Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct.
Au nom du Bureau du Sénat, j'appelle chacun de vous à observer l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu'il s'agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.
Effondrement du pont de Mirepoix-sur-Tarn
M. Pierre Médevielle . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. René-Paul Savary applaudit également.) Un pont s'est effondré lundi après-midi dans mon département. Mes pensées vont aux familles des deux victimes.
L'heure n'est pas aux polémiques ; mais, triste coïncidence, ce drame intervient six mois après la publication du rapport de la mission d'information Maurey sur la sécurité des ponts. Pas moins de 90 % des 200 000 ponts sont gérés par les collectivités territoriales et 25 000 sont en mauvais état. Or les communes et intercommunalités n'ont pas les moyens de les rénover.
À l'heure du Congrès des maires, le manque de ressources des collectivités locales interroge. Le rapport d'information appelait à un vrai plan Marshall pour les ponts, passant par la création d'un fonds d'aide aux collectivités, comme on l'a fait pour les tunnels après la catastrophe du Mont-Blanc.
La loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit une augmentation des moyens pour les ponts gérés par l'État, mais celle-ci n'est pas assez rapide.
À quand des moyens techniques, financiers et humains en plus pour les communes et intercommunalités ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports . - J'ai moi aussi une pensée pour les victimes et leurs familles, pour les secours et pour les témoins qui ont eu le courage de porter assistance aux personnes en péril.
Une enquête judiciaire est en cours. J'ai également diligenté le Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre. Il semble que le pont ait été emprunté par un poids lourd dépassant de très loin la limite autorisée - à 19 tonnes. Le pont avait été inspecté en 2017 par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), qui l'avait jugé sans défaut, diagnostic confirmé en 2018 par une enquête départementale.
Pas moins de 70 millions d'euros en 2019 et plus de 120 millions d'euros en 2020 seront dédiés à la sécurité des ponts gérés par l'État. Un recensement des ponts ouvrant droit à des cofinancements est en cours, il sera achevé à la fin de l'année.
Les services de l'État sont disponibles pour apporter une aide aux collectivités. Et je suis favorable à l'implantation de capteurs sur certains ponts, préconisée par le rapport d'information, afin d'assurer une surveillance en temps réel. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
M. Pierre Médevielle. - J'en prends acte. Nous ne pouvons plus regarder ces infrastructures se dégrader sans réagir, nous ne pouvons jouer avec la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mesures en faveur des hôpitaux (I)
M. Bernard Cazeau . - (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM) L'hôpital est malade. Cela vient de loin... (M. Jean-Marc Todeschini le confirme.) C'est qu'il a eu à subir les évolutions financières et organisationnelles successives, sans compter les transformations, depuis vingt ans, de l'exercice médical de ville, dont les pratiques ont conduit à un engorgement des urgences.
Il y a quelques jours, une manifestation a mobilisé massivement les professionnels hospitaliers de toutes catégories, conduisant le Premier ministre et vous-même, madame la ministre de la Santé, à annoncer ce matin des mesures fortes et rapides. Elles consistent en une accélération de la stratégie « Ma Santé 2022 » : abondement de 1,5 milliard d'euros supplémentaires sur trois ans pour l'hôpital, Objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) hospitalier porté à 2,46, reprise d'un tiers de la dette de l'hôpital soit 10 milliards d'euros, ou encore, prime annuelle de 800 euros nets pour les praticiens hospitaliers des secteurs sous tension et revalorisation du métier d'aides-soignants.
M. Rachid Temal. - La question ! (On renchérit sur de nombreuses travées des groupes SOCR et Les Républicains.)
M. Bernard Cazeau. - La voici. (On s'en félicite sur de nombreuses travées.) En quoi les mesures prises par le Gouvernement peuvent-elles améliorer la situation ? (Exclamations ironiques à droite et à gauche ; applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé . - Vous avez raison, monsieur Cazeau (Exclamations moqueuses sur les travées des groupes Les Républicains et SOCR), la crise de l'hôpital est effectivement ancienne. Malgré une augmentation des crédits en 2019, il nous a fallu en prendre la mesure et proposer des solutions nouvelles. C'était l'objectif de « Ma Santé 2022 », pour replacer le patient au coeur du système, privilégier la qualité des soins et réorganiser la médecine de ville tout en réarmant l'hôpital de proximité, pour assurer la continuité des soins. Le pacte de refondation des urgences avait le même objectif ; nous avons aussi supprimé le numerus clausus et réformé les études médicales pour augmenter le nombre de médecins.
Tous les effets se feront sentir dans le temps. Il fallait donc aussi prendre des mesures d'urgence. Les annonces de ce matin répondaient à trois objectifs : restaurer l'attractivité de l'hôpital public et redonner aux professionnels l'envie de s'y engager ; améliorer le fonctionnement de l'hôpital et faciliter le travail des professionnels ; redonner à l'hôpital des moyens considérables, immédiatement et dans la durée, en augmentant les budgets et en reprenant une partie de la dette. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Mme Laurence Cohen. - Ce n'est pas assez !
