Bioéthique (Suite)
M. le président. - Nous reprenons l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la bioéthique.
Mises au point au sujet d'un vote
Mme Véronique Guillotin. - Lors du scrutin 80 sur les amendements identiques n°s 204 rectifié bis et 288, Mme Nathalie Delattre souhaitait voter contre, M. Guillaume Arnell voter pour.
M. le président. - Acte vous est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l'analyse politique du scrutin.
Discussion des articles (Suite)
ARTICLE 15
M. le président. - Amendement n°212 rectifié ter, présenté par Mmes Assassi, Cohen, Apourceau-Poly et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, MM. Gay, Gontard et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et MM. Savoldelli et Collombat.
Supprimer cet article.
Mme Laurence Cohen. - Nous entrons dans le vif du sujet avec un article dont les conséquences sur notre modèle de société et sur l'espèce humaine sont vertigineuses.
Les cellules souches pluripotentes induites, dites cellules IPS, sont capables de se multiplier indéfiniment et de se différencier en tout type de cellule.
Le texte initial prévoit un régime de déclaration préalable obligatoire auprès de l'Agence de biomédecine dans le cas de la différenciation des cellules IPS en gamètes, et dans celui de l'agrégation de cellules IPS avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires. Les députés ont ajouté les recherches visant l'insertion de ces cellules dans un embryon animal pour créer un embryon chimérique.
Or cet article revient à autoriser, en l'encadrant, la fabrication de gamètes artificiels, potentiellement innombrables ; de très nombreux embryons pourraient être créés parmi lesquels on choisirait le plus convenable, sans nécessité d'une fécondation in vitro. Le risque d'eugénisme est bien réel : qui refuserait la promesse d'un bébé zéro défaut ? Certes l'Agence de biomédecine peut s'opposer aux recherches mais quels critères retiendra-t-elle ? Faute de réponse, nous proposons de supprimer cet article.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - La crainte de la création d'embryons chimériques est levée par la suppression de l'article 17. Supprimer l'article 15 empêcherait l'encadrement de la recherche sur les cellules IPS, notamment sur la différenciation des gamètes.
On supprimerait également l'alinéa qui complète l'intitulé du titre V du livre Ier du code sur la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires, or c'est à cette condition que l'interdiction des embryons chimériques sera possible. Retrait ou avis défavorable.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Supprimer cet article revient à ne plus encadrer l'usage des cellules IPS. Retrait ou avis défavorable.
M. Bruno Retailleau. - Cet amendement mérite un peu d'attention. Il s'agit de créer, à partir de cellules IPS, des gamètes ou des modèles embryonnaires. La Convention d'Oviedo de 1997 comme notre modèle bioéthique interdisent la création d'embryons pour la recherche, quels qu'ils soient.
Dès lors que des gamètes auront été créés, comment s'assurer qu'il n'y aura pas, dans le secret des laboratoires, fusion de ces gamètes, et donc constitution d'embryons ?
Le modèle embryonnaire est une sorte d'ersatz d'embryon. La prudence devrait nous conduire à le traiter comme un embryon, avec les mêmes protections. Sur ces deux points, j'attends une réponse.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Actuellement, il n'y a aucune régulation des cellules IPS car lors de la dernière révision de la loi de bioéthique, on ne savait pas les obtenir.
Le Gouvernement propose de soumettre à un régime de déclaration auprès de l'Agence de biomédecine les protocoles visant à utiliser ces cellules dans des cas précis. Étudier le mécanisme cellulaire de création des gamètes aide à la compréhension de l'infertilité, sachant que la création d'un embryon reste interdite.
M. Bruno Retailleau. - C'est un régime de déclaration, et non d'autorisation ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Oui, puisque les cellules IPS n'ont aucune origine embryonnaire. Ce sont des cellules comme les autres. La déclaration nécessite tout de même un avis favorable de l'Agence de biomédecine, mais le processus est moins lourd, administrativement.
Pour tester le caractère comparable de ces cellules à des cellules souches embryonnaires, il fallait pouvoir les agréger à des embryons animaux. C'était l'objet de l'article 17, que vous avez supprimé.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Si l'on supprime l'article 15, on supprime la modification de l'intitulé du chapitre Ier du livre Ier du titre V et l'on retombe dans le vide juridique actuel sur les cellules IPS.
La commission spéciale a par ailleurs émis un avis favorable à d'autres amendements à cet article.
L'amendement n°212 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°319, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission.
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par le mot :
humaines
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Amendement de précision sur l'origine humaine des cellules souches pluripotentes induites.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°319 est adopté.
M. le président. - Amendement n°320, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission.
Alinéa 2
Remplacer le mot :
rétabli
par le mot :
rédigé
L'amendement de coordination n°320, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°83 rectifié ter, présenté par MM. Chevrollier, de Legge, Schmitz et B. Fournier, Mme Bruguière et MM. Regnard, Morisset, Cardoux, de Nicolaÿ, Vial, Chaize, Meurant, H. Leroy et Segouin.
Après l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les cellules iPS sont utilisées pour la recherche pharmacologique.
M. Guillaume Chevrollier. - L'Académie nationale de médecine, l'Agence de biomédecine ou l'Inserm le disent, les cellules IPS sont utilisées dans la recherche pharmacologique avec la même efficacité que les cellules souches embryonnaires humaines. Elles présenteraient même des avantages que ces dernières n'ont pas. Dès lors, pourquoi ne pas les privilégier ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n'aura pas pour effet d'empêcher les protocoles de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines. Ces deux sortes de cellules ne sont pas équivalentes ; les cellules IPS sont obtenues par une procédure de reprogrammation qui peut entraîner des altérations. Avis défavorable.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Les cellules IPS n'ont pas les mêmes caractéristiques que les cellules souches embryonnaires. Je le répète : le Gouvernement souhaite une déclaration auprès de l'Agence de biomédecine. Avis défavorable.
L'amendement n°83 rectifié ter n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°296, présenté par le Gouvernement.
Alinéas 4 à 10
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« II. - Sans préjudice des dispositions de l'article L. 1243-3 et, le cas échéant, de l'article L. 1121-1, les protocoles de recherche conduits sur des cellules souches pluripotentes induites ayant pour objet la différenciation de ces cellules en gamètes, l'agrégation de ces cellules avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires ou leur insertion dans un embryon animal dans le but de son transfert chez la femelle sont soumis à déclaration auprès de l'Agence de la biomédecine préalablement à leur mise en oeuvre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - L'Assemblée nationale a encadré la recherche sur les embryons chimériques en soumettant les protocoles de recherche à déclaration auprès de l'Agence de biomédecine, qui pourra s'y opposer en cas de méconnaissance des principes éthiques, dont l'interdiction de porter atteinte à l'intégrité de l'espèce humaine.
Il est souhaitable de rétablir le texte d'origine, au regard du degré de chimérisme à ne pas dépasser. Introduire deux cellules sur huit n'aboutit pas à un taux de chimérisme de deux huitièmes.
M. le président. - Amendement n°85, présenté par MM. Chevrollier et de Legge.
I. - Alinéa 4
Après la référence :
L. 1121-1,
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
ce protocole ne peut être entrepris sans autorisation de l'Agence de biomédecine. Ce protocole ne peut être autorisé que si :
II. - Alinéas 5 à 7
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
« 1° La pertinence scientifique de la recherche est établie ;
« 2° La recherche, fondamentale ou appliquée, s'inscrit dans une finalité médicale.
