.
Dans les CPTS ne disposant pas d'établissement, les maisons de santé pourraient remplir le rôle de PASI à tour de rôle.
Fluidifier l'organisation des soins non programmés, c'est le pilier 4 du Ségur. Les ARS doivent procéder avec souplesse et pragmatisme, notamment en milieu rural.
Le groupe Les Indépendants votera cette proposition de loi.
M. Olivier Henno . - Je salue le travail de notre rapporteure qui a su coordonner les acteurs.
Le nombre de passages aux urgences a doublé entre 1996 et 2015, et cette évolution semble se poursuivre. Cela met en lumière la demande de soins non programmés et le déséquilibre de notre organisation. Vieillissement de la population, exigence d'une réponse immédiate, désertification médicale, mauvaise répartition des généralistes, fin de la permanence des soins sur le territoire sont autant d'explications.
Un patient sur cinq se rend aux urgences par défaut, pour réaliser des examens complémentaires. Près des deux tiers s'y rendent par souci d'accessibilité, même si l'on attend des heures. Selon la Cour des Comptes, 20 % des patients des urgences hospitalières ne devraient pas les fréquenter. Cette situation engendre un engorgement des urgences, au bord de l'implosion, et un surcoût important pour l'assurance maladie.
Centres de santé, maisons de santé, maisons médicales de garde... Les différences statutaires ont peu de sens pour nos concitoyens. Les patients des urgences doivent pouvoir identifier clairement les structures.
À ce jour, il est difficile pour les médecins libéraux de disposer du matériel pour les soins de première urgence. D'où l'intérêt de proposer une alternative, avec un plateau adapté pour la prise en charge.
Cette proposition de loi apporte une réponse rapide pour mailler le territoire en labellisant des structures qui existent déjà. Il faudra choisir un marqueur fort - peut-être pas la croix orange, mais ce n'est pas l'essentiel. Les PASI offriront un choix supplémentaire aux régulateurs du SAMU. Ce label ne sera pas imposé par l'administration mais obtenu sur initiative des professionnels de santé, coordonnée par la CTPS. L'offre des PASI sera complémentaire de l'hôpital de proximité et de la médecine de ville classique.
Je conclus en rendant hommage aux soignants. Notre groupe votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mme Laure Darcos . - Ce texte d'opportunité vise à répondre à la situation dramatique des urgences qui manquent de tout et dont le personnel est épuisé.
Je rends hommage aux soignants, mais aussi aux médecins de ville, souvent très seuls face à l'épidémie.
L'acte médical est devenu un bien de consommation courant. On va aux urgences pour obtenir une réponse immédiate, au risque d'accroître le malaise des soignants et le surcoût pour l'assurance maladie.
Cette proposition de loi aux intentions louables ne révolutionnera pas l'organisation de notre système de santé. Elle vient moins d'un an après la loi Santé et à la veille du Ségur de la santé. Pire, elle procède d'une vision technocratique en chargeant l'ARS de labelliser des structures existantes. Elle est vouée à l'échec, tant que l'on n'aura pas traité le problème de l'accès aux soins et de la démographie médicale.
J'attends plutôt du Gouvernement qu'il laisse les professionnels s'organiser et soutienne les initiatives des collectivités territoriales. Le village de Moigny-sur-École dans l'Essonne a ainsi installé le premier centre de télémédecine d'Île-de-France, au coeur du Gâtinais, avec pour objectif de faciliter l'accès aux soins et de libérer du temps médical pour les généralistes du territoire. L'expérimentation de la maison de santé hors les murs de Verrières-le-Buisson est aussi exemplaire. Faites confiance aux territoires pour innover ! Le groupe Les Républicains ne votera pas ce texte.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État . - Le président Milon a demandé où nous en étions dans le déploiement des CPTS. Nous avions évalué les besoins à 1 000 CPTS ; en février, on comptait 533 projets structurés contre 450 en novembre, avec la poursuite d'une vraie dynamique pendant la crise. Mme Cohen pourra témoigner qu'il en a été question hier lors du Ségur des parlementaires.
La crise a apporté des enseignements sur le Service d'accès aux soins (SAS) et la régulation médicale. Le sujet sera débattu dans le cadre du Ségur avec les parties prenantes.
Il n'y a pas de négociations en cours entre les libéraux et l'assurance maladie mais le Comité des structures d'exercice coordonné reprendra ses travaux la semaine prochaine.
Monsieur Jomier, on peut certes s'interroger sur la temporalité de l'examen de ce texte. Il s'inscrit dans la lignée du projet Ma Santé 2022 qui vise à mieux articuler ville et hôpital, ainsi que dans les concertations en cours dans le cadre du Ségur - qui associera bien médico-social et médecine de ville, comme en témoigne la composition du comité Ségur.
Madame Guillotin, l'application de la loi Santé n'est en effet pas complète, nombre de concertations ayant été suspendues du fait de la crise.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure . - Mon invitation à voter cette proposition de loi n'a pas recueilli l'unanimité. La temporalité brouille les pistes, j'en conviens. Mais le texte a été présenté il y a longtemps et il ne s'agit que de labelliser des structures existantes.
Le docteur Grall, président de l'ARS de la grande région Auvergne-Rhône-Alpes, nous a vanté l'expérience de la région de Rumilly, en lien avec les urgences d'Annecy. La labellisation donne une dynamique et des financements ; on le voit également en Ardèche et dans le Grand Est. Il ne s'agit pas de surajouter de nouveaux dispositifs, mais de visualiser les points d'accueil existants et de permettre à d'autres territoires de s'en emparer.
Notre collègue Christine Bonfanti-Dossat me le disait, son territoire met en place un tel système, sur le mode du volontariat, qui bénéficierait de ce label.
J'entends parler de désinvolture et de minimalisme ; l'auteur de cette proposition de loi ne prétend pas tout bouleverser, mais souhaite être utile aux usagers.
Mme la présidente. - Amendement n°4 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Decool, Menonville, A. Marc et Guerriau, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Capus et Laufoaulu, Mme N. Delattre, MM. Longeot, Mayet, Bonne, Pierre, Bouchet, Détraigne, Lefèvre, Nougein, Genest, Bonhomme, Vogel et Laménie, Mmes Perrot et F. Gerbaud et M. Gabouty.
I. - Alinéas 2, 3, 6, 7 et 11
Remplacer le mot :
immédiats
par les mots :
non programmés
II. - En conséquence, intitulé de la proposition de loi
Remplacer le mot :
immédiats
par les mots :
non programmés
M. Daniel Chasseing. - Je ne suis pas obsédé par le vocabulaire, mais les PASI concernent les soins non programmés, pas les urgences vitales. Des patients sans rendez-vous doivent toutefois être vus dans la journée, sous peine de voir leur état s'aggraver.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. - Lors des auditions nous nous sommes interrogés sur le terme « immédiat ». D'aucuns y voyaient une image de consumérisme, voire de drive de la santé. Pour autant, il faut parler à l'usager : la notion de « soins non programmés » ne parle qu'aux médecins. Faute de mieux, nous conservons le terme « immédiat ». Retrait ou avis défavorable.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Même avis. Le PASI n'a pas vocation à avoir le monopole de la prise en charge des soins non programmés : chaque médecin y contribue déjà quotidiennement. Votre amendement conduirait à devoir labelliser chaque cabinet libéral.
L'amendement n°4 rectifié bis est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°5 rectifié, présenté par M. Iacovelli et les membres du groupe La République En Marche.
Après l'alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Éventuellement, d'orienter le patient nécessitant des actions de prévention vers les professionnels de santé concernés.
M. Martin Lévrier. - Nous soutenons le dispositif des PASI, inspirés d'une expérimentation en région Auvergne-Rhône-Alpes. Mais ils devront aussi participer à la prévention et à l'éducation de la population à la santé en orientant les patients vers les professionnels de santé les mieux à même de les prendre en charge, comme le préconisait le rapport d'information de nos collègues Cohen et Savary. Dans un souci de souplesse, nous avons rendu la mesure facultative et espérons que cette rectification nous vaudra un avis de sagesse.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. - Hélas, je ne le peux : il n'appartient pas au PASI de se substituer au médecin traitant. Mais le texte vous satisfait. Retrait ou avis défavorable.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Sagesse.
M. René-Paul Savary. - Merci aux collègues d'avoir cité le rapport sur l'organisation des urgences que nous avons signé avec Laurence Cohen et Catherine Génisson. Mais, il est presque has been car la population a pris conscience, avec la crise, que des téléconsultations pouvaient fonctionner. Vous parlez d'un autre numéro que le 15 ; non, il faut une téléconsultation pour effectuer un tri efficace des urgences.
Les ARS n'auraient pas la même logique que les préfets.
Dans le Grand Est - qui est grand et à l'Est - (Sourires) les hôpitaux étaient surchargés pendant l'épidémie, alors que les cliniques étaient vides. Les établissements médico-sociaux n'ont été mobilisés que plus tard.
Bref, monsieur le ministre, il faut revenir à la réalité, avec plus de rameurs et moins de barreurs... (Sourires)
M. Bernard Jomier. - À défaut de résultat sur cette proposition de loi, le débat est nécessaire - il l'était sur le terme « immédiat » que souhaitait remplacer l'amendement précédent. La dénomination n'est pas adaptée, mais nous le gravons dans la loi.
Mais l'expression « soin non programmé » n'est pas lisible pour les patients. Ils savent ce que sont les urgences, ou ce que c'est d'avoir besoin d'un médecin de garde et c'est pour cela qu'ont été créées les maisons médicales de garde. C'est un empilement de dénominations, sinon de structures technocratiques...
Il ne faudrait pas donner de la lisibilité à une immédiateté pour des soins non urgents, ce qui serait contreproductif. La rapporteure nous a dit hier en commission que les territoires pourraient se saisir s'ils le souhaitent des PASI, cela n'améliorera pas la lisibilité.
Pendant la crise sanitaire, on a entendu des messages clairs de santé publique que la population a compris mais que nous n'entendions pas parce que Santé publique France n'a plus de moyens. C'est dommage.
M. Alain Milon, président de la commission. - Je partage le propos de Bernard Jomier. L'amendement de M. Lévrier enjoint les médecins à faire de la médecine : c'est ce qu'ils font. Je vois l'embarras du Gouvernement qui donne un avis de sagesse. S'il n'y a pas de retrait, je vous invite à voter contre.
