Économie circulaire (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.
Discussion générale
Mme Marta de Cidrac, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire . - Déjouant les pronostics, la CMP qui s'est tenue le 8 janvier au Sénat a abouti à un accord unanime sur un texte attendu, que la navette a enrichi et équilibré.
Cet accord montre que les parlementaires sont en phase avec la demande sociétale de changer notre modèle de production et de consommation, et d'en finir avec le tout-jetable, pour aller vers une économie circulaire et lutter contre le gaspillage de nos ressources.
Sans céder au plastic bashing systématique, nous devons agir vite pour en finir avec les emballages à usage unique et les microplastiques qui polluent nos océans.
Cet accord démontre toute la force du bicamérisme. Le Sénat a ouvert la voie sur certains sujets, lancé de sains débats, l'Assemblée nationale a poursuivi notre dynamique et enrichi le texte. Je salue le travail des rapporteurs et des députés.
Le projet de loi initial, de treize articles, n'était pas à la hauteur des enjeux. Le travail parlementaire lui a donné une véritable envergure. Nos deux assemblées ont travaillé avec la même ambition environnementale ; il n'y a eu ni chambre d'enregistrement ni détricotage stérile. Le travail a été transpartisan, et le texte définitif comporte des mesures émanant de chacun des groupes de notre assemblée.
Nous sommes parvenus à un texte plus ambitieux et plus transversal. L'économie circulaire doit irriguer toutes nos politiques publiques. Le projet de loi a vu son champ considérablement élargi à l'initiative du Sénat. Nous avons inséré plusieurs grands volets, sur la lutte contre le suremballage et la surproduction de plastique, sur les dépôts sauvages, sur la prévention et la gestion des déchets, la lutte contre le gaspillage alimentaire ou encore l'exemplarité de la commande publique.
Nous avons instauré un fonds pour la réparation et un fonds pour le réemploi solidaire. Les droits et l'information du consommateur sont renforcés, avec la création d'un indice de durabilité.
Notre texte est plus équilibré, avec une responsabilité élargie des producteurs (REP) sur l'ensemble des produits et matériaux du bâtiment. Un maillage territorial en points de reprise sera obligatoire, et les producteurs devront contribuer à de nouveaux points de collecte.
Nous avons trouvé un équilibre sur le point sensible de la consigne pour recyclage : les collectivités territoriales pourront finir le déploiement des consignes de tri avant de devoir justifier de leur capacité à atteindre les objectifs européens sans mettre en place de consignes. Le Sénat a veillé à ce que le service public de gestion des déchets ne soit ni désorganisé ni affaibli, relayant les inquiétudes légitimes des collectivités qui ont massivement investi. Tout le monde devra jouer le jeu. Le dialogue devra être poursuivi, les collectivités territoriales disposer des moyens pour atteindre les objectifs fixés.
Enfin, cet accord est exigeant. De nombreuses mesures requièrent des dispositions réglementaires. Le Sénat veillera au suivi de l'application et souhaite être associé au travail d'évaluation. (Applaudissements)
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire . - Je suis heureuse et émue d'être devant vous aujourd'hui. C'est ici que ce texte a débuté, c'est ici qu'il s'achève : c'est circulaire !
J'ai tenu à conserver vos ajouts. Je suis ravie de cet accord, fruit d'un ouvrage équitable, partagé entre les deux chambres, et vous en remercie.
Notre collaboration n'a pas été qu'un long fleuve tranquille. Grâce à nos désaccords et malgré des invectives parfois inutiles, je suis fière de cette loi, dont nous avons révélé ensemble tout le potentiel.
Initialement resserré autour de treize articles, compact et dense, ce projet de loi vous laissait la possibilité d'inclure vos riches contributions. Il a multiplié sa taille par dix. Nous pouvons être fiers de ce texte qui va changer la vie des Français et des élus locaux.
M. François Bonhomme. - Trop gentil !
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État. - Je songe d'abord aux moyens nouveaux pour lutter contre les dépôts sauvages. Quelque 70 % des déchets proviennent du BTP. Je salue le travail remarquable de Mme de Cidrac : j'ai vu dans votre territoire la mer de déchets sauvages à laquelle les élus font face. Nous endiguerons ce fléau grâce aux nouveaux moyens de police accordés aux maires, grâce à la REP sur les produits du bâtiment, la reprise gratuite des déchets triés et le nettoyage des décharges existantes.