M. Guillaume Chevrollier. - L'équivalence des cellules IPS et des cellules souches embryonnaires humaines a été reconnue par l'Académie de médecine, l'Inserm et le Conseil d'orientation de l'Agence de biomédecine.
L'alinéa 4 autorise la création sans condition, à partir de cellules souches pluripotentes induites, de gamètes artificiels. Ces manipulations contournent l'interdit de créer des embryons pour la recherche. Elles doivent donc être soumises à une procédure d'autorisation.
M. le président. - Amendement n°59 rectifié, présenté par MM. Reichardt et Danesi, Mme Eustache-Brinio, MM. Kennel et Morisset, Mmes Troendlé et Sittler, MM. Mayet et Piednoir, Mme Noël et MM. Duplomb et H. Leroy.
Alinéa 4
Remplacer les mots :
déclaration auprès de
par les mots :
autorisation par
M. René Danesi. - Les cellules souches pluripotentes induites sont fabriquées en laboratoire à partir de cellules adultes reprogrammées par le biais de l'injection de gènes spécifiques. Leur caractère pluripotent soulève des questions éthiques, notamment en cas de différenciation en gamètes, d'agrégation avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires de manière à constituer des organismes dont la structure se rapproche de celle d'un embryon, ou d'insertion dans un embryon - recherches qui seront sans doute prochainement réalisables.
Au regard des risques de création d'embryons hybrides humain-animal, l'Agence de la biomédecine doit instruire en amont les protocoles de recherche portant sur les cellules IPS et autoriser expressément leur mise en oeuvre.
M. le président. - Amendement n°246 rectifié ter, présenté par MM. Capus, Guerriau, Fouché, Bignon et Chasseing, Mme Mélot et M. Lagourgue.
Alinéa 4
Remplacer les mots :
déclaration auprès
par le mot :
autorisation
M. Daniel Chasseing. - Cet amendement de repli soumet les protocoles de recherche sur la manipulation d'embryons chimériques non pas à déclaration mais à autorisation.
M. le président. - Amendement n°84 rectifié quater, présenté par MM. Chevrollier, de Legge et B. Fournier, Mme Bruguière et MM. Regnard, Morisset, Cardoux, de Nicolaÿ, Vial, Chaize, Meurant, H. Leroy et Segouin.
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les gamètes ainsi créés ne peuvent en aucune façon servir à féconder un autre gamète, issu du même procédé ou obtenu par don, pour constituer un embryon.
M. Guillaume Chevrollier. - L'interdiction de féconder des gamètes dans le but de création d'embryons pour la recherche est claire. Mais pour combien de temps ?
M. le président. - Amendement n°152 rectifié, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, M. Morisset, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Vaspart et Brisson, Mmes Lanfranchi Dorgal et Bories et M. Bonhomme.
I - Alinéas 7 à 10
Supprimer ces alinéas.
II. - Après l'alinéa 13
Insérer onze alinéas ainsi rédigés :
« V.- L'insertion de cellules souches pluripotentes induites humaines dans un embryon animal en cas de projet de transfert chez la femelle ne peut être entreprise sans autorisation. Un tel protocole de recherche ne peut être autorisé que si :
« 1° Il est mis fin à la gestation dans un délai approuvé par l'agence de biomédecine ;
« 2° La contribution des cellules d'origine humaines au développement de l'embryon ne peut dépasser un seuil approuvé par l'agence de biomédecine ;
« 3° La pertinence scientifique de la recherche est établie ;
« 4° La recherche, fondamentale ou appliquée, s'inscrit dans une finalité médicale ou vise à améliorer la connaissance de la biologie humaine ;
« 5° En l'état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée, avec une pertinence scientifique comparable, sans recourir à des expérimentations de ce type ;
« 6° Le projet et les conditions de mise en oeuvre du protocole respectent les principes fondamentaux énoncés aux articles 16 à 16-8 du code civil, les principes éthiques énoncés au présent titre et ceux énoncés au titre Ier du livre II de la première partie du présent code.
« VI. - Les protocoles de recherche sont autorisés par l'Agence de la biomédecine après que celle-ci a vérifié que les conditions posées au V du présent article sont satisfaites. La décision de l'agence, assortie de l'avis de son conseil d'orientation, est communiquée aux ministres chargés de la santé et de la recherche, qui peuvent conjointement, dans un délai d'un mois, demander un nouvel examen du dossier ayant servi de fondement à la décision :
« 1° En cas de doute sur le respect des principes mentionnés au 6° du même V ou sur la pertinence scientifique d'un protocole autorisé. L'agence procède à ce nouvel examen dans un délai de trente jours, durant lequel l'autorisation est suspendue. En cas de confirmation de la décision, la validation du protocole est réputée acquise ;
« 2° Dans l'intérêt de la santé publique ou de la recherche scientifique, lorsque le protocole a été refusé. L'agence procède à ce nouvel examen dans un délai de trente jours. En cas de confirmation de la décision, le refus du protocole est réputé acquis.
« En cas de violation des prescriptions législatives et réglementaires ou de celles fixées par l'autorisation, l'agence suspend l'autorisation de la recherche ou la retire. L'agence diligente des inspections comprenant un ou plusieurs experts n'ayant aucun lien avec l'équipe de recherche, dans les conditions fixées à l'article L. 1418-2. »
M. Max Brisson. - Cet amendement soumet la perspective de transfert chez la femelle d'un embryon chimérique à un régime d'autorisation et non de simple déclaration. L'Agence de la biomédecine aura à charge de définir les délais et les seuils qu'impliquent les nouvelles conditions requises.
M. le président. - Amendement n°57 rectifié, présenté par MM. Reichardt et Danesi, Mme Eustache-Brinio, MM. Kennel, Babary et Morisset, Mmes Troendlé et Sittler, MM. L. Hervé, Mayet et Piednoir, Mme Noël et MM. Duplomb et H. Leroy.
Alinéas 7 à 10
Supprimer ces alinéas.
M. René Danesi. - Ces alinéas permettent l'insertion de cellules IPS dans un embryon animal dans le but de son transfert chez la femelle. Au vu des questions éthiques soulevées, la commission spéciale a posé certains verrous à la création d'embryons chimériques. La possibilité de transfert chez l'animal d'embryons hybrides animal-homme menace le patrimoine génétique de l'humanité. Le CCNE évoque le risque de cas d'infection ou d'infestation se transmettant d'une espèce à l'autre, le risque de représentation humaine chez l'animal, le risque de conscience humaine chez l'animal. Sans compter la question du bien-être animal.
La défense de la nature va de pair avec celle de l'humanité. Cet amendement proscrit donc la création de chimères animal-humain.
M. le président. - Amendement identique n°245 rectifié bis, présenté par MM. Capus, Guerriau, Decool, Fouché et Bignon.
M. Jean-Pierre Decool. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°213 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Cohen, Apourceau-Poly et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, M. P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.
I. - Alinéa 7
Remplacer le mot :
parturition
par le mot :
gestation
II. - Alinéa 9
1° Remplacer les mots :
en cas de
par les mots :
l'interdiction du
2° Après le mot :
femelle
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
en vue d'une gestation.
III. - Alinéa 10, seconde phrase
Remplacer le mot :
cinquante
par le mot :
quarante
Mme Laurence Cohen. - Cet amendement de repli interdit le transfert de l'embryon chimérique chez la femelle, donc la possibilité de toute gestation, et abaisse à 40% le taux de cellules d'origine humaine.