M. Martin Lévrier. - Mon amendement demande aux médecins de faire de la médecine et de la prévention. Je le maintiens.
M. Alain Milon, président de la commission. - La prévention fait partie de la médecine !
L'amendement n°5 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Decool, Menonville, A. Marc et Guerriau, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Capus et Laufoaulu, Mme N. Delattre, MM. Longeot, Mayet, Bonne, Pierre, Bouchet, Détraigne, Lefèvre, Nougein, Genest, Bonhomme, Vogel et Laménie, Mmes Perrot et F. Gerbaud et M. Gabouty.
Alinéa 12
Supprimer les mots :
à proximité
M. Daniel Chasseing. - Dans certaines CPTS rurales, il n'y a ni labo de biologie ni plateaux techniques à proximité, terme que je souhaite supprimer à l'alinéa 12. Les PASI pourraient cependant y exister malgré tout. Tel est l'objet de mon amendement.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. - Sagesse. J'entends bien le propos de Daniel Chasseing s'agissant de certains territoires ruraux. Mais les PASI ne seront pas attractifs sans offre d'examens. Comme le terme de proximité n'est toutefois pas contraignant, le supprimer ne pose pas de problème.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - L'accès aux examens complémentaires doit être proche pour que les patients ne soient pas conduits à aller directement aux urgences. L'inscription des PASI dans une CPTS garantit la coopération entre acteurs d'un même territoire.
Retrait ou, à défaut, avis défavorable.
M. Daniel Chasseing. - Ce que je pressentais se précise, hélas. Médecin, j'ai envoyé le patient d'un traumatisme du pied avec fracture de la dernière phalange au cabinet de radiologie, pas aux urgences ; le patient souffrait d'une cystite, je l'ai envoyé au labo, pas aux urgences.
Ne reniez pas la ruralité dans ce texte.
M. René-Paul Savary. - Je partage le sentiment de Daniel Chasseing. Ce n'est pas à la loi de dire ce qui se passe dans les cabinets médicaux ! Il y avait les consultations : pendant deux heures, on recevait sans rendez-vous et on ne prescrivait pas d'examens à chaque fois. C'est du bon sens.
Point n'est besoin de tout inscrire dans la loi. Ce n'est pas au patient de décider qu'il passe des examens mais au médecin de les prescrire, dans le cadre de sa responsabilité ! Ainsi la radio n'était pas systématique pour les entorses ! Soyons attentifs : laissons les territoires s'organiser et les professionnels exercer.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Il n'est pas question de renier la ruralité, bien au contraire. Nous pourrions disserter longtemps sur la question de savoir où commence et où finit la proximité.
Je maintiens mon avis de sagesse.
L'amendement n°1 rectifié est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°2 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Decool, Menonville, A. Marc et Guerriau, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Capus et Laufoaulu, Mme N. Delattre, MM. Longeot, Mayet, Bonne, Pierre, Bouchet, Détraigne, Lefèvre, Nougein, Genest, Bonhomme, Vogel et Laménie, Mmes Perrot et F. Gerbaud et M. Gabouty.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans un point d'accueil pour soins immédiats coordonné au sein d'une communauté professionnelle territoriale de santé comprenant plusieurs maisons de santé pluri-professionnelles, les praticiens s'organisent à l'intérieur d'une maison de santé pour permettre l'accueil pour soins immédiats cinq ou six jours sur sept. »
M. Daniel Chasseing. - Cet amendement prévoit que les professionnels s'entendent pour assurer le rôle de PASI dans des maisons de santé. C'est précisément ce qui est souhaité dans le pilier n°4 du Ségur de la santé : « fluidifier l'urgence et la régulation des soins non programmés ».
En revanche, il ne faut pas préciser « six jours sur sept » dans la loi.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. - Malgré tout, je crois qu'il faut garder une plasticité et un cahier des charges souple. Retrait ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Même avis pour les mêmes raisons.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Même avis pour les mêmes raisons.
L'amendement n°2 rectifié est retiré.
M. Hervé Marseille. - Je regrette la situation : le texte a fait l'objet d'un vote unanime à l'Assemblée nationale. Les circonstances amènent le Sénat à une appréciation différente. J'en prends acte.
Nous avons demandé en conséquence un scrutin public, afin de marquer les différences.
À la demande du groupe Union centriste, l'article premier est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°111 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 323 |
Pour l'adoption | 95 |
Contre | 228 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'article 2 demeure supprimé.
Mme la présidente. - En l'absence de texte, un vote sur l'ensemble n'est pas nécessaire.
La proposition de loi n'est pas adoptée.
La séance est suspendue pour quelques instants.
Démarchage téléphonique et lutte contre les appels frauduleux (Deuxième lecture)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux.
Discussion générale
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Les abus de démarchages téléphoniques sont une nuisance pour nos concitoyens, voire un supplice quasi quotidien, qui peut conduire à de lourds préjudices financiers. Il faut les en protéger sans pénaliser les acteurs économiques honnêtes. Nous devons trouver, à cet égard, un subtil équilibre.
Déjà, ont été votés une information meilleure des consommateurs dans les contrats et lors de la prospection commerciale, un renforcement des obligations des entreprises ayant recours au démarchage téléphonique, une aggravation des sanctions qui pourront aller jusqu'à 375 000 euros pour une personne morale et une publication systématique de ces sanctions aux frais du professionnel, un mécanisme plus réactif et plus sécurisé juridiquement de suspension et résiliation des numéros surtaxés des opérateurs indélicats avec une faculté de saisine du juge du référé par la DGCCRF.
En deuxième lecture à l'Assemblée nationale, ont été mis en place un encadrement plus strict du démarchage téléphonique, notamment des jours et des heures auxquels il peut être pratiqué, et une responsabilisation accrue des professionnels, avec une présomption de responsabilité du professionnel ayant tiré profit des sollicitations commerciales, ainsi qu'un meilleur encadrement des exceptions à la liste d'opposition dans le cadre de l'exécution d'un contrat en cours.
Les travaux du Sénat en commission ont poursuivi en ce sens. Toutefois, j'appelle votre attention sur la suppression de l'interdiction du démarchage téléphonique par les entreprises de rénovation énergétique. Les associations de consommateurs la réclament. C'est un sujet de contentieux majeur à la DGCCRF. Un tiers des litiges sur la rénovation énergétique sont liés au démarchage téléphonique. Les citoyens doivent avoir confiance, à l'heure de la mise en oeuvre du plan pour la transition énergétique.
Je rappelle le plan de lutte contre la fraude dans le secteur de la rénovation énergétique que j'ai lancé conjointement avec le ministre du Logement et la secrétaire d'État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire le 12 novembre dernier, qui comporte une campagne de sensibilisation du grand public, et des actions pour mieux protéger les consommateurs.
Afin que ce plan de lutte soit efficace et cohérent, nous recommandons une interdiction du démarchage pour ce secteur particulier. Le démarchage postal et par courriel resterait permis, ainsi que la possibilité d'être référencé sur un site de confiance.
Nous proposons d'autoriser cependant le démarchage téléphonique dans certaines conditions. La mesure est donc proportionnée et s'inscrit dans le plan de lutte contre la fraude du Gouvernement.
La proposition de loi nous apparaît équilibrée.
Nous proposons d'encadrer les jours et heures du démarchage téléphonique par décret. Le professionnel doit également être responsabilisé. Il ne doit ni être à l'origine ni avoir profité du démarchage téléphonique. Je regrette la suppression du dispositif relatif aux numéros surtaxés.
Le renforcement du cadre pour lutter contre ces fraudes sera utile à la DGCCRF.
M. André Reichardt, rapporteur de la commission des lois . - Nous examinons en deuxième lecture la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, déposée par notre collègue député Christophe Naegelen.
Composée initialement de six articles, la proposition de loi en comptait onze lors de sa transmission au Sénat et quatorze lors de son adoption en première lecture le 21 février 2019. Cela remonte à loin. À cette occasion, le Sénat avait adopté quatre articles conformes et trois articles additionnels.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale n'a adopté que deux articles conformes. Sur les quatorze articles de la proposition de loi, neuf d'entre eux sont encore en discussion. Nous avons eu des échanges constructifs avec Christophe Naegelen, pour concilier protection du consommateur et développement de l'activité économique. Nous n'en sommes pas loin.
Dans un état d'esprit constructif, la commission des lois a adopté deux articles conformes : l'article 2, qui introduit le principe de l'open data des données essentielles de l'organisme gestionnaire de la liste d'opposition au démarchage téléphonique, que l'Assemblée a complété par l'obligation de publication d'un rapport public annuel par le gestionnaire ; et l'article 5, qui redéfinit le champ de l'exception contractuelle, laquelle permet à un professionnel de contacter un consommateur inscrit sur Bloctel, en la restreignant aux sollicitations en rapport avec l'objet d'un contrat en cours. Cette nouvelle rédaction est plus protectrice des consommateurs que le droit actuel, sans être aussi rigoureuse que la rédaction initialement retenue par l'Assemblée nationale, à laquelle le Sénat s'était opposé. Plusieurs amendements portent sur le sujet.
La commission des lois n'est pas revenue sur la suppression de deux articles : l'article premier A sur les modalités d'inscription à Bloctel par téléphone et l'article 3 bis sur les règles de plafonnement des sanctions, en considérant que l'autorité administrative devra toujours exercer son pouvoir de sanction de manière proportionnée sous le contrôle du juge.
Trois dispositions demeurent contestables. Ainsi, je vous propose de supprimer l'interdiction, à l'article premier bis, du démarchage téléphonique aux professionnels qui vendent des « équipements ou des travaux destinés à des logements et permettant la réalisation d'économies d'énergie ou la production d'énergies renouvelables », qui soulève un risque d'inconstitutionnalité important au regard des principes d'égalité devant la loi et de la liberté d'entreprendre.
À l'article 6, des dispositions nouvelles, méconnaissant la règle de l'entonnoir, ont été adoptées. Je vous proposerai leur suppression.
À l'article 7, le délai fixé à cinq ans paraît excessif.
Enfin, il convient, à l'article premier bis, de clarifier le caractère réfragable de la présomption de responsabilité du professionnel qui méconnaîtrait ses obligations et de préciser les obligations déontologiques auxquelles les professionnels seraient soumis.