Les fonds de réparation et de réemploi solidaire abonderont des structures locales en promouvant la lutte contre le gaspillage. Preuve qu'une discussion constructive entre le Gouvernement et le Parlement peut conduire à améliorer concrètement le quotidien de nos concitoyens !
Je me réjouis de l'accord trouvé sur la consigne ; les collectivités territoriales auront le délai nécessaire pour étendre les consignes de tri, avant une analyse objective de la situation qui pourrait conduire à la mise en oeuvre d'un dispositif de consigne visant à accélérer la transition écologique. Il n'a jamais été question de remettre en cause l'investissement des collectivités territoriales - le Grenelle comme la directive européenne nous l'interdiraient d'ailleurs.
Certaines interdictions et obligations d'informations qui avaient été rejetées au Sénat en seconde délibération ont été retravaillées à l'Assemblée nationale et réintégrées dans le texte. Je salue là encore le travail entre vos deux chambres.
Nous avons mis en place une stratégie de sortie du plastique à usage unique en vingt ans. Nous publierons un plan quinquennal dans les prochains mois afin de diminuer de moitié d'ici dix ans le nombre de bouteilles en plastique commercialisées, soit 7,5 milliards de bouteilles en moins. Nous interdisons la mise sur le marché d'une série de microplastiques, notamment dans les cosmétiques ou les produits d'entretien. Nous imposerons - en pionnier - l'usage de filtres à microfibres plastique sur tous les lave-linges neufs d'ici 2025.
M. François Bonhomme. - Quelle audace !
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État. - Ce projet de loi ouvre la porte à des transformations systémiques, en valorisant chaque geste citoyen, et pose les bases d'une écologie de rassemblement. Vous pouvez, nous pouvons en être fiers. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, RDSE, Les Indépendants et SOCR, ainsi que sur le banc de la commission)
M. Frédéric Marchand . - Ce projet de loi intervient dans un contexte mondial inquiétant en matière de développement durable. Le 21 janvier à Davos, l'ONG Circle Economy lançait un cri d'alarme : l'écart mondial de circularité se creuse, à 8,6 %, contre 9,1 % il y a deux ans. L'économie linéaire consiste à créer des déchets. Le changement est une obligation.
Il s'incarne dans ce projet de loi qui vise à prévenir la dégradation environnementale et les inégalités sociales. Il s'agit d'accélérer le changement de notre modèle de production et de consommation.
La CMP a adopté ce texte à l'unanimité. Les échanges ont été nombreux et ouverts. L'objectif commun de la transition écologique nous a rassemblés. Ce texte est parfaitement équilibré et préserve les apports du Sénat.
Le projet de loi a été considérablement enrichi par le débat parlementaire : il donne les outils nécessaires pour revenir sur le modèle linéaire « produire-consommer-jeter ».
Il faut responsabiliser tous les maillons de la chaîne. C'est le sens de l'information des consommateurs, condition d'un choix éclairé, de l'application du principe pollueur payeur, avec la nouvelle filière REP et les fonds pour le réemploi et la réparation, de la lutte contre le gaspillage alimentaire et la scandaleuse destruction des invendus non alimentaires.
La CMP a renforcé le pouvoir des maires pour lutter contre les dépôts sauvages.
Elle est parvenue à un accord équilibré sur la consigne pour atteindre les objectifs de recyclage tout en satisfaisant les légitimes demandes des collectivités territoriales. Cela montre tout l'intérêt d'un débat parlementaire constructif.
Cette boîte à outils nous aidera à avancer, à marche forcée, vers la transition écologique : il faut sonner la mobilisation générale des comportements.
Une démarche France Circularité - sur le modèle de France Mobilités - fera des parlementaires, je l'espère, des ambassadeurs de ce texte.