M. le président. - Amendement n°176, présenté par M. Meurant.
Après l'alinéa 13
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.... - En aucune façon, les gamètes dérivés de cellules souches pluripotentes induites ne peuvent être fécondés.
M. Sébastien Meurant. - La création de gamètes artificiels à partir de cellules IPS, qui ne sont pas des cellules embryonnaires mais des cellules adultes somatiques, n'est pas interdite mais soumise à déclaration auprès de l'Agence de la biomédecine.
La méiose naturelle est lente, complexe. Une méiose induite pourrait introduire des remaniements génétiques anormaux, difficiles à anticiper et impossibles à vérifier si le gamète doit être utilisé en fécondation. Il est donc essentiel de préciser qu'en aucune façon, les gamètes dérivés de cellules IPS ne peuvent être fécondés.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Compte tenu de la suppression de l'article 17, l'amendement n° 296 n'a plus de raison d'être et risque d'introduire une incohérence dans le texte. (M. Bruno Retailleau renchérit.) Avis défavorable.
L'amendement n° 85 soumet l'ensemble de la recherche sur les cellules IPS à un régime d'autorisation, ce qui paraît disproportionné. Il s'agit de cellules dérivées de cellules adultes, non d'embryons. En outre, la rédaction de l'amendement le rendrait potentiellement inapplicable. Retrait ou avis défavorable.
L'article 15 prévoit un encadrement et des garanties suffisantes. L'Agence de la biomédecine peut s'opposer à tout protocole qui violerait les principes éthiques fondamentaux ; cette opposition est précédée d'un avis public. Avis défavorable à l'amendement n° 59 rectifié, ainsi qu'à l'amendement n° 246 rectifié ter, quasi identique.
La commission a précisé à l'article 14 que la création d'embryons humains par la fusion de gamètes créés à partir de cellules IPS était interdite. Avis favorable à l'amendement n° 84 rectifié quater, qui renforce cette interdiction.
Par cohérence avec la suppression de l'article 17, il convient de supprimer toute mention de possibilité de recherche conduisant à un embryon chimérique. L'avis favorable de la commission à l'amendement n° 152 rectifié ne se justifie plus : à titre personnel, retrait ou avis défavorable.
En cohérence, la commission avait donné un avis défavorable aux amendements identiques nos 57 rectifié et 245 rectifié bis. Mais compte tenu de la suppression de l'article 17, avis favorable à titre personnel, pour plus de cohérence.
Avis défavorable à l'amendement n° 213 rectifié, par cohérence.
L'amendement n° 176 réaffirme l'interdiction de création d'embryon par fusion de gamètes, précisée à l'article 14 : retrait au profit de l'amendement n° 84 rectifié quater, imputé à une meilleure place.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Avis défavorable à tous les amendements autres que celui du Gouvernement. Nous ne souhaitons pas pour les cellules IPS un régime plus restrictif que pour les cellules souches embryonnaires humaines. Avec le régime de déclaration, l'Agence de la biomédecine conserve la capacité de s'opposer à un protocole ; la seule différence avec l'autorisation est que l'avis est réputé favorable passé un certain délai, sans qu'il soit besoin de produire un acte administratif spécifique.
Les garanties du code civil et la Convention d'Oviedo restent pleinement applicables.
Vous avez supprimé l'article 17, mais il convient de rester prudent. Selon le Conseil d'État, les évolutions sur les chimères ne sont pas couvertes par l'interdit actuel, et la localisation du texte laisse à penser qu'il n'a pas vocation à couvrir la recherche sur l'embryon animal.
Le Sénat a étendu la culture in vitro d'embryons humains jusqu'à 21 jours, soit la phase de gastrulation, de mise en place des feuillets embryonnaires dont celui qui donnera le système nerveux central. Dans un souci d'équilibre, le Gouvernement propose de restreindre l'observation d'un embryon in vitro à 14 jours mais d'autoriser l'utilisation de cellules IPS dans des embryons chimériques pour observer cette phase sans utiliser d'embryon humain.
M. Bruno Retailleau. - Je ne voterai pas l'amendement du Gouvernement. Les amendements liés à l'article 17 auraient dû devenir sans objet puisqu'il n'existe plus. Pour le reste, un régime d'autorisation est plus prudent, moins laxiste qu'un simple régime de déclaration.
Les cellules IPS reprogrammées ne sont pas la même chose que les cellules souches embryonnaires humaines, mais le problème éthique survient quand une cellule IPS devient gamète ou modèle embryonnaire. Elles ont les mêmes propriétés que les cellules souches embryonnaires humaines : l'autorenouvellement et la pluripotence. La question éthique est donc la même.
Certes, l'Agence de biomédecine pourra s'opposer, mais vous cherchez à alléger au maximum les procédures pour la recherche et l'industrie pharmaceutique. Notre pays croule sous les normes, mais comme par hasard, en matière d'éthique, on fait sauter tous les verrous ! SI les chercheurs explicitent et argumentent, ils obtiendront sans peine l'autorisation.
Mme Patricia Schillinger. - Ils vont s'expatrier !
M. Bernard Jomier. - La suppression de l'article 17 était une erreur, le résultat sera l'inverse de ce que vous recherchez.
Les cellules IPS ne donneront jamais d'embryon pour la recherche car c'est interdit par la Convention d'Oviedo.
M. Bruno Retailleau. - Nous voulons des garanties.
M. Bernard Jomier. - Personne ne peut franchir cet interdit. Tous les garde-fous sont en place. Les cellules IPS sont des cellules adultes, qui n'ont pas à être soumises au même contrôle que les cellules embryonnaires. Ou alors, on remet en cause toute la recherche sur tous les tissus humains !
Cellules IPS et CESh ont une stabilité génétique comparable, mais les résultats en épigénome ne sont pas les mêmes. C'est pourquoi il faut mener la recherche sur les deux, notamment pour comprendre le rôle des perturbateurs endocriniens sur les pathologies. On ne peut pas tout interdire et vouloir comprendre les malformations des embryons.
À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°296 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°85 :
Nombre de votants | 297 |
Nombre de suffrages exprimés | 297 |
Pour l'adoption | 24 |
Contre | 273 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°85, mis aux voix par assis et debout, n'est pas adopté.
L'amendement n°59 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°246 rectifié ter.
L'amendement n°84 rectifié quater est adopté.
L'amendement n°176 n'a plus d'objet.
L'amendement n°152 rectifié est retiré.
Les amendements identiques nos57 rectifié et 245 rectifié bis sont adoptés.
L'amendement n°213 rectifié n'a plus d'objet.
M. le président. - Amendement n°253 rectifié bis, présenté par MM. Chevrollier et B. Fournier, Mme Bruguière, M. Regnard, Mme Deroche, MM. Morisset, Cardoux, de Nicolaÿ, Panunzi et Vial, Mme Morhet-Richaud et MM. Meurant, H. Leroy, Reichardt et Chaize.
Alinéas 18, 22 et 27
Remplacer les mots :
deux ans d'emprisonnement et de 30 000
par les mots :
quatre ans d'emprisonnement et de 60 000
M. Guillaume Chevrollier. - Face à des laboratoires qui ont de gros moyens, les sanctions ne sont pas suffisamment dissuasives. Avec cet amendement, nous rappelons notre attachement à l'éthique.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Les sanctions en vigueur sont déjà dissuasives. L'Agence de biomédecine confirme qu'il n'y a eu aucune sanction prononcée, les chercheurs étant prudents. Avis favorable cependant, pour donner un signal fort.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Les peines prévues sont équilibrées et dissuasives. On ne peut pas publier les résultats d'une recherche scientifique sans produire l'avis de l'Agence de biomédecine - aucun chercheur ne s'y aventurerait.