Engagement et proximité
M. Éric Jeansannetas . - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE) Le Congrès des maires s'est ouvert hier, alors que l'Assemblée nationale examine le texte sur l'engagement dans la vie locale et la proximité de l'action publique, adopté à l'unanimité moins 2 voix par le Sénat. Il vise à remettre les maires au centre de la gouvernance locale. Seul un maire sur deux a l'intention de se représenter en 2020. Or ils sont la quintessence de la vie démocratique et le coeur battant de la République. Le président de la République a rappelé hier leur rôle central.
Nous avons pris connaissance avec circonspection - le terme est faible - du texte de la commission des lois de l'Assemblée nationale : il est en recul par rapport à nos votes, sur la compétence eau et assainissement, sur l'assouplissement des intercommunalités, sur l'indemnité des élus, la territorialisation des compétences facultatives des EPCI... Le Sénat avait introduit de la souplesse dans la gouvernance des collectivités. Il s'agissait de répondre au sentiment de dépossession des élus face à la complexité normative. Comment voyez-vous la convergence entre les deux assemblées pour dégager un compromis ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Sébastien Lecornu a construit ce projet de loi avec l'ensemble des élus.
M. Éric Bocquet. - Pas tous !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Le texte a été voté à l'unanimité au Sénat. Mais les députés sont des parlementaires au même titre que vous. (On ironise sur les travées du groupe Les Républicains : « Ils sont aux ordres ! ».) Ce n'est pas ici que l'on va remettre en cause les vertus du bicamérisme ! (M. Martin Lévrier le confirme.)
Prenons des exemples, monsieur le député (Rires et exclamations sur les travées du groupe Les Républicains), pardon, monsieur le sénateur ! Prenons des exemples de compromis possibles.
L'Assemblée nationale conserve l'idée du Sénat sur les compétences facultatives, ce que Mathieu Darnaud appelait « l'intercommunalité à la carte ». Les députés ont respecté le texte, en le précisant.
Nous reprenons aussi l'amendement de M. Darnaud sur les indemnités. Sur l'assainissement, nous assouplissons encore la compétence des communes dont nous avons déjà décalé le transfert de 2022 à 2026. Cela prouve que nous avons entendu le Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Mesures en faveur des hôpitaux (II)
M. Guillaume Gontard . - Monsieur le Premier ministre, depuis des mois que couve la crise de l'hôpital, on aurait pu imaginer que le Gouvernement aurait associé le Parlement à la réforme de l'hôpital et privilégié la concertation avec les partenaires sociaux. Votre mépris des parlementaires et des corps intermédiaires nous heurte. C'est la même méthode qu'il y a un an face à la crise des gilets jaunes. Vous avez minimisé les problèmes et louvoyé pendant huit mois de mouvements sociaux. Vous ne réagissez qu'à la colère sociale provoquée par votre violence néolibérale.
Vous reprenez une partie de la dette des hôpitaux. Rappelons que les règles européennes obligent les hôpitaux à se financer auprès d'opérateurs privés - une aberration. Ce que vous accordez à certaines catégories de personnel sous forme de primes, vous le reprendrez avec la réforme des retraites. Et sur l'augmentation des salaires, les ouvertures de lits, les embauches, les internes, il n'y a rien !
Monsieur le Premier ministre, merci de préciser les autres mesures que vous envisagez pour résoudre la crise hospitalière. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SOCR)
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé . - La situation des hôpitaux est un héritage. (Protestations à gauche et à droite)
Les mesures annoncées ce matin sont concrètes, issues d'une longue expérience du terrain, concertées avec les professionnels, les présidents d'hôpitaux, les syndicats. Nous renforçons les moyens, accordons des primes, dégageons 1,5 milliard d'euros sur trois ans pour recruter, moderniser, ouvrir des lits.
Nous allons aussi reprendre un tiers de la dette des hôpitaux, soit 10 milliards d'euros.
Enfin, les tarifs facturés à l'assurance maladie ne baisseront plus - comme jusqu'en 2018 - mais augmenteront pendant trois ans et seront revus à la hausse chaque fois que la lutte contre les actes inutiles apportera des économies. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
M. Guillaume Gontard. - Cessez de parler d'héritage. Nos concitoyens attendent des actes, pas des propos ! L'hiver social arrive, il sera rude. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; Mme Martine Filleul et M. Martial Bourquin applaudissent également.)
Devenir des impôts locaux
M. Alain Duran . - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Répondant sans doute à une idée soufflée par le Medef, le Gouvernement souhaite réformer les impôts de production, cotisation foncière des entreprises (CFE) et contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui représentent respectivement 7 milliards d'euros et 18 milliards d'euros de ressources pour les collectivités territoriales.