De nombreux amendements portent sur l'opt-in. Notre choix de ne pas aller vers l'opt-in est la dernière chance de l'opt-out. Que M. Jean-Pierre Sueur veuille bien excuser l'emploi de ces mots anglais, qu'il traduira certainement en français...
M. Jean-Pierre Sueur. - Oui, il le faut !
M. André Reichardt, rapporteur. - Je souligne que je suis bien conscient du degré de harcèlement de nos concitoyens et de leur ras-le-bol à cet égard.
Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain ! Il y a certes des abus, mais cela ne doit pas conduire à interdire tout démarchage téléphonique.
Je forme le voeu qu'une CMP assure prochainement le succès de cette proposition de loi, qui permettra utilement de réguler le démarchage téléphonique, pour une meilleure protection des consommateurs.
M. Jean-Pierre Sueur . - Ce matin, j'ai reçu un appel de Gisèle Jourda. Dans l'Aude, il existe des petites communes isolées où certains habitants, âgés, ont tout simplement renoncé à décrocher leur téléphone car ils sont assaillis d'appels divers. Or, en cas d'inondation ou d'incendie, les maires font valoir que ces personnes doivent être prévenues par téléphone. Ce texte est donc hautement nécessaire.
De nombreux appels concernent la rénovation énergétique. Il y a des duperies et une utilisation fallacieuse de l'argent public. Un interdit unique est-il constitutionnel ? Il y a néanmoins un véritable problème sur le sujet.
Nous nous abstiendrons, car le texte ne prévoit pas le consentement a priori avant tout démarchage téléphonique. Cela est pourtant très simple, sans qu'il y ait à se perdre dans des anglicismes ! Les habitants excédés du département de l'Aude et d'ailleurs pourraient ainsi déclarer ne pas vouloir être sollicités.
Est-ce la dernière chance d'améliorer le système ? De toute façon, nous y reviendrons...
M. André Reichardt, rapporteur. - Il y a 60 000 emplois en jeu !
M. Jean-Pierre Sueur. - Quelque onze pays d'Europe ont adopté le consentement préalable. C'est déjà le cas pour le mail et le SMS. La mesure est en outre tout à fait conforme au RGPD.
Une proposition de loi de Jacques Mézard adoptée par le Sénat allait en ce sens ; elle avait été amendée par François Pillet. Comment pourrait-elle aller dans le mauvais sens ? (Sourires)
On peut regretter que la loi de la marchandise s'étende dans l'espace, aux entrées de nos villes ; on peut regretter qu'elle s'étende dans le temps en s'imposant à toutes les heures du jour et de la nuit. Mettons fin à ce fléau du démarchage téléphonique.
M. Ronan Dantec . - L'encadrement, plus ou moins strict, du démarchage téléphonique est un serpent de mer. C'est un problème connu et reconnu, les consommateurs sont importunés sans cesse. Oui, la proposition de loi Mézard a été adoptée... il y a neuf ans déjà - je venais d'arriver au Sénat.
L'obligation de consentement en amont devrait être la règle pour éviter des dérives confinant au harcèlement et visant plus particulièrement les personnes fragiles, celles qui ne savent pas dire non.
Les problèmes du démarchage téléphonique sont parfaitement connus. Les sociétés n'hésitent pas à appeler les consommateurs plusieurs fois dans le même mois, le soir, le week-end...
Il y a aussi le mal-être au travail des démarcheurs. Les pays européens, tels que l'Allemagne, l'Espagne, le Danemark ont inscrit dans la loi le consentement préalable, avec succès. Il est étonnant qu'on régule les textos et non les appels fixes alors que les premiers sont moins intrusifs que les seconds.
Avec les appels concernant la réhabilitation des logements, et singulièrement l'offre très alléchante de l'isolation à 1 euro, on a constaté de nombreux abus. Les travaux sont souvent bâclés et les propriétaires ensuite ne font pas réaliser de vrais travaux. Ce sont les bons professionnels qui réclament une régulation ! J'espère que nous trouverons un compromis. Je regrette que le texte n'aille pas assez loin mais je salue ses avancées.
Le groupe RDSE votera la proposition de loi.
M. Martin Lévrier . - Les pratiques de démarchage téléphonique ont lieu 4 fois par semaine et 4,4 fois par semaine pour les plus de 65 ans selon l'UFC-Que choisir.
Je remercie le rapporteur de l'Assemblée nationale, Christophe Naegelen, pour les solutions équilibrées qu'il a proposées pour les deux volets de cette proposition de loi.
Retenir le principe de l'opt-in revient à partir du postulat que le consommateur est toujours contre le démarchage : ce serait vouer à la disparition un secteur économique. Il est préférable de mieux réguler, d'améliorer le service Bloctel et de faire cesser les abus.
Je salue le travail de notre rapporteur qui a su faire voter quatre articles conformes tout en enrichissant le texte, avec la mention de Bloctel sur les contrats d'abonnement téléphonique et la création d'un régime de données ouvertes par ce service applicable au gestionnaire du Bloctel.
La rédaction de compromis de l'Assemblée nationale à l'article 5 a été validée par le rapporteur. C'est un bel exemple d'équilibre grâce au bicamérisme.
Il reste possible d'améliorer et enrichir le texte. Nous souhaitons rétablir l'interdiction du démarchage téléphonique pour le secteur de la rénovation thermique.
Ce texte présente une triple qualité de nécessité, d'équilibre et d'efficacité. Le groupe LaREM le votera.
Mme Michelle Gréaume . - Ce texte peut mettre fin à des nuisances subies par nos concitoyens. Le matin, vous vous levez et allumez la télé ou la radio : pub ; vous ouvrez le journal : pub ; vous allez au travail en transport en commun : pub. Et quand vous pensez être enfin tranquille, le téléphone sonne.
Ces stratégies agressives sont mises en oeuvre par des salariés mal rémunérés, sous surveillance permanente, contraints d'appliquer des méthodes scandaleuses et de subir les réactions virulentes des interlocuteurs.
Pour quelle utilité économique et sociale ? La question est posée de ces petits métiers aliénants qui pourraient disparaître sans que la société vacille... Libre information, conseil au client ? C'est faux. Bien sûr, le secteur emploie 56 000 personnes en France et rapporte plus de deux milliards par an, mais à qui ?
Ce serait un soutien important pour les pays du Sud ? Quelle indignité ! L'ambition française pour leur développement se bornerait à exploiter des jeunes diplômés à cette tâche débilitante ?
Le législateur a déjà apporté des réponses aux abus : liste rouge créée en 1978, Pacitel en 2011 et Bloctel en 2016, mais ce dernier illustre la faiblesse - organisée - de la régulation, laquelle repose sur l'initiative du consommateur pour refuser le démarchage téléphonique.
Les moyens de contrôle et de sanction manquent. La DGCCRF voit ses dotations et ses effectifs fondre ; de plus, Bloctel ne fonctionne pas. Comment expliquer, sinon, que plus de 200 000 inscrits se plaignent du démarchage téléphonique ? Les entreprises négligent de nettoyer leurs fichiers de contacts. Comment croire qu'un démarcheur fournirait à chaque appel les informations légales et prendrait le temps de présenter Bloctel, alors qu'il est minuté et surveillé par son manager ?
Toute la philosophie de cette régulation est à revoir. Je reconnais que la proposition de loi n'aggrave pas la situation, et pourrait l'améliorer à la marge, contre les arnaques surtaxées. Mais le texte peut être amélioré, le groupe CRCE a déposé des amendements, il réserve donc son vote.
M. Dany Wattebled . - Le démarchage téléphonique est une nuisance mais une pratique légale, employant 56 000 personnes en France dont 15 000 dans les Hauts-de-France - souvent des personnes fragiles, travaillant à des horaires flexibles, parfois pour un complément de revenu.
Ce n'est pas le démarchage téléphonique qui est en cause mais la fraude, automates, appels pièges, utilisation frauduleuse de numéros de téléphone... Il faut mieux protéger le consommateur tout en soutenant les TPE et PME qui respectent le droit.
La commission, je m'en réjouis, a supprimé l'interdiction du démarchage faite à tel ou tel secteur en particulier, qui entraînait un risque d'inconstitutionnalité. La sanction de cinq ans de suspension d'activité était excessive. La commission l'a sagement réduit à six mois.
Le groupe Les Indépendants votera ce texte utile et équilibré.
M. Jean-François Longeot . - L'examen de cette proposition de loi a débuté en 2018. Une fois encore, nous constatons sa pertinence, d'autant que l'on a observé pendant le confinement une recrudescence des appels, nous rappelant la galère du démarchage téléphonique. Les Français sont neuf sur dix à se dire excédés par ces appels. La France serait divisée sur le sujet ? Le réquisitoire est unanime !
La pétition réclamant en janvier dernier l'interdiction du démarchage téléphonique a recueilli plus de 115 000 signatures, mais c'est une solution trop radicale. Mieux vaut faire évoluer le cadre législatif, protéger les consommateurs, sans entraver ce secteur économique.
Bloctel existe depuis 2014 mais ses insuffisances sont patentes et ses résultats modestes.
Nous ne voulons pas remettre en cause la philosophie du droit actuel. Mais nos concitoyens ne comprendraient pas que la montagne accouche d'une souris, que la proposition de loi ne soit pas l'occasion d'avancées. Au-delà des personnes inscrites, il serait légitime que Bloctel assure une protection également aux personnes les moins armées.
Nous appelons de nos voeux le respect d'une ligne de crête, avec un démarchage téléphonique respectueux, et une sanction renforcée des fraudes. Nous nous félicitons d'une aggravation des sanctions en cas de manquement et attendons beaucoup de la définition d'horaires autorisés pour le démarchage téléphonique.
Nous proposons l'interdiction de cette pratique s'agissant des travaux d'économie d'énergie, qui a donné lieu à trop d'abus. Nous conservons l'espoir d'un compromis en CMP... et d'une promulgation dans un délai raisonnable.
Mme Laure Darcos . - Si le législateur s'est déjà attelé à la tâche de lutter contre le démarchage téléphonique abusif en 2014 avec Bloctel, les abus sont encore trop fréquents et confinent parfois au harcèlement.
Je remercie le rapporteur pour son travail. L'objet de ce texte n'est pas d'interdire toute prospection commerciale par téléphone mais d'éviter les abus.