Par ailleurs, le droit pénal ne connaît pas de peine de quatre ans d'emprisonnement. Votre amendement n'est pas conforme à l'échelle des peines fixée à l'article 131-4 du code pénal. Avis défavorable.
L'amendement n°253 rectifié bis est adopté.
M. le président. - Amendement n°154 rectifié, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, M. Morisset, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Vaspart et Brisson, Mme Lanfranchi Dorgal et M. Bonhomme.
I. - Alinéa 18
Compléter cet alinéa par les mots :
dont le protocole est soumis à déclaration en application du II de l'article L. 2151-6 du code de la santé publique
II. - Alinéa 19
Remplacer les mots :
à l'article
par les mots :
au II de l'article
III. - Après l'alinéa 20
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
...) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« ".... - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait de procéder à une recherche sur des cellules souches embryonnaires dont le protocole est soumis à autorisation en application du V dudit article L. 2151-6 :
« "1° Sans avoir préalablement obtenu le consentement écrit et l'autorisation auprès de l'Agence de la biomédecine conformément au même V de l'article L. 2151-6, ou alors que cette autorisation est retirée ou suspendue en application du même article L. 2151-6 ;
« "2° Sans se conformer aux prescriptions législatives et réglementaires." » ;
IV. - Alinéa 22
Compléter cet alinéa par les mots :
dont le protocole est soumis à déclaration en application du II de l'article L. 2151-7 du même code
V. - Alinéa 23
Remplacer les mots :
à l'article
par les mots :
au II de l'article
VI. - Après l'alinéa 24
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
...) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« ".... - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait de procéder à une recherche sur des cellules pluripotentes induites dont le protocole est soumis à autorisation en application du V dudit article L. 2151-7 :
« "1° Sans avoir préalablement obtenu le consentement écrit et l'autorisation auprès de l'Agence de la biomédecine conformément au même V de l'article L. 2151-7, ou alors que cette autorisation est retirée ou suspendue en application du même article L. 2151-7 ;
« "2° Sans se conformer aux prescriptions législatives et réglementaires." »
VII. - Alinéa 27
Compléter cet alinéa par les mots :
dont le protocole est soumis à déclaration en application du II de l'article L. 2151-6 du code de la santé publique
VIII. - Alinéa 28
Remplacer les mots :
à l'article
par les mots :
au II de l'article
IX. - Après l'alinéa 29
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
...) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« .... - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait de procéder à une recherche sur des cellules souches embryonnaires dont le protocole est soumis à autorisation en application du V dudit article L. 2151-6 :
« 1° Sans avoir préalablement obtenu le consentement écrit et l'autorisation auprès de l'Agence de la biomédecine conformément au même V de l'article L. 2151-6, ou alors que cette autorisation est retirée ou suspendue en application du même article L. 2151-6 ;
« 2° Sans se conformer aux prescriptions législatives et réglementaires. » ;
X. - Alinéa 31
Compléter cet alinéa par les mots :
dont le protocole est soumis à déclaration en application du II de l'article L. 2151-7 du même code
XI. - Alinéa 32
Remplacer les mots :
à l'article
par les mots :
au II de l'article
XII. - Après l'alinéa 33
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
...) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« .... - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait de procéder à une recherche sur des cellules pluripotentes induites dont le protocole est soumis à autorisation en application du V dudit article L. 2151-7 :
« 1° Sans avoir préalablement obtenu le consentement écrit et l'autorisation auprès de l'Agence de la biomédecine conformément au même V de l'article L. 2151-7, ou alors que cette autorisation est retirée ou suspendue en application du même article L. 2151-7 ;
« 2° Sans se conformer aux prescriptions législatives et réglementaires. »
M. Max Brisson. - Cet amendement harmonise les dispositions pénales avec les protocoles d'expérimentation soumis aux procédures d'autorisation.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Cet amendement était de coordination. À titre personnel et par cohérence, retrait ou avis défavorable, l'amendement n°152 ayant été retiré.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Même avis.
L'amendement n°154 rectifié est retiré.
L'article 15, modifié, est adopté.
ARTICLE 16
M. le président. - Amendement n°86 rectifié ter, présenté par MM. Chevrollier, de Legge et B. Fournier, Mme Bruguière, M. Regnard, Mme Deroche, MM. Morisset, Cardoux, de Nicolaÿ, Panunzi, Vial, Chaize, Meurant et H. Leroy, Mme Morhet-Richaud et M. Segouin.
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le consentement du couple géniteur est joint au protocole de recherche autorisé par l'Agence de la biomédecine.
M. Guillaume Chevrollier. - Il est primordial que l'Agence de biomédecine, garante des principes éthiques qui encadrent la recherche sur l'embryon, soit assurée que le couple géniteur ait bien reçu l'information nécessaire et ait donné son consentement libre et éclairé, avant que toute atteinte soit portée à l'embryon. Le consentement éclairé doit être intégré dans le dossier de demande d'autorisation de recherche.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Par définition, ne pourront être utilisés par les chercheurs que les embryons délibérément fournis à la recherche après consentement écrit. Il n'est bien entendu pas possible pour l'Agence de biomédecine d'attribuer à des protocoles de recherche des embryons qui n'auraient pas été délibérément cédés par les couples à la recherche. Par ailleurs, si l'objectif recherché est celui d'un consentement systématiquement réinterrogé en fonction de la nature du protocole de recherche, ceci est difficilement envisageable en pratique. Retrait ou avis défavorable.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Nous sommes tous très attachés à des accords en toute conscience. C'est déjà le cas. Le consentement écrit est en outre révocable à tout moment, à partir du moment où l'embryon n'a pas encore été utilisé. Avis défavorable.
M. Guillaume Chevrollier. - Malgré la complexité administrative, les enjeux sont primordiaux. Je maintiens mon amendement.
L'amendement n°86 rectifié ter n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°174, présenté par M. Meurant.
I. - Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Dans tous les cas, ce consentement fait l'objet d'une confirmation par écrit après un délai de réflexion de trois mois à compter de la date du premier consentement mentionné au premier alinéa du présent II.
II. - Alinéa 11, dernière phrase
Remplacer les mots :
cas de révocation par écrit
par les mots :
l'absence de la confirmation
III. - Alinéas 12 et 13
Après le mot :
confirmé
insérer les mots :
par écrit
M. Sébastien Meurant. - Rétablissons la rédaction sur le devenir des embryons surnuméraires adoptée par l'Assemblée nationale en faveur de la confirmation par écrit, qui laisse le temps de la réflexion.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'obligation de confirmation écrite à trois mois pour les embryons ne faisant plus l'objet d'un projet parental s'avère lourde à gérer pour les centres concernés et fragilise la réorientation vers le don ou la recherche. Nous avons choisi d'alléger la procédure en prévoyant que le silence vaut confirmation du consentement.
Je rappelle que nous parlons d'embryons ne faisant plus l'objet d'un projet parental. Y revenir est douloureux pour le couple dont la décision, mûrement réfléchie, n'a pas dû être facile à prendre. Évitons de leur redemander une confirmation écrite et préférons que l'absence de réponse vaut acceptation. Avis défavorable.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°174 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°87 rectifié ter, présenté par MM. Chevrollier, de Legge, Schmitz et B. Fournier, Mme Bruguière, M. Regnard, Mme Deroche, MM. Morisset, Cardoux, de Nicolaÿ, Panunzi, Vial, Piednoir, Chaize, Meurant et H. Leroy, Mme Morhet-Richaud et MM. Segouin et Leleux.