Lutter contre le gaspillage et promouvoir l'économie circulaire, voilà un bel objectif. Vous pouvez compter sur le groupe LaREM pour relever ce défi. (Applaudissements sur le banc de la commission et sur les travées du groupe RDSE)
Mme Éliane Assassi . - Ce projet de loi a suscité le débat - c'est un euphémisme, vu que son volume a été multiplié par dix. Son examen au Sénat s'était achevé sur une seconde délibération qui revenait à la hussarde sur certaines avancées.
Nous l'avions néanmoins voté en constatant des progrès notables, satisfaits de l'adoption de 18 de nos amendements.
Le Sénat avait rejeté la consigne pour recyclage plastique qui menaçait, sous la pression des lobbies et avec votre complicité, (Mme la ministre proteste.) l'équilibre du service public des déchets géré par les collectivités territoriales et faisant payer deux fois les ménages...
Ce texte porte des mesures positives mais manque de vision globale et cohérente ; je regrette l'opacité des travaux de la CMP, tout ayant été ficelé au préalable.
Sur le fond, les questions ne sont abordées que sous l'angle de la réglementation de la consommation. Or il faut remettre en cause globalement notre système de production qui exploite les ressources dans un ordre « cannibale », selon les mots d'un ancien ministre, à rebours de toute transition écologique, la finitude étant elle-même source de profits...
Que produisons-nous, pour qui et dans quelles conditions ? Saisissons-nous de ces questions plutôt que de les laisser aux marchés financiers. Vous qualifiez ce discours de « populisme vert » (Mme la ministre le conteste.), mais le vrai populisme, c'est de faire croire qu'on peut éviter le péril écologique par des mesurettes.
Certaines mesures sont à saluer : la lutte contre l'obsolescence programmée, la promotion du vrac, la lutte contre le suremballage ou le gaspillage des invendus, la promotion du réemploi dans la commande publique, certaines interdictions de plastique.
Nous aurions souhaité élargir la gouvernance des filières REP pour plus de transparence et une plus grande attention aux conditions de travail.
La deuxième délibération est hélas revenue sur le rétablissement de la seule véritable consigne - celle du verre dans les restaurants. Le compromis trouvé en CMP renvoie à plus tard la mise en oeuvre de la fausse consigne pour recyclage. Un flou artistique qui ne convainc pas...
Le débat sur le plastique a dépassé la question du recyclage pour aller vers l'interdiction pure et simple. Nous sommes satisfaits de l'objectif global de sortie du plastique à usage unique, même si l'échéance de 2040 est lointaine. Je note que notre amendement, rejeté en deuxième délibération à la demande du Gouvernement, a été repris à son compte à l'Assemblée nationale.
Nous nous abstiendrons sur ce texte, en espérant que les nombreux décrets d'application ne viendront pas raboter son ambition. (Applaudissements sur le banc de la commission)
Mme Colette Mélot . - Cette loi était nécessaire pour la protection de l'environnement et la lutte contre la pollution.
Les prévisions de réchauffement climatique pour 2050 montrent qu'il est urgent d'agir.
Nous saluons l'accord en CMP, mais resterons vigilants.
Le groupe Les Indépendants a d'emblée soutenu l'élargissement de la REP. Les discussions se sont cristallisées autour de la consigne. Le compromis est équilibré; les collectivités territoriales pourront évaluer leurs résultats et amortir leurs investissements ; si les objectifs internationaux ne sont pas remplis, des consignes de bouteilles plastiques seront mises en place en 2023. En Seine-et-Marne, nombre de collectivités ont investi et le système fonctionne bien. Il s'agit de rassurer.
Réduction du gaspillage des médicaments et du gaspillage alimentaire, information des consommateurs, lutte contre les dépôts sauvages, fin des emballages plastiques à usage unique en 2040 - autant d'avancées que nous saluons, même si nous aurions souhaité un changement plus rapide. L'objectif de 100 % de plastique recyclé d'ici 2025 est un engagement fort.
État, industrie, consommateurs : chacun doit contribuer à la circularité de notre économie. Nos comportements nous engagent face à un environnement qui se dégrade de jour en jour. Nous devons rester vigilants. Il en va de notre avenir.