L'interdiction du démarchage téléphonique pour le secteur de la rénovation comportait un risque d'inconstitutionnalité et portait préjudice aux entreprises respectueuses de la loi.
Des incertitudes doivent être dissipées. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement sur l'article premier bis afin que les appels téléphoniques sollicités par les clients ne soient pas concernés. La crise économique inédite qui s'apprête à frapper les entreprises nous impose de ne pas compliquer les relations commerciales.
Notre groupe votera ce texte, tel qu'issu des travaux de la commission.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER A (Suppression maintenue)
Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L'article L. 34-5 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « courriers électroniques », sont insérés les mots : « ou d'un appel vocal » ;
2° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'interdiction prévue au premier alinéa du présent article ne s'applique pas à la prospection directe au moyen d'un appel vocal en vue d'actions caritatives, de la réalisation de sondages ou de la fourniture de journaux, de périodiques ou de magazines. »
Mme Michelle Gréaume. - Malgré l'inscription de 3,7 millions de consommateurs sur Bloctel, ils sont très nombreux à être toujours rappelés. Quelque 200 500 d'entre eux se sont même tournés vers la DGCCRF. Je puis en témoigner, je me suis inscrite mais reçois encore de très nombreux appels. Le modèle de l'opt-in choisi par l'Allemagne, l'Espagne et le Portugal protégerait mieux les citoyens. Il faut donc créer une case dans les conditions générales de vente, à cocher par ceux qui acceptent d'être appelés.
Mme la présidente. - Amendement identique n°17 rectifié, présenté par MM. Bonhomme, Bonne, Longuet, Luche, Cambon, Piednoir, Brisson et Schmitz, Mmes Deromedi, de Cidrac et Billon, MM. Médevielle, Moga, Longeot, Dallier, Cigolotti, Dufaut, B. Fournier, A. Marc, Lefèvre et Vogel, Mme Deroche, M. D. Laurent, Mme Garriaud-Maylam, M. Leleux, Mmes Berthet et Vullien, M. Pierre, Mme Bruguière, MM. Cardoux et Pellevat, Mmes Bonfanti-Dossat et Chauvin, MM. Bouchet, Milon, Charon et Bazin, Mme L. Darcos et MM. Pointereau, P. Martin, Saury, Mouiller et Delcros.
M. Stéphane Piednoir. - En France, entre 2016 et 2018, 1,3 million de réclamations, émanant de 200 000 personnes, ont été déposées par les seuls inscrits à Bloctel, soit un taux de plainte de 5 %. En Allemagne, où le système d'opt-in est en vigueur, seules 150 000 plaintes ont été comptabilisées sur l'ensemble de la population, soit un taux de plainte de 0,36 %.
Depuis la mise en place de l'opt-in au Portugal en 2012, et au Royaume-Uni en 2018, les associations de consommateurs portugaise DECO, et anglaise Which notent une baisse significative du nombre de plaintes.
Pour répondre au fléau du démarchage téléphonique et à l'inefficacité du dispositif Bloctel, le présent amendement aligne le régime de ce type de prospection sur celui des SMS et courriels qui disposent d'un système d'opt-in. Pour cela, il est proposé que tous les régimes relatifs au démarchage figurent au même article, dans un souci d'harmonisation et de clarté.
L'amendement n°28 rectifié bis n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°9, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le premier alinéa de l'article L. 223-1 du code de la consommation est complété par une phrase ainsi rédigée : « L'inscription sur cette liste se fait par voie dématérialisée, postale ou téléphonique. »
M. Jean-Pierre Sueur. - Nous demandons simplement que l'inscription à la liste d'opposition au démarchage téléphonique puisse être faite par téléphone. Cette disposition avait déjà été adoptée par le Sénat. Je ne doute donc pas qu'elle le sera à nouveau.
M. André Reichardt, rapporteur. - Les amendements vont tous dans le même sens : la mise en place de l'opt-in chère à M. Sueur. Lors de l'examen en première lecture, nous n'avions pas voulu remettre en question l'opt-out, qui fonde la philosophie du droit en vigueur. Même si cela date un peu - seize mois - nous ne souhaitons pas y revenir. Nous préférons renforcer les mécanismes de régulation.
L'amendement 9 rétablit un article supprimé à l'Assemblée nationale, mais qui est satisfait par les textes. Avis défavorable aux amendements identiques nos1, 17 rectifié et à l'amendement n°9.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Il est préférable d'en rester à l'équilibre du texte. Il y a bien sûr des progrès à faire sur Bloctel et sur la mise en oeuvre effective de la loi. Aujourd'hui, de nombreuses entreprises respectueuses de la loi font du démarchage téléphonique. Il ne faut pas faire les lois pour la minorité - environ 5 % des entreprises - qui ne la respecte pas.
Il est déjà possible de contacter Bloctel par tout moyen. Il est vrai que le moyen téléphonique n'est pas opérant, pour une raison de coût : il faut un opérateur au bout du fil. Mais il reste possible de demander l'opposition par courriel et par courrier - on compte 60 courriers et des milliers de courriels, de mémoire, l'an dernier, ce dernier moyen fonctionne bien !
Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°9.
M. Ronan Dantec. - Il y aurait 5 % d'entreprises contrevenantes ? Ce n'est pas mon sentiment, je dirais plutôt qu'il y en a 95 % qui m'importunent !
Notre groupe s'interroge sur l'utilité des emplois dans le secteur du démarchage téléphonique. Ils ne sont pas épanouissants et génèrent des plaintes, dont le traitement exige d'autres emplois, ce qui suscite de la dépense publique.
Il faut changer la règle, mais pas forcément systématiquement. Il y a des gens qui souscrivent des contrats et acceptent d'être démarchés sur des sujets en lien avec ces contrats. Cela inciterait les entreprises à faire des offres moins inopportunes.
À la demande de la commission des lois, les amendements identiques nos1 et 17 rectifié mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°112 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 325 |
Pour l'adoption | 111 |
Contre | 214 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je pensais retirer l'amendement n°9, après avoir entendu le rapporteur. Mais j'ai entendu la ministre et par conséquent je le maintiens. (Sourires)
Car je conclus des propos de Mme la secrétaire d'État que la société Bloctel n'applique pas la loi : il eût fallu qu'elle mît en place les moyens humains pour répondre au téléphone. Il y a une légalité formelle et une situation réelle.
L'amendement n°9 n'est pas adopté.
L'article premier A demeure supprimé.
ARTICLE PREMIER
Mme la présidente. - Amendement n°10, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 3
1° Remplacer les mots :
d'opposition
par le mot :
dédiée
2° Remplacer les mots :
ne souhaite pas
par le mot :
souhaite
M. Jean-Pierre Sueur. - C'est un amendement de cohérence avec l'amendement n°12 qui viendra plus tard.
M. André Reichardt, rapporteur. - Je peux aussi le considérer comme un amendement de cohérence avec les précédents amendements que nous venons de rejeter. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Même avis.
L'amendement n°10 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°4, présenté par Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
....- Au deuxième alinéa du même article L. 221-16, les mots : « sur papier ou sur support durable » sont remplacés par les mots : « par courrier ».
Mme Michelle Gréaume. - Un centre d'appels propose une offre à une personne âgée ; pour écourter la conversation, celle-ci accepte qu'on lui envoie un exemplaire du contrat. Quelques jours plus tard, un professionnel se présente à son domicile pour lui présenter un contrat, ce qui crée pour elle une pression. En outre, les proches n'ont pas la possibilité d'étudier le contrat, le consommateur est privé d'un nécessaire temps de réflexion.
L'envoi par courrier, lui, permet une étude comparative et garantit ainsi le libre choix du consommateur. Il est de nature à rassurer les consommateurs mais aussi protéger les entreprises vertueuses. Sachant que le délai de rétraction de quatorze jours est valable à compter de la signature du contrat, on éviterait aussi de nombreux recours.
M. André Reichardt, rapporteur. - Votre amendement est trop restrictif. Il n'est pas pertinent d'empêcher les professionnels d'envoyer les contrats par courriel. Le consommateur n'est engagé que s'il a signé, et il bénéficie d'un délai de rétractation. Retrait ou avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Une personne âgée qui ne lit pas son courrier électronique ne signera pas le contrat et ne sera donc pas engagée. Votre amendement, tel qu'il est rédigé, n'empêche pas les visites. Retrait ou avis défavorable.
Mme Michelle Gréaume. - Je le retire. Mais je voulais protéger les personnes âgées qui n'ont, par ailleurs, pas toujours connaissance du délai de rétractation.
L'amendement n°4 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°11, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - L'article L. 221-7 du code de la consommation est ainsi rédigé :
« Art. L. 221-7. - Un arrêté conjoint des ministres chargés de la consommation et de l'économie numérique, pris après avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, définit la tranche de numéro obligatoire permettant d'identifier l'appel comme un démarchage téléphonique ou une prospection commerciale. »
M. Jean-Pierre Sueur. - Cet amendement instaure un préfixe permettant d'informer immédiatement le consommateur qu'il s'agit d'un démarchage ou d'une offre commerciale. C'est donc en connaissance de cause qu'il décrochera. C'est du bon sens. Je ne comprendrais pas que l'on fût hostile à la fois au consentement préalable explicite et à un tel préfixe, conforme à la législation européenne. Je présente donc mon amendement avec une grande confiance. (Sourires)
Mme la présidente. - Amendement n°5 rectifié, présenté par Mme Loisier, MM. Longeot, Laugier et Bonnecarrère, Mme Joissains, MM. Janssens et Canevet, Mmes Billon et Doineau, M. L. Hervé, Mme de la Provôté, MM. Mizzon et Moga, Mme Saint-Pé et MM. Delcros, Kern et P. Martin.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après l'article L. 221-17 du code de la consommation, il est inséré un article L. 221-... ainsi rédigé :
« Art. L. 221-.... - Tout appel de prospection commerciale par voie téléphonique doit être identifiable par le consommateur à l'aide d'un préfixe précédant obligatoirement le numéro de la ligne appelante.