Alinéa 8
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Si le consentement écrit et préalable du couple géniteur ne figure pas dans le protocole de recherche, celle-ci ne peut être menée. Il est alors mis fin à la conservation de ces embryons.
M. Guillaume Chevrollier. - Si l'Agence de biomédecine n'a pas la preuve du consentement écrit et préalable du couple géniteur selon lequel il donne son embryon à la recherche, elle ne peut autoriser le protocole de recherche sans contrevenir aux principes éthiques qui s'y appliquent.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Cet amendement a le même objectif que l'amendement n°86, qui a été rejeté. Avis défavorable.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Même avis.
L'amendement n°87 rectifié ter n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°173, présenté par M. Meurant.
Alinéas 9 et 10
Supprimer ces alinéas.
M. Sébastien Meurant. - La notion de déclaration anticipée des deux membres du couple en cas de décès, introduite par l'Assemblée nationale, fait peser sur le membre survivant une charge émotionnelle démesurée, en même temps qu'elle ouvre la voie à l'AMP post mortem. Une telle disposition doit donc être supprimée.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'équilibre actuel est plus respectueux de la décision du couple. Par ailleurs, le conjoint survivant ne sera réinterrogé au plus tôt qu'un an après le décès. Avis défavorable.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Même avis.
L'amendement n°173 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°184, présenté par M. Meurant.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Chaque année, l'Agence de biomédecine rend publics les actions qu'elle a entreprises et les résultats qu'elle a obtenus pour limiter le nombre des embryons conservés.
M. Sébastien Meurant. - Le nombre d'embryons congelés ne cesse d'augmenter : + 20 % depuis 2011 pour une croissance du nombre d'enfants nés par AMP de 7 % entre 2011 et 2015. La loi de bioéthique de 2011 prévoyait pourtant de limiter le nombre d'embryons conservés. Réaffirmons l'objectif de diminution du nombre des embryons conservés.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Les pratiques et procédés limitant le nombre d'embryons conservés sont déjà inscrits dans le code de la santé publique. Il serait donc redondant de l'inscrire ici. Le rapport de l'Agence de biomédecine sur l'application de la loi bioéthique suggérait l'allègement des procédures administratives d'accueil des embryons. Selon son guide de bonnes pratiques, il doit être mis fin à la conservation des embryons non accueillis dans un projet de recherche dans un délai de cinq ans. Retrait ou avis défavorable.
Mme Frédérique Vidal, ministre. - Même avis.
L'amendement n°184 n'est pas adopté.
L'article 16 est adopté.
L'article 18 est adopté.
ARTICLE 19
M. le président. - Amendement n°1 rectifié quinquies, présenté par Mmes Guidez, Doineau et Morin-Desailly, M. Gabouty, Mme Vullien, M. Détraigne, Mmes Billon et Vermeillet, MM. Danesi, Saury et Guerriau, Mmes Kauffmann et Perrot, MM. Wattebled et Cazabonne, Mme Férat, MM. Cuypers, Canevet et Bonhomme, Mme Lanfranchi Dorgal et MM. Decool et Lafon.
Alinéa 7, dernière phrase
Remplacer le mot :
proposée
par les mots :
remise par le médecin
Mme Jocelyne Guidez. - Cet article poursuit l'amélioration de la qualité et de la sécurité des pratiques du domaine bioéthique. Il reconnaît la médecine foetale et rénove la définition du diagnostic prénatal, tout en renforçant l'information de la femme enceinte et du couple, en particulier en cas de problème génétique foetal.
Il est toujours prévu qu'une liste d'associations spécialisées et agréées soit proposée. Ce point est important car il est essentiel, avant de prendre quelque décision que ce soit, d'entrer en contact avec des associations afin d'être renseignés.
Cependant, la rédaction de la fin de l'alinéa 7 n'est pas pleinement satisfaisante. Cet amendement remplace le mot « proposée » par « remise par le médecin ». Ces deux notions ne sont pas identiques.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Avis favorable. La commission spéciale n'a eu aucune raison de s'y opposer.
Mme Agnès Buzyn, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°1 rectifié quinquies est adopté.
L'article 19, modifié, est adopté.
ARTICLE 19 BIS A (Supprimé)
M. le président. - Amendement n°127 rectifié ter, présenté par MM. de Legge et Chevrollier, Mmes Noël, Bruguière, Thomas et Chain-Larché, MM. Schmitz, Morisset et Brisson, Mme Sittler, MM. de Nicolaÿ, Cuypers, Mayet, Bascher et B. Fournier, Mme Ramond, MM. Regnard, Retailleau et Longuet, Mme Lavarde et MM. Leleux, H. Leroy, Cambon, Meurant, Bignon, Segouin et Hugonet.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. - L'article L. 2131-4-1 du code de la santé publique est abrogé.
II. - Le Gouvernement rend compte, au plus tard le 31 décembre de l'année de la promulgation de la présente loi, des progrès accomplis dans la collecte et le stockage des unités de sang placentaire.
M. Dominique de Legge. - Cet amendement supprime le diagnostic préimplantatoire (DPI) avec typage HLA autorisé à titre expérimental par la loi du 6 août 2004, confirmée en 2011.
La suppression de cette technique a été adoptée par les députés en première lecture. Elle n'est en effet plus pratiquée depuis 2014 par l'hôpital Antoine Béclère qui était le seul à l'avoir mise en oeuvre.
Revenons à la rédaction de l'Assemblée nationale.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - La commission spéciale a décidé de supprimer cet article introduit par l'Assemblée nationale. J'entends les interrogations sur cette technique concernant les enfants cadets sains susceptibles de fournir une greffe aux aînés malades. Conscient des enjeux, le législateur a strictement encadré ce dispositif, qui doit être une solution de dernier recours. N'empêchons pas ce désir d'enfant conjugué à la volonté de soigner un autre enfant malade.
Les associations de familles ayant des enfants atteints de maladies rares estiment que c'est parfois la meilleure technique. Ne renonçons pas à cette possibilité de sauver des vies. Avis défavorable.
Mme Agnès Buzyn, ministre. - Sagesse. Cette technique extrêmement rare est nécessaire pour quelques pathologies pour lesquelles les greffes extrafamiliales sont peu efficaces. Il est parfois nécessaire de trouver un donneur au sein de la fratrie, qui bien évidemment ne doit pas être malade.
La technique assure que l'enfant ne sera pas malade, grâce à un tri d'embryon. En outre, cet enfant sera compatible avec un don du sang du cordon ombilical.
Durant toute ma vie professionnelle, j'ai eu à traiter ces enfants et ces familles.
Interdire cette technique, c'est interdire un remboursement par la sécurité sociale aux familles qui doivent alors aller à l'étranger. J'ai trop d'histoires personnelles à ce sujet. Sagesse.
M. Bruno Retailleau. - Et la raison ?
Mme Cécile Cukierman. - Chaque cas est problématique et elle a ses spécificités.
On parle ici d'enfants médicaments ou de naissances médicamenteuses. Certes, des familles peuvent avoir envie d'un deuxième enfant mais comment savoir si ce désir n'est pas motivé que par le souhait de soigner le premier enfant ?