Après la suppression de la taxe professionnelle, après le tour de passe-passe de la taxe d'habitation, vous continuez à détricoter la décentralisation. Ce faisant, vous risquez de réduire les services aux usagers et de menacer l'autonomie des collectivités territoriales. Les élus locaux oeuvrent pourtant jour après jour pour le développement des villages, des régions, des départements, et pour construire une République des territoires plus juste.
Au moment où la République a besoin de se rassembler, vous la mettez en danger ! Vous démolissez la fiscalité locale en mettant la CFE et la CVAE dans le viseur.
M. Roland Courteau. - Très bien !
M. Alain Duran. - Les maires sont actuellement réunis. Pouvez-vous leur affirmer que la petite musique d'une baisse de la CFE et de la CVAE va cesser ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics . - Je garantis que la suppression de la taxe d'habitation, mesure de pouvoir d'achat, sera intégralement compensée par des recettes fiscales dynamiques et pérennes, et à l'euro près. Nous ne ferons pas la même erreur que lors de la suppression de la taxe professionnelle, et les collectivités territoriales ne seront pas en butte avec des dotations de compensation diminuant au fil des ans.
Quant à la fiscalité des entreprises, les impôts de production ne sont pas seuls à être lourds et inefficaces. Je pense à la C3S par exemple, visée par le Conseil d'analyse économique. Les barèmes de CFE sont-ils satisfaisants ? J'ai le sentiment que non. La recette de la CVAE est-elle prévisible pour les élus locaux ? Pas toujours. Nous poursuivons notre travail de sincérisation de la fiscalité locale, pour constituer un panier fiscal stable, juste et durable pour les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Scolarisation des enfants handicapés
Mme Colette Mélot . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants) Nous célébrons le trentième anniversaire de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE) signée par 191 pays dont la France. Cette journée est aussi marquée par la mobilisation nationale des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH). Ils sont au nombre de 90 000. La loi sur l'école de la confiance a mis en avant l'école inclusive. Le nombre des enfants handicapés scolarisés est en augmentation de plus de 40 000 depuis deux ans, soit 361 500 élèves accueillis à la rentrée 2019. Cependant, leur scolarisation demeure un défi quotidien pour leurs familles. De fait, 11 000 d'entre eux ne peuvent pas bénéficier d'accompagnants, faute de moyens. Le Gouvernement a fait de ce sujet une priorité du quinquennat et se donne trois ans pour améliorer la situation. Quelles réponses envisagez-vous pour les familles de ces 11 000 élèves, et pour améliorer le statut des AESH ?
M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse . - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Blanquer, actuellement au Congrès des maires. Il ne manquera pas d'y parler de l'école inclusive, sujet qui est au coeur des préoccupations des Français. Le Gouvernement rattrape un lourd retard en la matière. Les besoins restent importants, mais nous avançons à pas de géant : 40 000 élèves supplémentaires en situation de handicap scolarisés à la rentrée 2019, 4 500 recrutements pour les accompagnants, 300 créations d'unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS). Il reste à ce jour non plus 11 000 mais 8 000 élèves non accompagnés, soit deux fois moins que l'an dernier à la même époque. Nous avons renforcé les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) par des professionnels formés pour mieux traiter les dossiers. Nous avons aussi prévu des moyens supplémentaires pour les AESH en leur offrant des contrats plus robustes que les contrats aidés, c'est-à-dire des CDD de trois ans et des CDI : 80 % des AESH en bénéficient déjà. Nous avons l'intention de parvenir à 100 % d'ici la fin du quinquennat. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Mme Colette Mélot. - Le sujet est sensible. Beaucoup de familles sont dans la détresse et attendent des solutions rapides.
Décentralisation
M. Philippe Bas . - (Applaudissements nourris sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC) Hier le président de la République a été reçu par les maires dans le meilleur esprit républicain. Il a rendu hommage aux maires - le contraire aurait surpris...
Il a pourtant laissé le chantier de l'acte III de la décentralisation en jachère, sans rien annoncer. Des nuages s'accumulent sur les libertés locales : la recentralisation est en marche, qui place les communes sous la coupe de l'État.
L'autonomie financière recule, les dotations s'érodent, les subventions à discrétion du préfet se substituent à la dotation d'investissement libre d'emploi ; avec le contrat de Cahors, l'État s'immisce dans la libre administration des collectivités. Rien n'est fait pour rééquilibrer les relations entre communes et intercommunalités, ni pour faire obstacle au communautarisme. Sur ce point, on sait ce que ne veut pas le président de la République, mais on ne sait toujours pas ce qu'il veut.
Monsieur le Premier ministre, allez-vous prendre conscience de ces menaces d'asphyxie qui pèsent sur la démocratie locale ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Édouard Philippe, Premier ministre . - Monsieur le président Bas, votre tableau est bien noir... mais le contraire aurait surpris ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe LaREM) Permettez-moi de faire référence à ma faible expérience de maire. Quelques semaines après les élections municipales de 2014, il fut question d'une diminution drastique et pluriannuelle des dotations.