Le groupe Les Indépendants votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur le banc de la commission)
Mme Anne-Catherine Loisier . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) L'économie circulaire, jusqu'alors abordée par petites touches, a enfin son texte spécifique. Il comporte nombre d'avancées, en matière d'information du consommateur, de destruction des invendus, de réparabilité, d'élargissement des REP, de reprise des produits usagés ou encore d'éco-modulation. La majorité du groupe UC le votera.
Des défis restent à relever. Le meilleur déchet est celui que l'on ne produit pas, or le texte ne préconise pas suffisamment de bonnes pratiques d'entretien et d'usage. Or il faut changer les comportements en profondeur.
Quels meilleurs outils pour optimiser la collecte, le tri et le recyclage que les services publics de gestion des déchets ? La consigne de recyclage des bouteilles plastiques est à double tranchant. Elle cautionne l'usage du plastique par les industriels pour les dix ans à venir, pèse sur le consommateur, démultiplie les circuits de collecte et déstabilise les services publics existants.
Le système actuel de collecte est fondé sur un maillage territorial qui fonctionne. Les collectivités territoriales ont investi massivement pour recueillir l'ensemble des déchets de nos concitoyens à des coûts soutenables.
Nous comptons sur votre vigilance à l'égard de la gouvernance des éco-organismes : Citeo doit renforcer sa collégialité. Un groupe de suivi parlementaire de la loi serait bienvenu, pour veiller à la soutenabilité des mesures. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDSE ; Mme Colette Mélot applaudit également.)
M. Joël Bigot . - Quel chemin parcouru ! Je remercie le Gouvernement d'avoir déposé ce texte en premier lieu au Sénat. Cela a permis de mettre la focale sur les territoires.
Les collectivités territoriales ont été en première ligne, notamment sur la question de la consigne de recyclage, véritable pomme de discorde. Cette mesure, inspirée par les grands industriels de la boisson, aura permis de faire de la lutte contre les emballages plastiques un axe structurant du texte.
L'introduction d'un principe général dans le code de l'environnement selon lequel toutes les politiques publiques doivent prendre en compte la lutte contre la pollution des plastiques est à saluer. Nous avions fixé un objectif chiffré dès 2030 ; désormais, « la France se fixe comme objectif d'atteindre la fin de la mise sur le marché d'emballages plastiques à usage unique d'ici à 2040 ». On semble déjà s'excuser d'un futur échec.
L'article 8 bis sur la consigne est un compromis non optimal à nos yeux. Nous ne souhaitions cependant pas faire échouer la CMP. Les associations représentant les collectivités ne sont pas des lobbies, madame la ministre.
M. Claude Kern. - Très bien !
M. Joël Bigot. - Cette tentative de disqualification a beaucoup ému les territoires.
Nous serons attentifs aux mesures sur l'extension des consignes de tri d'ici à 2023. Mais l'incertitude créée par le projet initial a eu pour effet de geler voire stopper les projets en cours...
Le Sénat a grandement contribué à l'amélioration du texte qui compte désormais 130 articles, soit une ambition décuplée. Certains amendements désavoués ici par le Gouvernement ont reçu un avis favorable quand ils ont été redéposés par des députés de la majorité. Nous avions manifestement trop de bonnes idées...
Des manques subsistent, tels le compteur d'usage des appareils électroménagers ou encore l'interdiction des plastiques contenant des perturbateurs endocriniens avérés. Du moins l'information du consommateur progressera-t-elle.
La lutte contre le gaspillage alimentaire et non-alimentaire fait un bond en avant avec l'interdiction des destructions systématiques des invendus.
Je salue le renforcement des obligations des filières REP étendues à de nouveaux produits, tout en regrettant la suppression d'une filière REP globale ou balai.
Le fonds national unique de réemploi solidaire a été abandonné pour un dispositif à la main des éco-organismes, donc des producteurs. Dommage pour le secteur de l'économie sociale et solidaire...
Enfin, nous saluons les nouveaux outils donnés aux élus locaux pour lutter contre les dépôts sauvages.
Malgré l'absence d'un volet pédagogique, nous voterons ce texte équilibré, qui favorise une économie plus circulaire, sans pour autant prendre le grand tournant écologique qu'attendent les Français. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et RDSE ; M. Claude Kern et Mme Colette Mélot applaudissent également.)