« Un décret pris après avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse détermine les modalités d'application du premier alinéa. »
M. Jean-François Longeot. - Afin que les consommateurs identifient la nature des appels reçus, il convient de faire précéder les numéros utilisés par les démarcheurs d'un préfixe spécifique. Cela permettrait de refuser d'être démarché avant même d'avoir décroché, et limiterait le nombre de litiges engendrés par la prospection commerciale téléphonique. C'est du bon sens
Mme la présidente. - Amendement identique n°20 rectifié bis, présenté par MM. Bonhomme, Bonne, Longuet, Luche, Cambon, Piednoir, Brisson et Schmitz, Mmes Deromedi et de Cidrac, MM. Médevielle, Dallier, Cigolotti, Dufaut, B. Fournier, Laménie, Lefèvre et Vogel, Mme Deroche, M. D. Laurent, Mme Garriaud-Maylam, M. Leleux, Mmes Berthet et Vullien, M. Pierre, Mme Bruguière, MM. Cardoux et Pellevat, Mmes Bonfanti-Dossat et Chauvin, MM. Bouchet, Milon, Charon et Bazin, Mme L. Darcos, MM. Pointereau et Saury, Mme Puissat et M. Mouiller.
M. Stéphane Piednoir. - Cette solution technique, ni complexe ni onéreuse à mettre en oeuvre, est effectivement de bon sens.
L'amendement n°29 rectifié bis n'est pas défendu.
M. André Reichardt, rapporteur. - Cette mesure ne pénaliserait que les professionnels vertueux, dont les consommateurs ne prendront plus les appels ; les fraudeurs, par définition, utiliseront un numéro sans préfixe ! Avis défavorable, à regret... (Sourires)
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Même avis pour les mêmes raisons.
M. Ronan Dantec. - L'appelant peut laisser un message. Si l'offre est pertinente, il pourra être rappelé. Ce n'est donc pas un système d'interdiction mais de régulation, qui fera évoluer les choses dans le bon sens.
L'amendement n°11 est adopté.
(Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)
Les amendements identiques n°5 rectifié et 20 rectifié bis deviennent sans objet.
L'article premier, modifié, est adopté.
ARTICLE PREMIER BIS
Mme la présidente. - Amendement n°12, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.
Rédiger ainsi cet article :
I. - Après l'article 38 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, il est inséré un article 38-... ainsi rédigé :
« Art. 38-.... - Concernant le traitement des données à des fins de prospection, notamment commerciale, la personne doit donner expressément son accord par écrit au responsable du traitement ou à celui d'un traitement ultérieur, pour que ses données puissent faire l'objet dudit traitement. À défaut d'accord écrit, ses données personnelles ne peuvent en aucun cas être utilisées à des fins commerciales.
« Les données à caractère personnel issues des listes d'abonnés ou d'utilisateurs de communications électroniques ou téléphoniques ne peuvent être utilisées dans des opérations de prospection commerciale directe sans l'accord préalable explicite de la personne physique auxquelles ces données à caractère personnel se rapportent. Cet accord peut être dénoncé par l'abonné à tout moment. L'opérateur est tenu d'informer clairement l'abonné de cette faculté de résiliation.
« Cet accord doit être soit expressément adressé à l'opérateur de communications mentionné au premier alinéa pour tous les abonnements contractés antérieurement ou postérieurement à la loi n° du visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, soit recueilli expressément par la personne qui effectue le démarchage, sous forme écrite s'il se traduit par une vente ou une prestation de service payante.
« Les premier et deuxième alinéas ne s'appliquent pas lorsque le traitement répond à une obligation légale ou de sécurité publique. »
II. - Le code de la consommation est ainsi modifié :
1° L'article L. 221-7 est ainsi rédigé :
« Art. L. 221-7. - Un arrêté conjoint des ministres chargés de la consommation et de l'économie numérique, pris après avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, définit la tranche de numéro obligatoire permettant d'identifier l'appel comme un démarchage téléphonique ou une prospection commerciale. » ;
2° Les deux premiers alinéas de l'article L. 223-1 sont ainsi rédigés :
« Le consommateur qui souhaite faire l'objet de prospection commerciale par voie téléphonique peut gratuitement s'inscrire sur une liste dédiée à cet effet. L'inscription à cette liste peut se faire par voie numérique, postale ou téléphonique.
« Il est interdit à un professionnel, directement ou par l'intermédiaire d'un tiers agissant pour son compte, de démarcher téléphoniquement un consommateur non inscrit sur cette liste, à l'exception des sollicitations ayant un lien direct avec l'objet d'un contrat en cours. » ;
3° À l'article L. 223-3, le mot : « inscrits » est remplacé par les mots : « non inscrits » et les mots : « d'opposition » sont remplacés par le mot : « dédiée » ;
4° L'article L. 223-4 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « d'opposition » sont remplacés par le mot : « dédiée » ;
b) Au second alinéa, les mots : « d'opposition » sont remplacés par le mot : « dédié » ;
5° L'article L. 223-5 est abrogé.
III. - Le code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° L'article L. 34-5 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après la référence : « L. 32, », sont insérés les mots : « d'un appel vocal, » ;
b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'interdiction prévue au premier alinéa du présent article relative aux appels vocaux s'applique à partir du 1er janvier 2021. » ;
c) À la première phrase du cinquième alinéa, après la référence : « L. 32, », sont insérés les mots : « d'appels vocaux, » ;
d) Après le même cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'interdiction prévue au premier alinéa du présent article ne s'applique pas à la prospection directe par appel vocal en vue de la fourniture de journaux, de périodiques ou de magazines. » ;
2° Après l'article L. 34-5, il est inséré un article L. 34-5-... ainsi rédigé :
« Art. L. 34-5-.... - Lors de la conclusion d'un contrat de fourniture de service téléphonique au public, l'opérateur de communication électronique doit recueillir le consentement exprès de l'abonné, personne physique, pour l'utilisation par voie téléphonique, par un tiers au contrat, de ses données à caractère personnel à des fins de prospection directe. »
M. Jean-Pierre Sueur. - Cet amendement reprend ceux de mes collègues. Je l'ai présenté en discussion générale.
M. André Reichardt, rapporteur. - La commission des lois préconise d'en rester à l'opt out, afin de ne pas mettre en péril les 60 000 emplois du secteur tout en faisant cesser le harcèlement téléphonique. Certes, il y a des abus, mais faut-il sortir l'arme nucléaire et empêcher les entreprises sérieuses de travailler ?
Nous en sommes à la deuxième lecture, l'objectif est de mettre en oeuvre ce texte rapidement. Monsieur Dantec, vous avez évoqué la précarité des emplois dans le démarchage téléphonique. Veillons à ne pas propager des rumeurs inexactes. J'ai visité des entreprises françaises de démarchage téléphonique et j'ai rencontré les représentants des salariés sans qu'ils se plaignent de leur situation. Bien sûr, il existe des centres d'appel à l'étranger, où je ne me suis pas rendu - mais ils ne pourront utiliser des numéros français depuis l'étranger, ce qui devrait considérablement limiter les risques. Quoi qu'il en soit, il ne faut pas mettre un terme à l'activité des centres d'appels installés en France. Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Beaucoup d'entreprises ont leur propre plateforme de démarchage téléphonique. Elles sont le plus souvent respectueuses des clients : c'est une question et de réputation pour l'entreprise, qui a intérêt à un démarchage éthique. Ne mettons pas toutes les entreprises dans le même panier. Nous essayons de lutter contre les abus. Or les plateformes étrangères ne se conformeront pas au numéro unique, ne nous faisons pas d'illusion. Certaines appellent même sur les téléphones portables alors que c'est interdit. On raccrochera au nez de ceux qui respectent la loi et on décrochera pour les autres.
Essayons de traiter les situations que nous connaissons tout en préservant des emplois utiles, qui peuvent représenter des petits boulots bienvenus pour des étudiants - cela a été mon cas - ou des personnes qui ont des contraintes horaires particulières. Dans la situation actuelle, nous ne pouvons les balayer d'un revers de main.
Mme Michelle Gréaume. - Je suis aussi là pour protéger l'emploi et je regrette que mon amendement n°3 à l'article 3 bis ait été déclaré irrecevable au titre de l'article 44 bis. Il demandait un rapport sur les salariés des centrales en France et à l'étranger.
À la demande de la commission des lois, l'amendement n°12 est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°113 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l'adoption | 109 |
Contre | 231 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°22 rectifié, présenté par MM. Bonhomme, Bonne, Longuet, Luche, Cambon, Piednoir, Brisson et Schmitz, Mmes Deromedi, de Cidrac et Billon, MM. Médevielle, Moga, Longeot, Dallier, Cigolotti, Dufaut, B. Fournier, Laménie, Lefèvre et Vogel, Mme Deroche, M. D. Laurent, Mme Garriaud-Maylam, M. Leleux, Mmes Berthet et Vullien, M. Pierre, Mme Bruguière, MM. Cardoux et Pellevat, Mmes Bonfanti-Dossat et Chauvin et MM. Bouchet, Milon, Charon et Bazin.
I. - Après l'alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Au premier alinéa de l'article L. 223 - 1, après le mot : « commerciale », sont insérés les mots : « ni être contacté par un institut d'études ou de sondage ou un organisme caritatif » ;
II. - Alinéas 11 et 12
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
L'article L. 223-5 est abrogé.
M. Stéphane Piednoir. - Cet amendement de cohérence supprime les exceptions au droit d'opposition au démarchage qui existent en faveur de la presse, des sondages et des associations caritatives. Il apparaît injustifié que ces domaines échappent à l'interdiction.
M. André Reichardt, rapporteur. - Avis défavorable. Les abus ne sont pas le fait de ces professionnels.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Nous n'avons pas de plaintes les concernant. Retrait ou avis défavorable.
L'amendement n°22 rectifié est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°6 rectifié, présenté par Mme Loisier, MM. Longeot, Laugier et Bonnecarrère, Mme Joissains, MM. Janssens et Canevet, Mmes Billon et Doineau, M. L. Hervé, Mme de la Provôté, MM. Mizzon et Moga, Mme Saint-Pé, MM. Delcros et Kern et Mme Férat.
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Est interdite toute prospection commerciale de consommateurs par voie téléphonique qui vise la souscription de contrats de fourniture d'électricité ou de gaz naturel.