Sur la durée du mandat municipal qui s'achèvera en mars prochain, on distingue bien, du reste, une première période de trois ans marquée par la baisse des dotations, par des modifications brutales du périmètre des intercommunalités, et par de multiples mesures bouleversant l'action quotidienne des maires. Puis, seconde période, cette baisse s'est arrêtée. (On le conteste bruyamment à droite.) Nous avons pour notre part choisi de nous garder de tout big bang périmétrique pour remodifier les compétences - les modifications, rappelons-le, ont parfois été adoptées en CMP... - et nous avons fait le choix de laisser les collectivités territoriales assimiler les réformes d'avant 2017.
La taxe d'habitation est compensée par une recette fiscale, dynamique, pérenne. Lorsque l'on a supprimé la taxe professionnelle, sous le quinquennat qui précédait le quinquennat précédent...
M. Pierre-Yves Collombat. - Qui l'a fait ?
M. Édouard Philippe, Premier ministre. - ... il aurait été souhaitable de procéder pareillement : les maires et les intercommunalités s'en seraient trouvés mieux.
Le président de la République, monsieur le président Bas, a fait le choix de la stabilité et de la confiance. C'est le président de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) lui-même qui a proposé d'attendre les prochaines municipales pour aller plus loin. Nous travaillons justement sur un projet de loi de différenciation sans précédent.
Voyez ce que nous avons fait avec l'Alsace, avec le concours du Sénat : écoute des territoires, différenciation. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM ; M. Benoît Huré applaudit également.)
M. Jacques Grosperrin. - Vous n'avez pas écouté la Moselle, en tout cas !
M. Philippe Bas. - Je vous l'accorde, monsieur le Premier ministre : il y a eu pire que votre Gouvernement. (Sourires) Mais les maires ne sont pas des faire-valoir et ils n'ont que faire des flatteries. Il est plus que temps de faire cesser la recentralisation. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; Mme Nathalie Delattre applaudit également.)
Mesures en faveur des hôpitaux (III)
M. Alain Milon . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ma question s'adresse, non pas à la ministre de la Santé et des Solidarités, mais directement au Premier ministre, car la semaine dernière, alors que Mme Buzyn siégeait au banc du Gouvernement, lors de l'examen du PLFSS par le Sénat, le président de la République a fait savoir que les réformes de l'hôpital seraient annoncées par la Premier ministre lui-même. C'est désormais chose faite.
Hélas, monsieur le Premier ministre, ce matin, vous ne nous avez pas convaincus : au lieu du plan de sauvetage, très attendu par les professionnels de santé, nous n'avons eu que du rafistolage. Les revalorisations se sont transformées en primes ponctuelles, soumises à conditions, et les 300 millions d'euros de plus annoncés pour 2020 sont à remettre en perspective avec les 800 millions d'euros de déficit annuel des hôpitaux, dont, faute de leur donner les moyens de fonctionner, vous n'allégez la dette que d'un tiers.
Après le plan « Ma Santé 2022 » que vous avez présenté il y a quatorze mois, et le plan Urgences il y a six mois, et qui n'ont pas atteint leurs objectifs, il est à craindre que vos dernières annonces ne subissent le même sort.
Pourquoi le Gouvernement n'a-t-il pas été plus ambitieux, pour réformer plus en profondeur l'hôpital ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Anne-Catherine Loisier et Élisabeth Doineau applaudissent également.)
M. Édouard Philippe, Premier ministre . - Les professionnels de l'hôpital public ont un sentiment d'abandon après dix années d'économies et de régulations budgétaires terribles, de réformes insatisfaisantes, de transformation de la gouvernance, les médecins étant éloignés de celle-ci, de réforme profonde de l'organisation territoriale, et ajoutez à tout cela les 35 heures ! (Protestations à gauche) Bref, l'hôpital public est proche du décrochage ; il faut lui redonner de l'oxygène.
Les manifestants ou les corps intermédiaires, que nous prenons en considération, tout autant que vous, monsieur le président Milon, ne rejettent pas les mesures prises dans le cadre de « Ma Santé 2022 », ils y adhèrent, mais rappellent qu'elles mettront du temps à porter leurs fruits. Or il y a urgence.
Pour cette raison, nous agissons avec 1,5 milliard d'euros d'argent frais sur trois ans et 150 millions d'euros par an pendant trois ans. Ce n'est pas rien ! L'investissement public avait en effet été divisé par deux en dix ans, tandis que leur endettement a augmenté de 40 %. Comment pouvaient-ils faire face aux enjeux ? Nous reprenons un tiers de la dette accumulée, ce qui redonne des marges de manoeuvre, de l'ordre de 800 millions d'euros. C'est évidemment considérable !
Ces mesures permettront aux hôpitaux d'investir à nouveau, de façon pérenne.