Le poids psychologique sera lourd sur le deuxième enfant. (M. Roger Karoutchi approuve.) Je voterai cet amendement. À défendre le progrès, ne tombons pas dans le progressisme ou le maximalisme.
Mme Laurence Cohen. - Je ne voterai pas cet amendement. La commission spéciale propose de maintenir le double diagnostic préimplantatoire. Mme Cukierman a raison de souligner les questions qui se posent.
Les cas évoqués sont rarissimes. La technique est peu pratiquée, et seulement par le Professeur Frydman. On ne peut pas utiliser un enfant comme un moyen ou un objet, en effet. Comment peut-il se construire s'il n'a été conçu que pour sauver l'aîné ?
Même si les chances de réussite sont minces, laissons cette chance aux familles d'avoir recours à cette technique. Évitons l'errance des familles concernées.
M. Bruno Retailleau. - Je comprends toutes les interventions. La notion de souffrance peut présider aux avis des uns et des autres. Raccrochons-nous à la raison. La rareté ne peut pas être un argument. La loi de bioéthique pose des principes, elle ne doit pas céder devant la loi du faible nombre...
On doit faire naître un enfant pour lui-même, sans l'instrumentaliser - même si le terme est à nuancer.
On est en outre sur un tri d'embryon, une double sélection avec ce DPI. Enfin, il existe des techniques utilisées par des hématologues qui évitent ces naissances, avec des cellules souches issues du sang de cordon. Pouvez-vous me le confirmer, madame la ministre ?
M. Bernard Jomier. - Les cas sont très rares. Les familles en question en ont tiré du mieux-être. Cette technique a-t-elle un avenir ? Je n'en sais rien, mais pourquoi l'interdire, alors que la procédure est parfaitement encadrée ? Quelques familles la pratiquent en Belgique. Ne les priverait-on pas d'une prise en charge de la sécurité sociale ? Je ne voterai donc pas cet amendement.
M. Daniel Chasseing. - Je soutiens la commission spéciale qui a maintenu l'autorisation de cette technique extrêmement encadrée, autorisée en 2004 et pérennisée en 2011. Le diagnostic préimplantatoire n'a pour objectif que de vérifier l'absence de maladie et la compatibilité avec une greffe. Je ne voterai pas cet amendement.
Mme Florence Lassarade. - Je vais parler en tant que pédiatre. Une famille qui va perdre un enfant sera tentée par cette technique. J'entends le terme d'« enfant médicament » mais une famille qui perd un enfant n'en fait-elle pas un autre pour le remplacer ? L'argument ne tient donc pas. L'enfant cadet sera sans doute considéré comme le sauveur de la famille.
M. Jérôme Bascher. - Nous faisons la loi, et non pour tel ou tel cas individuel qui peut nous toucher. Lorsqu'on voit un sans-papier, on a envie de l'aider individuellement. Est-ce pour cela qu'il faut régulariser tous les sans-papiers ? (Exclamations sur les travées du groupe SOCR)
M. Bernard Jomier. - Quelle comparaison !
M. Jérôme Bascher. - Il s'agit du bien commun. Je voterai l'amendement 127 rectifié ter.
M. Roger Karoutchi. - Qu'est-ce que le bien commun ?
M. Michel Amiel. - Je suis étonné par l'argument qui vient d'être développé. La loi est faite aussi pour les cas exceptionnels. Les parents ne vont pas chosifier leur deuxième enfant ! C'est un double acte d'amour tant pour le premier que pour le deuxième enfant.
Je ne voterai pas cet amendement. Cette technique est sans doute rare mais elle peut faire du bien.
Mme Catherine Deroche. - Je ne voterai pas cet amendement. Nous ne créons pas un nouveau dispositif. Ne supprimons pas ce qui existe déjà.
Mme Agnès Buzyn, ministre. - On peut greffer des enfants avec du sang de cordon congelé, issu de banques internationales, mais dans deux pathologies, ces techniques donnent de mauvais résultats. C'est pourquoi les dons intrafamiliaux ont tout leur intérêt.
Le tri des embryons a lieu de toute façon en cas de maladie génétique rare pour le premier enfant. Les parents feront un DPT pour un enfant afin qu'il n'ait pas cette maladie. Le premier tri a lieu et il est prévu ici un deuxième tri. Ne fermons-nous pas la porte à des familles ayant aussi le désir d'un autre enfant, même s'il peut sauver un aîné.
L'amendement n°127 rectifié ter n'est pas adopté.
L'article 19 bis A demeure supprimé, de même que l'article 19 bis.
ARTICLE 19 TER
M. le président. - Amendement n°68 rectifié, présenté par MM. Mizzon, Canevet, Cazabonne, Delahaye, Détraigne et L. Hervé, Mme Herzog et M. Masson.
Supprimer cet article.
M. Jean-Marie Mizzon. - L'amendement n°166 adopté par la commission spéciale autorise, à titre expérimental et sous conditions, le diagnostic préimplantatoire avec recherche d'anomalies chromosomiques.
La technologie permet de trier les embryons in vitro avec des procédés de plus en plus poussés. Pour lutter contre les tentations d'eugénisme inhérentes à cette pratique, le législateur a limité, jusqu'ici, celle-ci à des maladies génétiques héréditaires dites « graves ».
Ces dispositions multiplient les indications de recours au DPI sans limites stables. Cela révèle les inquiétantes pressions idéologiques pesant sur l'élargissement du DPI pour tous.
Rétablissons le cadre strict de recours au DPI actuellement en vigueur.
M. le président. - Amendement identique n°100 rectifié ter, présenté par MM. Retailleau, Chevrollier, B. Fournier, Danesi et Vial, Mme Deromedi, MM. de Legge et Bazin, Mme Bonfanti-Dossat, M. H. Leroy, Mmes Bruguière, Chain-Larché et Thomas, MM. Bascher, Chaize, Mouiller, Schmitz et Cuypers, Mme Deseyne, MM. Gilles, Mandelli, Mayet, Longuet, Cambon, Rapin et Bignon et Mme Micouleau.
M. Bruno Retailleau. - J'ai demandé la parole sur l'article. Comment fait-on ?
M. le président. - Prenez plus de temps pour prendre la parole à la fois sur l'article et pour présenter votre amendement.
M. Bruno Retailleau. - La discussion sur ce sujet a été un moment de tension et d'émotion fort à l'Assemblée nationale. En commission, un député a dit « il faut éliminer les embryons trisomiques ». En séance, un autre parlait de les « éradiquer ». Le cadre, brutal, est posé. Certains ont une logique de la bonne intention, compassionnelle : avec cette mesure, ils veulent réduire les risques de fausse couche suite aux FIV.
Selon Jean-Paul Bonnefont, interrogé le 18 octobre 2018 à l'Assemblée nationale, l'augmentation des chances de grossesse après un test d'aneuploïdie n'a jamais été démontrée. Mais cette technique peut aboutir à détruire des embryons sains, ajoutait-il.
Si l'on propose d'ajouter un deuxième test au premier, cela fera plus de chiffres d'affaires pour les laboratoires, et ils applaudiront des deux mains !
Il s'agit d'eugénisme, ni plus ni moins, puisqu'il s'agit d'éliminer tous les embryons n'ayant pas un génome conforme, normal. Quel signal envoyons-nous aux personnes handicapées ? Quelle stigmatisation, quelle violence du message vis-à-vis des trisomiques ! Quelle société voulons-nous ?