M. Jean-François Longeot. - Les fournisseurs d'énergie sont, selon l'UFC-Que Choisir, les troisièmes démarcheurs les plus actifs. En outre, les litiges liés au démarchage téléphonique ont progressé de 60 % entre 2012 et 2019. Sollicités sans leur consentement, les consommateurs ne peuvent effectuer de choix éclairé. D'autant que les informations présentées lors des échanges téléphoniques sont souvent lacunaires, voire inexactes. Aussi, nous interdisons le démarchage téléphonique en matière de fourniture d'électricité et de gaz naturel.
Mme la présidente. - Amendement identique n°19 rectifié bis, présenté par MM. Bonhomme, Bonne, Longuet, Luche, Cambon, Piednoir, Brisson et Schmitz, Mmes Deromedi et de Cidrac, MM. Médevielle, Dallier, Cigolotti, Dufaut, B. Fournier, Laménie, Lefèvre et Vogel, Mme Deroche, M. D. Laurent, Mme Garriaud-Maylam, M. Leleux, Mmes Berthet et Vullien, M. Pierre, Mme Bruguière, MM. Cardoux et Pellevat, Mmes Bonfanti-Dossat et Chauvin et MM. Bouchet, Milon, Charon et Bazin.
M. Stéphane Piednoir. - Les litiges liés au démarchage téléphonique ont effectivement progressé de 60 % entre 2012 et 2019 et concernent largement les fournisseurs d'énergie, troisièmes démarcheurs les plus actifs.
Nous visons les secteurs les plus saillants du démarchage téléphonique. L'argument portant sur les emplois à préserver est irrecevable. Faudrait-il alors maintenir les centrales à charbon sous prétexte que des emplois seraient en jeu ? C'est le cas dans ma région. En l'absence de préfixe unique, il est possible de reconnaître la provenance d'un appel. Il est possible, facilement, de protéger les consommateurs en excluant les secteurs les plus prolifiques en nombre de démarches et de litiges. Nous sommes là pour protéger les consommateurs.
L'amendement n°27 rectifié bis n'est pas défendu.
M. André Reichardt, rapporteur. - La commission des lois est défavorable à une interdiction sectorielle du démarchage téléphonique qui serait inconstitutionnelle au regard de l'égalité entre professionnels.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Je ne partage pas votre analyse constitutionnelle, monsieur le rapporteur, mais je suis aussi défavorable à l'amendement. Les fournisseurs d'énergie sont peu nombreux et facilement contrôlables. Engie vient ainsi d'être condamné à une amende d'un million d'euros de la part de la DGCCRF.
Il y a eu des débordements, des démarchages téléphoniques agressifs, et nous renforçons le contrôle et publions les sanctions. L'accent doit plutôt être mis sur les abus dans le domaine de la rénovation thermique, où des myriades d'entreprises se créent et disparaissent tous les jours.
À la demande de la commission des lois, les amendements identiques nos6 rectifié et 19 rectifié bis sont mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°114 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l'adoption | 42 |
Contre | 298 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mme Loisier, MM. Longeot, Laugier et Bonnecarrère, Mme Joissains, MM. Janssens et Canevet, Mmes Billon et Doineau, M. L. Hervé, Mme de la Provôté, MM. Mizzon et Moga, Mme Saint-Pé, MM. Delcros et Kern et Mme Férat.
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La prospection par voie téléphonique visant à obtenir la souscription de contrats d'assurances est interdite.
M. Jean-François Longeot. - Le démarchage téléphonique s'avère particulièrement problématique en matière d'assurance.
Les professionnels s'exonèrent régulièrement de leur obligation de remettre une information écrite avant toute souscription d'un contrat et n'adaptent pas les prestations proposées aux besoins des consommateurs.
Cet amendement interdit le démarchage téléphonique en matière d'assurance.
Mme la présidente. - Amendement identique n°18 rectifié bis, présenté par MM. Bonhomme, Bonne, Longuet, Luche, Cambon, Piednoir, Brisson et Schmitz, Mmes Deromedi et de Cidrac, MM. Médevielle, Dallier, Cigolotti, Dufaut, B. Fournier, Laménie, Lefèvre et Vogel, Mme Deroche, M. D. Laurent, Mme Garriaud-Maylam, M. Leleux, Mmes Berthet et Vullien, M. Pierre, Mme Bruguière, MM. Cardoux et Pellevat, Mmes Bonfanti-Dossat et Chauvin et MM. Bouchet, Milon, Charon, Bazin et Pointereau.
M. Stéphane Piednoir. - Défendu.
L'amendement n°26 rectifié bis n'est pas défendu.
M. André Reichardt, rapporteur. - La commission des lois est défavorable à une interdiction par secteur.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Retrait ou avis défavorable. Nous avons travaillé avec le secteur des assurances. Le comité consultatif du secteur financier a publié le 19 novembre un avis important concernant les démarchages téléphoniques pour le secteur des assurances.
Les démarcheurs devront désormais respecter des règles précises en cas d'appel dit « à froid » : processus de vente en deux temps, vente minimum vingt-quatre heures après le premier appel et après réception de la documentation et recueil du consentement écrit.
Les amendements identiques nos7 rectifié et 18 rectifié bis ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°31 rectifié, présenté par M. Lévrier et les membres du groupe La République En Marche.
I. - Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Est interdite toute prospection commerciale de consommateurs par voie téléphonique qui vise la vente par des professionnels d'équipements et de travaux destinés à des logements et permettant la réalisation d'économies d'énergie ou la production d'énergies renouvelables.
II. - Alinéa 7, première phrase
Remplacer le mot :
troisième
par le mot :
quatrième
M. Martin Lévrier. - La rénovation énergétique des logements est essentielle à la transition énergétique d'autant qu'ils représentent 25 % des émissions de CO2 en France. Hélas, ce secteur est propice aux abus et concentre la majorité des plaintes alors qu'il bénéficie d'un fort soutien public. La confiance des consommateurs s'en trouve profondément érodée. Il convient donc de mettre un terme au démarchage téléphonique dans ce secteur. Le Gouvernement a complété cet amendement par un sous-amendement qui précise les cas où cette interdiction ne s'appliquera pas. Ce dispositif sera utile aux consommateurs comme aux entreprises vertueuses.
Mme la présidente. - Sous-amendement n°38 à l'amendement n°31 rectifié de M. Lévrier et les membres du groupe La République En Marche, présenté par le Gouvernement.
Amendement n 31 rect.
I. - Après l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret détermine les cas dans lesquels, compte tenu de l'antériorité et de la nature de la relation contractuelle entre le professionnel et le client, ainsi que de la proportion d'aides publiques liées à la rénovation énergétique dans le chiffre d'affaires du professionnel, les dispositions du précédent alinéa ne sont pas applicables.
II. - Alinéa 8
Remplacer le mot :
quatrième
par le mot :
cinquième
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Nous partageons la préoccupation des auteurs de l'amendement et sommes favorables à l'interdiction du démarchage téléphonique dans le secteur de la rénovation thermique, notamment parce qu'il bénéficie d'aides publiques.
Les entreprises du secteur sont rendues visibles par des labels spécifiques, des portails et des conseillers : leurs offres commerciales sont mises en avant, ce qui rend moins nécessaire le démarchage téléphonique.
Nous avons cependant échangé avec des acteurs de la rénovation thermique ou qui y participent et proposons des dérogations ciblées pour les entreprises dont le chiffre d'affaires comprend peu d'aides publiques et dont la rénovation énergétique ne représente qu'une partie de leur activité et pour celles qui ont un lien antérieur avec le client ciblé. Le dispositif sera précisé par un décret en Conseil d'État.
Mme la présidente. - Amendement n°35 rectifié, présenté par MM. Dantec, Artano et Collin, Mme Costes, MM. Corbisez et Gold, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Requier, Roux et Vall.
I. - Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Est interdite toute prospection commerciale de consommateurs par voie téléphonique sans accord préalable ou relation contractuelle en cours qui vise la vente par des professionnels d'équipements ou de travaux destinés à des logements et permettant la réalisation d'économies d'énergie ou la production d'énergies renouvelables.
II. - Alinéa 7, première phrase
Remplacer le mot :
troisième
par le mot :
quatrième
M. Ronan Dantec. - Il est essentiel de légiférer rapidement. Cette offre d'isolation à 1 euro met à bas tout le système de la rénovation énergétique et la France a de très mauvais résultats en la matière.
Le démarchage téléphonique déstructure les portails d'informations qui sont mis en place. Si j'étais un peu taquin, (Sourires) je dirais que l'antériorité de la relation commerciale est un principe qui pourrait s'appliquer à tous les démarchages téléphoniques.
Je n'ai pas tout compris sur le critère de proportion d'aides publiques dans le chiffre d'affaires du professionnel mis en avant par le Gouvernement.
Mme la présidente. - Amendement n°13, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Est interdite toute prospection commerciale de consommateurs par voie téléphonique qui vise la vente par des professionnels d'équipements ou de travaux destinés à des logements et permettant la réalisation d'économies d'énergie ou la production d'énergies renouvelables.
M. Jean-Pierre Sueur. - La situation est complexe. Il aurait été beaucoup plus simple de choisir le consentement préalable ! Je conçois la logique du rapporteur, qui consiste à dire qu'il n'y a aucune dérogation. Mais où s'arrêteront les dérogations ?
Néanmoins, il faut prendre en compte la situation des entreprises des économies d'énergie qui proposent un trop grand nombre d'opérations fallacieuses. Nous acceptons donc une dérogation pour ce secteur.
Madame la ministre, nous ne pourrons pas adopter votre sous-amendement par lequel vous avez certainement voulu présenter une motion de synthèse. Je n'aimerais pas être le rédacteur du décret que vous prévoyez pour autoriser certaines entreprises à démarcher leurs clients. L'ancienneté des relations devra-t-elle être d'un an, de deux ans ? La nature des relations sera-t-elle définie par décret ? Qu'est-ce que cette nature ? Et je ne parle même pas de la proportion d'aides publiques dans le chiffre d'affaires desdites entreprises ! Ces conditions seront-elles alternatives ou cumulatives ? Votre proposition byzantine risque de devenir un nid à contentieux.
Madame la ministre, vous savez vous-même que votre proposition est trop complexe.