Par ailleurs, les métiers seront revalorisés et les chefs de service seront en capacité de mener leurs propres projets. Il ne s'agit pas de décisions centralisées, et cela est assez rare pour être souligné. Je tiens à féliciter Mme Buzyn (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM) : le travail qu'elle a engagé avec les fédérations et les nombreux interlocuteurs que nous avons consultés a permis de bâtir, ce bon plan, ce vrai plan pour l'hôpital. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
M. Alain Milon. - Je n'ai pas cinq minutes pour vous répondre ! Je suis d'accord avec vous sur l'effet négatif des 35 heures...
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Non !
M. Alain Milon. - La crise de l'hôpital a été aggravée par la loi HPST que vous aviez votée, en tant que député. Il faut aller plus loin dans l'autonomie de l'hôpital, améliorer sa gouvernance, redonner le pouvoir à ceux qui soignent - pourquoi ne pas remplacer le conseil de surveillance par un conseil d'administration ? -, revaloriser les salaires des catégories de personnel les moins bien payées et associer les collectivités territoriales, pour se rapprocher des besoins de terrain. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Journée des droits des enfants
Mme Annie Guillemot . - Ce 20 novembre, nous célébrons le trentième anniversaire de la CIDE, alors que de nombreux droits de l'enfant continuent d'être bafoués. Je salue tous ceux qui s'investissent au quotidien dans cette cause, l'Unicef, les associations, les maires des villes « amis des enfants » comme ma ville de Bron.
Pas moins d'1,8 million d'enfants sont considérés comme pauvres en France, dont 17 % ont moins de 10 ans, 600 000 vivent dans des conditions indignes et 155 000 sont victimes de violences sexuelles. Un enfant meurt des violences intrafamiliales tous les cinq jours selon le Défenseur des droits, des violences existent aussi dans des institutions publiques. En effet, leur fonctionnement même est susceptible d'induire ou d'amplifier les violences entre les enfants dont elles ont la charge.
Quelles décisions concrètes compte prendre le Gouvernement pour améliorer la situation ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - Je salue les membres de la fondation Action enfance qui assistent au débat dans les tribunes. (Applaudissements), ainsi que le travail réalisé par l'Unicef et les associations.
Le Gouvernement n'a pas attendu ce trentième anniversaire, ni ma nomination, pour oeuvrer en faveur des droits des enfants. Quand Jean-Michel Blanquer porte la scolarisation obligatoire à 3 ans ou quand Agnès Buzyn prévoit les onze vaccins obligatoires, quand Sophie Cluzel agit pour l'école inclusive, ou pour le repérage précoce des troubles du spectre de l'autisme, quand Mme Belloubet travaille à la réforme de l'ordonnance de 1945, ils oeuvrent évidemment pour le bien-être des enfants et pour le respect de leurs droits, à commencer par le premier : le droit à la sécurité.
Pour autant, le droit à la sécurité affective doit également être pris en compte. Les chiffres que vous avez rappelés sont inadmissibles. D'où le plan de 22 mesures pour garantir la sécurité des enfants, que nous avons mis en place et que le président de la République a présenté à l'Unesco ce matin, pour lutter contre les violences faites aux enfants, et notamment garantir à tous les enfants qu'aucune grande personne à leur contact n'ait pu être l'auteur d'actes pédocriminels. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
Mme Annie Guillemot. - Oui, mais, en 2018, plus de 800 enfants sont mis en prison à Mayotte, et 208 enfants placés en rétention en Métropole. Il faut passer de la convention aux actes - avec un objectif de zéro enfant dans la rue d'ici 2022 ! (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)
Réforme des retraites
M. René-Paul Savary . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Selon le président de la République, pour qu'une réforme des retraites soit possible en 2025, il faut équilibrer le système. On ne peut pas laisser filer le déficit. Le rapport cotisant-pensionné est défavorable. Si le déficit est entre 8 et 10 milliards d'euros, eh bien, il faut dire qu'il faudra travailler davantage. Le rapport du Conseil d'orientation des retraites (COR) le chiffre de 8 à 17 milliards d'euros. C'est au pied du mur qu'on voit le maçon !
Que proposez-vous pour équilibrer le système ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire aux retraites, délégué auprès de la ministre des solidarités et de la santé. - Je m'adresse à vous en tant que rapporteur du projet de loi sur les retraites et membre du COR. Je salue le président Milon et le rapporteur général Vanlerenberghe, et remercie le Sénat pour toutes les contributions en vue de trouver un juste système entre jeunes actifs et retraités. (Murmures sur les travées du groupe les Républicains)
Le conseil d'administration du COR se réunit demain, je suppose que votre intervention s'inscrit dans ce cadre.
Demain, le président du COR remettra en effet son rapport au Premier ministre qui réunira les 25 et 26 novembre toutes les organisations syndicales pour leur demander concrètement, conformément à sa commande du 19 septembre dernier, quel est l'état réel du déficit du système des retraites.
Pendant la campagne présidentielle, il y a eu des estimations curieuses, tel ce raisonnement, de nature à semer le trouble, selon lequel, plus on baisserait le nombre de fonctionnaires, plus on aurait un système déficitaire...
Nous respecterons l'engagement que nous avons pris pour un système de répartition dont le plafond sera le plus élevé des pays développés. Nous voulons assumer de ne pas faire peser sur les jeunes un déficit qu'ils n'ont pas causé. Nous voulons un système juste, équilibré, solide, fondé sur une base de zéro déficit. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM ; M. Jean-Marie Bockel applaudit aussi.)
M. René-Paul Savary. - C'est votre réponse, mais ce n'est pas ma question : comment résorber le déficit ? (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains)
Soit nous baissons les pensions, soit nous augmentons les cotisations, soit l'on travaille plus longtemps... Dans un système à points, vous introduisez un nouveau critère : la valeur du point. Plus celle-ci est basse, plus les retraites seront basses. Si le système n'est pas équilibré, au lieu d'avoir des gagnants et des perdants, il n'y aura que des perdants.
Il est grand temps, pour rétablir la confiance, de dire la vérité aux gens. À vouloir trop changer, parfois on ne change rien... (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Alcool au volant « tolérance zéro » et convivialité rurale
M. Michel Canevet . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Nous sommes tous attachés à la France rurale, à ses produits du terroir, solides... et liquides ! (Marques d'approbation et sourires sur plusieurs travées, particulièrement celles du groupe Les Républicains). Oui, nos territoires sont reconnus pour la qualité de leur gastronomie et de leurs productions, notamment viticoles. Vins de côtes du Rhône, du Bordelais, de Bourgogne, pastis de Marseille, cidre de Bretagne (L'énumération est ponctuée d'exclamations et de marques d'appréciation sur diverses travées, en particulier au centre et à droite.)
Mme Françoise Gatel. - Très bien !
M. Michel Canevet. - Beaucoup de nos concitoyens ont donc été étonnés d'entendre, dimanche, le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, prôner la tolérance zéro pour la consommation de boissons et la conduite. (Murmures sur les travées du groupe SOCR) Alors que l'arsenal répressif est déjà extrêmement fort, veut-on pénaliser davantage les territoires ruraux après la limitation de vitesse à 80 km/heure sur les axes secondaires ? (Les murmures vont s'amplifiant.) Nous apprécions tous les boissons, en les consommant avec modération... Quelle est la position du Gouvernement ? (Applaudissements sur la plupart des travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur . - (Marques de protestation à droite) Vous avez raison quant à la richesse de notre gastronomie et la qualité des produits de nos terroirs. Mais le pastis de Forcalquier est bien meilleur que celui de Marseille... (Exclamations et sourires) Mais il s'agit ici de lutter contre l'insécurité routière. Plusieurs mesures ont été mises en place parmi celles qui ont été préconisées pour lutter contre l'alcoolémie lors du comité interministériel sur la sécurité routière du 9 janvier 2019. Il ne s'agit pas d'interdire de boire ! (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) Il n'est pour autant pas question de revenir sur le taux légal d'alcoolémie au volant et de l'abaisser à zéro gramme. (Marques de satisfaction sur les mêmes travées)
Il n'est pas sain de boire avant de prendre le volant. Le ministre de l'Agriculture a juste voulu rappeler qu'il fallait se protéger soi-même et les autres. Il s'agit d'être pragmatique : peu d'accidents mortels concernent des doses d'alcool comprises entre 0 et 0,5 gramme par litre de sang. Dans la plupart des accidents mortels, des taux de 1,5 gramme et plus sont constatés. Autant utiliser nos forces de l'ordre, mobilisées pour assurer la sécurité des Français, à d'autres causes que de multiplier les contrôles aléatoires et peu efficaces. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM, ainsi que sur plusieurs travées du groupe UC)
M. Michel Canevet. - Merci pour votre réponse rassurante pour les populations des territoires ruraux, qui n'ont souvent d'autre choix que de prendre le volant pour se déplacer. En matière de sociabilité, il est important de continuer à fréquenter les débits de boissons et à déjeuner chez des amis ou des parents, sans avoir à craindre quoi que ce soit. (Applaudissements sur la plupart des travées des groupes UC et Les Républicains)
Attractivité industrielle de la France
M. Philippe Dominati . - À Bercy, on sait, quand il le faut, être pragmatique, comme on l'a vu à propos de la fusion Fiat-PSA. L'État actionnaire a choisi le siège social d'Amsterdam, comme il le fit naguère pour la fusion entre Renault et Nissan, ou Airbus. On peut certes être séduit par la fiscalité sur les sociétés, mais aussi la stabilité fiscale des Pays-Bas, bien sûr.
Le patron de Tesla a choisi Berlin pour implanter son usine en Europe...
M. Jean-Yves Roux. - Berlin est en Europe !
M. Philippe Dominati. - Il aurait pu penser, par exemple, à Saclay, qui dispose aussi de bons ingénieurs. Son choix a été notamment guidé par la nécessité d'aller vite. Cette implantation représente 4 milliards d'euros et entre 5 000 et 8 000 emplois. Un fabricant japonais a aussi réalisé à Berlin un investissement de 2 milliards d'euros. Qui à Bercy est en charge de l'attractivité de la France et de ces dossiers industriels ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Vous avez raison, (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains) qu'il s'agisse de l'investissement dans une usine de batteries électriques ou de celui de Tesla, c'est l'attractivité de la France qui est en jeu. Nous menons donc une politique ambitieuse en la matière.
M. Albéric de Montgolfier. - Et l'impôt sur les sociétés que vous deviez baisser ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - En termes d'attractivité et de recherche et développement (R et D), revenons aux chiffres ! En 2018, Ernest et Young estimait que la France accueillait 330 projets industriels, contre 200 pour la Turquie (M. Pierre-Yves Collombat s'exclame.) et 150 pour l'Allemagne.
Quant à la R et D, la France accueille autant de sites que l'Allemagne et le Royaume-Uni réunis...
M. Martin Lévrier. - Très bien !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - La politique d'attractivité que nous menons depuis deux ans est efficace, pour permettre aux étrangers, mais aussi aux Français, d'investir en France (M. François Patriat applaudit.) : politique fiscale sur la taxation du capital ; développement de la formation, car l'obstacle principal tient aux difficultés de recrutement, et simplification, dans le cadre du pacte de production, en sont les aspects principaux. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
M. Philippe Dominati. - Bercy était sans doute trop occupé à reporter la baisse de l'impôt sur les sociétés, à établir la taxe sur les billets d'avions ou à concocter une taxe sur les bureaux. L'attractivité de la région capitale n'est manifestement pas sa priorité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques travées du groupe UC)
PAC
M. Joël Labbé . - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE) Monsieur le ministre de l'agriculture (« Ah ! » à droite), lors du dernier comité État-régions, vous vous êtes opposé à une augmentation du transfert actuel de 7,5 % du premier vers le deuxième pilier de la PAC, pour 2020.
Or cette mue, nécessaire pour la conversion au bio, est déjà insuffisante : les régions ont déjà consommé la totalité de l'enveloppe des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC), et réservent les aides à la conversion bio aux seuls jeunes agriculteurs.
Comment répondre dans ces conditions aux demandes des agriculteurs et des citoyens pour assurer la transition écologique dans les territoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Il vous reste une minute quatre secondes pour une réplique déjà écrite. (Protestations, principalement sur les travées du groupe Les Républicains et marques d'indignation sur plusieurs autres travées)
Le risque que vous évoquez n'existe pas. Le prélèvement de 7,53 % entre le premier et le deuxième pilier a suffi en 2019 et nous avons autorisé les régions à faire de la surprogrammation en 2020. Le budget est suffisant. Les MAEC seront financées.
Oui, c'est un choix : nous avons privilégié les aides aux jeunes agriculteurs, sur la base de leurs propositions. On ne peut pas travailler en l'air. Quasiment toutes les régions pourront ainsi aller au bout des aides aux MAEC et dans le bio. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)
M. Joël Labbé. - C'est insuffisant ! Votre réponse aurait pu m'énerver auparavant. (Sourires)
M. Jean Bizet. - Il s'améliore !
M. Joël Labbé. - Cela se joue, il est vrai, au-dessus du ministre de l'Agriculture, au niveau du Premier ministre. Monsieur le Premier ministre, vous êtes à l'écoute du modèle agricole, en grande pauvreté et désespérance. Il y a des alternatives, donnons-nous les moyens !
Il est hors de question de sortir du glyphosate selon vous, d'imposer des zones de non-traitement. Écoutez-donc tous les sons de cloches agricoles, pas seulement une seule ! (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR et sur quelques travées du groupe CRCE ; Mme Françoise Laborde applaudit également.)
Conséquences des intempéries dans la Drôme
Mme Marie-Pierre Monier . - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) J'associe mes deux collègues drômois, Gilbert Bouchet et Bernard Buis, à cette question. Les chutes de neige de jeudi ont provoqué une situation inédite. Dans la Drôme, 88 000 foyers ont été privés d'électricité ; hier ils étaient encore plusieurs milliers. Plus d'électricité, cela signifie plus de chauffage et d'eau chaude, et parfois plus de communications.
En automne, des arbres portent encore leurs feuilles et ont supporté des chutes abondantes de neige lourde. Lorsqu'ils tombent sur les installations électriques, ils font d'autant plus de dégâts. Je rends d'ailleurs hommage aux agents d'Enedis, intervenus aussi vite qu'ils le pouvaient, et salue surtout le dévouement des maires et élus locaux, restés sur le pont jour et nuit, mobilisés depuis six jours : épuisés, ils se sentent bien seuls.
À ce jour, 7 000 foyers n'ont pas encore vu leur électricité rétablie.
Les plus modestes sont d'autant plus touchés et en danger. Que compte faire le Gouvernement pour rétablir l'électricité dans les foyers ? Comment sécuriser les réseaux électriques pour l'avenir et éviter qu'une telle situation ne se reproduise ? Quelle indemnisation pour ces foyers ? Ne faudrait-il pas une reconnaissance de catastrophe naturelle ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire . - C'est effectivement un épisode très difficile dans le Sud-Est depuis la fin de la semaine dernière. Je me suis rendue dans la Drôme vendredi. Je salue l'action des équipes de secours et des agents d'Enedis. Vous avez rappelé les conditions météo particulières.
Les hélicoptères n'ont pas pu décoller, faute de visibilité. 330 000 foyers avaient été privés d'électricité ; ils étaient 30 000 à la fin du week-end. Il reste encore 7 000 foyers coupés et quelques-uns dans l'Ardèche (M. Jacques Genest proteste.). Des groupes électrogènes ont été mis à disposition, même s'ils sont à utiliser avec précaution - nous avons déploré un accident en Isère. Des centres d'hébergement ont été ouverts, notamment dans la Drôme et 2 300 agents d'Enedis ont été mobilisés jour et nuit. Pour l'avenir, Enedis continue ses travaux d'enterrement des lignes du réseau : 18 000 kilomètres de lignes sont couverts chaque année. Actuellement, la moitié du réseau est enterré.
Enfin, s'agissant de l'indemnisation, les assurances seront mises à contribution au titre des chutes de neige et de grêle. Il n'y a pas besoin de décréter l'état de catastrophe naturelle. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM ; M. Gilbert Bouchet proteste.)
Finances locales
Mme Laure Darcos . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le président de la République aime les élus - il n'a cessé de le répéter hier ! Votre Gouvernement a cependant la fâcheuse habitude de s'immiscer dans les finances locales. Par exemple, en supprimant la taxe d'habitation, vous supprimez un impôt qui ne vous appartient pas, comme l'a justement rappelé François Baroin hier au président de la République.
Vous prévoyez que 75 millions d'euros seront retirés en 2020 à la Société du Grand Paris pour financer la politique des transports de l'État. Coût pour mon département : plus de 3 millions d'euros, alors même que l'Essonne pâtit d'infrastructures de transports surchargées et vieillissantes.
Non content d'avoir reporté la construction de la ligne 18 qui devait dynamiser le Plateau de Saclay des Yvelines jusqu'en Essonne, ou le Charles de Gaulle Express qui devait faciliter l'accès au village olympique en Seine-Saint-Denis, l'État nous ponctionne a posteriori pour sa mauvaise gestion !
Il est toujours mieux d'assumer ses compétences, donc ses responsabilités et le financement qui va de pair ! Et cela n'est pas qu'un problème francilien !
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. - C'est sûr.
Mme Laure Darcos. - Quand cesserez-vous de dévitaliser ainsi les collectivités, au mépris des élus et des populations que nous servons ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Ladislas Poniatowski. - Très bien !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics . - Les impôts n'appartiennent ni aux collectivités ni à l'État ; ils sont payés par les contribuables. (Exclamations à droite) Nous avons retenu deux solutions pour financer les travaux d'infrastructures de la Société du Grand Paris ; l'une, issue du rapport parlementaire, consiste à moduler la taxe sur les bureaux ; l'autre, revient en effet à y affecter une partie de la DMTO des départements de la petite couronne.
Vous auriez pu nuancer vos propos mais il faut relativiser cette fonction.
Le Gouvernement a fait le choix de la stabilité pour les dotations de fonctionnement, et les concours de l'État aux collectivités vont même passer dans le budget que vous allez examiner, de 48,3 milliards d'euros à 49,1 milliards d'euros, après 11 milliards d'euros de baisse entre 2014 et 2017. (M. Philippe Dallier le conteste.)
Dans le cadre de cette stabilité, l'État maintient ses moyens consacrés au soutien à l'investissement des collectivités locales, soit au total, 9 milliards d'euros. Enfin, nous renforçons notre solidarité envers les collectivités, les dotations de péréquation progressant au même niveau que l'année précédente : c'est la stabilité, donc la lisibilité, de la DSU et de la DSR. C'est ainsi que nous construisons le contrat de confiance avec les collectivités locales. (Applaudissements sur les travées du groupe laREM)
Mme Laure Darcos. - L'État ne peut pas payer ses dettes en prenant l'argent des collectivités. À mesure unilatérale, on risque d'avoir une réponse unilatérale et pourquoi pas un gel des cofinancements dans les territoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
La séance est suspendue à 16h20.
présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente
La séance reprend à 16 h 35.