M. Éric Gold . - Une fois n'est pas coutume, la CMP est parvenue à un accord. La consigne a occupé une bonne partie des débats. Représentants des élus, nous nous étions engagés en première ligne pour défendre les investissements des collectivités territoriales en matière de collecte.
Le texte issu du Sénat laissait toute latitude aux industriels pour mettre en place une consigne pour recyclage sans aucun encadrement. Le compromis trouvé laisse aux collectivités et aux recycleurs jusqu'à 2023 pour atteindre les objectifs de collecte. Compte tenu de l'urgence, si le bilan des performances de collecte n'était pas satisfaisant, un dispositif de consigne pourrait être mis en place après 2023.
La collecte hors foyer demeure en deçà des ambitions européennes et nous avons veillé à l'améliorer.
Le renforcement des pouvoirs de police du maire sur la lutte contre les déchets sauvages va de pair avec une sanction de 1 500 euros, l'usage de la vidéo-protection pour verbaliser, et le transfert à l'EPCI des prérogatives de lutte contre les dépôts sauvages s'il est compétent pour la collecte des déchets. Cela confortera les maires, et évitera que le drame de Signes se reproduise.
Nous saluons les objectifs de réduction des plastiques à usage unique. D'ici à 2021, 20 % des produits de la commande publique devront intégrer des matériaux recyclés ou de réemploi et la priorité sera donnée aux pneumatiques rechapables ou rechapés lors du renouvellement des flottes. Nous nous en félicitons.
Je salue les mesures en faveur d'un moindre gaspillage alimentaire, limitant la distribution d'imprimés publicitaires, interdisant dès 2023 l'impression des tickets papiers, limitant la consommation d'eau potable dans les bâtiments neufs, ou encore interdisant la mise sur le marché de toute substance à l'état de microplastiques - dont on connaît les dégâts lorsqu'ils sont ingérés par les espèces aquatiques.
Finissons par les mesures permettant aux consommateurs de s'orienter vers des produits écologiquement plus vertueux : amélioration des consignes de tri et de l'information du client sur les qualités environnementales des produits et leur indice de réparabilité, mise à disposition de pièces détachées plus vite et plus longtemps, ou encore incitation à l'utilisation de contenants réutilisables.
La question n'est pas de savoir si le texte doit être adopté, mais s'il va assez loin. Il ne doit pas nous faire oublier l'urgence climatique, les niveaux de pollution de notre planète, et la nécessaire évolution de notre mode de vie. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, Les Indépendants et SOCR)
M. Didier Mandelli . - Nous y sommes... Après une riche concertation et la mise en place d'un comité de pilotage dont j'ai fait partie, ce texte arrive à son terme.
Sa première mouture comptait 6 articles et 2 ordonnances, ce qui nous avait déçus, Hervé Maurey et moi. Il est passé de 13 à 87 articles après son adoption au Sénat et à 131 articles après son passage à l'Assemblée nationale. Madame la ministre, je vous remercie d'avoir conservé un certain nombre de mesures issues de nos travées, même si cela a été au prix d'échanges animés. (Mme la ministre sourit.) Nous partagions certains objectifs. Je salue le pragmatisme et le bon sens de la rapporteure.
Les collectivités territoriales ont inspiré beaucoup de nos propositions, dont la Vendée qui attend toujours votre visite, madame la ministre.
De la même façon que le mot « écologie » ne figurait pas dans le dictionnaire en 1974 quand René Dumont s'est présenté à l'élection présidentielle, de même l'économie circulaire, que je promeus personnellement depuis trente ans, est enfin entrée dans le champ lexical. C'est moins un concept que l'expression du bon sens, puisqu'il s'agit de la traduction du principe « penser global et agir local » en conciliant développement durable et exigence sociale.
Le chemin est encore long avant que les huit milliards d'habitants de la planète - nous n'étions que quatre milliards en 1974, j'étais déjà là (Sourires) - puissent l'habiter sans épuiser ses ressources. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ainsi que sur le banc de la commission.)
M. Claude Kern . - Nous nous apprêtons à voter définitivement ce texte. La nécessité d'acter des mesures concrètes n'a pas été sacrifiée sur l'autel du sujet polémique de la consigne.
Nous nous satisfaisons des nombreuses avancées du texte qui répondent aux besoins des collectivités territoriales sans enfreindre les principes européens, notamment sur la directive SUP (single use plastic).
C'est un réel tournant qui permettra d'améliorer l'information du consommateur, la prévention des déchets, la réduction des emballages à usage unique, la lutte contre le gaspillage ou encore le développement du réemploi et de la réparation à travers le principe de responsabilité élargie du producteur et le développement de plusieurs nouvelles filières de REP - qui ont été créées ici même. Cela n'efface pas vos atermoiements sur la consigne (Madame la ministre proteste.) : mise sous boisseau de l'expertise de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) au profit de celle du collectif France Boissons, approximation des chiffres, arguments fallacieux, réécriture de l'engagement de l'exécutif, accusations douteuses à l'endroit de certaines associations de collectivités... Nous resterons donc vigilants, notamment sur la collecte des bouteilles en plastique. Par quelles mesures concrètes comptez-vous enrichir les trop rares dispositifs de collecte hors foyer ? Comment encouragerez-vous Citeo à plus d'efficacité ? Il faut inciter les collectivités territoriales à investir pour l'extension des consignes de tri.
Les membres du groupe UC voteront librement et en leur âme et conscience. C'est de la mise en commun de toutes les actions que dépend la progression de l'économie circulaire. C'est un projet politique qu'il faut avoir le courage de porter. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDSE)
M. Cyril Pellevat . - Je remercie la rapporteure pour son travail sur ce texte équilibré. L'Assemblée nationale a donné gain de cause à la Haute Assemblée, reconnaissant le travail accompli.
La CMP avait surtout pour objet de trouver un accord sur la consigne pour le recyclage. Le Sénat y était défavorable, craignant que ce type de consigne nous maintienne dans l'ère du tout-jetable. Le Sénat craignait aussi une perte de recettes de 200 millions d'euros pour les collectivités territoriales qui ont déjà investi dans des dispositifs de collecte.
La CMP a trouvé un accord en allongeant le délai pour les collectivités territoriales de 2023 à 2024. Des possibilités de sanctions ont été introduites dans le cas où les éco-organismes ne prendraient pas les mesures adéquates pour que les collectivités territoriales puissent atteindre leurs objectifs.
Nous nous réjouissons aussi du renforcement du pouvoir du maire dans la lutte contre les dépôts sauvages et de l'interdiction dès 2022 de l'emballage pour les fruits et légumes.
Nous ne pouvons qu'applaudir ces avancées. Il reste maintenant à permettre aux collectivités de les mettre en oeuvre. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDSE et sur le banc de la commission)
La discussion générale est close.
M. le président. - En application de l'article 42, paragraphe 12, le Sénat se prononce par un seul vote.
Le projet de loi est définitivement adopté.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - Je me réjouis de l'issue de ce vote quasi unanime. C'était loin d'être acquis, notamment en CMP.
Le Sénat a montré encore une fois sa capacité à agir pour l'intérêt général, sans posture, ni a priori, en dehors de toute démarche politicienne.
Ce texte mettra en place de nombreuses mesures positives dont beaucoup ont été introduites au Sénat.
Le texte était initialement ramassé, voire squelettique. Nous l'avons étoffé sur le gaspillage, le suremballage, et avec des objectifs ambitieux, témoignant ainsi de l'engagement et du volontarisme de la Haute Assemblée en matière de développement durable.
Je remercie tous ceux qui ont participé à ce travail : sénateurs, députés, ainsi que Mme la ministre de l'environnement, qui a organisé une réunion ayant permis de débloquer la CMP. Merci enfin aux deux rapporteures.
Nous resterons vigilants et avons décidé que le groupe d'études sur les déchets, présidé par M. Mandelli - avant sa reprise probable par Marta de Cidrac - suivrait tout particulièrement son application. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE et LaREM et sur le banc de la commission.)
Prochaine séance mardi 4 février 2020, à 14 h 30.
La séance est levée à 15 h 35.
Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,
Jean-Luc Blouet
Chef de publication