Mme la présidente. - Amendement identique n°21 rectifié, présenté par MM. Bonhomme, Bonne, Longuet, Luche, Cambon, Piednoir, Brisson et Schmitz, Mmes Deromedi, de Cidrac et Billon, MM. Médevielle, Moga, Longeot, Dallier, Cigolotti, Dufaut, B. Fournier, Laménie, Lefèvre et Vogel, Mme Deroche, M. D. Laurent, Mme Garriaud-Maylam, M. Leleux, Mmes Berthet et Vullien, M. Pierre, Mme Bruguière, MM. Cardoux et Pellevat, Mmes Bonfanti-Dossat et Chauvin et MM. Bouchet, Milon, Charon, Bazin et Pointereau.
M. Stéphane Piednoir. - Qui n'a pas été sollicité par ce type de démarche abusive, excessive, à la limite du harcèlement ? Certains consommateurs plus fragiles finissent par accepter, de guerre lasse, ce qu'on leur propose.
C'est le premier scandale. Le second, c'est le discrédit jeté sur tout un secteur économique. J'ai été président d'une agence locale de l'énergie et du climat (ALEC). Nous étions rejetés car assimilés à tous ceux qui proposent les fausses rénovations à 1 euro.
Le troisième scandale, c'est la qualité des travaux qui ne sont ni faits ni à faire et obligent le consommateur à tout refaire - pour le plus grand bénéfice du professionnel. Je pense moi aussi que le sous-amendement de la ministre n'est pas réaliste et qu'il sera très difficile d'écrire le décret auquel il fait référence.
L'amendement n°24 rectifié bis n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Sous-amendement identique n°37 à l'amendement n°24 rectifié de Mme Noël, présenté par le Gouvernement.
Amendement n° 24
Compléter cet amendement par un alinéa et un paragraphe ainsi rédigés :
« Un décret détermine les cas dans lesquels, compte tenu de l'antériorité et de la nature de la relation contractuelle entre le professionnel et le client, ainsi que de la proportion d'aides publiques liées à la rénovation énergétique dans le chiffre d'affaires du professionnel, les dispositions du précédent alinéa ne sont pas applicables.
.... - Alinéa 7, première phrase
Remplacer le mot :
troisième
par le mot :
cinquième
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Le critère d'antériorité d'une relation contractuelle est simple à mettre en oeuvre.
La notion de proportion d'aides publiques liée à la rénovation énergétique dans le chiffre d'affaires de l'entreprise est une notion également aisée à appréhender. Les fraudeurs sont des entreprises créées uniquement pour percevoir les aides publiques, et non des entreprises générales de travaux. Il est donc très facile de les repérer.
Enfin, la nature de la relation porte sur le caractère connexe des prestations déjà fournies.
Le décret sera donc facile à rédiger.
Mme la présidente. - Amendement n°33 rectifié, présenté par M. Marseille et les membres du groupe Union Centriste.
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Sous réserve de l'alinéa précédent, est interdite toute prospection commerciale de consommateurs par voie téléphonique qui vise la vente par des professionnels d'équipements ou de travaux destinés à des logements et permettant la réalisation d'économies d'énergie ou la production d'énergies renouvelables.
M. Jean-François Longeot. - Défendu.
Mme la présidente. - Sous-amendement n°36 à l'amendement n°33 rectifié de M. Marseille et les membres du groupe Union Centriste, présenté par le Gouvernement.
Amendement n°33 rect.
I. - Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Est interdite toute prospection commerciale de consommateurs par voie téléphonique qui vise la vente par des professionnels d'équipements ou de travaux destinés à des logements et permettant la réalisation d'économies d'énergie ou la production d'énergies renouvelables.
II. - Compléter cet amendement par un alinéa et un paragraphe ainsi rédigés :
« Un décret détermine les cas dans lesquels, compte tenu de l'antériorité et de la nature de la relation contractuelle entre le professionnel et le client, ainsi que de la proportion d'aides publiques liées à la rénovation énergétique dans le chiffre d'affaires du professionnel, les dispositions du précédent alinéa ne sont pas applicables.
.... - Alinéa 7, première phrase
Remplacer le mot :
troisième
par le mot :
cinquième
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Défendu.
M. André Reichardt, rapporteur. - Nous sommes au coeur du sujet. Les amendements rétablissant l'interdiction de démarchage téléphonique par les professionnels de la rénovation énergétique vont à l'encontre du texte de la commission. Nous sommes tous d'accord pour condamner fermement les démarchages intempestifs de certaines entreprises.
La solution du Gouvernement ne nous convient pas. L'interdiction du démarchage téléphonique pour un secteur poserait un vrai problème d'égalité devant la loi. En quoi les démarcheurs téléphoniques de ce secteur, qui peut aussi compter des professionnels honnêtes, pourraient-ils se voir interdits d'activité alors que des fraudes existent dans bien d'autres domaines ?
Ce n'est pas en interdisant le démarchage téléphonique que les mauvaises pratiques cesseront. Les fraudeurs continueront à agir alors que les entrepreneurs de bonne foi ne le pourront plus. En outre, il existe des armes puissantes dans le droit de la consommation pour mettre un terme à ce type d'agissements : les pratiques commerciales trompeuses, la publicité mensongère sont punies, tout comme l'abus de faiblesse et la vente forcée par correspondance.
Autoriser le démarchage aux seuls clients déjà acquis est discutable sur le plan de la concurrence.
Les trois sous-amendements du Gouvernement maintiennent l'interdiction générale en prévoyant des exceptions par décret. Or il ne revient pas au pouvoir réglementaire de définir les exceptions à une interdiction d'exercer une activité économique. Les observations du président Sueur sont totalement légitimes.
Avis défavorable à tous les amendements et sous-amendements.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Avis favorable à l'amendement n°31 rectifié, aux amendements identiques nos13 et 21 rectifié, à l'amendement n°33 rectifié, sous réserve de l'adoption des sous-amendements.
Retrait de l'amendement n°35 rectifié.
Le sous-amendement n°38 n'est pas adopté.
À la demande de la commission des lois, l'amendement n°31 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°115 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l'adoption | 146 |
Contre | 194 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n°35 rectifié n'est pas adopté, non plus que le sous-amendement n°37et les amendements identiques nos13 et 21 rectifié.
Le sous-amendement n°36 n'est pas adopté.
Rappel au Règlement
M. Jean-Pierre Sueur . - Pour faire preuve de bonne volonté, j'ai accepté qu'on aille vite sur le vote de mon amendement n°13 ; or nous multiplions les scrutins publics pour faire adopter une position qui n'est pas partagée par la majorité des sénateurs présents au sein de l'hémicycle. Faites venir vos collègues ! Ce rappel au Règlement a du sens : on ne peut pas faire n'importe quoi.
Discussion des articles (Suite)
À la demande de la commission des lois, l'amendement n°33 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°116 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l'adoption | 183 |
Contre | 157 |
Le Sénat a adopté.
(M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
Mme la présidente. - Amendement n°23, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Un décret, pris après avis du Conseil national de la consommation, détermine les jours et horaires durant lesquels la sollicitation de particuliers, par voie téléphonique, à des fins commerciales ou non, est autorisée.
II. - Alinéa 7, seconde phrase
Supprimer les mots :
, désignés dans les conditions prévues par arrêté du ministre chargé de l'économie
III. - Alinéa 8
Supprimer les mots :
, sauf s'il démontre qu'il n'est pas à l'origine de leur violation
IV. - Alinéa 13
1° Première phrase
Supprimer les mots :
, désignés dans les conditions prévues par arrêté conjoint du ministre chargé de l'économie et du ministre de l'intérieur
2° Seconde phrase
Supprimer les mots :
et la fréquence
V. - Alinéa 14
Remplacer les mots :
, horaires et la fréquence
par les mots :
et horaires
et les mots :
voie réglementaire
par le mot :
décret
VI. - Alinéa 15
Rédiger ainsi cet alinéa :
Les manquements aux dispositions prises en application du précédent alinéa sont passibles de l'amende administrative prévue par l'article L. 242-16 du code de la consommation, prononcée dans les conditions fixées par cet article. Ils sont recherchés et constatés par les agents mentionnés à l'article L. 511-3 du même code dans les conditions fixées par l'article L. 511-6 dudit code.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Cet amendement supprime une partie des ajouts de la commission des lois et prévoit une habilitation à légiférer par ordonnances concernant le contrôle par la DGCCRF des manquements aux obligations déontologiques.
Le I précise que la détermination des jours et horaires durant lesquels la prospection de particuliers par voie téléphonique est autorisée doit concerner toutes les sollicitations téléphoniques, qu'elles soient commerciales ou non. Il convient donc de ne pas viser seulement les sollicitations téléphoniques qui échappent aux règles d'opposition au démarchage téléphonique.
En outre, n'est visé que l'encadrement, par voie règlementaire, des jours et horaires pendant lesquels les sollicitations téléphoniques sont autorisées. En effet, eu égard à la grande diversité des secteurs d'activité ainsi que des produits et services concernés, il semble très complexe d'encadrer par décret la fréquence des appels. Cela ne paraît pas du tout applicable.
Le II supprime le renvoi à un arrêté du ministre chargé de l'Économie pour désigner les professionnels opérant dans le secteur de la prospection commerciale par voie téléphonique, en charge de l'élaboration d'un code de bonnes pratiques. En effet, ce mode de désignation pose problème, vu le nombre d'acteurs et de secteurs d'activité concernés. Là aussi, c'est un problème d'effectivité.
Le III réaffirme le principe d'une responsabilité de plein droit du professionnel ayant tiré avantage d'un démarchage téléphonique illicite.
Le IV supprime le renvoi à un arrêté conjoint du ministre chargé de l'Économie et du ministre de l'Intérieur pour désigner les professionnels réalisant des études et des sondages par voie téléphonique, en charge de l'élaboration d'un code de bonnes pratiques. Là aussi, ce mode de désignation pose problème, vu le nombre d'acteurs concernés.
Par ailleurs, eu égard à la grande diversité de nature des études et des sondages menés et des besoins auxquels ils répondent, il ne semble pas possible de déterminer la fréquence des appels, mais seulement les jours et horaires pendant lesquels les sollicitations par voie téléphonique sont autorisées.
Le V ne prévoit que l'encadrement, par décret, des jours et horaires pendant lesquels les sollicitations téléphoniques pour la réalisation d'études et de sondages sont autorisées. On retrouve le problème de la fréquence.