Il y a quelques mois, Jean Vanier, fondateur de L'Arche, disparaissait. Il avait fondé l'éthique de la fragilité. Il disait que l'on mesure le degré d'humanité d'une civilisation à l'attention qu'elle porte aux plus fragiles. Vous avez peut-être vu le film Le huitième jour. Je m'étais entretenu avec cet acteur trisomique, dans les années 1990. Tous ceux qui ont vu ce film ont été touchés : pensez-y au moment de voter.
La fille du Général de Gaulle, Anne, née en 1928, était trisomique, lourdement handicapée. Ses parents avaient fait le choix de la garder avec eux ; à l'époque, on plaçait ces enfants. Lors de son inhumation, quand Anne avait 20 ans, le général de Gaulle a dit à sa femme : « Maintenant, elle est comme les autres ». Il a dit un jour : « Anne est une grâce. Elle m'a fait dépasser tous mes échecs ».
Votez cet amendement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Loïc Hervé et Jean-Claude Luche applaudissent également)
L'amendement n°159 n'est pas défendu.
Mme Agnès Buzyn, ministre. - Le débat à l'Assemblée nationale a été très long et très émouvant. Cette demande provient des centres de FIV. De par le monde, beaucoup de centres utilisent ces techniques de tri pour supprimer les embryons qui présentent des anomalies visuelles ou du nombre de chromosomes en espérant que les embryons implantés aient plus de probabilités de produire une grossesse à terme.
Cette certitude est loin d'être avérée et, une semaine après les débats à l'Assemblée nationale, une étude internationale présentée dans un congrès américain, a démontré que le DPI-A chez les femmes de 25 à 40 ans n'améliorerait pas le succès de la réimplantation. Cette technique mènerait à la destruction d'embryons sains, tandis qu'on risquerait de ne pas détecter d'autres anomalies.
Nous proposons la poursuite de protocoles de recherche clinique pour juger de l'utilité de détecter les anomalies chromosomiques.
Une telle technique pose aussi des problèmes éthiques car dans les anomalies chromosomiques recherchées, la trisomie 21 est diagnostiquée. Or elle donne des enfants viables. On supprime donc des embryons trisomiques.
À l'Assemblée nationale, il a été question d'histoires terribles de couples ayant eu un enfant avec une anomalie génétique, qui ont ensuite recouru à l'AMP pour éviter d'avoir à nouveau un enfant malade et à qui on disait au moment du dépistage prénatal que l'embryon était trisomique. La question de l'avortement thérapeutique se pose alors...
Ces situations, exceptionnelles, existent. Il y a 150 000 essais d'AMP en France dont 100 000 reposent sur la FIV, et cela concerne toutes les familles, pas seulement celles qui ont un premier enfant malade. On ouvrirait alors une technique de tri d'embryons à toutes les procédures d'AMP.
Sommes-nous tous d'accord pour inscrire dans la loi le tri des enfants avec la trisomie 21 ? Pourquoi offrir cette possibilité uniquement à ceux qui ont recours à une AMP et pas à une insémination artificielle ou à une conception naturelle ?
La technique est possible, simple, mais l'argument de l'amélioration du « rendement » de la FIV est loin d'être acquis.
La technique permettant de regarder les anomalies chromosomiques permet de détecter les mutations génétiques alors que vous avez émis un avis défavorable pour le dépistage préconceptionnel. Le temps est encore à la recherche pour améliorer les FIV.
Je suis défavorable à la technique, donc avis favorable à la suppression de l'article.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Ne faisons pas dire au texte de la commission spéciale ce qu'il ne dit pas. Elle a proposé un cadre très strict, et à titre expérimental, du DPI-A.
Les équipes médicales cibleraient les personnes les plus à risque, en cas d'échecs répétés de FIV ou pour les femmes ayant subi des fausses couches à répétition. L'objectif est d'améliorer la prise en charge. La finalité n'est pas de sélectionner des embryons sur d'autres critères que ceux de la meilleure implantation possible.
Nous pouvons encore améliorer le dispositif, si nous ne supprimons pas cet article. Mais ne nous privons pas d'une technique que l'ensemble des sociétés savantes en médecine de la reproduction appellent de leurs voeux pour rendre ces parcours d'AMP moins douloureux.
Favoriser la recherche, comme le souhaite Mme la ministre, n'est pas incompatible avec cet article. Si nous supprimons cet article, nous perdrons cinq ans, date de la future révision du projet de loi de bioéthique.
Il s'agit d'une assistance médicale à la procréation qui est longue et douloureuse.
Sortons du débat passionnel. Les enfants trisomiques sont viables, et accueillis avec bonheur par leurs parents. Notre société doit les inclure au mieux. Mais le DPI-A est une technique supplémentaire pour éviter de transplanter des embryons qui ne donneront pas naissance à un enfant.
M. Daniel Chasseing. - Je soutiens l'article proposé par la commission spéciale, qui aidera les femmes qui subissent des fausses couches à répétition. Le DPI-A permet d'accéder plus rapidement à une grossesse. Il ne concernera pas toutes les femmes ayant recours à l'AMP. Ce ne serait pas un acte eugéniste mais un encadrement du DPI-A.
Madame la ministre, on peut rechercher la trisomie 21 par une analyse de sang ou une amniocentèse.
Mme Cécile Cukierman. - Bien évidemment, ces cas vécus sont tous spécifiques. Faisons-nous la loi pour répondre à ces situations particulières ?
Nous utilisons la science pour répondre à des problèmes naturels. Mais pouvons-nous croire que nos choix n'ont aucune incidence sur les autres, sur le groupe ? Cette ligne de crête est difficile à trouver. Mais à trop laisser le pouvoir à la science - sans s'y opposer - faisons attention au scientisme. Cet article ouvre la porte à beaucoup de problèmes.
Albert Jacquard disait, dans son Éloge de la différence : « Sachons nous enrichir de la différence de l'autre ». (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; M. Loïc Hervé et Mme Michèle Vullien applaudissent également.)
Mme Michelle Meunier. - Dans son ensemble, le groupe socialiste et républicain est contre la suppression de l'expérimentation. Le DPI-A a pour principal objet la recherche d'une anomalie génétique provoquant une maladie rare, voire incurable.
Étendre son champ à la numération des chromosomes, à la vérification du nombre d'autosomes, n'implique aucun acte supplémentaire.
Mais une mauvaise numération des autosomes aboutit très majoritairement à des fausses couches. S'ils naissent, les enfants souffriront de pathologies très graves. Par conséquent nous soutenons la position de la commission spéciale. Le CCNE s'est prononcé en sa faveur. Le Professeur Frydman a déclaré à notre commission qu'on éviterait ainsi une violence psychique, physique et économique aux couples concernés.
M. Dominique de Legge. - La commission spéciale nous propose ce diagnostic à titre expérimental. Cela signifie bien qu'elle a un doute. Je n'ai pas envie d'expérience quand il s'agit d'humanité.
Il faut encore que l'on décide de la grille d'évaluation de l'expérimentation. Certaines personnes vous diront qu'il faut continuer...
Le principe posé, c'est de créer une norme génétique : je ne le souhaite pas. Après l'expérimentation, il y aura la généralisation.
M. Alain Milon, président de la commission spéciale. - Je ne partage pas les propos de M. de Legge ; en revanche, je partage totalement ceux de la rapporteure et du docteur Chasseing. Mais si vous votez ces amendements en ayant pour souci le risque d'eugénisme ou par refus d'empêcher la naissance d'enfants trisomiques, alors il faut aller jusqu'au bout de votre logique ! Pour information, il existe d'autres trisomies que la trisomie 21, dont la trisomie 18 qui est mortelle. Ne faisons plus aucun test de trisomie 21 ni d'amniocentèse, à aucune femme enceinte !
M. Bernard Jomier. - Seules les anomalies non compatibles avec le développement de l'embryon sont concernées par le DPI-A, qui est très cadré.
Je partage les propos de M. Retailleau mais je récuse totalement le lien entre DPI-A et société inclusive.
Notre pays autorise un couple à ne pas donner naissance à un enfant atteint de trisomie 21. Si le couple choisit de le garder, la société doit tout faire pour l'inclure.
Le DPI-A n'est pas l'assurance absolue d'un enfant sain, et c'est très bien. Mais il faut l'assurance d'un enfant vivant.
Certains craignent des dérives. Mais toute technique expose à ce risque ! Je vous rappelle surtout que seuls cinq centres peuvent effectuer une DPI-A, pas vingt ou trente : le contrôle par l'Agence pourra se faire strictement. Je suivrai la position sage de la rapporteure.
M. Jacques Bigot. - Madame la ministre, vous craignez qu'on aille vers plus de contrôles génétiques. Or le texte de la commission spéciale est extrêmement prudent, plaçant le DPI-A sous le contrôle de l'Agence de la biomédecine.
Nous avons tous été contactés par des femmes qui ont enchaîné les fausses couches. Leur parcours est compliqué, améliorons-le. Je suis très étonné de la position du Gouvernement.
M. Marc Laménie. - J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt et de respect les collègues. Nous sommes au coeur des questions d'éthique, de morale, de respect. Certaines personnes autour de nous sont dans des situations très difficiles.
Le président Retailleau a évoqué le tri : cela ne doit pas s'appliquer dans ce domaine-là.
La ministre a évoqué la recherche - la tâche des chercheurs est immense, ils méritent aussi le respect, mais nous sommes ici au coeur des valeurs morales. Je voterai ces amendements de suppression.
M. Philippe Bas. - J'ai les plus grands doutes sur les dispositions introduites par la commission spéciale.
L'Opecst, l'Agence de la biomédecine, le Conseil d'État ont émis de sérieuses réserves sur le DPI-A. La ministre, qui réunit non seulement sa propre expérience professionnelle mais toute l'expertise de la direction générale de la santé, est ici déterminée, alors qu'elle s'en est remise à la sagesse du Sénat précédemment.
Il ne suffit pas d'écrire « à titre expérimental » pour encadrer les dispositions. C'est un faux-semblant.
Le paragraphe 7 laisse entrevoir l'étendue de l'élargissement du DPI. Qu'est-ce que l'efficience de l'AMP qui est citée ? Jusqu'où va-t-on ? Seule est exclue la recherche du sexe de l'enfant à naître...
N'adoptons pas cette expérimentation qui comporte tant de risques. Nous ne faisons pas de la bioéthique-fiction, nous cherchons à résoudre des problèmes qui se posent réellement. (Applaudissements sur la plupart des travées du groupe Les Républicains ; M. Loïc Hervé applaudit également.)
M. Michel Amiel. - Je ne voterai pas la suppression de l'article et me rallie aux arguments du président Milon. Soyez cohérents : supprimez tout dépistage de la trisomie 21 !
J'avoue cependant que le caractère expérimental me paraît bizarre et me dérange.
Mme Laurence Cohen. - Ce débat est extrêmement important. Les points de vue sont très divers au sein de chaque groupe politique. Je suivrai la commission spéciale, car, sinon, j'aurais l'impression qu'on ne traite pas toutes les femmes ni tous les couples de la même façon.
Si l'on veut être logique, arrêtons toute possibilité d'amniocentèse pour les femmes devenues enceintes de façon classique. Ne limitons pas les possibilités de dépistage aux seuls couples infertiles. Sinon ce serait deux poids, deux mesures.
M. Jérôme Bascher. - J'ai été très touché par l'argumentation de Philippe Bas. Nous sommes en première lecture. En seconde lecture, ce texte pourra être amélioré. Il faut voter ces amendements de suppression pour revenir ensuite avec une autre rédaction.
M. Bernard Jomier. - Et l'entonnoir ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. - Ce que la commission spéciale nous propose doit nous interpeller : il s'agit d'une expérimentation. Si la technique était unanimement considérée comme utile, ce ne serait pas le cas.
Le DPI-A ne semble pas mieux faire que l'examen morphologique des embryons. C'est ce que conclut une étude américaine. L'étude française le vérifiera peut-être. La société américaine de médecine de la reproduction dit bien que la technique n'est pas prouvée. Il y a encore un débat scientifique.
Après avoir ouvert une expérimentation, il est difficile de la cadrer. Le Gouvernement fait le choix de la recherche, en finançant un protocole dès 2020.
Monsieur le président Milon, on ne peut pas comparer une interruption médicale de grossesse (IMG) et le tri d'embryons avant implantation. Dès que les chercheurs auront l'information d'une anomalie sur un embryon, comment pourront-ils implanter celui-ci en connaissance des conséquences ? Ils ne pourront pas choisir de ne pas voir.
Aucun embryon avec aneuploïdie ne sera implanté si vous votez le texte de la commission spéciale, alors que 1 500 familles sur 8 000 auxquelles on propose une IMG choisissent chaque année de garder un enfant même avec une anomalie.
Cette technique permet de détecter des anomalies génétiques, donc au-delà du nombre de chromosomes.
Il y a cinq centres de DPI, pour 800 embryons examinés actuellement. S'il y en avait 100 000 à traiter, il faudrait élargir considérablement les équipes, avec le risque que certaines aillent plus loin, trop loin. Il vaut mieux poursuivre la recherche.
M. Alain Milon, président de la commission spéciale. - J'entends le raisonnement de la ministre, mais dans un cas il s'agit d'embryons non encore implantés, dans l'autre des foetus.
Les médecins n'ont pas à cacher la situation aux parents en ce qui concerne les embryons. Aux parents de choisir. (Mme la ministre soupire.) Dans l'autre cas, c'est un foetus vivant, pas un embryon, qu'on élimine. Le problème est quand même différent.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - J'entends les reproches quant à l'expérimentation. Mais on nous aurait fait le reproche inverse, celui de ne pas commencer par une expérimentation, si nous ne l'avions pas prévue.
MM. Philippe Bas et Bruno Retailleau. - Ce n'est pas une expérimentation !
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Le texte est celui-là. Je regrette que les débats ne concernent que la trisomie 21. Allons au bout, soyons courageux et ne proposons plus le dépistage de la trisomie 21 à toutes les femmes. Souvenez-vous de la situation passée, quand le test était limité aux femmes de plus de 35 à 37 ans, dont la grossesse était jugée à risques...
À la demande du groupe Les Républicains, les amendements nos68 rectifié, 100 rectifié ter et 290 sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°86 :
Nombre de votants | 323 |
Nombre de suffrages exprimés | 304 |
Pour l'adoption | 181 |
Contre | 123 |
Le Sénat a adopté.
L'article 19 ter est supprimé.
Les amendements nos251 rectifié et 190 rectifié n'ont plus d'objet.
M. le président. - Nous avons examiné aujourd'hui 101 amendements. Il en reste 20.
La séance est levée à minuit cinq.
Prochaine séance, aujourd'hui, mercredi 29 janvier 2020, à 15 heures.
Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,
Jean-Luc Blouet
Chef de publication