Croissance et transformation des entreprises (Procédure accélérée - Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public solennel sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la croissance et la transformation des entreprises.
Explications de vote
M. Richard Yung . - Cette loi a pour objectif d'aider les entreprises - et, surtout les PME et TPE, qui sont, comme chacun le sait, les maillons faibles de l'économie française - à se développer en simplifiant leurs vies administrative, fiscale et financière et en encourageant leur vocation sociale, conformément aux recommandations du rapport Notat.
Trois mois de débats préalables, un mois de consultation en ligne, débats à l'Assemblée nationale et au Sénat, examen de près de 1 000 amendements par notre assemblée, le travail a été sérieux et approfondi. Pas moins de 47 articles ont été adoptés conformes : sur le régime des VIE, sur les experts-comptables, l'agrément des entreprises solidaires d'utilité sociale, la procédure d'opposition aux brevets ou encore la représentation des femmes dans les fonctions exécutives des sociétés.
Moins bien, 43 articles ont été supprimés : sur la réforme de la gouvernance de Business France, la limitation à trois du nombre de mandats comme président de chambre de commerce et d'industrie, l'assouplissement du prêt interentreprises, la suppression de la délégation à la sécurité économique demandée unanimement par l'Assemblée nationale.
Le texte s'est enrichi de 47 articles nouveaux qui concernent l'adaptation de certaines interdictions d'usage du plastique et de certains produits phytosanitaires, l'ouverture des commerces de détail alimentaire le dimanche ou encore le réseau des chambres de commerce et d'industrie.
Des points de divergence subsistent avec l'Assemblée nationale : sur la suppression du stage préalable d'installation pour les artisans, la gouvernance de Business France, le relèvement de deux seuils sociaux... Ce sont des signaux négatifs envoyés par le Sénat au monde du travail. (On proteste sur les bancs du groupe Les Républicains.) Vous verrez, on vous demandera pourquoi vous avez voté cela !
S'agissant d'Aéroports de Paris, le Sénat a rayé d'un trait de plume les améliorations apportées par le rapporteur sur le cahier des charges et la régulation. (Nouvelles protestations sur les bancs du groupe Les Républicains)
La majorité ayant supprimé l'article 44 était pour le moins hétéroclite...
M. Bruno Sido. - Et alors ?
M. Bernard Jomier. - C'était l'intérêt général !
M. Charles Revet. - C'est la preuve que c'était bien !
M. Richard Yung. - Vous ne faites pas de politique, moi oui !
M. François Grosdidier. - Ce n'est pas de la politique, c'est de l'idéologie !
M. Richard Yung. - Rien ne sert de crier ! Cent vingt-quatre sénateurs Les Républicains, vingt RDSE, soixante-quatorze socialistes, seize CRCE, c'était l'Arche de Noé. (Huées sur les bancs des groupes Les Républicains, SOCR et CRCE)
M. le président. - Revenons à bord.... (Sourires)
M. Richard Yung. - Dans ces conditions, il me semble difficile d'arriver à un accord avec l'Assemblée nationale.
M. Rachid Temal. - Avec le groupe En Marche ! (M. Martin Lévrier applaudit ; quelques huées à droite.)
M. Richard Yung. - Nous n'avons toujours pas compris votre position sur la Française des Jeux.
M. Philippe Dallier. - Pas grave !
M. Richard Yung. - Je doute que cet hémicycle, sur ses deux bords, soit prêt à faire des compromis. Je le regrette profondément car ce texte comporte de nombreuses avancées pour les entreprises. Tel qu'il ressort des travaux du Sénat, le groupe LaREM ne peut pas le voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
M. Fabien Gay . - (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Ce projet de loi de plus de 200 articles aurait pu être découpé en au moins 10 projets de loi, comme l'ont prouvé les nombreuses interventions sur les articles. Il y en a même une sur la privatisation d'ADP qui nous a donné le sentiment d'assister à un meeting macronien.
Nous, nous nous réjouissons que le bradage du monopole naturel qu'est ADP ait subi un temps d'arrêt et qu'une majorité d'idées se soit constituée pour le refuser. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; MM. Bruno Sido, René Danesi et Sébastien Meurant applaudissent également.) Nous avons défendu l'intérêt général. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs des groupes SOCR et Les Républicains) Oui, en France tout n'est pas à vendre, surtout pour aller engraisser quelques multinationales comme Vinci. Rendez-vous le 7 mars, chers collègues : nous vous proposerons de renationaliser les autoroutes !
Mme Éliane Assassi. - Eh oui !
Mme Sophie Primas. - Ce sera non !
M. Fabien Gay. - Quant au Gouvernement, puisqu'il réfléchit à un référendum à questions multiples, qu'il sorte les privatisations de ce texte et interroge les Français, sur ce point ainsi que sur l'augmentation des salaires et le rétablissement de l'ISF.
Pour le reste, sous couvert de modernisation, vous détricotez le code du travail. C'est le nouveau western social où régnera la loi du plus fort. Sur plus de 200 articles, pas un seul ne crée de nouveaux droits pour les salariés. Comment comprendre que nos amendements se faisant l'écho de la crise sociale aient été balayés ? Hausse du Smic ? Pas à l'ordre du jour ! Hausse des salaires ? Pas à l'ordre du jour ! Le droit d'intervention des salariés ? Irrecevable ! Le conditionnement du CICE ? Pas de réponse ! L'encadrement des hauts revenus et des dividendes ? Vous n'y pensez pas, nous a-t-on répondu, ce serait instaurer le communisme dans notre pays.
Ce texte sert-il l'intérêt général ou les intérêts privés ? Deux heures de débat pour attirer une centaine de traders londoniens fuyant le Brexit, rien sur les relations entre les donneurs d'ordre et les PME sous-traitantes qui, elles, créent de l'emploi.
Ce texte fera des dégâts économiques considérables, à commencer par la casse des seuils sociaux. Le Medef l'avait rêvé, la droite ne l'avait pas fait, vous l'avez réalisé. (Rires sur les bancs du groupe Les Républicains) C'est d'autant plus dogmatique qu'en 2017, les 47 % d'entreprises interrogées par l'Insee plaçaient les seuils sociaux assez bas dans les freins à l'embauche, loin derrière les incertitudes de la conjoncture.
Dans le prolongement de la loi de financement pour 2019, vous multipliez les exonérations et supprimez quasiment le forfait social. Les cotisations sociales, qui sont là pour protéger le salarié, seraient des « contraintes », des « normes », des « obligations », dont il faudrait libérer les entreprises. Nous devrions pourtant être fiers de notre modèle social, le monde entier nous l'envie. Des salariés bien soignés sont compétitifs !
Enfin, beaucoup d'articles de ce texte tombent à plat. La discussion sur le partage des richesses se limite à l'intéressement et la participation, à une légère refonte de l'épargne retraite alors que Jean-Paul Delevoye mène actuellement la concertation préalable à la mise à mort du système de répartition. Et que dire du statut d'autoentrepreneur, dévoyé par les plateformes comme Uber pour exploiter des jeunes ? Heureusement, le juge est plus rapide que le législateur.
Votre texte, comme les cinq précédents qui touchaient à l'entreprise, ne règlera rien. Écoutez plutôt le pays qui vous dit : partagez le gâteau, partagez le gâteau, partagez le gâteau !
M. Bruno Sido. - Quel gâteau ?
M. Claude Raynal. - Et la cerise ?
M. Fabien Gay. - Comme le dit Gibran Khalil Gibran : « Les fleurs du printemps sont les rêves de l'hiver, racontés le matin à la table des anges ». (On apprécie sur les bancs des groupes CRCE, SOCR et Les Républicains.) Que vienne vite ce printemps pour tous les peuples ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)
M. Martial Bourquin . - Transformer notre économie, louable ambition mais encore faut-il s'entendre sur le diagnostic.
Le Sénat a obtenu la suppression de la privatisation d'ADP et de la Française des jeux (FDJ), c'est l'honneur de la gauche et de la droite de s'entendre pour garder dans le giron de l'État ses pépites. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et Les Républicains) Privatiser ces entreprises, c'est privatiser des rentes.
M. Jean-François Husson, rapporteur. - Vous ne l'avez jamais fait ?
M. Martial Bourquin. - Après l'échec de Notre-Dame-des-Landes, il peut certes y avoir la tentation de faire un cadeau à Vinci, mais ce serait contraire à l'intérêt général, (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; M. Bruno Retailleau applaudit également.) après les ratages stratégiques des autoroutes et de l'aéroport de Toulouse-Blagnac.
Ce texte est une occasion ratée. Le salarié doit être le sujet, non l'objet, de la transformation de nos entreprises.
À l'heure ou la sauvegarde de notre planète est une priorité, l'insuffisance de ce texte en matière de développement durable et les attaques contre l'économie sociale et solidaire sont incompréhensibles. Elles en disent long sur le caractère néo-libéral de ce texte. Vous demandez aux salariés de participer au financement de l'investissement sans prendre de mesures sur les dividendes du CAC 40, vous refusez de limiter les hauts salaires qui mettent à mal notre cohésion nationale.
La désindustrialisation de notre pays se poursuit et le Gouvernement n'a pas de politique industrielle. Et face au Made in China et au « Rendre sa grandeur à l'Amérique », il faut plus que jamais un État stratège ! Que fait l'Allemagne, après l'échec de Kuka ? Elle élargit les possibilités de blocage des acquisitions étrangères dans les entreprises. Nous, nous faisons l'inverse, nous nous désengageons !
Il faut plus que jamais débattre de ces questions et faire des choix. On veut nous imposer le tout-électrique, après le tout-diesel, en condamnant au passage le tiers de nos sites industriels.
Nous voterons contre ce projet de loi. Nous avons une plus haute ambition pour nos entreprises, nous voulons un État stratège omniprésent. De nouvelles régulations doivent s'imposer. Le programme Alstom doit être repris, proposons une solution française !
Les PME-TPE sont les grandes oubliées de ce texte. La mise en cause de l'allotissement, une avancée considérable proposée par l'Europe, est tout un symbole.
Nous sommes heureux d'avoir rejeté la privatisation d'ADP et de la FDJ. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
M. Bruno Sido. - C'est un peu facile !
M. Jean-Marc Gabouty . - Le groupe RDSE a accueilli favorablement ce texte avec quelques réserves. Le champ très large de ce texte compromettait l'émergence d'une ligne directrice claire, les privatisations et les mesures sur la gouvernance de la Cour des comptes et de La Poste auraient dû faire l'objet d'un texte séparé.
Plus de liberté, de simplicité, d'efficacité : les débats ont-ils permis d'approcher ces objectifs ? J'en doute. Le Sénat a apporté des précisions utiles mais sur des points techniques.
La cession et la modification du régime juridique d'ADP, encadrés par la commission spéciale, ont été rejetées par notre assemblée après, il faut le reconnaître, quelques flottements. (M. Jean-Claude Requier le confirme.) Nous ne serons plus là pour faire le bilan de la concession dans 70 ans...
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. - C'est probable ! (Sourires)
M. Jean-Marc Gabouty. - ... sur laquelle le Sénat s'est refusé de peser. La privatisation de la FDJ ayant été évacuée d'emblée par la commission, le Gouvernement se consolera avec la seule validation du retrait de l'État d'Engie. Tout cela est-il cohérent, je n'en suis pas certain ; on peut quand même se retrouver sur l'exonération du loto du patrimoine de toutes contributions ou prélèvements.
Sur les chambres de métiers, les débats ont été confus. Je ne suis pas sûr que le vote reflète réellement l'opinion majoritaire de cette assemblée... (M. Jean-Claude Requier le confirme.) La tendance à la centralisation régionale affaiblit les territoires périphériques sans gain d'efficacité.
Il y a des mesures positives dans le chapitre consacré à rendre les entreprises plus justes. Je regrette que le Sénat et le Gouvernement refusent l'intéressement obligatoire dans les entreprises de plus de dix salariés. Il s'imposera bientôt de lui-même, je suis prêt à le parier.
Le relèvement du seuil de 50 à 100 salariés est apparemment séduisant pour les entreprises. Cette disposition d'affichage, dont ses auteurs savent qu'elle ne sera pas retenue à l'Assemblée, contient quelques effets pervers : définir des mesures spécifiques pour les petites entreprises sera plus difficile, tous les salariés des entreprises de 50 à 100 salariés n'auront plus la garantie de bénéficier de la participation.
Autre regret, le report de 2020 à 2021 de l'application des relèvements des seuils de contrôle légal des comptes de sociétés. Ce n'est pas compréhensible pour les entreprises, reconnaissons que la profession de commissaire aux comptes est bien organisée... (Sourires)
Un excès de conservatisme, un excès de libéralisme, un excès de frilosité et beaucoup de perplexité, la majorité des membres du groupe du RDSE s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ; M. Julien Bargeton applaudit également.)
M. Philippe Adnot . - Ce texte aurait gagné en cohérence avec un périmètre mieux ajusté. Grâce au travail de la commission spéciale et du Sénat, il a été amélioré sur de nombreux points, même si je regrette que certains sujets aient été écartés.
Le point fort du texte est la modification des seuils. Cette bouffée d'oxygène attendue par nos entreprises ne coûtera rien à l'État.
Les chambres consulaires ne voient pas reconnue leur liberté d'organisation ; elles seront incitées à facturer leurs services sans amélioration des prestations. Les entreprises paieront donc deux fois.
Je me réjouis que les privatisations n'aient pas été retenues ; on a vu, avec les autoroutes, les conséquences d'une privatisation mal maîtrisée.
Je regrette de ne pas avoir été suivi sur le brevet de qualité. La France n'a pas vocation à être le réceptacle des brevets de faible intérêt.
Enfin, nous avons été contraints de partir du texte du Gouvernement, non de celui de l'Assemblée nationale, à travers une application excessive de l'article 45 de notre Constitution. Monsieur le président du Sénat, il faudra y revenir car cela met en danger notre assemblée.
Je voterai le texte amendé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)
M. Michel Canevet . - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains) Le groupe UC a abordé ce texte avec enthousiasme, dans un double objectif de liberté et de responsabilité. Je salue le travail de la présidente de la commission spéciale et de mes deux co-rapporteurs, Jean-François Husson et Élisabeth Lamure. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
Le texte poursuit l'objectif d'orienter l'épargne vers les entreprises ; il comporte aussi un volet sur les entreprises plus juste, n'en déplaise à certains... (M. Fabien Gay esquisse un large sourire.) Sous cet aspect, c'est un texte fondateur.
Le projet de loi, sans apporter de contraintes supplémentaires, simplifie la vie des entreprises.
Les chambres consulaires sont très importantes dans l'irrigation du tissu économique territorial ; elles aident les entrepreneurs à créer des réseaux et sont aussi parfois un rempart protégeant les petits contre les gros, tentés de tout régenter.
Le groupe UC regrette, dans sa majorité, le refus de la privatisation d'ADP. Nous ne sommes pas dans une économie administrée. (Marques de lassitude sur les bancs du groupe CRCE) N'oublions pas la concurrence internationale. La privatisation aurait rendu ADP plus compétitif.
Mme Éliane Assassi. - Il l'est déjà !
M. Michel Canevet. - Pas suffisamment ! Concernant la responsabilité sociétale des entreprises, il fallait faire évoluer le droit. Même le Medef va se doter d'une raison d'être !
L'association « Produit en Bretagne », (Mme Françoise Gatel applaudit.) qui regroupe plus de 1 000 entreprises, a récemment tenu son assemblée générale. J'y ai entendu la volonté de se doter d'une raison d'être ; chez les entrepreneurs, il y a une prise de conscience de la place et du rôle des entreprises dans la société. Mieux répartir la valeur en faveur des salariés est important mais sans passer par la coercition, monsieur Gabouty.
Avec l'espoir que l'Assemblée nationale reprendra les apports du Sénat, le groupe UC votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur celui de la commission ; M. André Reichardt applaudit également.)
M. Emmanuel Capus . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) Au nom du groupe Les Indépendants, je salue le travail de la commission spéciale, sa présidente et nos trois rapporteurs.
Je salue, monsieur le président du Sénat, votre condamnation de toute forme de violence. À la source de ces violences, se trouvent certains des problèmes que ce texte aspire à résoudre, notamment le sentiment qu'ont certains de nos concitoyens d'être les perdants de la mondialisation.
Ce texte fera respirer notre économie et restaurera la confiance dans la liberté d'entreprendre. Le relèvement des seuils sociaux à 100 salariés relâchera la pression normative sur les PME.
Un amendement de notre groupe généralise l'organisation des chambres des métiers et de l'artisanat autour d'un établissement unique de région tout en précisant les missions des chambres départementales. Je me réjouis que le Sénat se fasse le porte-voix des territoires, c'est notre devoir de ne pas ajouter au sentiment d'abandon qu'éprouvent certains par la loi.
Cependant, la position de notre assemblée sur certains sujets structurants n'apparaît pas clairement au terme de ces débats. Dans quelle mesure l'État doit-il intervenir dans l'économie ? Refus des privatisations d'ADP et de la FDJ, confirmation de celle d'Engie, pour moi, c'est le régalien qui doit relever de l'État.
M. Jean-Marie Bockel. - Très bien !
M. Emmanuel Capus. - Or en quoi l'énergie est-elle moins stratégique que le transport aérien ? Nous remplirions mieux notre rôle de législateur en définissant mieux les modalités des cessions d'actifs.
La transformation de l'économie ne se décrète pas, ce sont les entreprises qui la feront. À nous de leur donner des outils et de définir un cadre juste. La réduction du forfait social sur la participation et l'intéressement vont dans la bonne direction.
C'est en restaurant la confiance dans la société que nous dynamiserons notre économie en préservant la cohésion.
Le groupe Les Indépendants votera ce texte qui va dans le bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants et sur le banc de la commission)
Mme Sophie Primas . - (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je salue la qualité du travail de la commission spéciale.
Ce projet de loi aux intitulés ambitieux est présenté comme le grand texte économique du quinquennat. Par l'extrême diversité des sujets qu'il aborde et leur inégale importance, il ne provoquera pas le choc de compétitivité attendu.
Sur la forme, le texte est passé de 73 articles à près de 200 après son examen à l'Assemblée nationale. Résultat, beaucoup de dispositions sur des sujets majeurs ont échappé à une étude d'impact. Il en va ainsi de l'amendement anti-Huawei, déposé très tardivement par le Gouvernement au Sénat. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains ; Mme Sylvie Goy-Chavent applaudit également.) La solution doit être expertisée a minima ; en attendant, la rejeter est faire preuve de responsabilité.
Sur le fond, nous nous retrouvons sur de nombreux points. Beaucoup de scories normatives ont été supprimées par le Sénat, qui est allé plus loin dans la rationalisation des seuils.
Nous avons rendu l'épargne salariale plus attractive en alignant les taux dérogatoires du forfait social tant pour le plan épargne retraite que pour la participation ou l'intéressement.
Nous avons renforcé le poids des élus dans le conseil d'administration de la Poste et la protection des consommateurs dans le cadre de la fin des tarifs réglementés de l'énergie.
Des points de désaccord subsistent. L'imprécision du texte sur la raison d'être des entreprises était source de risques ; au demeurant, la RSE est déjà intégrée à notre droit. La loi doit être normative et non bavarde, sinon la jurisprudence prend le pas sur le pouvoir politique. (Marques d'approbation et applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)
Au terme d'un quasi-consensus, nous avons refusé la privatisation d'ADP et de la FDJ, tant les motivations du Gouvernement étaient peu convaincantes. Les dividendes peuvent certes fluctuer, mais le rendement des fonds de placement également ! Privatiser ADP, est-ce privatiser un monopole ? Quoi qu'il en soit, c'est une infrastructure stratégique. Il est imprudent de la laisser partir sans plus de garantie sur le mécanisme de cession des actifs. Qui peut prédire le sort du futur opérateur privé, « opéable » à merci ? Qui sera maître du ciel français ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
S'agissant de la FDJ, les réponses ont manqué sur le financement de la filière équine et sur l'aménagement du territoire. Nous avons accepté la réforme de la fiscalité des jeux et des paris sportifs en ligne.
Le groupe Les Républicains votera le texte issu de nos travaux. Beaucoup reste à faire en matière de compétitivité. Or la France reste championne des prélèvements obligatoires, le déficit commercial se dégrade et les promesses de baisse de l'impôt sur les sociétés risquent de se briser sur le mur jaune des réalités sociales... (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe UC)
Scrutin public solennel
M. le président. - Je remercie à mon tour la présidente de la commission spéciale, ses rapporteurs et l'ensemble de ses membres. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)
Il va être procédé dans les conditions prévues par l'article 56 du Règlement au scrutin public solennel sur l'ensemble du projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises.
La séance, suspendue à 15 h 35, reprend à 16 h 5.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°54 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 324 |
Pour l'adoption | 206 |
Contre | 118 |
Le Sénat a adopté le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises.
(Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC)
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances . - Scrutin difficile à décrypter : ceux qui étaient pour le texte initial du Gouvernement ont voté contre, ceux qui étaient contre ont voté pour ! (On s'en défend sur les bancs du groupe CRCE.)
Dans cette obscure clarté qui tombe des étoiles, une chose est certaine : la qualité du travail de la présidente de la commission spéciale, que je remercie, et des trois rapporteurs, que je remercie également. (Applaudissements depuis les bancs du groupe Les Républicains jusqu'aux bancs du groupe LaREM ; Mme Nelly Tocqueville applaudit également.)
Durant ces longues heures de discussion, nous avons fait oeuvre utile. Je souhaite que les améliorations proposées par M. Husson sur l'encadrement des privatisations puissent être intégrées au texte définitif. (Applaudissements depuis les bancs du groupe Les Républicains jusqu'aux bancs du groupe LaREM)
Ce texte est essentiel pour notre économie. Je peux tout entendre, mais pas que le projet de loi Pacte ne serait pas une bonne nouvelle pour les salariés ! La simplification de l'épargne salariale, le développement de l'actionnariat salarié, la protection renforcée des femmes collaboratrices, l'accès à l'intéressement et à la participation pour dix millions de salariés grâce à la suppression du forfait social ne seraient donc pas de bonnes nouvelles pour les salariés ?
Le projet de loi Pacte permettra à ceux qui travaillent de vivre plus dignement de leur travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe UC ; M. Fabien Gay et Mme Laurence Rossignol protestent.)
Pour les entrepreneurs, c'est un texte essentiel. Guichet unique pour la création d'entreprise, simplification des procédures administratives, allégement de charges coûteuses, alignement sur les règles européennes en matière de contrôle des comptes. Les procédures françaises ne doivent pas être plus strictes que celles auxquelles sont soumis nos concurrents européens. (M. Loïc Hervé approuve.)
Nous simplifions les seuils sociaux. Une entreprise qui franchira la barre des 50 salariés ne se verra imposer aucune obligation supplémentaire pendant cinq ans. Je suis convaincu que cela débloquera les embauches. Le passage d'une dizaine de seuils à trois - 11, 50 et 250 salariés - est une simplification majeure.
Aucune obligation dans ce texte, que des facultés. Ainsi de la raison d'être, que les jeunes entrepreneurs que je rencontre me disent souhaiter. Pour eux, l'entreprise ne se limite plus à la création de profits, elle doit répondre à des attentes sociétales, rendre la société plus juste. La raison d'être, c'est l'avenir de l'entreprenariat ! La France peut donner l'exemple en la matière. Avec Jean-Dominique Senard, avec Nicole Notat, avec des parlementaires, je me suis battu pour que l'économie française prenne du sens.
Ce texte est essentiel pour l'innovation, dont dépendra notre capacité à nous réindustrialiser. Je peux tout entendre, monsieur Bourquin, mais pas que nous n'aurions pas de politique industrielle. Partageons plutôt la fierté des industriels français qui, pour la première fois en dix ans, ont recréé des emplois industriels et rouvert des entreprises. (Applaudissements sur le banc de la commission et sur ceux du groupe LaREM, ainsi que sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
Oui, il faut donner davantage de perspectives à l'innovation. D'où l'intérêt des mesures visant à renforcer le brevet français.
Je maintiens que la privatisation d'ADP, d'Engie et de la FDJ - activités qui peuvent être traitées de manière encadrée par des acteurs privés - est indispensable pour financer le fonds d'innovations de rupture qui investira dans les technologies nouvelles.
Au XXIe siècle, il y aura des vainqueurs et des vaincus : dans le premier camp, les nations qui auront investi dans l'intelligence artificielle, qui auront la maîtrise des algorithmes, des logiciels et des données ; dans le second, celles qui auront préféré gérer des rentes. Je préfère que notre pays soit dans le camp des vainqueurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs des groupes Les Républicains et UC)
M. le président. - Merci, monsieur le ministre, vous avez été très présent et proactif durant ces débats.
La séance est suspendue à 16 h 15.
présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente
La séance reprend à 16 h 25.
Nominations à une éventuelle CMP
Mme la présidente. - J'informe le Sénat que des candidatures ont été publiées pour siéger au sein de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.