Enfin, le VI limite l'application d'une sanction administrative à la seule violation des règles déontologiques encadrant les sollicitations téléphoniques pour la réalisation d'études et de sondages lorsqu'elles sont reprises par décret. Il n'est, en effet, pas possible de sanctionner d'une amende administrative le non-respect de règles qui n'auraient pas force obligatoire. Il habilite également les agents de la DGCCRF à rechercher et constater de tels manquements.
Sur ces six points, il s'agit de rendre la loi effective.
Mme la présidente. - Amendement n°30 rectifié bis, présenté par Mme L. Darcos, MM. Vogel et Daubresse, Mme Lopez, MM. Leleux, Chaize, Duplomb et Danesi, Mme Morhet-Richaud, MM. Gremillet et Savary, Mme Deroche, M. Pierre, Mme Deromedi, MM. Saury, Dufaut, Schmitz, Brisson et Vaspart, Mmes Raimond-Pavero, Gruny, Berthet et Di Folco, MM. Lefèvre et Bonhomme, Mme Procaccia, M. Mouiller, Mme Lassarade, M. de Montgolfier, Mme Micouleau, MM. Piednoir, Cambon et Bazin, Mme Canayer, MM. Houpert, Regnard et Cardoux, Mmes Bories et Noël, M. Vial, Mme Richer, MM. Segouin, Charon et Kennel, Mme Lanfranchi Dorgal et MM. Ginesta et del Picchia.
Alinéa 6
Après le mot :
téléphonique
insérer les mots :
non sollicitée
M. Stéphane Piednoir. - Cet amendement exclut de l'interdiction les appels passés à la demande du consommateur.
Mme la présidente. - Amendement n°14, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le professionnel mentionné au troisième alinéa du présent article respecte des normes déontologiques fixées par décret, pris après consultation du Conseil national de la consommation et en concertation avec les professionnels opérant dans le secteur de la prospection commerciale par voie téléphonique.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je ne vois pas pourquoi le Sénat se déjugerait. Cet amendement reprend la position du Sénat.
M. André Reichardt, rapporteur. - Avis défavorable à ces trois amendements contraires à la position de la commission.
L'amendement n°23 n'est pas adopté.
L'amendement n°30 rectifié bis est adopté.
L'amendement n°14 n'est pas adopté.
L'article premier bis, modifié, est adopté.
L'article 2 est adopté.
L'article 3 bis demeure supprimé.
ARTICLE 5
Mme la présidente. - Amendement n°2, présenté par Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Supprimer cet article.
Mme Michelle Gréaume. - Défendu.
M. André Reichardt, rapporteur. - Avis défavorable.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Également.
L'amendement n°2 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°15, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.
Rédiger ainsi cet article :
Après le mot : « liste », la fin du second alinéa de l'article L. 223-1 du code de la consommation est ainsi rédigée : « , sauf lorsqu'il s'agit de sollicitations ayant un lien direct avec l'objet d'un contrat en cours ».
M. Jean-Pierre Sueur. - Cet amendement en revient à la position du rapporteur de l'Assemblée nationale afin d'éviter des dérives.
Mme la présidente. - Amendement n°16 rectifié, présenté par MM. Bonhomme, Bonne, Longuet, Luche, Cambon, Piednoir, Brisson et Schmitz, Mmes Deromedi, de Cidrac et Billon, MM. Médevielle, Moga, Longeot, Dallier, Cigolotti, Dufaut, B. Fournier, Laménie, Lefèvre et Vogel, Mme Deroche, M. D. Laurent, Mme Garriaud-Maylam, M. Leleux, Mmes Berthet et Vullien, M. Pierre, Mme Bruguière, MM. Cardoux et Pellevat, Mmes Bonfanti-Dossat et Chauvin, MM. Bouchet, Milon, Charon et Bazin, Mme L. Darcos et MM. Pointereau, P. Martin et Delcros.
Rédiger ainsi cet article :
Après le mot : « liste », la fin du second alinéa de l'article L. 223-1 du code de la consommation est ainsi rédigée : «, à l'exception des sollicitations ayant un lien direct avec l'objet d'un contrat en cours ».
M. Stéphane Piednoir. - Défendu.
L'amendement n°25 rectifié bis n'est pas défendu.
M. André Reichardt, rapporteur. - Avis défavorable aux deux amendements.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - Même avis.
L'amendement n°15 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°16 rectifié.
L'article 5 est adopté.
L'article 6 est adopté.
L'article 7 est adopté.
Mme la présidente. - Je vais mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, ainsi modifiée.
M. Jean-Pierre Sueur. - Le groupe socialiste et républicain s'abstiendra.
La proposition de loi est adoptée.
Prochaine séance, mardi 9 juin 2020, à 14 h 30.
La séance est levée à 18 h 35.
Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,
Jean-Luc Blouet
Chef de publication
Annexes
Ordre du jour du mardi 9 juin 2020
Séance publique
À 14 h 30 et, éventuellement, le soir
Présidence : Mme Hélène Conway-Mouret, vice-présidente, Mme Valérie Létard, vice-présidente
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à protéger les victimes de violences conjugales (texte de la commission, n°483, 2019-2020)
Analyse des scrutins
Scrutin n°111 sur l'article premier de la proposition de loi visant à répondre à la demande des patients par la création de Points d'accueil pour soins immédiats
Résultat du scrutin
Nombre de votants : 339
Suffrages exprimés : 323
Pour : 95
Contre : 228
Le Sénat n'a pas adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Contre : 142
N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, Mme Colette Giudicelli
Groupe SOCR (71)
Contre : 70
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Hélène Conway-Mouret, Président de séance
Groupe UC (51)
Pour : 51
Groupe RDSE (23)
Pour : 7 - MM. Henri Cabanel, Jean-Pierre Corbisez, Jean-Marc Gabouty, Mme Mireille Jouve, M. Joël Labbé, Mme Guylène Pantel, M. Jean-Yves Roux
Abstentions : 16
Groupe LaREM (23)
Pour : 23
Groupe CRCE (16)
Contre : 16
Groupe Les Indépendants (14)
Pour : 14
Sénateurs non inscrits (6)
N'ont pas pris part au vote : 6 - M. Philippe Adnot, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier
Scrutin n°112 sur les amendements identiques n°1, présenté par Mme Michelle Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, et n°17 rectifié, présenté par M. François Bonhomme et plusieurs de ses collègues, tendant à rétablir l'article 1er A de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux
Résultat du scrutin
Nombre de votants : 339
Suffrages exprimés : 325
Pour : 111
Contre : 214
Le Sénat n'a pas adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Contre : 142
N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, Mme Colette Giudicelli
Groupe SOCR (71)
Pour : 70
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Hélène Conway-Mouret, Président de séance
Groupe UC (51)
Pour : 2 - Mme Anne-Catherine Loisier, M. Jean-François Longeot
Contre : 49
Groupe RDSE (23)
Pour : 23
Groupe LaREM (23)
Contre : 23
Groupe CRCE (16)
Pour : 16
Groupe Les Indépendants (14)
Abstentions : 14
Sénateurs non inscrits (6)
N'ont pas pris part au vote : 6 - M. Philippe Adnot, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier
Scrutin n°113 sur l'amendement n°12, présenté par M. Jean-Pierre Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, à l'article 1er bis de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux
Résultat du scrutin
Nombre de votants : 340
Suffrages exprimés : 340
Pour : 109
Contre :231
Le Sénat n'a pas adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Contre : 143
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat
Groupe SOCR (71)
Pour : 70
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Hélène Conway-Mouret, Président de séance
Groupe UC (51)
Contre : 51
Groupe RDSE (23)
Pour : 23
Groupe LaREM (23)
Contre : 23
Groupe CRCE (16)
Pour : 16
Groupe Les Indépendants (14)
Contre : 14
Sénateurs non inscrits (6)
N'ont pas pris part au vote : 6 - M. Philippe Adnot, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier
Scrutin n°114 sur les amendements identiques n°6, présenté par Mme Anne-Catherine Loisier et plusieurs de ses collègues, et n°19 rectifié bis, présenté par M. François Bonhomme et plusieurs de ses collègues, à l'article 1er bis de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux
Résultat du scrutin
Nombre de votants : 340
Suffrages exprimés : 340
Pour : 42
Contre : 298
Le Sénat n'a pas adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Pour : 1 - M. Stéphane Piednoir
Contre : 142
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat
Groupe SOCR (71)
Contre : 70
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Hélène Conway-Mouret, Président de séance
Groupe UC (51)
Pour : 2 - Mme Anne-Catherine Loisier, M. Jean-François Longeot
Contre : 49
Groupe RDSE (23)
Pour : 23
Groupe LaREM (23)
Contre : 23
Groupe CRCE (16)
Pour : 16
Groupe Les Indépendants (14)
Contre : 14
Sénateurs non inscrits (6)
N'ont pas pris part au vote : 6 - M. Philippe Adnot, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier
Scrutin n°115 sur l'amendement n°31 rectifié, présenté par M. Martin Lévrier et les membres du groupe La République En Marche, à l'article 1er bis de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux
Résultat du scrutin
Nombre de votants : 340
Suffrages exprimés :340
Pour : 146
Contre : 194
Le Sénat n'a pas adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Contre : 143
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat
Groupe SOCR (71)
Pour : 70
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Hélène Conway-Mouret, Président de séance
Groupe UC (51)
Contre : 51
Groupe RDSE (23)
Pour : 23
Groupe LaREM (23)
Pour : 23
Groupe CRCE (16)
Pour : 16
Groupe Les Indépendants (14)
Pour : 14
Sénateurs non inscrits (6)
N'ont pas pris part au vote : 6 - M. Philippe Adnot, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier
Scrutin n°116 sur l'amendement n°33 rectifié, présenté par M. Hervé Marseille et les membres du groupe Union Centriste, à l'article 1er bis de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux
Résultat du scrutin
Nombre de votants : 340
Suffrages exprimés : 340
Pour : 183
Contre : 157
Le Sénat a adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Contre : 143
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat
Groupe SOCR (71)
Pour : 70
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Hélène Conway-Mouret, Président de séance
Groupe UC (51)
Pour : 51
Groupe RDSE (23)
Pour : 23
Groupe LaREM (23)
Pour : 23
Groupe CRCE (16)
Pour : 16
Groupe Les Indépendants (14)
Contre : 14
Sénateurs non inscrits (6)
N'ont pas pris part au vote : 6 - M. Philippe Adnot, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier